: I H DICTIONNAIRE UNIVERSEL D’HISTOIRE NATURELLE RÉSUMANT ET COMPLÉTANT Tous les faits présentés par les Encyclopédies, les anciens Dictionnaires scientifiques, les Œuvres- complètes de Buffon>, e£ les meilleurs Traités spéciaux sur les diverses branches des sciences naturelles; Donnant la description des êtres et des divers phénomènes de la nature, 1 étymologie et la définition des noms scientifiques , les principales applications des cor^s organiques et inorganiques, à l’agriculture, à la médecine, aux arts industriels, etc.; V OUVRAGE UTIXsE Aux Médecins, aux Pharmaciens, aux Agriculteurs, aux Industriels, et généralement à tous les hommes désireux de s’initier aux merveilles de la nature; PAR MESSIEURS ARAGO, BAUDEMENT, BECQUEREL, BIBRON , BLANCHARD, BOITARD, DE BRÉBISSON , AD. BRONGNIART, C. BROUSSAIS, BRULLÉ, CHEVROLAT, CORDIER , DECAISNE, DELAFOSSE, DESHAYES, DESMAREST, J. DESNOYERS, ALCIDE ET CHARLES D’ORBIGNY, DOYÈRE , DUCHARTRE, DUJARDIN , DUMAS, DUPONCHEL , DUYERNOY, ÉLIE DE BEAUMONT, FLOURENS, ISIDORE GEOFFROY ST-HILAIRE, GERBE, GERVAIS, AL. DE HUMBOLDT, DE JUSSIEU, DE LAFRESNAYE, LAURILLARD , LEMAIRE, RÉVEILLÉ, LUCAS , MARTIN SAINT-ANGE , MILNE EDWARDS, MONTAGNE, PELOUZE, PELTIER, C. PRÉVOST, DE QUATREFAGES , A. RICHARD, RIVIÈRE, ROULIN , SPACH , VALENCIENNES, ETC.; DIRIGÉ PAR M. CHARLES D’ORBIGXY. , Et enrichi d’un magnifique Atlas de planches gravées sur acier. i ç, ' ■ . TOME NEUVIEME PARIS, CHEZ LES ÉDITEURS MM. RENARD, MARTINET ET C", RUE DE BUSSI, 6; ET CHEZ MM. LANGLOIS ET LECLERCQ, || VICTOR MASSON, Rue de la Harpe, SI. j( Place de PÉcole-de-Médecine , 1. ÜUmfs maisons, cljez £. Blidjelsen, à iFdpzt 1847. Digitized by the Internet Archive in 2018 with funding from Wellcome Library I 4 V https://archive.org/details/b30454888_0013 \ DICTIONNAIRE UNIVERSEL T O M E N E U V I É M li. LISTE DES AUTEURS PAR ORDRE DE MATIERES, Avec l’indication des lettres initiales dont leurs articles sont signés. Zoologie générale. Anatomie, Physiologie, Tératologie et Anthropologie* MM. DUPONCHEL (ils , médecin de l’École polytechnique. [A. D] DUVERNOY, D.-M., professeur d’histoire naturelle au Collège royal de France, etc. [Duv.] FLOURENS , D.-M., secrétaire perpétuel de l’Acad. royale des Sciences , membre de l’Académie française, professeur-admi¬ nistrateur au Muséum d’Histoirc naturelle. [Fl. s.] MM. ISIDORE GEOFFROY SAIIV T-KILAIRE , D.-M., membre de l’Institut, inspecteur-général de l’Université, professeur ad¬ ministrateur au Muséum d’HistoiCe naturelle. [I. G. -S. -H DE HUMBOLDT (le baron Alexandre V, membre de l’In¬ stitut, de l’Académie royale de Berlin, de la Société royale de Londres, etc., etc. [de Humb.J MARTIN SAINT-ANGE, D.-M, membre de plusieurs socié¬ tés savantes. [M. S. -A.] mammifères et Oiseaux* BAUDEMENT, prof, suppl. au Collège royal de Henri IV. [B.] ISIDORE GEOFFROY SAINT-HILAIRE , D.-M., membre de l’Institut, etc. [I- G. -S. -H.] GERBE, aideau Collège de France. [Z.G.] Reptiles et BIBRON, professeur d’histoire naturelle , aide-naturaliste au I Muséum d’Histoire naturelle. [G. B.] | DE LAFRESNAYE, membre de plusieurs sociétés sav. [Lafk.J LAURILLARD , membre de la Société philomatique . et, (Mammifères, Oiseaux et Reptiles fossiles.) [L..d DE QUATREFAGES, doc. en méd. et ès-sciences. [X. de Q.] BOULIN , membre de la Société philomatique, etc. [Roui.. ï Poissons. VALENCIENNES , professeur-administrateur au Muséum d’His¬ toire naturelle. ^ J mollusques* ALCIDE D’ORBIGNY, auteur du Voyage dans l’Amérique 1 DESHAYES , membre de la Soc. philomatique, etc. [Desii.J méridionale, membre de la Soc. philomatique, etc. [A.d'O.] 1 VALENCIENNES, prof.-adm. au Mus. d’Hist. nat. [Val. Articulés* (Insectes, Myriapodes, Arachnides, Crustacés, Cirrhopodes, Annélides, Helininthides, Systolidcs.) AUDOUIN , D.-M., membre de l’Institut, professeur-adminis¬ trateur au Muséum d’Histoire naturelle. [Aüd.] BLANCHARD, membre de la Soc. entomolog.de France. [Bl.] BOITARD , auteur de plusieurs ouvrages d’hist. uatur. [ Boit.] CHEVROLAT, membre de plusieurs sociétés savantes. [C.] DESMAREST, secrét. de la Soc. entomolog. de France. [E D.] Zoopliytes ou (Eehinodermes, Acalèplies, Foraminifères, ALCIDE D’ORBIGNY, membre de la Société philomati- I que, etc. [A. d’O.] DUJARDIN, docteur es-sciences , doyen de la Faculté des seien ces de Rennes. |Duj] DUPONCHEL, membre de plusi eurs sociétés savantes. [D.] GERVAIS , doct. ès-sciences, membre de la Soc. philom. [PG] LUCA-S, membre de la Société entomologique de France. [11. L.j MILNE EDWARDS, D.-M., membre de l’Institut, etc. [M F. | Rayonnés. Polypes, Spongiaires et Infusoires.) DUJARDIN, membre de la Société philomatique, etc. [Dci ] MILNE EDWARDS , D.-M., membre de l’Institut, etc. [M. L.] Botanique. DE BRÉB1SS0N , membre de plusieurs soc. savantes. [ Bhéb.} BRONGNIART , D.-M., membre de l’Institut, professeur-admi¬ nistrateur au Muséum d’Histoire naturelle. [Ad. B.] DECAISNE, aide-naturaliste au Muséum d’Histoire naturelle, membre de la Société philomatique. [J. D.] DUCHARTRE, membre de la Société philomatique, etc [P.D.] l)E JUSSIEU , D.-M., membre de l’Institut , professeur-admi¬ nistrateur au Muséum d’Histoire naturelle. [Ad. J.] LEMAIRE .ancien professeur de l’Université, membre de plu¬ sieurs sociétés savantes. *■ ' -J MONTAGNE, D.-M-, membre de la Société philomatique et de plusieurs autres sociétés savantes. I 1 . RICHARD, D.-M., membre de l’Institut, professeur à la fa¬ culté de médecine. f '■* SPACH , aide-naturaliste au Muséum d’Hist. naturelle. Réologie . minéralogie. COBDIER , membre de l’Institut, professeur-administrateur au Muséum d’Histoire naturelle , pair de France , inspecteur-général des mines , conseiller d’Etat. [L. G.] DELAFOSSE , professeur de minéralogie à la Faculté des scien¬ ces, etc. [Del.] DESNOYERS , bibliothécaire au .Muséum d’Hist. liât. (Ques¬ tions géologiques sous le point de vue historique.) [J.Desn.] membre de l’Institut, professent ingénieur en chef des mines, etc b [E. de B.] CHARLES D’ORBIGNY. membre de plusieurs sociétés savan¬ tes, etc. *■ ’ J CONSTANT PRÉVOST , professeur de géologie a la l’ adulte des sciences, etc. ÉLIE DE BEAUMONT , au College royal de France, Chimie, Physique ARAGO , secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, dé- I puté, etc. [Ab-] BECQUEREL , membre de l’Institut , professeur-administra¬ teur au Muséum d’Histoire naturelle. [Becq.] DUMAS, membre de l’Institut, professeur de chimie a la Fa¬ culté de médecine et a la Faculté des sciences, etc. [Dum.] et Astronomie* FELTIER, PELOUZE Collège roy RIVIÈRE, royale. D.-M., membre delà Société philomatique. [P. , membre de l’Institut , professeur de chimie au al de France et à l’École polytechnique, etc. [Pel. j professeur de sciences physiques, de l’Université Paris. — Imprimerie de L. Mautinet, rue Jacob, 3o. DICTIONNAIRE UNIVERSEL RÉSUMANT ET COMPLÉTANT Ions les faits présentés par les Encyclopédies, les anciens dictionnaires scientifiques, les Œuvres complètes de Buffon , et les meilleurs traités spéciaux sur les diverses branches des sciences naturelles; — Donnant la description des êtres et des divers phénomènes de la nature, 1 étymologie et la définition des noms scientifiques, et les principales applications des corps organiques et inorganiques à l’agriculture , à la médecine , aux arts industriels , etc.; PAR MESSIEURS ARAGO, E. BAUDEMENT, BAZIN, BECQUEREL, BIRRON, BLANCHARD, BOITARD, DE BRÉBISSON , AD. BRONGNIART, C. BROUSSAIS, BRULLÉ, CHEVROLAT, CORDIER, DECAISNE, DELAFOSSE, DESHAYES, DESMAREST, J. DESNOYERS, ALCIDE ET CH. D’ORBIGNY, DOYÈRE, DUCHARTRE , DUJARDIN , DUMAS , DUPONCHEL , DUVERNOY , MILNE EDWÀRDS , K LIE DE BEAUMONT, FLOURENS, GERBE, GERVAIS, IS. GEOFFROY ST. -HILAIRE, AL. DE HUMBOLDT, DE JUSSIEU, DE LAFRESNAYE , LAURILLARD , LEMAIRE, LÉVEILLÉ, LUCAS, MARTIN ST. -ANGE , MONTAGNE, PELOUZE, PELTIER, C. PRÉVOST, DE QUATREFAGES, A. RICHARD, RIVIÈRE, ROULIN , SPACH , VALENCIENNES, ETC. + DIRIGÉ FAR M. CHARLES D’ORBIGNY, Et enrichi d’un magnifique Atlas de planches gravées sur acier. - > > 0-0 > -C-O-O-c-c - TOME NEUVIÈME. -o-o-OO-O- -O- C OC o PA R I S. CHEZ LES ÉDITEURS MM. RENARD, MARTINET ET C -, RUE DE BUSSI, 6; ET CHEZ LANGLOIS ET LECLERCQ, I VICTOR MASSON, Rue Je la Harpe, 81. * Place de l’Ecole de-Médecine, I. Jftcmes maisons , dje 2 ü\ ilXicljelsert , à iTetpHig. 1847 ÊLÆSTJE DES ABRÉVIATIONS EMPLOYÉES DANS CET OUVRAGE. (Les abréviations en petites capitales placées au commencement de chaque article indiquent la grande classe à laquelle il appartient.) Acal . Acalèphes. Anal . Anatomie. Ann . Annales. Annél . Annélides. Arach . . . . Arachnides. A sir . Astronomie. Hoi . . botanique. Bni. cr. ... Botanique cryptogami- que. Bot.pl 2.. . .^Botanique phanéroga- rnique. Bull . Bulletin. Chim. .... Chimie. Cirrh . Cirrhopodes. Crusi . Crustacés. Fchin .... Echinodermes. Fig . Figure Foramin. . . Foraminifères. F o ss . Fossile. G. ou g. . . . Genre. Gèol . Géologie. Helm . Helminthides. Hist. nui. . . Histoire naturelle. Infas .... Infusoires. Ins . Insectes. Ma m . Mammifères Mèm. .... Mémoire. Méléor. . . . Météorologie. Min . Minéralogie. Moll . Mollusques. Myriup. . . . Myriapodes. Ois. . . . . . Oiseaux. Paléoni. . . . Paléontologie. Ph.ou Phan. Phanérogame, ou pha- nérogamie. Pliys . Physique. Physiol. . . . Physiologie. PL ..... Planche. Poiss . Poissons. Polyp .... Polypes, Polypiers. Rad . Radiai i es Repi . Reptiles. Spong .... Spongiaires, Systol . Syslolides. Syn.onSynon. Synonyme. Tércti . Tératologie. V. ou F oy . Voyez. Fui g . Vulgaire. Zool . Zoologie. ! Zooph. . . . Zoophyles. »• DICTIONNAIRE UNIVERSEL D’HISTOIRE NATURELLE. O OIE. Amer. ois. — Ce nom, qui , primi¬ tivement, s’appliquait indistinctement à un petit nombre d’espèces que l’on confondait entre elles, aconsidérablementdepuis changé de valeur. Élevé d’abord à la puissance de nom de genre, il est devenu ensuite, pour la plupart des méthodistes, le titre d’une sous-famille et même d’une famille : celle des Oies ou Ansérinées. Quoique cette famille soit assez riche en espèces, cependant toutes ont entre elles de si grandes affinités de mœurs et d’organisa¬ tion, que l’histoire de l’une d’elles peut deve¬ nir, à de très légères différences près, l’histoire de toutes les autres. Longtemps les Oies ont été confondues avec les Cygnes et les Canards, et cela au¬ tant à cause de leurs analogies anatomiques que de leur manière de vivre; pourtant elles en diffèrent sous ces deux rapports. Si l’on considère leurs caractères physiques , on voit qu’elles ont un bec relativement plus court et plus fort à la base que celui des Cygnes et des Canards; que leurs tarses sont plus élevés, et que leurs jambes sont plus rapprochées du milieu du corps, ce qui leur donne une démarche plus gracieuse et plus assurée. Quant aux particularités de mœurs qui distinguent les Oies, elles sont parfaitement en concordance avec les diffé¬ rences organiques que l’on observe; c’est ainsi qu’elles sont moins aquatiques que les Cygnes et les Canards, qu’elles nagent peu et ne plongent point. Si ceux-ci vivent con¬ stamment sur les lacs, les étangs, les ri¬ vières, sur les bords de la mer, les Oies, au contraire, ne viennent que fort rarement sur les bords de l’eau, et seulement le soir, pour T. IX. y passer la nuit. Leurs habitudes sont donc bien différentes de celles des Canards, qui quittent les eaux à l'heure où les Oies s’y rendent. Les terrains bas, mais découverts, les prairies humides, les plaines marécageuses sont les lieux que les Oies aiment à fréquen¬ ter. On les trouve souvent aussi dans les terres ensemencées; là , les dégâts qu’elles occasionnent aux jeunes pousses de céréales sont quelquefois si considérables, que, dans certains cantons où ces Oiseaux sont com¬ muns, les cultivateurs sont obligés de veil¬ ler sur leurs champs , afin d'en éloigner les bandes d’Oies qui s’y abattent. Dans les contrées où ces Oiseaux ne sont pas chassés par l’homme, leur confiance est assez grande pour ne point trop être inquiets de sa présence; mais on peut dire que, ce cas excepté, ils sont sauvages et farouches t» l’extrême. Soit que les Oies pâturent dans la campagne , soit qu’elles prennent du re¬ pos sur les eaux, elles sont très difficiles à approcher et surtout à surprendre. Leur vigilance est rarement en défaut, secon¬ dée qu’elle est par une ouïe délicate et une vue excellente. Le moindre objet qui leur est suspect les met en émoi. Il suffit que l’une d’elles pousse un cri pour que toute la bande s’envole et cherche ainsi à se mettre à l’abri du péril qui lui est signalé. Indépendamment de ce cri d’alarme, qu’on ne perçoit qu’à de faibles distances, les Oies font encore entendre, et cela surtout lors¬ qu’elles volent ou qu’elles sont surprises , un son guttural dur et éclatant comme celui d’une trompette. Si le caractère sauvage et farouche des 1 2 OïE Oies s’est éteint dans nos races domestiques, toujours est-il que celles-ci n’ont rien perdu du caractère vigilant qui distingue les es¬ pèces dont elles proviennent. Pendant le jour, un ennemi qui cherche à s’introduire dans la basse-cour, un Oiseau de proie qui voltige dans les airs, sont bientôt trahis par les cris bruyants de la troupe entière. La nuit, leur sommeil est si léger, que le moin¬ dre bruit les éveille et provoque de leur part les mêmes criailleries. Aussi les anciens étaient-ils dans la croyance que les Oies étaient plus vigilantes que les chiens. Pour Columelle, elles étaient les meilleures et les plus sûres gardiennes de la ferme, et il avait raison sous un rapport, car, ainsi que nous l’avons dit, elles avertissent les autres volailles de l’approche ou de la présence d’un ennemi. Mais leur plus grand titre à la célébrité est d’avoir sauvé Rome. Tout le monde sait que ce furent les Oies que l’on nourrissait au Capitole qui , par leurs cris, avertirent les Romains de l’assaut nocturne que tentaient les Gaulois. Aussi, en recon¬ naissance de ce service , fixait-on , chaque année , une somme pour l’entretien de ces Oiseaux , tandis que le même jour on fouet¬ tait les chiens sur une place publique , comme pour les punir de leur coupable si¬ lence. Du reste , la famille des Oies renferme encore une espèce qui a joui, dans un temps très éloigné de nous et dans un pays autre que l’Italie , d’autant de célébrité et de plus de vénération que la race provenant de l’une de nos Oies sauvages : cette espèce est l’Oie d’Égypte {Anser œgyptiaca). D’après Hérodote, les Égyptiens la comptaient au nombre des animaux sacrés ; ils la figuraient dans les hiéroglyphes, et lui rendaient de grands hommages. Une ville de l’Égypte su¬ périeure lui était dédiée et portait même son nom. Enfin, au dire d’IIorus-Apollo, cette Oie, dans le système théogonique des anciens Égyptiens, servait à exprimer la piété filiale, l’amour et le dévouement pa¬ ternel et maternel; d’un côté, parce que les jeunes vivent toujours sous l’autorité des parents; d’un autre côté, parce que ceux-ci les défendent, même au péril de leur vie. Les Oies sont des oiseaux voyageurs. La plupart des espèces que possède l’Europe émigrent du nord au midi en automne, et OIE du midi au nord au printemps. Celles qui visitent la France sont ordinairement les messagères des frimas , car nous les voyons à l’approche de l’hiver, et surtout lorsque cette saison doit être rude. Alors elles se montrent chez nous en assez grand nombre. Selon que le froid est plus ou moins rigou¬ reux , elles descendent plus ou moins vers les contrées méridionales; mais toutes re¬ tournent, au mois de mars, dans les pays septentrionaux de notre continent, et se portent sous les latitudes les plus élevées , au Spitzberg, au Groenland, à la baie d’Hudson , etc. De même que les Grues, les Oies, lors¬ qu’elles émigrent, conservent dans leur vol un ordre qui semble avoir été tracé par un instinct géométrique. Elles se rangent sur deux lignes, formant un angle à peu près comme un Y. Si la bande est peu considé¬ rable, elles se mettent sur une seule ligne ; mais, dans l’un et l’autre cas, l’ordre est exactement observé par chaque voyageur, et, lorsque celui qui fend l’air au sommet de l’angle ou de la ligne est fatigué, il passe au dernier rang pour se reposer. Les Oies volent presque toujours fort haut; et ce n’est que dans les jours de brouillard ou le matin, avant le lever du soleil , qu’on les voit émigrer près de terre. Leur vol est doux et facile; il ne s’annonce par aucun bruit, et c’est seulement par leurs cris qu’elles avertissent de leur passage. L’on pourrait croire, si l’on en jugeait par nos races domestiques , que les Oies sont généralement polygames ; cependant les espèces à l’état de liberté se forment or¬ dinairement par couples quand vient le moment de la reproduction. Il y a chez ces oiseaux accouplement réel, c’est à-dire que chez eux l’acte copulateur ne s’accomplit pas par simple affriction , mais par intro¬ mission d’un pénis non pas dans une vulve , mais dans un cloaque qui en tient lieu. Cet accouplement, auquel les Oies préludent par des ébats sur l’eau et des cris faibles et fréquemment répétés, est longtemps pro¬ longé et s’accomplit à terre. C’est égale¬ ment à terre, dans les bruyères, mais assez souvent aussi dans les marais, qu’elles éta¬ blissent leur nid. Elles ne déploient pas, à cet effet, une grande industrie: quelques joncs coupés, de l’herbe sèche, sont les OIE OIE 3 éléments sur lesquels les Oies déposent leurs œufs. Quelques espèces mettent des plumes par-dessus ces matériaux. La ponte n’a lieu qu’une fois dans l’année. Le nombre d’œufs que reçoivent ces sortes de nids varie selon les espèces , mais il est assez généralement de six à dix. Leur couleur ne présente pas de fort grandes variétés ; elle est ordinaire¬ ment verdâtre ou blanchâtre. Chez les Oies, c’est à la femelle seule qu’est réservé le soin de l’incubation : sa durée, selon les espèces, est de vingt, vingt- cinq ou trente jours. Pendant tout le temps que la couveuse est sur les œufs, le mâle ne la quitte point; il redouble alors de soins et de vigilance, et donne une très grande attention à ce qu’aucun ennemi n’approche trop près de sa nichée. Cette garde qu’il exerce auprès de sa femelle, il l’exerce aussi à l’égard de ses petits. Ceux- ci naissent couverts de duvet , et cherchent eux-mêmes leur nourriture immédiatement après leur éclosion. Comme si l’eau devait leur offrir plus de sécurité que la terre, les parents se hâtent de les y conduire. On di¬ rait d’ailleurs qu’ils sont déjà familiers avec cet élément, car ils l’abordent sans beau¬ coup d’hésitation et paraissent s’y plaire ex¬ trêmement. Les jeunes Oies ne ressemblent donc point aux adultes, qui préfèrent la terre à l’eau. La plupart des espèces muent deux fois dans le courant de l’année, en juin et en novembre. Cette dernière mue fait revêtir aux mâles l’habit de noces qu’ils conserve¬ ront jusqu’à l’époque de la couvaison. La nourriture des Oies consiste en graines ou en semences de toutes sortes , en végé¬ taux aquatiques, en racines bulbeuses, en insectes, et en herbes tendres. Quoique les Oies sauvages n’aient pas une chair des plus recherchées, cependant on ne laisse pas de les chasser. Dans les pays surtout où ces oiseaux sont une ressource pour les individus peu fortunés qui les ha¬ bitent, la chasse qu’on fait aux Oies est très active. Les Kosaques, au rapport de l’allas ( Voyage dans l'empire de Russie , t. 111, p. 421), chassent les Oies au moyen d’un vaste filet qu’ils posent verticalement dans une avenue s’ouvrant sur un lac. Dans d’autres contrées de l’Europe, on cherche à les prendre au moyen de filets tendus ho¬ rizontalement , et au milieu desquels on place quelques Oies privées pour servir d’appelants. Enfin , le fusil est l’instrument dont on se sert le plus usuellement pour chasser ces oiseaux ; mais cette chasse exige de la part de celui qui la fait de grandes précautions, les Oies étant, comme nous l’avons dit, rusées et défiantes. La famille des Oies a des représentants dans toutes les parties du monde. Après avoir fait l’histoire des Oies vivant en liberté, il nous reste à dire quelques mots de la conquête que l’homme a faite sur elles, en réduisant à l’état de domesti¬ cité volontaire l’espèce d’où est sortie cette race que nous élevons communément dans nos fermes et nos basses-cours, et de laquelle nous retirons , pour nos besoins , une nour¬ riture abondante et saine , un duvet pré¬ cieux , et ces instruments non moins utiles qui nous servent , depuis treize siècles , à fixer nos pensées. L’on s’accorde générale¬ ment aujourd’hui à considérer l’Oie cendrée ou première (Anser cinereus ) comme la sou¬ che de nos Oies domestiques. Si nous en ju¬ geons parle caractère de ses descendants, cet oiseau , d’un naturel très disciplinable , et surtout fort sensible aux soins qu’on lui donne , a du facilement se plier au joug de la servitude. Cependant Buffon a pensé que la domesticité des Oies n’était ni aussi ancienne ni aussi complète que celle de la Poule. Le fait est qu’on ne possède aucune donnée historique pour dire à quelle époque a commencé l’action de l’homme sur ces oiseaux. Les Romains élevaient comme nous des Oies. Us avaient pour les propager et les conserver une enceinte murée , traversée par un canal d’eau vive, et couverte entiè¬ rement d’un filet à larges mailles , pour qu’elles ne pussent s’envoler. Les Celtes , les Gaulois, et les Francs , nos pères, éle¬ vaient aussi un grand nombre de ces oi¬ seaux. Pendant longtemps ils furent pour eux une branche importante et considérable de commerce avec l’Italie. Pline (Ilist. nat.f liv. X, chap. 27) nous apprend qu’il a vu plusieurs fois d’immenses troupeaux d’Oies qui, de differents cantons de la Gaule, et surtout du pays des Morins (aujourd’hui les départements du Nord et du Pas-de-Calais), se rendaient à pied jusqu’à Rome ; et à ce sujet , il fait remarquer le moyen employé 4 OIE OIE par les conducteurs pour parvenir heureu¬ sement et sans perte au terme d’un voyage aussi long. Contrairement à l’usage adopté par les Oies libres dans leurs migrations , ils plaçaient toujours au premier rang les plus fatiguées, afin que la colonne les pous¬ sant en avant, elles fussent, contre leur gré, dans la nécessité d’avancer. En France, l’Oie domestique a longtemps eu les honneurs de tous les festins , et les a encore dans certaines classes de la société. Chez les anciens Grecs , surtout chez les Lacédémoniens et chez les Égyptiens , elle ne paraissait sur la table qu’aux jours des grands repas. A Rome libre, où nous avons dit que l’Oie était vénérée comme symbole de la vigilance, rarement elle figurait dans un festin; mais, dès que la ville des Césars eut subi le joug de ses empereurs , on y connut la méthode barbare qui consistait à priver cet oiseau d’eau, de mouvement et de lumière, pour obtenir ces foies succu¬ lents dont la gourmandise faitencore aujour¬ d’hui ses délices. Deux consulaires , con¬ temporains de Yarron , se disputaient l’in¬ vention de cette méthode. Nous dirons , enfin , que la réputation de stupidité que l’on a faite aux Oies do¬ mestiques, réputation qui est devenue pro¬ verbiale, est loin d’être méritée. Ces Oiseaux, pour avoir été modifiés , au physique , par la domesticité , n’ont rien perdu de leurs instincts, ou , si l’on veut , de leur intelli¬ gence. Les Oies avaient été confondues par Linné, sous le nom générique de Anas , avec les Cygnes et les Canards. Cette ma¬ nière de voir, adoptée, jusque vers ces der¬ nières années, par quelques ornithologistes, est actuellement tout-à-fait abandonnée. Tous les auteurs ne sont cependant pas d’ac¬ cord sur la valeur qu’il convient d’assigner à la section que ces Oiseaux composent. Les uns, revenant à l’opinion de Brisson, qui , le premier, sépara les Oies des Canards et des Cygnes, accordent que les oiseaux dont il est question peuvent bien , à la rigueur, représenter un genre, quoique ses limites ne soient pas très précises; les autres, invo¬ quant les mêmes motifs, n’en forment qu’un sous-genre; enfin, il est des auteurs qui , plus hardis, font des Oies une sous-famille susceptible de plusieurs divisions généri¬ ques. G. -R. Gray, dans sa List of the Gé¬ néra , etc. , disperse les Anseres de quelques ornithologistes dans dix genres et deux sous- familles : celle des Plectropterinœ et celle des Anserinœ. A l’exemple de G. Cuvier, nous considé¬ rerons les Oies comme distinctes des Canards et des Cygnes, et nous les distribuerons par groupes fondés sur les affinités réciproques des espèces. Au reste, nous aurons soin , ainsi que nous l’avons fait jusqu’ici, en ci¬ tant les espèces , d’indiquer celles qui sont devenues, pour quelques naturalistes, des types de genres nouveaux. Les Oies se distinguent des Canards et des Cygnes , auxquels on les associait, par leur bec médiocre ou court, plus étroit en avant qu’en arrière, et plus haut que large à sa base ; par leurs jambes plus élevées , plus rapprochées du milieu du corps ; par leurs tarses plus robustes, et par leur cou relativement moins allongé. En outre elles n’ont aucun renflement au bas de la trachée, et celle-ci, dans les espèces connues, ne forme non plus aucun repli. Le premier de ces ca¬ ractères est particulier aux Canards , et le second appartient aux Cygnes. 1. Oies proprement dites ( Anser , Briss.). Bec aussi long que la têle , garni sur ses bords de lamelles qui se montrent à l'exté¬ rieur comme des dents pointues. Cette section n’est presque uniquement composée que d’espèces vivant en Europe. L’Oie cendrée ou première, Anser cinereus Mey. et Wolf. (Gould., Birds of Eur. , pl. 347) : manteau d’un brun cendré ondé de gris; croupion cendré; membrane des yeux et bec d’une seule couleur jaune orange; ailes pliées n’atteignant pas l’extrémité de la queue. Cette espèce, qui est la souche ou le type de toutes les races d’Oies que nous élevons en domesticité , habite les mers, les plages et les marais des contrées orientales de l’Eu¬ rope. Elle s’avance rarement vers le nord au-delà du 35e degré. On la trouve assez abondamment vers le centre du continent européen où elle niche, et dans ses migra¬ tions elle visite en petit nombre la Hollande et la France. L’Oie sauvage ou des moissons, Ans. sege - tum Mey et Wolf. (Buft*. , pl. enl., 983) : tête et haut du cou d’un brun cendré; dos d’un cendré brun ; croupion d’un brun noi¬ râtre ; bec noir à sa base et à son extrémité, d’un jaune orangé dans le milieu; mem¬ brane des yeux d’un gris noirâtre. Cette espèce , confondue avec la précé¬ dente, s’en distingue par ses ailes qui sont plus longues, et par son bec qui est bicolore. Elle présente cette autre particularité qu’elle niche dans les régions arctiques, tandis que nous voyons l’Oie cendrée se reproduire dans les climats tempérés du continent. Elle habite l’Europe septentrionale, émi¬ gre périodiquement vers nos climats , et se montre abondante à son double passage en France, en Allemagne, en Angleterre, et surtout en Hollande. L’Oie a bec court , Ans. brachyrhynchus Baill. ( Mém . de la Soc. d'émul. d'Abbeville, ann. 1833) : plumage semblable à celui de la précédente, mais un peu plus cendré; bec très petit et court ; une tache à la mandi¬ bule supéiicure d’un rouge pourpre très Yif; pieds rouges. Cette espèce , dont on ne connaît point l'habitat, est de passage accidentel en France, où elle a été tuée plusieurs fois. On ne l’a observée que dans les hivers rigoureux de 1829, 1830 et 1838; elle s’est toujours montrée en petit nombre , et faisant bande à part. M. de Lamotte d’Abbeville nourrit , depuis 1830, plusieurs individus de cette espèce, dans sa basse-cour, où ils vivent en compagnie des Ans. cïnereus , segetum et al - bifrons , sans jamais vouloir se mêler à ces trois espèces. L’Oie rieuse ou a front blanc, Ans. albi - frons Bechst. (Gould., Birds of Eur. , pl. 289) : plumage brun grisâtre; abdomen varié de blanc et de noir ; un grand espace d’un blanc pur sur le front. Pallas a décrit comme variété de cette es¬ pèce une Oie à taille moins forte et à man¬ dibule supérieure noire à la pointe et en dessus. Elle habite le nord des deux continents, et se montre de passage en France, en Alle¬ magne et en Hollande. L'Oie intermédiaire , ^4ns. intermedius Naumann (Vog. , Nacb.tr ., pl. 288). Espèce nouvelle et douteuse établie sur deux indi¬ vidus seulement. Elle a de grandes affinités avec la précédente; mais elle en diffère pourtant, d’après Naumann, par une taille plus forte , et par un bec teint de noir à la base, près du front et sur les bords de la mandibule supérieure. Selon le même au¬ teur, elle remplacerait, en Irlande, l’Oie rieuse. L Oie naine , .dns. minutas Naumann ( ^ °g-> Nachtr., pl. 291). Espèce admise par plusieurs ornithologistes allemands , mais dans laquelle M. Teinminck croit voir une Oie à bec court. L’Oie a cravate, i4ns. canadensis Yieill. (Buff., pl. cnl., 346): plumage brun mêlé de gris ; gorge et bande sur l’occiput d’un blanc pur; cou noir à reflets violets. Habite le nord de l’Amérique. Cette Oie vit très bien et se reproduit dans nos climats. Du temps de Buffon, on en voyait déjà sur les bassins de Versailles. G. Cuvier pense que cette espèce doit prendre place parmi les Cygnes. Brandt lui a associé VAnas cygnoides de Linné, eta fait de ces deux oiseaux son genre Cygnopsis. 2. Oies de neige ( Chen , Boié). Front très élevé ; bec coupé de chaque côté par des sillons longitudinaux et des dente¬ lures. G. Cuvier, dans son Règne animal , n’a pas établi cette section; cependant nous l’admettrons puisqu’elle est généralement reconnue, et surtout qu’elle est basée sur des caractères distinctifs. Elle a pour type : L’Oie hyferborée ou de neige , Chen hy- perboreus Boié, Ans. hyperboreus Pall. (Gould., Birds of Eur., pl. 346) : plumage d’un blanc pur; rémiges blanches jusqu’à la moitié de leur longueur, le reste noir; front jaunâtre ; mandibule supérieure d’un beau rouge. Elle habite les régions polaires de l’an¬ cien et du nouveau continent. On la dit de passage accidentel en Prusse et en Autriche. 3. Bernaciies ( Bernicla , Stephens ; Brenta, Brisson ). Bec court , menu , convexe , comme tron ■ qué ; bords à lamelles internes ne paraissant point à Vexlerieur. L’Oie bernache ou a joues blanches, Bern. leucopsis Steph. , Anser leucopsis Bechst. (Buff., pl. enl., 355) : dos varié de gris cen¬ dré et de noir; front, côtés de la tête et 6 OIE OIE gorge d’un blanc pur; occiput, nuque, cou, haut de la poitrine, queue et rémiges d’un noir profond. Cette espèce , par la fable qui la faisait naître sur les arbres comme un fruit, et qui, par cette raison , était considérée comme un gibier maigre que l’on pouvait manger en carême , habite les contrées du cercle arc¬ tique. Elle est de passage en automne et en hiver dans les pays tempérés, et se montre alors assez abondamment en France , en Hollande et en Allemagne. L’Oie gravant, Bern. brenta Steph., Ans. bernicla Illig. ( Buff. , pl. enl. , 342 ) : dos d’un gris très foncé; tête, cou et haut de la poitrine d’un noir terne ; une tache de cha¬ que côté du cou, et les couvertures infé¬ rieures de la queue d’un blanc pur. Elle habite le nord des deux continents. A son double passage , elle se montre en France, en Allemagne et en Hollande. L’Oie a cou roux, Bern. ruficollis Steph., Ans. ruficollis Naumann ( Gould. , Birds of Eur., pl. 351) : sommet de la tête , gorge, ventre et toutes les parties supérieures d’un noir profond ; devant du cou et poitrine d’un beau roux rougeâtre; une ceinture blanche entourant la poitrine et remontant sur le dos. Elle habite les contrées septentrionales de l’Asie , et se montre de passage périodique en Russie; très accidentellement elle s’a¬ vance jusqu’en Angleterre et en Alle¬ magne. L’Oie d’Egypte, Ans. œgyptiacus Briss. , Chenalopex œgyptiacus Steph. ( Buff. , pl. enl., 379, 982 et 983) : plumage agréable¬ ment varié, sur un fond gris-blanc, de zig¬ zags bruns-roussâtres ; grandes couvertures des ailes d’un vert chatoyant. Cette espèce , révérée des anciens Égyp¬ tiens à cause de son attachement pour ses petits, habite les côtes orientales de l’Afri¬ que. On avait mis en doute l’apparition de cette Oie sur notre continent; on supposait que les individus qui y avaient été tués étaient des sujets échappés des ménageries où on retient cette espèce ; mais il ne sau¬ rait plus y avoir de doute à cet égard. L’Oie d’Égypte visite bien positivement l’Europe. Nous avons signalé nous - même , dans la Revue zoologique pour 1844 , la capture faite, dans les environs de Paris , de deux Oies de cette espèce. Ils faisaient partie d’une bande composée de neuf individus. Parmi les espèces étrangères que G. Cu¬ vier range encore dans cette section , nous citerons : L’Oie de Magellan , Bern. magellanica Steph. (Buff. , pl. enl., 1006 ) : tête et cou roux ; dos roux rayé de noir ; ventre maillé de blanc et de noir. Habite les îles Ma- louines. Cette espèce est le type du genre Chlœ- phaga d’Eyton. L’Oie antarctique, Ans. antarcticus Yieill. (Less., Voyage de la Coquille, pl. 50): tout le corps noir et blanc par raies éga¬ les ; abdomen et queue d’un blanc pur. Habite les îles Malouines et le sud de l’A¬ mérique. L’Oie de Madagascar, Ans. madagasca- rensis Cuv. (Buff .,pl. enl., 770) , du Mada¬ gascar. Type du genre Nettapus de Brandt. L’Oie a collier , Ans. coroman deliana Cuv. (Buff., pl. enl., 749). Du Bengale. L’Oie aux ailes blanches , Ans. leucopte- rus Cuv. Des Malouines. M. Lesson place encore parmi les Berqa- ches I’Oie a CAMAiL blanc , Ans. polycomos Less. : d’un gris roux; ailes et queue vert doré; flancs et abdomen d’un marron foncé. Habite le Brésil. Nous y rangerons aussi l’espèce qui a été décrite par MM. Eydoux et Souleyet , dans le Voyage de la Bonite , sous le nom d’OiE de Hawaii , Ans. hawaiiensis ( Z ool. , t. I , pl. 10). Cette espèce habite les îles Sandwich. Une autre division, établie par G. Cuvier, est celle des Céréopses ( Cereopsis , Lath. ) ; mais nous n’avons point à revenir ici sur ce qui a été dit de ces Oiseaux à l’article qui les concerne. Enfin nous dirons que certaines espèces, que l’on avait considérées comme des Oies , et que quelques auteurs persistent à laisser dans la première des divisions dont il vient d’être question , ont été rapportées par Cu¬ vier parmi les Cygnes. Telles sont : I’Oie a double éperon, Ans. gambensis Lath. , dont M. de Lafresnaye a fait le type de son genre Anatigralla ; Leach et Stephens, leur genre Plectropterus; et I’Oie bronzée, Ans. melano- tos Vieill. ( Buff. , pl. enl. , 937 ) , type du genre Sarkidiornis de Eyton. (Z. G.) OIS 7 OIO OIE DE MEU. mam. — - Le Dauphin or¬ dinaire, Delphinus delphis , a reçu ce sur¬ nom. (E. d.) OIGNART et OIGNE, ois. — Noms vul¬ gaires du Canard siffleur. OIGNON, bot. ph. — Voy. ognon. OIGNONNET. bot. ph. — Voy. ognonnet. ^OIKOPLEIJRA (oTxoç, maison; n)evPct, flanc), acal. — Genre proposé par Mertens pour un animal marin, dont la structure, et conséquemment la place dans la méthode, sont encore très incertaines; ce paraît être le même que Chamisso etEysenhardt avaient nommé Appendicularia , et que MM. Quoy et Gaimard ont nommé aussi Frelillaria. M. Lesson le place à la suite du genre Noc- tiluque, dans sa division des Béroïdes faux ou acils, en se demandant si ce ne serait pas une larve. Mertens croyait que ce devait être un mollusque ptéropode. Chamisso et Eysenhardt décrivent leur Appendicularia flagellum, comme ayant le corps gélatineux, subovoïde, long de six millimètres environ , avec des points Fouges , transparents, in¬ ternes, et un appendice gélatineux, ces- toïde, bordé de rouge, plus long du double ou du triple que le corps, servant à la na¬ tation par un mouvement d’ondulation très marqué; ces auteurs l’ont trouvé dans le détroit de Beehring. MM. Quoy et Gaimard ont trouvé abondamment, près du Cap de Bonne-Espérance, l 'Oikopleura bifurcata , qu ils avaient nommé Frelillaria , parce qu’il est sans cesse en mouvement ; son corps est anguilliforme, aplati, pointu à son extrémité, qui est munie d’une nageoire échancrée; son axe est parcouru par un ca¬ nal, sur les côtés duquel on voit des granu¬ lations blanches. La partie qui correspond à la tête est surmontée d’un capuchon mem¬ braneux, très délié, frangé, où apparaît un point rouge entouré de jaune. Au reste , MM. Quoy et Gaimard déclarent que c’est seulement pour éveiller l’attention des na¬ turalistes, qu’ils décrivent ainsi un ani¬ mal si peu connu , qu’on ne sait encore dans quelle classe le placer. (Duj.) ^OIOSPERMUM (°Toç, unique; onépaa., graine), bot. ph. — Genre de la famille des Composées, tribu des Sénécionidées, établi par Lessing (m Linnœa, IV, 339, fig. 69, 71, 72, 78; Synops.f 148). Herbes du Bré¬ sil. Voy. COMPOSÉES. OISANITE. min. — Voy. oysanite. OISEAU. Avis. zool. — Voy. oiseaux pour tout ce qui concerne cette grande classe de Vertébrés. — Dans le langage vulgaire et dans beaucoup d’ouvrages scientifiques, l’on a employé le mot Oiseau avec quelque épi¬ thète pour désigner certaines espèces , qui , pour la plupart, font partie de familles et de genres différents. Ainsi l’on a appelé : Oiseau -Abeille, les Oiseaux-Mouches ; Oiseau d’Afrique, le Casse-Noix et la Pin¬ tade ; Oiseau aquatique , le Bec en fourreau ; Oiseau arctique , le Labbe ; Oiseau Baltimore, VOriolus Baltimore ; Oiseau de Banana , VOriolus icterus ; Oiseau des barrières , le Coccyzus scplo- rum ; Oiseau a bec blanc , une espèce de Trou- piale ; Oiseau a bec tranchant, le Pingouin; Oiseau béni, ! e Motacilla Troglodytes ; Oiseau bête, VEmberiza lia ; Oiseau bleu , la Poule sultane , un Merle et le Martin-Pêcheur; Oiseau de Boeuf, le Héron crabier; Oiseau de Bohème, le Jaseur; Oiseau a bonnet noir, le Parus palustris ; Oiseau boucher, la Pie-grièche; Oiseau-Bourdon , quelques Oiseaux-Mou¬ ches et autres Colibris ; Oiseau brame, le Falco Pondicherianus / Oiseau de cadavre , la Chevêche ; Oiseau de Calicut, le Dindon ; Oiseau des Canaries, le Serin ; Oiseau-Cane, Y Emberiza olivacea ,* Oiseau du Cèdre, une variété du Jaseur; Oiseau céleste, les grandes espèces du genre Faucon ; Oiseau cendré de la Guiane , un Gobe- Mouche ; Oiseau des Cerises , le Loriot commun ; Oiseau-Chameau, l’Autruche; Oiseau de charogne, l’Orieou, espèce du genre Vautour; Oiseau-Chat, le Catbird ou Muscicapa Caroliniensis ; Oiseau de cimetière , le Grimpereau des murailles ; Oiseau a collier, VAlcedo torquata ; Oiseau de combat, le Tringapugnax ; Oiseau a cou de Serpent, le Plotus Levait- lanlii ; 8 OIS Oiseau des courants, VAlca pica; Oiseau a couronne, VArdea pavonina Oiseau de la couronne, même chose qu’Oi- seau du Cèdre ; Oiseau couronné du Mexique , le Touraco Louri ; Oiseau couronné noir , le Tangara mela- nictera ; Oiseau de la Croix, le Bouvreuil à sour¬ cils roux ; Oiseau de Curaçao , le Hocco ; Oiseau de Cythère , le Colomba visoria ; Oiseau de Dampier , le Calao de Céram ; Oiseau de dégoût , le Dronte ; Oiseau du destin, le Buceros abyssiniens ; Oiseau a deux becs , le Buceros ginginia- nus ; Oiseau du diable ou de tempête , le Pro- cellaria pelagica ; Oiseau diablotin, le Larus catarrhacles ; Oiseau de Dieu, l’Oiseau de Paradis; Oiseau de Diomède , le Puffin ; Oiseau a dos rouge j le Tangara septi- color ; Oiseau dunette, la Grive ; Oiseau épinard , même chose qu’Oiseau à dos rouge ; Oiseau fétiche , le Butor ; Oiseau de feu , un Troupiale et un Tan- gara ; Oiseau fou, la Sittelle de la Jamaïque; Oiseau des glaces , l’Ortolan de neige; Oiseau goitreux, le Pélican blanc; Oiseau de guerre, la Frégate; Oiseau des herbes, le Tangara canora; Oiseau jaune , le Bruant commun, le Syl- via œstiva et le Loriot commun ; Oiseau de Joncs , l’Ortolan de Roseaux ; Oiseau de Juida, VEmberiza Paradisea ; Oiseau de Libye, la Grue cendrée; Oiseau de mai , la Calandre ; Oiseau marchand , le Vullur aura ; Oiseau de mauvaise figure , l’Effraie ; Oiseau de Médée , le Paon ; Oiseau de meurtre , la Litorne ; Oiseau a miroir , la Sylvie gorge-bleue ; Oiseau mon père, le Corvus calvus ; Oiseau de montagnes , les Hoccos ; Oiseau de la mort , l’Effraie ; * Oiseau-Mouche, un sous-genre de Co¬ libris ; Oiseau de murmure, les petites espèces de Colibris; OIS Oiseau de nausée, même chose qu’Oiseau de dégoût ; Oiseau de Nazare ou de Nazareth , le Di- dus Nazarenus ; Oiseau de neiges, le Niverolle, l’Ortolan de neiges et le Lagopède; Oiseau de Nerte, la Litorne; Oiseau niais, le Canard siffleur; Oiseau noir , le Tangara alra; Oiseau de Notre - Dame, VAlcedo hispida ; Oiseau de Numidie , la Pintade; Oiseau d’OEuf , le Slerna viltata; Oiseau d’or , le Monaul ; Oiseau de Palamède, la Grue cendrée; Oiseau de Paradis , voy. paradis ; Oiseau pêcheur , le Balbuzard; Oiseau de la Pentecôte, le Loriot com¬ mun ; Oiseau a pierre , le Pauxi ; Oiseau de pluie, le Tacco; Oiseau pluvial , le Pic-vert ; Oiseau de plumes ou Ois. royal , VArdea pavonina ; Oiseau pourpré, le Fulica Porphyrio ; Oiseau prédicateur, la plupart des Fau¬ cons ; Oiseau quaker , le Diomedea fuliginosa ; Oiseau-Rhinocéros , un Calao ; Oiseau rieur, le Cuculus ridibundus ; Oiseau de riz, VEmberiza oryzivora ; Oiseau roi , le Lanius tyrannus ; Oiseau royal, même chose qu’Oiseau de plumes ; Oiseau des savanes , le Passe'rina pra- tensis ; Oiseau Saint-Jean, le Falco lagopus; Oiseau Saint-Martin , le Busard ; Oiseau de Saint-Pierre , quelques Pétrels ; Oiseau sans ailes , les Pingouins et les Manchots ; Oiseau de sauge , la Fauvette des Ro¬ seaux ; Oiseau silencieux, un Tangara; Oiseau du soleil , le Caurale et le Grèbe- Foulque ; Oiseau sorcier , l’Effraie ; Oiseau-Souris , quelques Colious ; Oiseau-Teigne, le Martin-Pêcheur com¬ mun ; Oiseau de tempête, même chose qu’Oiseau du Diable ; Oiseau des Terres - Neuves , l’Aracari vert ; OIS 9 OIS Oiseau Tocàn, le Ramphastos erylhrorhyn - ehus ; Oiseau Tout-Bec, les Toucans et les Ara- caris ; Oiseau trompette , l’Agami , le Buceros africanus et VArdea pavonina; Oiseau du Tropique , la Paille-en-queue ; Oiseau de Turquie, les Casse-Noix. OISEAUX. Aves. zool. — De tous les êtres qui s’agitent sur notre globe, les Oi¬ seaux sont peut-être ceux qui ont le plus fixé l’attention des peuples. Utiles sous plu¬ sieurs rapports; parés en général de cou¬ leurs brillantes et variées; doués, pour la plupart , de qualités agréables , et répandus en nombre considérable sur tous les points habités de la terre, ils devaient nécessai¬ rement attirer les regards des observateurs et exciter leur curiosité et leur admiration. Aussi , à toutes les époques , et dans tous les lieux, voyons-nous l’homme leur accor¬ der le plus vif intérêt. Aux uns il a de¬ mandé une nourriture saine , abondante et facile; il a quelquefois scruté les mœurs des autres pour y trouver des actes qu’il s’est proposés pour exemples , ce qu’attestent les écrits des anciens, qui fourmillentde preuves à cet égard. Il a été frappé de la gravité , de l’air imposant et majestueux, du courage et de la hardiesse de ceux-ci; ceux-là , au contraire, se sont fait remarquer de lui par leur timidité, leur lâcheté , leur faiblesse et leur stupidité même. Il aime les uns pour leur aimable pétulance , leur coquetterie et leur gai caquetage , pour leur douceur et leur attachement, pour leur mélodie pleine de charmes et de grâces ; les autres lui plai¬ sent par l’élégance de leurs formes, par la légèreté et la souplesse de leurs mouvements ; d’autres, enfin, l’éblouissent par la beauté de leur plumage , par l’éclat et la bizarrerie de leur parure, par les mille couleurs que la nature prodigue a versées sur eux avec richesse et profusion. Sous ce rapport, ces derniers sont bien réellement, si l’on peut dire , les pierres précieuses du règne animal, car ils brillent parmi les êtres animés , comme l’émeraude et le saphir parmi la matière brute et inorganique; ce sont d’au¬ tres fleurs de la création détachées du sol et se mouvant de leur libre arbitre dans les airs. Les Oiseaux devaient donc avoir et ont eu de nombreux admirateurs, et par suite de T. IX. nombreux historiens. Depuis Aristote jus¬ qu’à nous, une foule d’écrits, auxquels ils ont donné lieu, se sont succédé, qui tous ont eu pour but de les faire connaître, soit dans leurs relations réciproques, soit dans leur nature , soit dans leur utilité pour l’es¬ pèce humaine. Une chose frappe lorsqu’on ouvre les annales de l’antiquité ; on y voit que les Oiseaux, comme tous les autres animaux , n’ont guère été étudiés , à ces époques re¬ culées , que sous le rapport de l’économie générale, et parce qu’ils pouvaient fournir aux ressources alimentaires. Cette étude, bornée d’abord aux espèces qui avaient subi le joug de la domesticité, et à quelques au¬ tres que l’on retenait captives, s’étendit peu à peu à celles qui vivaient en liberté. On eut besoin de consulter les mœurs et les habitudes de toutes , afin de connaître les conditions d’existence qu’il convenait de donner à celles-ci pour leur conservation et leur propagation, et de savoir dans quelles circonstances , à quelle époque et par quels moyens on pouvait se procurer celles-là. C’est de ce besoin de connaissances qu’est née l’histoire naturelle des Oiseaux, histoire d’abord informe , entachée d’erreurs gros¬ sières et fort incomplète ; mais qui devait s’épurer peu à peu et arriver à cet état où nous la voyons aujourd’hui. Quoique les mœurs de la plus grande partie des Oiseaux soient encore un secret pour l’homme ; quoique la plupart des points de leur organisation demeurent inconnus; cependant les observations en ce genre qui sont consignées dans les travaux généraux , et celles qui se trouvent disséminées dans les mémoires spéciaux, sont en nombre si con¬ sidérable, que les réunir toutes dans une histoire générale est chose, sinon impossi¬ ble, du moins très difficile, et qui d’ailleurs entraînerait nécessairement avec elle l’in¬ convénient grave de faire disparaître l’intérêt que peut avoir une pareille histoire sous la confusion des détails. C’est dire que, plus préoccupé du désir d’intéresser que de celui de ne passer sous silence aucun des faits connus , nous choisirons parmi ces faits ceux qui nous paraîtront les plus saillants et les plus propres à entrer dans le cadre que nous nous sommes tracé. Nous ferons notre point de départ de 2 10 OIS OIS l’exposé des caractères physiologiques et anatomiques , et de la forme générale des Oiseaux. Ce sera comme une introduction à l’étude de leur organisation. Nous exami¬ nerons ensuite leur genre de vie , leurs actes et leurs habitudes naturelles. Nous en¬ trerons dans quelques considérations géné¬ rales sur leur dispersion à la surface du globe , sur leur utilité dans l’économie ; enfin, nous mettrons en relief, dans un historique succinct, les résultats des efforts tentés aux diverses époques de la science , pour saisir les rapports ou les différences que présentent entre elles les espèces. Notre travail comprendra donc six divisions prin¬ cipales : la définition ou la caractéristique desOiseaux, leur organisation, leurs mœurs, leur distribution géographique , les avan¬ tages que l’homme en retire , et leur clas¬ sification. CHAPITRE PREMIER. FORME ET CARACTÈRES GÉNÉRAUX DES OISEAUX. § Ier. Caractères physiologiques. • Placés, dans la série des êtres animés , à côté des Mammifères, et immédiatement après eux, les Oiseaux composent la deuxiè¬ me classe des Vertébrés. Ils sont ovipares ; ils ont une circulation et une respiration doubles et sont organisés pour le vol. Ces quatre caractères distinguent nettement cette grande classe de celles qui l’avoisinent. En effet, si , sous le rapport de la généra¬ tion , en d’autres termes de l’oviparité , si même sous celui de la circulation , les Oi¬ seaux offrent quelque analogie avec les Reptiles, et principalement avec les Chélo- niens, ils en diffèrent essentiellement sous celui de leurs facultés locomotrices et de la respiration. D’un autre côté, les anciens ont pu être séduits par le mode de locomo¬ tion aérienne de quelques Mammifères , des Chauve-souris, par exemple , au point de les rapprocher des Oiseaux ; mais l’erreur, à ce sujet, a depuis longtemps cessé d’exis¬ ter. On n’a pas tardé à reconnaître qu’il y avait dissemblance entre les uns et les au¬ tres sous le rapport de la respiration, de la circulation, et, ce qui aurait dû tout d’a¬ bord frapper les esprits, sous celui de la génération. Les anciens , Aristote , Pline, Elien, Scaliger , n’ignoraient point ce fait. Tous les Oiseaux, ont-ils dit, pondent des œufs, à l’exception de la Chauve-Souris; mais le vol étant pour eux le caractère do¬ minant de la classe qui nous occupe , et les Mammifères dont il vient d’être question, jouissant de la faculté de voler, il s’ensuit qu’ils ont été pour ainsi dire logiques en classant ceux-ci parmi les Oiseaux. Ce qu’il y a de bien positif, c’est qu’aujourd’hui ces derniers ne sont et ne peuvent être confondus avec aucun autre animal actuellement connu. Aux caractères cités, caractères qui sont purement physiologiques , peuvent s’en joindre quelques autres tirés des organes extérieurs. Ainsi ce qui sert encore à carac¬ tériser cette classe , c’est un bec corné dé ¬ pourvu de dents proprement dites , et sur¬ tout, ce qui n’est pas sans être d’une im¬ portance réelle sous plusieurs rapports, ce sont les téguments dont le corps de l’Oiseau est couvert, c’est-à-dire les plumes. Ces sortes d’appendices de la peau n’ont été dé¬ partis qu’à cette classe; ils peuvent, par conséquent en être considérés comme l’ex¬ pression la plus caractéristique. §11. — Du CORPS DE L’OISEAU, CONSIDÉRÉ DANS SA FORME GÉNÉRALE ET DANS QUELQUES UNES DE SES PARTIES. Destinés à s’élever dans un milieu gazeux, à y demeurer suspendus, à sillonner l’es¬ pace en tous sens, les Oiseaux sont admira¬ blement organisés pour cette fin. Leur corps est taillé de la manière la plus favorable pour fendre l’air sans éprouver trop de ré¬ sistance, et pour s’y soutenir sans effort. Tout y est disposé pour une progression ra¬ pide et un équilibre parfait. Sa forme géné¬ rale peut être représentée par deux cônes que l’on supposerait unis par leur base. C’est vers le point de cette union supposée que sont attachées les deux rames alaires, qui, mises en mouvement, doivent faire avancer l 'ensemble sur lequel elles prennent leur point d’appui. On conçoit que, si le corps de l’Oiseau avait eu une autre forme, si sa partie antérieure avait été évasée au lieu d’être comme anguleuse, la progression eût été plus difficile : on conçoit aussi que si la moitié postérieure, celle qui doit être en • traînée, avait offert plus d’étendue ou de W OIS 11 largeur que la moitié antérieure , le mou¬ vement eût été également plus pénible. In¬ dépendamment de celte disposition éminem¬ ment propice pour la locomotion aérienne, le corps de l’Oiseau offre encore une combi¬ naison remarquable qui rend possible l’é¬ quilibre dans un milieu gazeux. Tout le poids qui est fourni par les viscères abdo¬ minaux, celui des muscles pectoraux, sont comme un lest destiné à rendre lourde la partie inférieure, tandis que, sur les côtés de la colonne vertébrale et entre les côtes, sont enchâssés des lobes pulmonaires qui, eu communication avec de vastes sacs aé¬ riens gonflés d’air, donnent de la légèreté à la partie supérieure du corps, siège de ces organes. On le voit, les lois de la physique ont été rigoureusement observées; et c’est au point que, si une cause quelconque dé¬ truit l’harmonie de ces lois, l’équilibre ces¬ sant , l’Oiseau devient inapte au vol, bien qu’il soit doué de cette faculté à un haut degré. Mais , si la nature a pourvu ceux des Oi¬ seaux dont la vie se passe dans les airs, de moyens puissants de voler, si elle a com¬ biné cette puissance de vol avec la légèreté nécessaire, elle a donné à ceux qui occupent le rang opposé dans la série ornithologique, à ceux qui vivent constamment dans l’eau, qui sont exclusivement attachés à cet élé¬ ment, elie leur a donné, disons-nous, avec un corps à peu près semblable, mais plus développé en longueur et plus taillé par le bas en forme de carène, des membres dis¬ posés en rames. Chez quelques uns même, tels que les Gorfous, les Manchots et les Sphénisques, les ailes ne sont plus destinées au mode de locomotion général des Oiseaux, mais à la progression aquatique. Etudié sous le point de vue topographi¬ que, le corps de l’Oiseau se présente comme un tout divisible en régions, elles-mêmes subdivisibles en plusieurs autres parties. Ainsi on peut lui distinguer une région an¬ térieure, dans laquelle on reconnaît une ex¬ trémité rostrale ou rostre et une tête; une région moyenne qui comprend trois régions secondaires appelées cou, thorax et abdo¬ men, et une région postérieure subdivisible en bassin ou post-abdomen, et en extrémité caudale ou queue. C’est l’ensemble de ces régions, nommées rostre ou bec, tête, cou, OIS thorax, abdomen, pelvis et queue, que l’on oésigne généralement sous le nom de tronc, et c est sur les côtés de ce tronc que sont annexés les appendices qui servent à la lo¬ comotion. Si la notion des différentes régions que l’on distingue dans un Oiseau est néces¬ saire parce qu’elle fournit en général au na¬ turaliste des caractères extérieurs très im¬ portants, la connaissance d’une nomencla¬ ture spéciale de chaque région est également indispensable pour déterminer et décrire rapidement les espèces. En ornithologie sur¬ tout, il était- de toute nécessité d’assigner aux diverses parties du corps de l’Oiseau des noms qui pussent servir à faire apprécier les différences. Notre intention n’est pas d’entrer ici dans des détails à ce sujet. D’ail¬ leurs , les figures de la pl. 60 de ce Diction¬ naire que nous accompagnons d’un texte ex¬ plicatif assez détaillé, nous dispensent d’ex¬ poser la nomenclature des parties. CHAPITRE II. ORGANISATION DES OISEAUX. Les Oiseaux occupent une place trop éle¬ vée parmi les animaux, pour que leur orga¬ nisation s’éloigne sensiblement de ce qu’on connaît chez les Mammifères. Ils offrent à constater des différences importantes, sans doute; mais ces différences ne sont pas tel¬ lement fondamentales qu’elles excluent l’a¬ nalogie. Eu égard à la disposition , les or¬ ganes sont, dans l’une et l’autre classe, à peu près les mêmes; sous celui du nombre, l’on conçoit qu’ils puissent différer; quant à la forme, elle n’a une importance réelle que relativement à certaines fonctions phy¬ siologiques. Du reste, les Oiseaux destinés à un genre de vie différent de celui des Mammifères ont dû nécessairement recevoir une organisation qui rendit possible leur manière d’être. « Comme rien ne peut exister, dit G. Cu¬ vier dans son introduction au Règne animal , s’il ne réunit les conditions qui rendent son existence possible , les différentes parties de chaque être doivent être coordonnées de manière à rendre possible l’être total , non seulement en lui même, mais dans ses rap¬ ports avec ceux qui l’entourent; et l’ana¬ lyse de ces conditions conduit souvent à des lois générales tout aussi démontrées que 12 OIS OIS celles qui dérivent du calcul ou de l’expé¬ rience. » Une de ces lois , on pourrait peut - être dire la seule qui régisse le règne ani¬ mal, car seule elle renferme le principe gé¬ néral et constant des conditions d’existence, est celle qui se résume par ces mots : L'or¬ ganisation d’un animal est toujours en rap¬ port avec ses besoins et ses habitudes. Ce principe, qui a rencontré quelques antago¬ nistes , est cependant tellement universel, qu’on le heurte, pour ainsi dire, à chaque pas que l’on fait dans l’organisme d’un être. Ainsi, pour ne parler que des Oiseaux, si semblables entre eux , en ce qui concerne le plan général d’après lequel ils ont été con¬ struits, qui ne voit que la nature, en les formant, leur a donné une organisation con¬ forme au genre de vie qu’elle leur a dé¬ parti? Si nous voulions étudier ici toutes les particularités organiques qu’ils offrent à considérer, nous constaterions que les diffé¬ rentes parties qui les constituent sont en rapport avec des habitudes plus ou moins aériennes, ou plus ou moins terrestres, ou plus ou moins aquatiques, et nous aurions encore entre ces trois termes, le vol, la marche et la natation, tous les degrés pos¬ sibles d’organisation. Si , comme nous venons de le dire , les Oiseaux ont été créés d’après un plan uni¬ que, ils ne doivent pas présenter de ces diffé¬ rences importantes qui tiennent à la dégra¬ dation. En effet, on observe toujours, dans tous, les mêmes parties; mais, en même temps, on voit que ces parties sont modi¬ fiées selon le besoin de l’animal. S’ils dif¬ fèrent entre eux , ce n’est , par consé¬ quent, que d’une manière secondaire et spé¬ ciale. Après ces considérations , nous devons prendre connaissance des principaux groupes d’organes, en les examinant d’une manière générale, sous le point de vue anatomique et physiologique, et en les étudiant, autant qu’il nous sera possible, successivement et dans leur subordination à la constitution de l’organisme. § I. Des organes des sens et de leurs FACULTÉS PHYSIOLOGIQUES. De la peau , considérée comme appareil de protection. Par elie-mêine , la peau proprement dite n’offre rien de bien remarquable. Elle est composée d’un derme peu dense dans les endroits que recouvrent les plumes , mais d’une épaisseur assez considérable dans ceux qui n’en sont pas revêtus; aux pattes des Oiseaux marcheurs, par exemple, sa densité est très grande. On y distingue aussi un ré¬ seau vasculaire excessivement développé, un pigmentum, mais seulement dans les parties dépourvues de plumes; une couche nerveuse extrêmement faible et un épiderme géné¬ ralement fort mince sur toutes les parties du corps que recouvre l’appareil phanéreux, mais remarquable par sa densité surtout où il y a absence de cet appareil. Il semble que la nature ait pris soin de protéger par des moyens autres que des plumes les endroits qui devaient en être privés. Sur ces points, l’épiderme est fort développé; il s’y épaissit, s’y dispose par plaques qui prennent pour l’ornithologiste le nom d 'écailles, et qui de ¬ viennent, pour lui, d’après la forme qu’elles affectent, un moyen de classer un grand nombre d’espèces par groupes naturels. En effet, ces écailles, placées les unes à côté des autres ou légèrement imbriquées et recou¬ vrant les pattes, sont d’assez bons caractères, soit que, régulièrement disposées, elles pren¬ nent une forme écussonnée , soit que, réti¬ culées, comme les mailles d’un filet, elles en affectent la disposition. Mais les pattes ne sont pas les seules parties de l’Oiseau qui aient des plaques écailleuses résultant de l’épais¬ sissement de l’épiderme , le tour de l’œil de certaines espèces en est également pourvu; elles paraissent alors remplacer les cils dont la classe des Oiseaux est généralement privée. Si beaucoup de Mammifères présentent un appareil crypteux, souvent très considérable, et sécrétant, chez la plupart, des matières plus ou moins odorantes, les Oiseaux, sous ce rapport, n’ont à nous offrir rien de sem¬ blable. Tout ce qu’on peut constater chez eux, c’est un amas de cryptes situé à la par¬ tie postérieure du dos et au-dessus du coc¬ cyx. Ce sont ces cryptes qui fournissent à l’Oiseau la matière huileuse qu’il exprime avec son bec et dont il se sert pour oindre et lisser ses plumes. Chez toutes les espèces qui ont des habitudes aquatiques, cet organe est ordinairement beaucoup plus volumineux que chez celles qui vivent le plus à terre, et OIS 13 OIS même chez celles dont la vie est entièrement aérienne. Mais le caractère dominant de la peau des Oiseaux consiste dans le grand développement des téguments phanéreux, c’est-à-dire des plumes , devenues non seulement une sorte d’organe de protection propre à retenir la chaleur qui s’exhale du corps de l’animal , mais encore un moyen de locomotion. Elles ont probablement encore pour usage, à cause de leur hygrométricité ou comme le veulent quelques auteurs, à cause de leur tension électrique, de faire pressentir aux Oiseaux les variations du temps. Les plumes sont des productions cornées comme les poils, et comme eux composées d’une partie productrice et d’une partie pro¬ duite. Elles ne prennent généralement pas nais¬ sance sur toutes les parties du corps. Chez la plupart des Oiseaux, la poitrine et le ven¬ tre en sont totalement dépourvus. Un fait physiologique remarquable, surtout lors¬ qu’on sait que les Oiseaux sont des animaux appelés à une vie aérienne, est celui qui a rapport à la manière dont l’implantation des plumes a lieu. Elle se fait, en général, tou¬ jours de la tête à la queue, de la partie qui doit être projetée en avant à celle qui doit être entraînée. De cette manière, l’Oiseau peut glisser dans les airs, sans que cette dis¬ position ralentisse sa progression. Si les plu¬ mes avaient eu une autre direction , si, au lieu d’être appliquées les unes sur les autres dans le sens dont nous parlons, elles avaient été inclinées d’arrière en avant, dans l’action du vol, l’air qui serait venu les frapper les eût forcées à se redresser, d’abord à cause de leur direction, ensuite eu égard à leur légè¬ reté, et la locomotion eût été, sinon impos¬ sible, du moins excessivement pénible. Mais tout a été prévu dans la nature, et ces or¬ ganes de protection ont pris la même direc¬ tion que celle suivant laquelle l’Oiseau se meut. Régulièrement disposées par plaques, par bandes, par rayons, etc., les plumes sont mises en mouvement par des muscles parti¬ culiers, fort difficiles souvent à distinguer, mais qu’on ne saurait nier à cause de leur action. Cependant quelques uns de ces mus¬ cles, spécialisés pour la locomotion, sont susceptibles d’être décrits; tels sont, par exemple, ceux des plumes de la queue, des ailes, et ceux aussi qui font mouvoir la huppe dont sont parées certaines espèces. Sous le rapport de la forme, de la consis¬ tance , de la structure et des couleurs, les plumes varient considérablement. Toutes ou à peu près toutes sont constituées par un tube ou tuyau, par une tige qui est le pro¬ longement de celui -ci, et enfin par des bar¬ bes qui elles-mêmes sont le plus ordinaire¬ ment garnies de barbules pourvues de cro¬ chets. Ces crochets, lorsqu’ils existent, sont destinés à retenir les barbes les unes à côté des autres, de manière à en former une lame solide et impénétrable à l’air. Suivant le lieu qu’elles occupent et sui¬ vant leur degré de résistance, les plumes ont reçu des noms différents. On a appelé pen¬ nes celles qui s’attachent aux ailes et au croupion, toutes les autres ayant conservé le nom de plumes proprement dites. Ces der¬ nières, plus particulièrement destinées à pro¬ téger le corps de l’Oiseau, sont en général courtes, squamiformes et duveteuses à leur base. Cependant, chez quelques espèces, elles s’allongent et prennent des dispositions tou¬ tes spéciales ; mais ce n’est jamais que sur un point très restreint du corps que ces modi¬ fications se présentent. Tantôt, comme chez les Oiseaux de Paradis, ce sont quelques unes des plumes hypochondriaques qui acquièrent du développement; d’autres fois ce sont les couvertures supérieures de la queue, comme cela a lieu pour les Paons ; ou bien, encore, ce sont celles du dessus de la tête ; elles pren¬ nent alors le nom de huppes ou d'aigrettes. Chez quelques espèces, ce sont les plumes de la région parotique qui s’allongent. Enfin, chez quelques autres, ce sont celles qui oc¬ cupent la partie antérieure et inférieure du cou. Les Hérons offrent ce dernier exemple d’une manière fort sensible. Les pennes , au contraire , sont toujours plus ou moins lon¬ gues, plus ou moins raides et élastiques. Elles ont une forme aiguë ou obtuse; elles sont étroites ou larges. Dans certains genres, quelques unes d’entre elles cessent d’avoir des barbes au-delà d’une certaine étendue ; il en résulte alors ce qu’on nomme des filets. Il arrive encore que les barbes des pennes, après avoir régné dans une longueur voulue, cessent brusquement pour reparaître ensuite à l’extrémité de la tige, qui se trouve ainsi 14 OIS 018 terminée par une espèce de palette ; c’est ce quia lieu dans le Manucode royal, dans le Perroquet à palettes et dans une foule d’au¬ tres Oiseaux. D’autres fois elles manquent complètement sur un côté de la tige, ou bien elles y sontsi courtes qu’on serait tenté d’en nier l’existence. Ce qui est plus rare, c’est de voir les lames des pennes entièrement dégarnies de barbes; cependant le Casoar à casque en offre un exemple. Au reste, dans tous les Oiseaux qui jouissent de la faculté de voler, c’est au moyen des pennes que s’ac complit la locomotion aérienne. Quant aux dénominations particulières que les unes et les autres ont encore reçues selon les points du corps qu’elles recouvrent et où elles s’im¬ plantent, nous renvoyons à la planche 60 et au texte qui s’y rapporte. Un fait qui ne nous paraît pas avoir été signalé, du moins dans les plumes de nos espèces européennes, est celui de l’existence de deux tiges sur le même tube. Cette par¬ ticularité caractéristique des plumes du Ca¬ soar et de l’Emou se montre d’une manière fort remarquable chez un grand nombre d’Oiseaux , mais notamment chez les Rapa¬ ces. Toutes leurs plumes sont pourvues à la face interne de la tige principale et à sa base d’une tige secondaire. Cette tige, garnie de barbes sur lesquelles se montrent des barbu- les excessivement fines et soyeuses, est con¬ stituée par conséquent comme une tige or¬ dinaire. Il y a donc ici deux tiges sur le même tuyau, mais deux liges qui portent des bar¬ bes. Et ce qu’il y a de remarquable , c’est que le duvet même (qui, du reste, n’est qu’une plume décomposée) est ainsi consti¬ tué. Ce fait nous a été démontré dans toute son exagération chez un grand nombre d’Oi¬ seaux de proie; nous l’avons aussi rencontré chez les Palmipèdes, les Échassiers et les Passereaux. Une pareille disposition a sans doute pour but d’augmenter et de conserver la chaleur interne de l’Oiseau; car c’est là le rôle que les plumes duveteuses paraissent destinées à remplir. En effet, leur quantité est toujours ou presque toujours en raison directe de la température. Elles sont d’au¬ tant plus nombreuses que l’Oiseau vit da¬ vantage dans les climats froids, ou, ce qui revient à peu près au même , qu’il vit plus habituellement au haut des airs ou qu’il de¬ meure plus fréquemment sur l’eau. Les plumes ne sont pas le seul produit phanérique que présente la peau des Oi¬ seaux. On trouve encore chez eux de véri¬ tables poils ; tels sont ceux qui, réunis en bouquet, ornent la poitrine du Dindon; tels sont encore ceux qui se trouvent à la base du bec des Corbeaux, des Guêpiers, des Engoulevents, etc.; ceux-ci ont régulé nom particulier de vibrisses. Enfin, 1 e duvet qui protège les jeunes Oiseaux, cette matière moelleuse et cotonneuse, qui, chez le Cygne nouvellement éclos, devient, à cause de sa finesse et de sa blancheur, une pelleterie recherchée par le monde élégant, ce du¬ vet, disons-nous, est le plus souvent formé par des poils extrêmement fins et. élas¬ tiques. Si les plumes varient beaucoup sous le rapport de leur contexture et de leur forme, les différences qu’elles présentent sous celui de leurs couleurs ne sont pas moins consi¬ dérables , et ces différences sont subordon¬ nées ordinairement à des circonstances d’âge, de sexe, et à des conditions de température. En général, les Oiseaux des pays froids ont des couleurs ternes, tandis qu’au contraire ceux des climats chauds ont un plumage brillant et varié. C’est sous la zone torride qu’à cet égard se trouvent les espèces les plus remarquables. « Les Oiseaux de l’Inde, dit M. de Blainville, qui ont une couleur métallique, ont cette couleur plus glacée, plus ternie que ceux de l’Afrique, et sur¬ tout que ceux de l’Amérique. On trouve ce¬ pendant quelques espèces de Canards dont le plumage est très brillant, et qui cepen¬ dant vivent dans les climats froids. Mais presque jamais, dans ces climats, on ne voit ces couleurs irisées et surtout métalliques qui ornent la robe des Oiseaux-Mouches , des Oiseaux de Paradis. Dans le même genre naturel , les espèces les plus riches en cou¬ leurs appartiennent toujours aux climats chauds. Bien plus, dans la même espèce , les individus des parties les plus chaudes de la zone qu’elle habite sont plus vivement colorés que les autres. » Du reste, il y a ceci de très remarquable que la couleur, quel que soit son éclat, ne se montre dans toute son intensité et sa pureté que dans l’étendue de la plume qui est apparente à la vue ; vers l'insertion, à la base des plu¬ mes, elle est non seulement affaiblie et OIS OÏS terne, mais elle d i frère souvent de celle qu’offre la partie exposée à l’air. Cette différence de couleur dans les mê¬ mes plumes, et surtout dans celles qui sont irisées et métalliques, est un fait qu’on de¬ vait nécessairement chercher à expliquer. Il paraît dépendre de la disposition et de la contexture des parties constituantes. On a remarqué, en effet, que toute la portion cachée de ces plumes était composée de barbes et de barbules grêles, isolées et dé¬ composées de façon à absorber la lumière; tandis que, dans la portion exposée à l’air, ces mêmes parties, et surtout les barbules, étaient larges, nombreuses , serrées de ma¬ nière à former, en apparence, une surface polie et convexe , susceptible de réfléchir les rayons lumineux et de produire un phéno¬ mène analogue à celui de la formation des anneaux colorés. Selon d’Audebert, les plu¬ mes métalliques devraient leur brillant , non seulement au poli de leur surface et au grand nombre de petits miroirs que présen¬ tent leurs barbules, mais aussi à leur densité. Il aconsta té qu’une plume du cou del’Oiseau- Mouche rubis- topaze, pèse autant que trois plumes de couleur mate d’un volume égal. Dans les plumes vernissées , telles qu’on les trouve sur la tête des Pics, sur le dos des Hérons ou sur la gorge des Pigeons, le poli de ces plumes paraît dépendre plus particu¬ lièrement de la prédominance , chez elles, de la matière cornée et de l’absence de bar¬ bules sur les barbes, ou de l’étroite con¬ nexion qui existe entre les unes et les au¬ tres. Mais le sexe et l’âge entraînent aussi, avons-nous dit, des changements dans les couleurs du plumage. Ainsi les mâles de beaucoup d’espèces jouissent seuls du privi¬ lège d’éblouir par l’éclat de leur parure. Tandis que la nature leur a prodigué toutes les riches couleurs dont^lle disposait; tan¬ dis qu’elle les a pourvus d’une livrée des plus variées, elle a jeté sur les femelles des teintes sombres et rembrunies qui les différencient des mâles, au point d’avoir pu raire suppo¬ ser quelquefois qu’elles constituaient des espèces distinctes. Cependant, chez beau¬ coup d’Oiseaux, un plumage particulier n’est plus l’apanage du mâle : les deux sexes sont parés des mêmes couleurs. Quant à l’âge , il influe d une manière notable sur le plumage. 15 Les jeunes Oiseaux ne ressemblent ordinai¬ rement point aux adultes; ils revêtent gé¬ néralement une livrée particulière, qu’ils quitteront plus lard, pour ne plus la re¬ prendre (I). Le fait le plus évident et le plus extraor¬ dinaire de l’influence de l’âge sur la couleur du plumage, fait que confirment un grand nombre d’exemples, est celui qui se produit chez les vieilles femelles qui ont cessé de pondre. On a remarqué, en effet, que les femelles de certains Gallinacés, et notam¬ ment des Faisans, en devenant inaptes à se reproduire, perdent le plumage propre à leur sexe , pour prendre celui de leur mâle, auquel elles peuvent, après quelques an¬ nées, devenir exactement semblables. Les Gallinacés ne sont d’ailleurs pas les seuls qui présentent cette particularité; Levaillant a constaté que la Veuve à épaulettes rouges femelle subissait, en vieillissant, la même métamorphose. M. Dufresne a vu de vieilles femelles de Colingas se vêtir de la livrée du mâle. Enfin , on a observé le même phéno¬ mène chez les Pinsons, les Rouges-Queues et les étourneaux femelles (2). (i) G. Cuvier, dans ses Considérations générales sur les Oiseaux, a admis re principe que, lorsque la femelle diffère du mâle par des teintes moins vives, alors les petits des •deux sexes ressemblent à la femelle; et qu’au contraire lorsque les adultes mâle et femelle sont de même couleur, les petits ont une livrée qui leur est propre. MM. Yarrel et Ternmïnck ont reproduit la même opinion, l’un dans un mémoire inséré dans le tome I des Transactions de la So¬ ciété zoologique de Londres , l’autre dans la troisième partie de son Manuel d’ Ornithologie. Cependant lorsqu’on con¬ sulte les faits , on ne tarde pas à s’apercevoir que ce prin¬ cipe n’est pas rigoureusement vrai. En effet , les deux sexes d’un grand nombre d’espèces , telles que la Pie com¬ mune, le Geai d’Europe, le Bec-Fin des jardins, les Pouil- lots litis, siflleur, les Hippolais polyglotte et ictérine, etc., portent une livrée qui est parfaitement semblable , et ce¬ pendant les jeunes de ces espèces , avant leur première mue, ne diffèrent pas des parents. 11 en est de même à l’égard de la deuxième proposition. Beaucoup dVxemples lui sont contraires ; nous citerons seulement le Rossignol de mu¬ raille , et le Ilouge-queue , chez lesquels les jeunes ont une livrée qui leur est propre , quoique la femelle diffère essen¬ tiellement du mâle. (?.) Cependant l’âge avancé n’est pas toujours une condi¬ tion nécessaire pour donner au plumage de certaines fe¬ melles de Faisans, plus ou moins de ressemblance avec celui du mâle. Une dégénérescence organique des ovaires, telle que l’atrophie ou l’induration, en est souvent la cause. Sur sept femelles qui présentaient ce phénomène, M. Yarrel a trouvé constamment un état maladif des ovaires et des ovi- ductes. Nous avons vu nous-même dans les galeries anato¬ miques de Bonn, ville universitaire d’Allemagne , un jeune Paon femelle qui présentait les mêmes particularités. L’atrophie de ses organes reproducteurs lui avait fait re- 16 OIS Enfin, la couleur des plumes subît encore, selon la saison ou l’époque de l’année, des changements qui résultent de ce phénomène régulier et périodique qu’on appelle mue. Tous les Oiseaux sont sujets, au moins une fois l’an, à muer, c’est-à-dire à quitter leurs vieilles plumes pour en reprendre de nouvelles, dont la couleur ou sera la même, ou différera. Cette mue annuelle, qu’on dé¬ signe sous le nom de mue simple, et qui est toujours totale chez les Oiseaux parvenus à leur état parfait, a régulièrement lieu en automne; seulement, les uns y sont soumis plus tôt, les autres plus tard. Mais un très grand nombre d’espèces, en outre de la mue d’automne, subissent, au printemps, une seconde mue. Celle-ci, à laquelle les mâles sont plus particulièrement sujets, est totale ou partielle , et entraîne ordinairement un changement de couleurs, qui ne se main¬ tient que pendant le temps très court des amours. D’autres fois, elle se complique d’ornements extraordinaires , et développe ces plumes longues, subulées, qui forment les panaches ou les huppes de beaucoup d’es¬ pèces. Dans certains Oiseaux erratiques , quoique la mue soit simple et ait lieu en automne, le plumage prend, au printemps, des couleurs plus éclatantes, plus vives. Ceci a lieu, non plus par un renouvellement de plumes, mais par l’action de l’air, du jour,* et par les frottements qu’éprouve le plu¬ mage dans les divers mouvements de l’Oi¬ seau. Des couleurs ie plus souvent ternes et sombres bordent extérieurement les plu¬ mes de ces espèces, et cachent, en automne, les teintes brillantes ou claires de la partie supérieure de leurs barbes, dont le bout, en s’usant, fait paraître, au printemps, ces cou¬ leurs dans toute leur pureté. Indépendamment de ces variations natu¬ relles que manifeste annuellement le plu¬ mage, il subit parfois des modifications ac¬ cidentelles. Tels sont l’albinisme plus ou moins complet, plus ou moins pur, et quel¬ quefois, mais plus rarement, le mélanisme. Ce dernier état, qu’on observe surtout chez les Oiseaux captifs, paraît se produire par Vêtir successivement tous les attributs du mâle. Ce fait est contraire à cette «pinion un peu trop absolue , émise par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire , que le Paon ne présen¬ tait jamais de changement analogue à celui qui a lieu chez les femelles du Faisan. OIS l’influence d’une nourriture excitante long¬ temps prolongée. Les plumes ne sont pas les seules expan¬ sions organiques qui fassent partie de l’ap¬ pareil de protection des Oiseaux; on peut encore considérer comme dépendant de cet appareil ces parties cornées qui ont pris le nom d 'ongles, lorsqu’elles enveloppent la dernière phalange des doigts; d'éperons, lorsqu’elles protègent, en prenant une forme plus ou moins conique, une saillie osseuse; et de bec, lorsqu’elles recouvrent les man¬ dibules. Les ongles, dans les Oiseaux, composés comme ceux des Mammifères, par des poils agglutinés, varient, comme chez ces der¬ niers, selon le besoin de l’animal. Ils font partie des membres postérieurs , et sont comme un prolongement des doigts. Tous les Oiseaux en sont pourvus. Leur connais¬ sance est importante , et sous le rapport des mœurs, et parce qu’ils peuvent servir de ca¬ ractères génériques et spécifiques. Leur forme peut, dans beaucoup de cas, aider à faire distinguer un genre d’un autre genre, une espèce d’une autre espèce, et cela d’une manière nette et précise. En outre, si l’or¬ ganisation, ce qui est hors de doute, traduit les mœurs , et vice versâ , si des mœurs on peut déduire l’organisation, on conçoit qu’il soit possible, dans la forme , la grandeur et l’étendue des ongles, de lire les habitudes naturelles d’un Oiseau, et celles-ci étant connues, que l'on puisse approximativement arriver à deviner quelques points caracté¬ ristiques de son organisation. Ainsi, il suf¬ firait de voir la serre crochue et puissante d’un Faucon pour penser qu’elle est devenue chez lui l’auxiliaire nécessaire de l’organe de préhension, et que l’Oiseau doit s’en ser¬ vir pour saisir et déchirer une proie vivante. Chez les espèces où l’ongle sert également à la préhension, comme dans les Perroquets et chez un grand noftibre de Passereaux, mais à une préhension sans efforts, cet organe, tout en conservant la même forme que dans les Oiseaux de proie, a cependant un degré de faiblesse notable. Il est bien plus faible encore et bien moins crochu chez toutes les espèces qui vivent habituellement sur les arbres ; enfin les Oiseaux marcheurs et na¬ geurs ont généralement l’ongle droit, épais et mousse ou aplati. Celte forme n’est pas OIS OIS 17 absolue; car on trouve parmi les Passereaux et les Échassiers des espèces dont les ongles sont très aigus : nous ne citerons que celles des genres Alouette, Mégapode et Jacana. Chez ces derniers, les ongles sont tellement longs et acérés, qu’ils ont valu à l’espèce- type du genre, et même à plusieurs autres, le nom vulgaire de Chirurgien. Les ongles ne sont pas de la même lon¬ gueur à tous les doigts ; ordinairement c’est celui du pouce qui acquiert le plus d’étendue ; souvent aussi c’est celui du doigt médian , et quelquefois celui du doigt ex¬ terne. On remarque encore que , parmi les Gallinacés et les Échassiers, il est des es¬ pèces chez lesquelles l’ongle du doigt du milieu s’élargit et se pectine. Ce fait est surtout fort saillant dans les Hérons. Une particularité des plus remarquables est celle de l’existence d’un ongle propre¬ ment dit aux membres antérieurs de cer¬ tains Oiseaux. Cet ongle, qui a son siège au poignet de l’aile , se rencontre chez les Mar¬ tinets , les Foulques , les Martins-pêcheurs, les Hirondelles de rivage , etc. Il est un at¬ tribut des jeunes, car ordinairement il dis¬ paraît chez les vieux sujets. M. de Blain- ville, à qui l’on doit la découverte de ce fait, publié par lui , en 1819, dans ie Journal de physique, t. LXXX1X , p. 156, y a yu un caractère de plus pour comparer l’aile de l’Oiseau avec la main des Mammifères. Tout en avouant ne pas connaître l’usage de ces ongles , il avait pourtant soupçonné qu’ils pouvaient servir à certaines habitudes natu¬ relles. Il est certain, d’après les recherches de M. Florent Prévost, qu’ils sont un moyen de locomotion, ou que du moins ils aident beaucoup à l’accomplissement de cette fonc¬ tion. L’Oiseau s’accroche, à la faveur de cet ongle, aux corps environnants , et exécute, comme la Chauve-Souris , une progression terrestre , très pénible , il est vrai , pour un Oiseau faible , mais rendue possible par l’organisation de son aile, dont il se sert alors comme d’une patte. Si les organes dont nous venons de parler peuvent être considérés comme de vrais on¬ gles , il n’en est pas de même de ces sortes d’étuis cornés, nommés éperons , qui enve¬ loppent les apophyses osseuses dont les tarses ou le poignet des ailes de beaucoup d’espèces sont armés. Il y a entre eux cette T. IX. différence que les uns sont mobiles, quoique fixés solidement h la peau, et que les au¬ tres , recouvrant des parties osseuses, ne sont susceptibles d’aucune espèce de mou¬ vement. On peut en dire autant des cornes ou éminences qui existent à la tête du Ka- michi, du Casoar à casque et de quelques autres Oiseaux. Enfin , nous considérerons encore comme dépendant de l’appareil de protection cette partie dure, de nature identique à celle des ongles, qui recouvre les os des mâchoires et qu’on désigne sous le nom de bec. C’est sur lui que, pour beaucoup d’orni¬ thologistes, repose principalement la classi¬ fication des Oiseaux. L’on s’est demandé si, dans les animaux plus élevés, cet organe ne trouverait pas son analogue, et tout natu¬ rellement on l’a comparé aux dents des Mammifères. On devait être conduit à cette détermination, non seulement par la nature de l’organe, mais encore par ses usages. Le bec , en effet, que l’on peut considérer sous un autre point de vue, comme faisant par¬ tie de l’appareil digestif, sert , comme les dents, à la préhension et à la trituration des aliments. Mais il était réservé à M. Geof¬ froy Saint-Hilaire de confirmer l’analogie, en démontrant que les Oiseaux, dans leur jeune âge, possédaient, non plus, il est vrai, des dents proprement dites , mais de petits noyaux cornés qui pouvaient leur être assi¬ milés; de sorte que , d’après lui, ces ani¬ maux auraient ces organes à l’état transi¬ toire ; car l’individu adulte n’en offre plus de traces sensibles. Le fait de l’existence, sur le bec de l’Oiseau , de petites masses pulpeuses, recevant des nerfs et des vais¬ seaux, impaires quant au nombre et préexis¬ tant à la formation complète de cet organe, lui a été fourni par de très jeunes Perro¬ quets et par quelques autres espèces. Le bec qui, plus que tous les autres or¬ ganes de l’Oiseau , paraît être en rapport avec son genre de vie, offre, quant à sa forme , des différences considérables, et c’est sur cette variété de formes que repose en grande partie le système de classification. Chez les uns il est courbé dans toute son étendue, chez les autres il est droit dans sa plus grande longueur, et son extrémité seule présente un léger crochet; dans ceux-ci il offre une échancrure à sa pointe , dans ceux- 3 18 OIS OIS là il est droit et comprimé horizontalement à sa base ; il en est chez lesquels il se pré¬ sente comme un cône, chez d’autres il est convexe: chez d’autres encore il est droit et fléchi en haut, vers le bout; enfin, toutes les formes possibles se retrouvent dans les becs, depuis le plus faible, le plus effilé, le plus droit, le plus anguleux, le plus cylindrique, jusqu’au plus fort, au plus recourbé, au plus obtus, au plus plat. Mais c’est surtout sous le rapport de la fonction que le bec, dans certaines espèces, offre des particularités remarquables. Si dans les uns il est organisé pour déchirer une proie , pour briser un corps dur , ou pour triturer des semences ; si la corne a, à cet effet , acquis tous les degrés de dureté convenable; chez d’autres, chez ceux qui barbotent dans la vase pour en extraire les parties nutritives qui s’y trouvent en sus¬ pension , chez ceux encore qui sondent la terre pour en extraire des vers , l’enveloppe cornée est molle et comme pulpeuse. Le bec chez ceux-ci ayant été spécialisé pour le tact, il était nécessaire que la partie enveloppante acquît plus de sensibilité en acquérant plus de mollesse, et en admettant de plus grands filets nerveux; c’est ce qui a eu lieu chez les vraies Bécasses, les Oies, les Canards. Chez ces derniers surtout, les mandibules sont pour ainsi dire crénelées, à leur face buccale, par une foule d’éminences plus ou moins pulpeuses qui simulent des dents. Les Harles, qui font leur nourriture presque exclusive de poissons vivants , et qui avaient besoin de moyens propres à retenir une proie aussi facile à s’échapper, ont ces den¬ telures excessivement prononcées et entiè¬ rement cornées. Ce n’est donc ni pour tri¬ turer ni pour mâcher leurs aliments que certains Oiseaux sont pourvus de pareilles saillies dentiformes, mais pour palper et pour retenir. Chez les Oiseaux de proie eux- mêmes, et chez tous les dentirostres , la dent plus ou moins forte que présente la mandibule supérieure ne paraît pas avoir d’autre usage. Le bec est encore, pour beaucoup d’Oi- seaux, un moyen puissant de défense ou d’attaque. C’est quelquefois la seule arme qu’il emploie contre ses ennemis ; c’est aussi le principal instrument dont il se sert pour construire le lit , souvent si admirable, qu’il prépare à sa jeune famille. Enfin , il est à remarquer que toujours , ou presque toujours, c’est par son aide que les Oiseaux dressés en cage accomplissent diverses fonc¬ tions, attirent à eux leurs aliments, etc En traitant des mœurs , nous reviendrons sur ce sujet. Comme dépendance de l’appareil de pro¬ tection ou de la peau, et comme se ratta¬ chant directement à l’organe dont nous ve¬ nons de parler , nous devons encore faire mention, en passant, de cette membrane qui enveloppe la base de la mandibule su¬ périeure des Oiseaux de proie principale¬ ment, et qui porte en ornithologie le nom de cire. Les diverses excroissances charnues qui se voient autour du bec de plusieurs espèces , par exemple du Dindon , du Coq , etc. , se rapportent encore à cet ap¬ pareil. D’après le lieu qu’occupent ces ex¬ croissances , M. Carus a été conduit à les considérer comme les analogues des tenta¬ cules qui existent dans certains invertébrés. Nous ne saurions admettre cette analogie ; car, pour qu’elle pût se soutenir, il ne fau¬ drait pas que ces caroncules se montrassent dans la généralité des cas , comme fait spé¬ cial et comme attribut du mâle seul. De la peau considérée comme siège du toucher. D’après les considérations dans lesquelles nous venons d’entrer, l’on peut déjà pré¬ juger quel doit être le développement de l’appareil dans lequel réside le sens du tou¬ cher. Sous ce rapport, les Oiseaux ont été certainement moins favorisés que les Mam¬ mifères. Chez eux, ce ne sont pas seule¬ ment les plumes dont leur corps est couvert, les écailles qui enveloppent leurs pieds , les ongles qui arment leurs doigts , la corne qui recouvre leur bec , qui s’opposent à l’action du toucher ; la transformation des membres antérieurs en ailes est encore un obstacle à la perfection de ce sens. Quel¬ ques anatomistes pensent que les appen¬ dices de la locomotion aérienne , en subis¬ sant cette transformation qu’on leur connaît, peuvent éprouver des sensations spéciales, et doivent être considérés comme des or¬ ganes de toucher pour les courants d’air. Pourtant le tact paraît ne pas être tout- OIS OIS 19 à-fait éteint chez certaines espèces; nous citerons encore les Bécasses et les Canards , dont le bec jouit réellement de la faculté de sentir les corps qui leur conviennent comme nourriture, et de savoir les recon¬ naître au seul contact. Il semblerait que les doigts des membres postérieurs, organisés assez favorablement, puisqu’ils sont composés de phalanges très mobiles , puisqu’ils sont susceptibles de pou¬ voir s’écarter les uns des autres , et puisque aussi le système nerveux qu’ils reçoivent est assez considérable, il semblerait, disons- nous , que les doigts devraient être propres à l’action du toucher; mais il n’en est rien. Affectés à la locomotion, la sensibilité en eux a été émoussée, et l’Oiseau ne s’en sert que comme d’un organe de préhension. Organes du goût. Si le toucher est obtus , si même on peut le considérer comme nul, le goût n’est pas à beaucoup près plus développé que lui. Les Oiseaux ne mâchant pas les aliments dont ils se nourrissent , et les avalant pres¬ que toujours à la hâte, il eût été facile d’en déduire , à priori , quelles devaient être les modifications qu’a dû subir chez eux l’ap¬ pareil affecté au sens du goût. L’on serait nécessairement arrivé à cette conséquence, que les membranes qui tapissent l’intérieur de la bouche et la langue devaient avoir perdu de leur mollesse, de leur consistance et de leur mobilité.Ce que la simple induc¬ tion eût conduit à admettre est confirmé par l’observation directe. En effet, lors¬ qu’on étudie anatomiquement les organes que l’on s’accorde à considérer comme pro¬ pres à percevoir la sapidité des corps , on voit que la langue, qui est le siège prin¬ cipal du goût, est en général privée de pa¬ pilles nerveuses. Elle est parfaitement lisse à sa surface , elle ne reçoit plus , comme dans les Mammifères , le rameau lingual ou gustatif de la cinquième paire , elle n’est charnue que dans un très petit nombre d’espèces, et manque par conséquent , en général, de la mollesse et de la spongiosité nécessaires pour être réellement un organe du goût. En outre, indépendamment de l’enduit cartilagineux ou corné qui revêt la langue de presque tous les Oiseaux , et qui, on doit le concevoir, est le plus grand ob¬ stacle à la perception des saveurs , un os hyoïde, souvent considérable , soutient en¬ core cet organe. Ce fait est loin de s’accorder avec un haut développement de sensibilité en elle. Les autres parties de la cavité buc¬ cale offrent une organisation plus ingrate que celle de la langue, et peu susceptible de faire admettre qu’il y ait de leur part une participation quelconque à l’exercice du sens gustatif. L’on ne saurait cependant nier que les es¬ pèces dont la langue est encore assez char¬ nue , et qui mâchent ou déchirent leur proie, comme les Perroquets et les Rapaces, n’aient le sens plus développé que celles chez les¬ quelles cet organe n’a plus ce degré de mol¬ lesse et de flexibilité, qui est une condi¬ tion nécessaire de la sensibilité. Chez les Pics, les Torcols, les Canards, la langue, bien que charnue, ne nous paraît pas propre à la gustation. Selon nous, elle serait plutôt affectée à l’action du toucher. Cette opinion pourra paraître hasardée; mais si l’on veut réfléchir à l’usage qu’en fait l’Oi¬ seau , l’on jugera des motifs qui nous la font émettre. Les Pics la dardent dans les cre¬ vasses , dans les trous, sous l’écorce des arbres , non pas pour goûter si l’Insecte , qui y est caché, leur convient, mais pour le sentir et le saisir avec cette même langue. D’ailleurs, l’enduit gluant qui l’invisque serait seul capable de s’opposer à la percep¬ tion du goût. II en est de même pour les Torcols. Quant aux Canards, il est évident que la langue, chez eux, sert à toucher les matières nutritives qui se trouvent dans la vase. Tout dans leur bec a été modifié pour une sorte de tact en rapport avec leur genre de vie. Quelques ornithologistes ont voulu juger de l’étendue du goût des Oiseaux par le choix que font quelques uns d’entre eux des fruits dont ils senourrissent. S’ils savent préférer le grain mûr à celui qui ne l’est pas ; si à côté d’un fruit yert ils choisissent celui qui ne l’est plus, c’est que, selon eux, les Oiseaux ont dans le goût un degré de finesse qui ne leur fait jamais défaut. Nous n’acceptons pas ce raisonnement. Il y a dans ce choix plus d’instinct que de goût. Ils sa¬ vent distinguer et juger ce qui leur con¬ vient, comme nous pouvons en juger nous- OIS 20 OIS mêmes. La vue et l’instinct sont pour eux des guides sûrs. La langue , dans les Oiseaux , sert encore à la déglutition ; elle est dès lors accessoire de l’appareil digestif. Elle sert aussi à l’ar¬ ticulation des sons, c’est-à-dire à la parole et au chant. L’on sait que les Perroquets , et même beaucoup d’autres espèces, comme nous le dirons plus loin, ont la faculté de pouvoir prononcer et lier ensemble plusieurs mots. Si l’imitation de la voix humaine, chez les Perroquets , est poussée si loin , c’est que presque tous les individus de cette famille ont une langue qui se rapproche le plus, par sa forme et son organisation, de celle de 1 homme. Organes de l'olfaction. S’il est vrai que les sensations soient en harmonie avec l’organe qui les perçoit , l’odorat, chez les Oiseaux, doit nécessaire¬ ment être très faible; car les narines, per¬ cées ordinairement au-dessus du bec, sont non seulement très imparfaites chez le plus grand nombre d’espèces , mais encore elles sont souvent recouvertes par des plumes, des poils, des écailles, ou par un repli charnu (1). Les molécules odorantes doi¬ vent donc rencontrer, dans la généralité des cas, un obstacle qui s’oppose à ce qu’elles puissent frapper directement la membrane sensitive qui doit les percevoir. Les autres parties de l’appareil olfactif sont, du reste, assez développées pour qu’on ait pu supposer que l’odorat, chez les Oiseaux , était encore assez parfait. Ainsi la membrane muqueuse est généralement, comme dans les Mammi¬ fères, rouge et tomenteuse; les fosses na¬ sales peu étendues , et séparées l’une de l’autre par une cloison en partie osseuse et en partie cartilagineuse, renfermant trois cornets de forme variable selon les genres, et le nerf olfactif, en général très grêle dans les Gallinacés elles Passereaux, est plus fort dans les Rapaces , les Palmipèdes, et surtout les Échassiers. En un mot, l’or- (r) Les narines ou orifices externes , par opposition aux orifices internes ou arrière-narines, offrent de nombreuses différences dans la forme et la position. Elles sont ou ron¬ des, ou ovalaires, ou linéaires, ou operculées, etc. Quant à leur position, elles sont situées à la base du ber, ou vers le milieu , sur le dos ou sur le côté , etc. Ce sont là tout autant de caractères employés en Ornithologie pour l’établissement (les genres et quelquefois des familles. ganisation de l’appareil de l’olfaction, dans les Oiseaux , différant dans la totalité assez peu de ce que les Mammifères nous présen¬ tent, il serait assez rationnel d’admettre, comme quelques naturalistes l’ont fait, que le sens de l’odorat, chez eux, peut être assez développé. Cependant nous pensons que l’on peut plus raisonnablement soutenir avec Buffon et plusieurs autres naturalistes que les Oi¬ seaux découvrent les corps qui peuvent leur être utiles, plus par le moyen de la vue que par celui de l’odorat, et que, lorsque de fort loin ils se dirigent vers une pâture, c’est le premier de ces sens qui les guide, plutôt que la perception des odeurs qui en émanent. C’est surtout aux Vautours et aux Corbeaux qu’on a fait cette réputation de sentir de fort loin les cadavres des animaux dont ils se re¬ paissent. A cet effet, on a cité un passage d’Aristote ( Histoire des animaux , liv. IX, ch. 31 ) où il est dit : qu’à l’époque où des étrangers, venus de la Médie (contrée d’Asie), périrent dans les plaines de Pharsale, les Corbeaux abandonnèrent l’Attique et le Pé- loponèse pour se porter sur le lieu du com¬ bat. C’estégalement après une bataille livrée à Pharsale que les Vautours passèrent, dit- on, d’Afrique et d’Asie en Europe pour dé¬ vorer les cadavres laissés sans sépulture. Enfin on s’est encore appuyé sur cette opi¬ nion de Pline : que les Vautours ont un odorat très étendu. Nous n’élèverons pas une discussion sur la valeur de ces faits; nous nous bornerons à leur en opposer de plus modernes, de plus complets, de mieux ob¬ servés, et qui témoignent hautement en fa¬ veur de l’opinion que nous partageons avec quelques naturalistes. Ces faits, la science en est surtout rede¬ vable à Audubon et à Lcvaillant. Ces habiles observateurs ont vu des Corbeaux et des Vau¬ tours fondre en grand nombre sur un ani¬ mal qu’on venait d’abattre, et qui ne pou¬ vait par conséquent avoir atteint un degré de putréfaction assez grand pour qu’il y eût exhalation de molécules odorantes suscepti¬ bles d’être perçues au loin. « Si un chasseur, dit Levaillant dans son voyage en Afrique, tue quelque grosse pièce de gibier qu’il ne peut emporter sur l’heure, s’il l’abandonne un moment, à son retour il ne la trouve plus ; mais, à sa place, il voit une bande de r OIS Vautours, et cela dans un lieu où il n’y en avait pas un quart d’heure auparavant. ;> Lui-même a été fort souvent la dupe de ces Oiseaux, et, pour préserver de leur voracité un animal qu’il venait de tuer et qu’il ne pouvait emporter, il était obligé de le cou¬ vrir sous un tas de branches et de feuilles , de le soustraire par conséquent à la vue de ces ravisseurs insatiables. Ce fait seul prou¬ verait que la vue, plus que l’odorat, sert aux Vautours pour découvrir une proie. Quant à cette particularité de se précipiter en foule là où gît un cadavre , elle trouve son expli¬ cation dans les habitudes et l’instinct de ces Oiseaux. Comme ils vivent le plus ordinai¬ rement rapprochés entre eux par troupes, toujours sur des lieux élevés, ou explorant de tous côtés le pays au-dessus duquel ils pla¬ nent , s’il arrive que l’un d’eux découvre quelque animal mort et qu’il fonde sur lui, les autres , avertis par ses mouvements , se hâtent également d’arriver. 11 est donc à peu près démontré aujourd'hui que la faculté dont on s’est plu à doter un peu trop large¬ ment les Vautours n’est rien moins que prouvée. Pourtant nous sommes loin de nier com¬ plètement le sens de l’odorat chez les Oiseaux; nous croyons seulement qu’il a fort peu d’é¬ tendue, et que tout ce qu’on en a dit mérite restriction, Scarpa a été conduit par ses ob¬ servations à admettre que ce sens était plus parfait chez les mâles que chez les femelles. Organes de la vision. Mais si le tact, si le goût et si l’odorat sont peu développés dans les Oiseaux, la vue et l’ouïe ont, au contraire, acquis un degré de perfection que l’on rencontre difficilement en dehors de cette classe. La vue surtout est de tous les sens qui mettent l’Oiseau en rap¬ port avec le monde extérieur, celui qui a le plus de puissance: aussi l’appareil dans le¬ quel réside ce sens offre-t-il des particulari¬ tés remarquables. D’abord ce qui frappe, lorsqu’on met à découvert les yeux d’un Oiseau, c’est le vo¬ lume de ces organes par rapport au crâne. Enchâssés dans des orbites profondes et lar¬ gement évasées, ils occupent une grande étendue des parties latérales de la tête. Ils sont généralement et proportionnellement plus grands que ceux des Mammifères. Leur UJS 21 forme, au lieu d’être globuleuse ou orbicu- laire, comme chez ces derniers, est hémisphé¬ rique. Ils offrent en outre ceci de très cu¬ rieux, qu’à la demi-sphère représentée par la partie postérieure des globes oculaires, est adaptée une demi sphère plus petite. Un caractère remarquable de cette partie de l’œil qui, chez tous les vertébrés, porte le nom de sclérotique, est d’être soutenue au niveau et autour de la cornée transparente par un cercle de pièces osseuses ou cartila¬ gineuses dont le nombre et la disposition va¬ rient, mais qui toujours, en s’imbriquant les unes sur les autres, forment une sorte de cylindre ou d’anneau assez dur et résistant. Cet anneau constitue, conjointement avec la cornée qui est adaptée à son extrémité, la demi-sphère antérieure de l’œil. Les autres parties, telles que la choroïde, l’iris et la rétine, n’offrent rien de bien remarquable à noter. Voy., du reste, l’article oeil. Un organe qui semblerait n’appartenir qu’aux Oiseaux, et qui a donné lieu à bien des conjectures sur la nature et sur les fonc¬ tions qu’il est destiné à remplir, est celui auquel on a donné le nom de peigne ou de bourse noire. M. Giraidès, dans un excellent mémoire sur l’organisation de l’œil, a consi¬ déré le peigne, dont la structure est cellulo- vasculaire, comme un grand procès ciliaire. La forme de cet organe est généralement carrée et lamelleuse. Cependant chez le Ca- soar, l’Autruche, la Hulotte, etc., elle prend l’apparence d’une bourse conique. Comme le peigne prend naissance à la face interne du nerf optique pour se porter de là jusqu’au cristallin , à la partie postérieure duquel il paraît s’attacher, quelques anatomistes ont cru voir en lui un organe créé pour un but physique. Ils ont dit qu’il était pour l’Oiseau un agent qui lui donnait la faculté de recu¬ ler ou d’avancer le cristallin, et d’habituer par conséquent son œil aux distances. Cette faculté semble, en effet, être chez les Oiseaux très développée; mais est-elle due à la parti¬ cularité d’organisation que nous venons de signaler? Nous n’oserions l’affirmer. Quant aux parties accessoires qui concou¬ rent encore à compléter l’appareil de la vision dans la classe des Oiseaux, elles ne présentent rien de bien remarquable à indiquer; pres¬ que toutes , l’humeur vitrée , l’humeur aqueuse, les muscles, les glandes lacrymales, 22 OIS OIS rappellent ce qui existe chez les Mammifères. Un seul fait essentiel à signaler est celui de l’existence d’un troisième voile palpébral. Tous les Oiseaux, indépendamment des deux paupières horizontales, l’une supérieure, l’autre inférieure, ont encore une troisième membrane palpébrale ou clignotante, placée verticalement sous celles-ci (1). Cette troi¬ sième paupière consiste en un repli fort étendu de la conjonctive, transparent, situé obliquement à l’angle nasal de l’œil, de forme triangulaire, et dont le bord libre est oblique de haut en bas et de dehors en de ¬ dans, du moins quand elle est étendue ; car, dans l’état de repos, cette membrane se plisse verticalement dans l’angle de l’œil. Par l’ac¬ tion d’un muscle spécial (le pyramidal), la membrane clignotante ou nyctilante comme on l’a encore appelée peut être déroulée ou tirée comme un rideau au-devant de l’œil, et servir par conséquent, soit à nettoyer cet organe et à le débarrasser des corpuscules qui seraient venus s’y fixer, soit à le proté¬ ger contre l’action trop violente de la lumière en diminuant par sa présence l’intensité des rayons lumineux. On ne saurait se refuser à reconnaître que ce ne soit aussi à l’existence de cette troisième paupière que les Oiseaux de proie doivent la faculté de pouvoir regar¬ der fixement le soleil , faculté dans laquelle le vulgaire a vu quelque chose qu’il n’a pu s’expliquer, et de laquelle sont nées des in¬ terprétations fausses et le plus souvent su¬ perstitieuses. Il paraîtrait aussi que c’est pour affaiblir la trop grande activité de la lumière que quelques espèces d’Oiseaux ont leur pu¬ pille susceptible, comme celle des Chats, de se contracter ou de se dilater plus ou moins, selon que la lumière est plus ou moins vive. Les Oiseaux de proie nocturnes sont générale¬ ment dans ce cas. On se tromperait si l’on croyait que tous les Oiseaux ont l’organe de la vision déve¬ loppé au même degré. Chez eux, il est vrai, on ne trouve pas de différences essentielles; mais il en est quelques unes qui sont assez intéressantes pour que nous devions les si¬ gnaler. Ces différences , toutes spéciales , (i) On ne peut citer qu’une exception à ce fait. Il pa¬ raîtrait, d’après M. Linddel ( Trans. of the nat. history, Societi of TSorthumberland , vol. I , part, i , p. 3 ) , que le Bondrée ( Falco apivorus ) serait privé de cette troisième paupière: c’est ce que nous n’avons pu vérifier. sont en rapport ou avec le mode de nourri¬ ture, soit pendant le jour, soit durant la nuit, ou, avec le séjour habituel des Oiseaux. Ainsi ceux qui se nourrissent de proie vi¬ vante, qu’ils chassent et poursuivent de vive force, ont, en général, l’organe de la vue le plus développé, et par conséquent le plus par¬ fait. Nous ne prétendons pas parler ici seu¬ lement des Oiseaux de proie proprement dits dont tout le monde connaît la puissance vi¬ suelle ; pour nous, ceux-là se nourrissent aussi de proie vivante qui chassent les In¬ sectes au vol, et ceux-là n’ont pas moins été favorisés par la nature sous le rapport de la vue ; car si nous sommes surpris que le Ho¬ bereau ou l’Émerillon aient pu apercevoir d’assez loin le Campagnol ou l’Alouette qui couraient dans l’herbe , nous devons l’être également lorsque nous voyons un Gobe- Mouche s’élancer sur le Moucheron qui vole, l’Hirondelle happer, sous nos yeux, la Mou¬ che qu’elle avait déjà distinguée, ou le Mar¬ tinet dont la vue est tellement perçante qu’il peut, si nous en croyons Spallanzani, dis¬ tinctement apercevoir un objet de 5 lignes de diamètre, à la distance de plus de 300 pieds. Les Oiseaux crépusculaires , ou ceux qui cherchent leur nourriture lorsque le soleil vient de disparaître à l’horizon, ont propor¬ tionnellement les plus grands yeux. La ré¬ tine , chez eux , est très sensible , et suscep¬ tible de sentir une petite quantité de rayons lumineux ; leur pupille peut aussi se dilater grandement : de sorte qu’il y a dans l’œil de ces espèces une combinaison et une mo¬ dification admirables, pour que, à la faveur d’une lumière faible, l’animal puisse aper¬ cevoir sa proie. Ce qui paraît apporter le plus de diffé¬ rences dans l’appareil de la vision chez les Oiseaux , c’est la densité du milieu dans le ¬ quel chacun d’eux est appelé à vivre. Depuis l’Aigle qui s’élève dans les airs jusqu’au Manchot qui a des habitudes essentiellement aquatiques; depuis les espèces terrestres, telles que les Gallinacés, jusqu’à celles qui s’y rendent quelquefois , comme certains Échassiers et certains Palmipèdes , on peut observer des différences caractéristiques , surtout dans la forme du cristallin. Nous dirons enfin , d’une manière géné¬ rale , que l’étendue de la vue, chez les Oi¬ seaux , paraît être en raison directe de la OIS OIS 23 vitesse du vol. Ceux chez lesquels la locomo¬ tion aérienne est active sont ceux aussi dont la vue a acquis le plus d’acuité. La néces ¬ sité pour l’Oiseau d’avoir , avec un vol ra¬ pide, direct et soutenu, une vue excellente, est un fait qui n’a pas d’exception. Il sem¬ blerait même que, dans la nature , l’une de ces facultés ne peut exister sans l’autre. Organes de l’audition. Bien que chez les Oiseaux on ne rencontre pas ce que l’on appelle une conque auditive, c’est-à-dire un organe propre à colliger les sons, l’on peut dire qu’après la vue , l 'ouïe est, chez eux, le sens qui a acquis le plus de finesse. Comme preuve, nous ne citerons pas seulement la facilité avec laquelle la plupart retiennent les airs qu’on leur ap¬ prend et même des paroles ; nous ne verrons pas non plus dans le plaisir qu’ils trouvent à chanter continuellement, à gazouiller sans cesse, le seul indice d’un sens perfectionné; mais prenant des caractères plus généraux , susceptibles de pouvoir être appliqués à toute cette classe , nous donnerons encore comme preuve de l’excellence du sens de l’ouïe, dans les Oiseaux, la faculté qu’a cha¬ que espèce de pouvoir distinguer de fort loin le chant ou les cris d’appel de son espèce , lorsque les chants ou les cris d’appel d’une foule d’autres Oiseaux se font entendre en même temps. Ils paraissent être plus parti¬ culièrement affectés des sons qui leur sont connue ; ils les perçoivent, bien que faibles et couverts par mille autres sons , avec une facilité presque incroyable. L’appareil auditif en lui-même n’offre de remarquable que sa simplicité, relativement à ce qu’on connaît dans l'Homme. Nous avons déjà noté que les Oiseaux sont dépour¬ vus de conque auditive , à moins qu’on ne considère comme telle la valvule membra¬ neuse que l’on distingue dans l’oreille des Hiboux et des Chouettes , ce que quelques anatomistes sont portés à admettre. Nous dirons encore qu’on ne trouve plus, comme dans les Mammifères , de limaçon propre¬ ment dit ; un petit tube terminé par un cul- de sac en tient lieu. La chaîne des osselets est également dans une disposition diffé¬ rente , et tend à passer aux organes de dé¬ glutition. Enfin les canaux demi-circulaires, au nombre de trois, deux à peu près verti¬ caux et l’autre horizontal , s’étendent dans le crâne, et sont environnés de nombreuses cavités aériennes en communication avec la caisse du tympan. De tous les Oiseaux, ceux qui se nourris¬ sent de proie qu’ils chassent durant la nuit ont l’appareil de l’audition le plus perfec¬ tionné. Quelques physiologistes ont prétendu qu’en général le sens de l’ouïe, dans les Oiseaux, est plus étendu que celui des Mam¬ mifères. Cette opinion est susceptible d’être controversée. Si les Oiseaux, dans beaucoup de cas, peuvent percevoir un son à une dis¬ tance considérable et telle qu’il serait im¬ possible à un Mammifère d’entendre , c’est que les premiers se meuvent dans un mi¬ lieu où le son peut leur arriver sans obsta¬ cles , tandis que les seconds vivent habituel • lement dans des lieux qui empêchent celui- ci de se propager, de se transmettre, et, par conséquent , d’être perçu de fort loin. Un Oiseau qui repose à terre ou sur l’arbre de la forêt, celui dont le vol est bas, entendra certainement à des distances bien moins grandes que cet autre qui s’élève au haut de l’air : c’est ce dont il est facile de se con¬ vaincre. Lors du passage annuel, qui a lieu ordinairement en septembre et octobre, il arrive fréquemment que la prévision d’un mauvais temps est cause que les Oiseaux vo¬ lent en rasant presque la terre; d’autres fois c’est le vent qui les force à s’abaisser ainsi : or, dans ces cas, il est rare de les voir se rendre à la voix qui les appelle ; il faut qu’ils en soient bien rapprochés pour obéir à cette voix. Lorsqu’au contraire le ciel leur présage une belle journée , lorsqu’ils tien¬ nent les hautes régions de l’atmosphère, on les voit alors , quelque élevés qu’ils soient , se rendre aux cris d’appel. Comment expli¬ quer ce fait, qui, nous le répétons, se pré¬ sente fréquemment, si ce n’est par les cir¬ constances de position qui ont servi plus ou moins favorablement l’ouïe de l’Oiseau ? Dans un cas, nul obstacle ne s’opposait à ce que la voix des appelants arrivât jusqu’à lui; et dans l’autre , son vol près de terre ne lui permettait pas de recueillir les sons ni aussi nettement, ni d’aussi loin, et ce qui le prouve , c’est que si la distance qui sépare celui-ci de ceux qui le sollicitent est assez peu grande, on le voit se rendre à ses cris. 24 OIS OIS Pour nous , il resterait donc à décider si les Oiseaux ont l’ouïe plus étendue que les Mammifères. Il est probable que si l’on pla¬ çait ces derniers, ceux du moins qui ont ce sens convenablement développé , dans les mêmes circonstances, on verrait qu’ils ne le cèdent en rien , sous ce rapport, aux ani¬ maux dont nous faisons l’histoire , puisque ceux-ci , placés près de terre , paraissent ne pas mieux entendre qu’un Mammifère. Tels sont les sens qui mettent l’Oiseau en rapport avec le monde extérieur, par consé¬ quent aussi avec ses semblables , et qui le déterminent à agir de telle ou telle manière; Mais, pour que l’action s’accomplisse, pour qu’il y ait mouvement ou déplacement de la part d’un animal, il faut des organes propres à l’exécuter ; ce sont ces organes que nous allons succinctement passer en revue. § II. Des organes locomoteurs. Sous le rapport de la locomotion, il n’y a pas, dans toute la classe des Vertébrés , un seul être qui puisse être comparé aux Oi¬ seaux. Le Reptile, lourd et pesant, est con¬ damné, par son organisation ingrate, à se traîner assez lentement sur le sol; le Pois¬ son peut, il est vrai, en raison du milieu dans lequel il est plongé, parcourir de gran¬ des distances avec une vitesse extrême; le Mammifère est capable aussi de franchir en peu d’instants de longs intervalles; mais rien n’égale la célérité et la durée de mou¬ vement de l’Oiseau. Favorisé par des moyens locomoteurs puissants, plongé dans un mi¬ lieu qui offre peu de résistance, lui seul peut parcourir vingt lieues à l’heure. Buffon a comparé la vitesse des Oiseaux avec celle des Mammifères , et il a constaté que les meil¬ leurs coureurs parmi ceux-ci, par exemple, le Cerf, l’Élan, le Renne, le Cheval, ne peuvent faire que 5 ou 6 lieues à l’heure , et tout au plus 40 dans la journée, en suppo¬ sant, toutefois, que leurs forces leur per¬ missent de fournir, sans interruption, une aussi longue carrière. Or, dit-il , la vitesse des Oiseaux est bien plus grande; car, en moins de 3 minutes, on perd de \ueun gros Oiseau , un Milan qui s’éloigne , un Aigle qui s’élève et qui présente une étendue dont le diamètre est de plus de 4 pieds; d’où l’on doit inférer que l’oiseau parcourt plus de 753 toises (1465 mètres) par minute. In¬ voquant ensuite ces faits : qu’en Perse , au rapport de Pietro Délia Valle, le Pigeon messager fait en un jour plus de chemin qu’un homme de pied ne peut en faire en six; qu’un Faucon de Henri II, s’étant em¬ porté après une Outarde canepetière, à Fon¬ tainebleau, fut pris le lendemain à Malte; qu’un autre Faucon des Canaries, envoyé au duc de Lerme, revint d’Andalousie à l’île de TénérilTe en seize heures, ce qui fait un trajet de 250 lieues; s’appuyant enfin sur ce que dit Ilans Sloane : qu’à la Barbade, les Mouettes vont se promener en troupes à plus de 200 milles de distance, et qu’elles reviennent le même jour; il conclut , de la combinaison de ces faits, qu’un Oiseau de 4iaut vol peut parcourir, dans la journée , quatre ou cinq fois plus de chemin que le Mammifère le plus agile. D’ailleurs, le vol étant le principal mode d’action, le plus important des mouvements de l’Oiseau, tout, chez lui, contribue à le rendre facile. D’abord, c’est, comme nous l’avons établi plus haut, un corps favorable¬ ment construit, des plumes d’une légèreté remarquable ; puis, ce que nous allons suc¬ cessivement voir, une disposition générale qui permet à l’air de pénétrer presque tout l’organisme. Les organes à la faveur desquels l’Oiseau exécute ses mouvements sont de deux ordres, comme dans tous les Vertébrés : les uns , considérés comme leviers , sont passifs; les autres déterminent l’action; ils sont actifs et constituent les puissances. Nous entre¬ rons, à l’égard de ces organes, désignés d’une manière générale sous les noms d’os et de muscles , dans quelques considérations plutôt physiologiques qu’anatomiques. •Des os (partie passive de la locomotion). Les os, si lourds dans les autres Verté¬ brés , et remplis d’une substance huileuse qui ne contribue nullement à en diminuer le poids, non seulement sont presque tous vides dans les Oiseaux (1), mais de vastes cellules aériennes les parcourent encore en tous sens. Il n’est pas jusqu’à ceux de la (i) Dans le jeune âge pourtant , ils sont remplis île sub¬ stance médullaire, qui se résorbe peu à peu, pour être icm- placée, chez l'adulte, par un vaste creux qui régne dans toute l’étendue de l’os. OIS OIS 25 tête qui ne présentent ce caractère. En effet, on est surpris de voir, non seulement chez les espèces dont le crâne est le plus mince, mais encore chez celles dont le bec est dé¬ mesurément gros, comme celui des Toucans, ou dont la tête est surmontée d’énormes éminences osseuses, comme dans les espèces du genre Calao (1), on est, disons-nous, surpris de voir un diploé d’autant plus vaste que les os ou les protubérances os¬ seuses sont plus forts, contribuer considéra¬ blement à leur donner celte apparence vo¬ lumineuse. Cette organisation a pour but, on ne saurait le nier, de donner à l’Oiseau un degré de plus de légèreté. Non seule¬ ment son poids se trouve diminué par ce fait, mais encore l’air, et surtout l’air res¬ piré, rendu plus léger parce qu’il contient alors une plus grande quantité d’azote, en pénétrant dans la cavité des os, contribue encore à alléger le corps de l’Oiseau. Ce qui prouve, du reste, que telle est la destination des cavités osseuses , c’est que , chez les es¬ pèces dont le vol est pénible ou nul, les os n’offrent que peu ou point cette structure celluleuse. La locomotion, dans les Mammifères, les Sauriens, les Ophidiens et les Poissons, s’exé¬ cute plus ou moins à la faveur de la colonne vertébrale; dans les Oiseaux, il n’en est plus de même. Chez eux, il y avait exigence physiologique pour l’immobilité complète d’une série de vertèbres ; il fallait qu’elles prê¬ tassent un point d’appui solide aux membres qui exécutent le mouvement; aussi forment- elles, en se soudant, un levier inflexible. Cette disposition est surtout très prononcée dans les Oiseaux voiliers (2). Pourtant la (1) Nitzscli ( Archiv fiïr anat. und physiol., 1826, 4e cah., p. 618) a fait sur le squelette des Calaos cette observation assez remarquable, que les os qui sont médullaires chez tous les autres Oiseaux , se trouvent être aériens chez eux, et vice versa , des os aériens chez beaucoup d’Oiseaux sont remplis de moelle chez les Calaos. Sur le squelette du Bu- ceros e>ythrorhynchus (Briss,) il a trouvé , non seulement les os de la tète et surtout du bec, toutes les vertèbres du cou , les os iliaques , les trois dernières vertèbres caudales , les humérus et les fémurs pourvus de cavités aériennes, mais aussi tous les autres os des membres antérieurs et posté¬ rieurs. Les vertèbres dorsales , les côtes , le sternum , les omoplates, etc. , qui sont aériens chez beaucoup d’Oi¬ seaux , n’offrent chez les Calaos aucune trace de cette orga¬ nisation. (2) Dans le vieux Coq , les vertèbres dorsales finissent également par se souder depuis les vertèbres du cou jus¬ qu’aux veitèbres sacrées; c’est au point, même que les muscles s’atrophient et que les tendons s’ossifient, lorsque, T. IX. colonne vertébrale n’est pas immobile dans toute son étendue; les vertèbres dorsales et sacrées sont seules soudées ensemble. Celles du cou, dont le nombre varie de 9 à 23 , peuvent être mues dans tous les sens (3). Une erreur que nous devons signaler est celle qui veut que la longueur du cou , dé¬ terminée par le nombre ou l’étendue des vertèbres qui composent cette région, soit toujours* en rapport avec la longueur des jambes. Les auteurs qui ont émis cette pro¬ position n’ont eu sans doute en vue que quelques espèces d’Échassiers , tels que les Grues, les Cigognes, les Hérons, chez les¬ quels il y a harmonie entre la longueur de la région cervicale et celle des membres pos¬ térieurs ; mais combien d’espèces ne trouve- t-on pas, qui, avec des jambes fort courtes, possèdent un cou très long, ou d’autres, qui , avec un cou court , ont les jambes fort longues? Nous nous bornerons à citer deux exemples, dont tout le monde pourra ap¬ précier la valeur. Qui n’a été frappé de la longueur qu’offre le cou du Cygne? pour¬ tant ses pieds sont excessivement courts. Qui n’a vu l’Échasse, dont le cou contraste si bien avec l’étendue, proportionnellement démesurée, des membres qui lui ont valu le nom qu’elle porte? D’où vient que ces Oiseaux (et nous pourrions en indiquer beaucoup d’autres) sont , par leur organisa¬ tion , si manifestement en dehors d’une loi que l’on croyait applicable à toutes les es¬ pèces? Nous le répéterons encore : c’est que la nature a fourni à chaque être des moyens en rapport avec ses besoins. Le Cygne, dans sa vie aquatique, cherchant sa nourriture au fond de l’eau, devait avoir un cou long, afin d’atteindre les bas fonds ; et l’Échasse, trouvant ordinairement la sienne à la sur¬ face du même élément, avait besoin, non pas qu’un grand nombre de vertèbres cervi¬ cales vînt augmenter l’étendue de cette ré¬ gion , mais, au contraire, que les os des membres postérieurs prissent le plus grand développement possible en longueur, afin qu’ils fussent un moyen pour cet Oiseau , les vertèbres se soudant entre elles, le mouvement est de¬ venu impossible. (3) Cependant Nitzsch ( loc . cit , p. 618) a constaté que chez les Buceros Abyssinicus, plicatus, Malabaricus, coro- natüs et nasutus , les deux premières vertèbres cervicales sont constamment confondues en une seule pièce, et par conséquent immobiles. 4 26 OIS OIS qui passe sa vie sur les rivages, de s’avancer jusqu’à une certaine distance dans l’eau. Ces deux exemples suffiront pour démontrer que cette prétendue loi, qui veut que la longueur du cou soit proportionnée à celle des jambes, n’est pas absolue. Nous admet¬ tons pourtant que c’est là un fait général , mais nous sommes loin de vouloir en faire une règle , que des exceptions nombreuses , et telles que celles que nous venon£ de citer, détruisent infailliblement. Après les vertèbres cervicales, celles dont se compose le coccyx jouissent encore d’une certaine mobilité. On conçoit qu’il doive en être ainsi , surtout dans les Oiseaux voiliers ; car les pennes qui les dirigent dans le vol s’attachant sur cette partie , il devenait né¬ cessaire qu’elles ne fussent pas entièrement fixes pour que leur mouvement favorisât ce¬ lui qu’exécutent les rectrices dans l’action de la locomotion aérienne. Les vertèbres coc- cygiennes, dont le nombre varie de huit à dix , offrent encore ce caractère remarqua¬ ble , qu’au lieu de diminuer insensiblement de la première à la dernière , comme dans les Mammifères, elles conservent à peu près le même volume jusqu’à la dernière , qui s’élargit tout à coup, acquiert le plus de dé¬ veloppement, et présente des crêtes saillan¬ tes pour l’attache des muscles et pour l’in¬ sertion des pennes. Cependant dans les Manchots et les Grèbes , dont la queue est très faible, pour ne pas dire nulle , les ver¬ tèbres vont en diminuant, la dernière étant quelquefois réduite à un petit os conique , comme cela se voit d’ailleurs d’une manière bien plus saillante dans les espèces du genre Autruche. Mais un perfectionnement qu’offre seul le squelette des Oiseaux , est celui qui est re¬ latif à la disposition du thorax. Les côtes et le sternum concourent à le former, comme dans les Vertébrés supérieurs. Il est vaste, jouit d’une mobilité excessive, et, de plus, a acquis un degré de solidité remarquable par la réunion des côtes entre elles au moyen de petites apophyses osseuses. Ce qui con¬ tribue encore à rendre le thorax solide, c’est que les vertèbres dorsales , ainsi que nous l’avons déjà indiqué, sont soudées ensemble, et que la pièce sternale qui concourt à le former est composée d’un seul os. Toute l’action , pendant le vol , se concentrant sur cette partie, il devenait nécessaire qu’il y eût harmonie entre elle et les forces qui de¬ vaient se produire. Aussi voyons- nous les Oiseaux qui ne volent pas , tels que le Ca- soar, l’Autruche, l’Émou, etc., avoir !e sternum dépourvu de cette crête osseuse qu’on nomme brechel, et qui sert à l’inser¬ tion des principaux agents de la locomotion aérienne, c'esi-à-dire aux muscles pecto¬ raux. Chez eux le plastron sternal n’a plus cette grandeur extraordinaire que présente celui des Colibris, des Martinets, des Engou¬ levents , que l’on sait être d’excellents voi¬ liers ; il est étroit, affecte une forme bom¬ bée en avant, et les apophyses qui contri¬ buent à consolider les parois latérales de la cavité thoracique sont minces et grêles. Cette dégradation , si l’on peut ainsi appeler une modification dont le but est physiologique , se fait remarquer déjà dans plusieurs Échas¬ siers au vol pesant et lourd , et dans un grand nombre de Gallinacés. Mais une par¬ ticularité qui aurait lieu d’étonner , si elle n’était expliquée par les mœurs de l’Oiseau, est celle que fournit le sternum des Man¬ chots. Sous le rapport de son développement, il ne le cède presque en rien au sternum des meilleurs voiliers. Cette exception apparente est due à l’usage que cette espèce fait des membres antérieurs pour la natation ; et ce qu’il y a de remarquable, c’est que ces mem¬ bres sont pourvus d’une sorte de rotule propre à rendre cet acte plus facile. Chez les Oiseaux marcheurs ou coureurs, les parties postérieures se sont développées en raison inverse des parties antérieures. Si, chez eux, le sternum et tous les os attenants ont pris un caractère de faiblesse, s’ils ne sont plus pourvus de ces clavicules fortes, solides et élastiques, qui servent à favoriser la locomotion aérienne, en se détendant comme un arc et en repoussant les ailes lors¬ que celles-ci, pendant l’action du vol , sont rapprochées du corps par les puissances mus¬ culaires ; si, chez eux aussi, l’omoplate, l’humérus, les os de l’avant-bras et ceux de la main, comparés à ceux des Oiseaux de proie, des Pétrels, des Frégates, se trouvent, comme dans l’Aptéryx austral, l’Autruche et le Casoar, réduits à leur plus simple expres ¬ sion, l’on peut dire que, par compensation, leurs membres postérieurs et leurs dépen¬ dances ont, plus que dans les Oiseaux voi- OIS OIS lieis, acquis un degré de solidité remarqua¬ ble. Chez eux , les os du bassin offrent des surfaces plus vastes , des dépressions plus profondes et des saillies plus grandes pour l’attache des muscles ; les os des jambes sont gros, forts et solides; il y a donc, sous ce rapport, antagonisme entre les membres an ¬ térieurs et les postérieurs; les uns sont dé¬ veloppés en raison inverse des autres. Ce fait, qui paraît être général, n’est pour¬ tant pas absolu ; caron trouve que les espèces qui se servent du membre postérieur pour saisir une proie ou pour se retenir à des corps, ont le squelette de cette partie pres¬ que aussi perfectionné que celui duquel dé¬ pend la puissance du yoI. Nous devons cepen¬ dant citer ici un cas en apparence exception¬ nel, surtout si l’on n’a égard qu’à la longueur des parties osseuses, et ce cas nous conduira •à réfuter une opinion émise par plusieurs or¬ nithologistes. Nous voulons parler du peu d’étendue que présentent en même temps les os de l’aile et ceux de la jambe des Mar¬ tinets et des Colibris. On est étonné de voir combien sont courtes les parties solides de ces deux membres ; mais, lorsqu’on vient à les comparer attentivement, on constate que les os des ailes, bien que courts, sont larges, forts et parsemés d’aspérités saillantes, tandis que ceux des jambes sont faibles et grêles; en outre, le sternum, les clavicules, les omo¬ plates, annoncent un vol énergique, pendant qu’au contraire les os du bassin portent avec eux un caractère de faiblesse qui indique combien peu ces Oiseaux font usage de leurs membres postérieurs. D’ailleurs les organes accessoires de la locomotion aérienne, les pennes alaires , par leur développement et leur disposition, sont un type de perfection. C’est parce que tout le monde connaît la ülesse avec laquelle le Martinet vole que nous le choisissons pour exemple, afin de. démontrer que la rapidité du vol ne coïncide pas toujours avec une aile vaste, large et dont les leviers sont longs , ce qu’ont prétendu quelques naturalistes , mais bien avec une aile étroite et des os excessivement courts. La grandeur de l’aile indique une grande étendue dans le vol; l'Oiseau peut se soute¬ nir dans les airs longtemps et sans efforts; sa progression peut même quelquefois être rapide, comme celle de l’Albatros ; mais c’est ordinairement avec des leyiers courts que l’action est prompte, et, plus ils le sont, plus la rapidité est grande. Voyez, en effet, le Martinet : avec quelle vélocité ne fend-il pas l’air î Cependant ses membres antérieurs sont excessivement réduits, mais ils sont forts et servis par des muscles puissants. Les Oiseaux-Mouches, qui ont reçu une organisa¬ tion à peu près semblable à celle des Marti¬ nets, volent, au dire des voyageurs, avec la rapidité de l’éclair. Nous n’entrerons pas dans de plus longs détails au sujet du squelette des Oiseaux ; nous laissons à l’anatomie le soin de discuter les autres points, et nous renvoyons par con¬ séquent au mot général squelette. Des muscles ( partie active de la locomotion). Quant aux muscles sur lesquels nous n’a¬ vons que fort peu de choses à dire, ils jouis¬ sent, en général, d’une contractilité extrême, et ont un caractère qui se rattache d’une manière intime à celui de l’organisation gé¬ nérale. En effet, avec une circulation rapide d’un sang très chaud et riche en oxygène, avec une respiration vive et étendue, enfin avec un perfectionnementnotabledusystème nerveux, le système musculaire ne pouvait qu’acquérir le caractère qui le distingue. La fibre qui compose les muscles, sèche et ferme, est d’un rouge intense qui fait op¬ position à la couleur blanche nacrée des tendons qui la terminent. Ce qui est d’une importance physiologique digne d’être notée, c’est que, à l’exception des Oiseaux de basse- cour, de ceux que l’homme a soumis pour ses plaisirs ou ses besoins, on voit peu, dans les interstices musculaires, de ces couches épais¬ ses de tissu cellulaire que l’on rencontre as¬ sez souvent chez les Mammifères. Le mouvement développant les organes en raison inverse de l’inertie, et les Oiseaux étant , de tous les êtres , ceux qui paraissent le plus constamment agités , il eût été facile d’en déduire le grand développement des muscles. Mais de plus, en faisant l’appli¬ cation de ce principe aux diverses parties de l’Oiseau , on peut juger quelles sont celles qui , pour l’accroissement qu’elles ont pris, dominent les autres. Nous venons de voir que , chez les Oiseaux voiliers, l’appa¬ reil osseux qui concourt à l’exécution du vol a acquis un degré de solidité que n’of¬ frent pas chez les mêmes Oiseaux les mem- 28 OIS OIS bres postérieurs , condamnés , pour ainsi dire, à l’inaction; or, il en est de même pour les muscles. Les pectoraux étant les principaux agents de la locomotion aérienne, sont chez eux forts et puissants. Les Man ¬ chots , qui nagent au moyen de leurs deux paires de membres , et chez lesquels par conséquent tout le système musculaire est mis continuellement en activité, ont égale¬ ment les muscles pectoraux très développés. Le fait inverse se rencontre chez les Cou¬ reurs; les parties osseuses et charnues de la poitrine sont comme atrophiées , tandis que chez eux les muscles de la ceinture et des appendices postérieurs ont pris un accrois¬ sement prononcé. Mais en outre de cet ac¬ croissement, indice d’une progression ter¬ restre très énergique, le tissu fibreux des muscles de la jambe est envahi par un dé¬ pôt de matière calcaire , qui se dispose sous forme de lames osseuses, lesquelles lames, en augmentant la densité des organes dont elles font partie , sont encore une disposi¬ tion favorable à l’action des puissances (1). Des divers modes de locomotion des Oiseaux. Les divers modes de locomotion des Oi¬ seaux sont la progression terrestre ou la course, le saut et la marche; l’action de grimper, qui s’exécute, soit à la faveur d’une direction particulière imprimée aux doigts , soit au moyen du bec ; la natation , qui s’ef¬ fectue au moyen des membres postérieurs organisés favorablement pour frapper l’eau; l’action de plonger , qui , d’après Carus , doit résulter autant de la compression des cellules aériennes que de la direction que l’Oiseau donne à ses pattes ; et enfin , le vol. Celui-ci , le plus important de tous, s’exécute par les chocs successifs que les ailes impriment à l’air. Les Oiseaux, après s’être élevés , se dirigent dans l’espace à l’aide des plumes de la queue , qui agissent comme le gouvernail d’un vaisseau , et en diminuant aussi le mouvement de l’une ou de l’autre aile; ils planent en étalant largement les rémiges et les rectrices, et en remplissant d’air leurs cellules aériennes, et ils se pré¬ cipitent, ils fondent sur un objet avec plus (i) Ces lames osseuses , dont nous parlons, sont à la con¬ naissance de tout le monde ; car il n’est sans contredit per¬ sonne qui n’ait constaté leur présence dans cette partie du Poulet, de la Perdrix ou de la Dinde, que l’on nomme vul¬ gairement, mais fort improprement la cuisse. ou moins de rapidité en comprimant ces mêmes cellules, en rapprochant les ailes du corps e* en les laissant dans l’inaction. § III. Organes relatifs aux phénomènes de LA RESPIRATION ET DE LA CIRCULATION. De la respiration. S’il est une fonction qui , chez les Oiseaux, domine toutes les autres, c’est sans con¬ tredit la respiration. Elle est, chez eux, plus étendue que dans aucune autre classe d’animaux, et est devenue en quelque sorte générale, puisqu’elle s’exécute dans presque toutes les parties du corps de l’animal ; chez eux , il n’y a plus de diaphragme pro¬ prement dit pour déterminer la limite des cavités thoracique et abdominale. De ce mus¬ cle, vaste et si caractérisé chez les Mammi¬ fères, il n’existe plus sur les parties laté¬ rales du corps que de petits faisceaux de * nature fibreuse plutôt que musculeuse. Il y a donc , chez les Oiseaux , communication entre les organes respiratoires et les viscères abdominaux. L’air pouvant donc pénétrer dans toutes les parties , même dans les os , conme nous l’avons déjà dit , il y a , si nous pouvons nous servir d’une expression qui ca¬ ractérise un état pathologique , emphysème de presque tout le corps de l’Oiseau. Mais procédons à l’examen que nous avons à faire des parties qui concourent à former l’ensemble de l’appareil respiratoire des Oi¬ seaux, de manière à apprécier successive¬ ment tous les faits par lesquels s’accomplit la respiration. Nous négligerons de parler des cavités naturelles que l’air traverse lorsqu’il est ex¬ piré et respiré , c’est-à-dire des fosses na¬ sales et de la bouche , pour ne nous occuper que de l’appareil essentiel de la respiration. Comme dépendance de cet appareil , nous parlerons d’abord de la trachée-artère , dont la disposition présente quelques par¬ ticularités remarquables. Ce qui frappe d’abord dans la trachée- artère, examinée chez certaines espèces, c’est son excessive longueur par rapport à celle du cou. Chez les mâles de ces espèces, son étendue est si grande qu’elle forme di¬ vers replis , qui , au lieu de se loger , comme il semblerait que cela dût être, dans l’in¬ térieur du thorax , se placent dans l’épais¬ seur même de la crête du sternum développé OJS OIS 29 considérablement à cet effet. Ce fait se ren¬ contre chez les Cygnes chanteurs ( Cyc . Ca- norus) et Berwick (Cyc. Bcrioickii) , chez la Grue cendrée ( Gr. cinerea ) et chez la Demoiselle de Numidie ( Anthr . virgo) ; chez d’autres, ces flexuosités sont moins grandes, la trachée étant plus courte, et elles sont seulement placées alors sous le jabot, dans une cavité creusée au point de réunion des branches osseuses qui consti¬ tuent la fourchette ; c’est le cas de la Pin¬ tade coronal de l’Afrique ( Numidia cristata ) ; chez d’autres , enfin , elle est assez longue pour former des anses qui ne se logent plus ni dans la crête sternale , ni sous le jabot , mais au-devant de la poitrine entre la peau et les muscles pectoraux ; ce cas se présente chez la Phonigame et chez VAnas semi-pal- mata. La trachée de ce dernier se replie jusqu’à quatre fois sur les muscles de la poitrine. La structure de la trachée est également fort remarquable. De véritables anneaux presque entièrement osseux, séparés par de larges intervalles , de manière à pouvoir ai- sèment être mus et changer de volume pour produire toutes les modulations de la voix; des muscles nombreux , mieux développés que ceux des Mammifères , entrent dans sa composition. C’est surtout chez les mâles des Oiseaux chanteurs, que l’organisation de la trachée est arrivée à une perfection admirable. Les Palmipèdes et les Échassiers offrent également des modifications fort re¬ marquables de l’organe dont il est question. Chez eux, certains anneaux se fondent ensemble, se dilatent, produisent des ren¬ flements qui affectent des formes différentes selon les espèces , et qui influent puissam¬ ment sur l’étendue de la voix. Ce caractère est exclusif aux mâles. Les Canards, les Maries, l’offrent d’une manière très pro¬ noncée. Les Oiseaux sont les seuls animaux chez lesquels, indépendamment d’un larynx su¬ périeur analogue par sa conformation à celui des Mammifères , on rencontre un deuxième larynx ; celui-ci qu’on nomme larynx infé¬ rieur , parce qu’il est situé à la naissance des bronches ,au point où la trachée-artère se divise, et servi par des muscles nom¬ breux chez les Oiseaux chanteurs. C’est dans cet organe que se produit la voix. Mais le caractère dominant de l’appareil respiratoire des Oiseaux est dans le poumon et dans les cellules aériennes, répandues, comme nous l’avons déjà dit, par tout le corps de l’animal. Les poumons, remarqua¬ bles par leur volume , sont au nombre de deux, et forment chacun une masse sans lobe distinct , à moins qu’on ne considère les mamelons qui sont déterminés par l’en¬ foncement de ces organes dans l’intervalle des côtes, comme formant des lobes, ce qui serait abuser de la valeur de ce mot. En outre, toute leur surface est criblée d’une infinité de trous destinés à faciliter l’épanchement de l’air dans les cellules cir- convoisines. Celles-ci, dont la disposition et le nombre varient selon les espèces, sont en communication avec les sacs aériens, de sorte qu’en raison de cette organisation l’air peut circuler dans toutes les parties. C’est au point qu’au moyen d’un trou pratiqué soit au fémur, soit à l’humérus, on peut insuffler en entier le corps de l’Oiseau. II en résulte, comme l’ont démontré les expé¬ riences de Yrolik et d’Albers, que la respi¬ ration chez les animaux de la classe qui nous occupe, peut être entretenue par cette voie inverse, et que si on lèse une cellule, l’air chaud et dilaté s’échappant par cette lésion, ils deviennent incapables de voler plus longtemps (1). Il résulte aussi de cette sorte de circulation aérienne, que, pendant l’expiration , une partie de l’air renfermé dans les sacs aériens est obligée de traverser une seconde fois le poumon, ce qui pro¬ duit le phénomène de la double respira¬ tion (2). (1) La mort prompte, que détermine toujours chez les Mammifères une incision qui met à découvert leurs organes respiratoires, n’a pas lieu chez les Oiseaux ; leur respiration générale , leurs poumons avec leurs orifices pour le passage de l’air dans les autres cavités du corps , s’opposent à l’asphyxie ; aussi la physiologie expérimentale fait-elle des Oiseaux le sujet de ses observations pour l’étude des batte¬ ments du cœur. Nous avons vu un Coq auquel on avait en¬ levé tout le sternum , vivre ainsi plus de deux heures , et succomber enfin plutôt à la suite de l’hémorrhagie, toujours inséparable d’une pareille opération, que par le défaut de respiration. (2) Pour donner une idée juste de la manière dont s’exé¬ cute le double passage de l’air dans le poumon chez les Oi¬ seaux, M. Colas, à qui l’on doit un excellent travail sur les organes respiratoires de ces animaux , prend un tube garni à l’intérieur d’une éponge, qui représente le poumon, ayant une extrémité libre, et l’extrémité opposée garnie d’une vessie qui fait fonction de sac aérien. Supposant ensuite une force capable de dilater la vessie, il la met en action 30 OIS OIS De la circulation. L’effet capital de la disposition des or¬ ganes respiratoires est non seulement relatif à la fonction qu’ils sont appelés à remplir, mais aussi à la circulation . « Si on examine la série zoologique tout entière, sous le rap¬ port de la respiration, a dit M. Isidore Saint- Hilaire, on voit que les animaux se divisent en deux classes : 1° ceux chez lesquels le sang vient chercher l’air; 2° ceux chez les¬ quels l’air va chercher le sang. Or, plusieurs anatomistes , parmi lesquels Carus et Am¬ père, ont remarqué que les animaux dis¬ posés pour le vol sont les seuls chez lesquels l’air vient au-devant du sang ; par consé¬ quent, la respiration et la circulation sont, chez les Oiseaux , dans des rapports bien plus étendus que dans aucune autre classe de Vertébrés. » Le cœur, très puissamment organisé, est, proportionnellement au volume de l’Oiseau, beaucoup plus grand que celui de presque tous les Vertébrés. Sa forme conique et sa structure rappellent celui de l’espèce hu¬ maine. Comme dans les Mammifères , il est placé dans la cavité pectorale, au-de¬ vant des poumons , et derrière le sternum , immédiatement au-dessus du foie et au-des¬ sous des clavicules. On y distingue deux oreillettes et deux ventricules , dont les fonctions sont les mêmes que dans l’Homme. Quant à la disposition de l’aorte , elle est fort peu différente de ce qu’on connaît à cet égard dans les Vertébrés supérieurs; seule¬ ment, il y a ceci de remarquable, que l’aorte descendante, qui, chez les Mammifères, se porte ordinairement à gauche, demeure, chez les Oiseaux, unie quelque temps à la sous-clavière, et a de la tendance à passer à droite. La classe des Oiseaux offre encore ceci de particulier, que si , dans beaucoup d’espè¬ ces, il existe deux carotides, comme chez et produit par ce moyen l’inspiration; or, l’air dans lequel plonge l’extrémité ouverte du tube en se précipitant dans la vessie, doit nécessairement traverser l’éponge dont ce tube est pourvu. Admettant ensuite qu’une puissance quelconque comprime la vessie, pour produire un phénomène analogue à l’expiration, l’air qu’elle contient (air, par hypothèse , déjà respiré) sera forcé de repasser au travers du tissu de l’éponge pour sortir du tube : ainsi l’éponge aura été impré. gnée deux fois , comme le poumon de l’Oiseau est impré¬ gné deux fois pendant l’acte de l’inspiration et de l’expi¬ ration. les Mammifères, chez beaucoup d’autres on n’en trouve qu’une seule, qui résulte de la réunion des deux branches , qui se confon¬ dent peu après leur naissance, des sous-cla¬ vières. Cette carotide unique se bifurque avant de pénétrer dans la tête. Meckel , Bauer et Nitzsch ont observé ce fait, qui paraît constant chez tous les Passereaux examinés jusqu’à présent , mais qu’on re¬ trouve aussi dans des espèces de plusieurs autres familles très différentes. Nitzsch a en¬ core vu que le Flammant ( Phœnicop . ruber), il existe bien également une seule carotide, mais qu’elle est à droite, au lieu d’être à gauche. Mais un fait de finalité physiologique , que nous devons signaler, est celui qui est relatif au petit calibre de l’aorte descen¬ dante. C’est là une particularité dont on est tout d’abord saisi , et qui indique un rap¬ port avec le peu de développement qu’ont pris les parties postérieures de l’Oiseau rela¬ tivement aux parties antérieures. Un autre fait des plus remarquables est celui de l’existence de plexus artériels sur plusieurs 'points du corps des Oiseaux. Ces plexus, dont la découverte date de notre époque, et qui n’ont encore été aperçus que dans les animaux de cette classe, sont réelle¬ ment du plus grand intérêt. Celui qui mérite le plus notre attention est 1 e plexus incuba - teur. L’œuf , jeté dans le monde extérieur, devait se développer hors du sein de la mère, par l’influence de la chaleur que celle-ci devait lui communiquer, et la nature a pris soin de la pourvoir d’un appareil propre à maintenir en elle un degré de température convenable. On voit, en effet, dans les Oi¬ seaux, précisément à l’endroit où sont les mamelles chez les Mammifères, c’est-à-dire dans ce point de l’abdomen, voisin de l’a¬ nus, qui, chez eux, est le plus souvent dé¬ pourvu de plumes , un réseau vasculaire ayant son siège au-dessous de la peau. Ce réseau, formé par une multitude d’arlères et de veines flexueuses fréquemment anas¬ tomosées entre elles, a pour but de fournir en abondance du sang aux parties qui, ap¬ pliquées immédiatement sur les œufs, sont destinées à leur communiquer la chaleur. C’est à Barkow que l’on doit la découverte et la description de cet appareil spécial d’in¬ cubation. OIS OIS 31 Quant aux veines, leur marche ne paraît ment par des mouvements vifs et conti- pas toujours subordonnée à celle des artères. nuels, mais encore par l’eflectuation prompte G. Cuvier et Meckel ont constaté que, chez de certaines fonctions. II n’y a pas d’être les Oiseaux plongeurs, la veine cave est bien dans la série plus pétulant que l’Oiseau; il plus volumineuse que dans les espèces ter- n’y en a pas qui soit sans cesse, comme lui, restres. Ce fait, digne de remarque, établit dans le mouvement et l’agitation. Mais il ne une analogie avec ce qu’on observe chez cer¬ tains Mammifères, tels que les Dauphins, les Phoques , les Loutres , les Castors , et chez quelques Reptiles , comme les Tortues , etc. Dans ces animaux, qui ont l’habitude de plonger et qui restent assez longtemps sous l’eau sans respirer, il fallait que les vais¬ seaux eussent assez de capacité ou fussent pourvus d’espèces de réservoirs propres à contenir le sang qui reflue vers eux, sans qu’il en résultât de l’incommodité pour l’a¬ nimal. La même particularité devait exister chez les Oiseaux, qui , par leur nature, sont destinés à plonger souvent, afin de pourvoir à leur subsistance (1). Il existe encore chez les Oiseaux une dispo¬ sition spéciale d’une partie de l’appareil vei¬ neux. Au moyen de cette disposition, dé¬ crite par Jacobson ( Journal de physique , t. XCIII, p. 228), et nommée par lui sys¬ tème porte-rénal , le sang qui revient de la partie moyenne et de la partie postérieure du corps n’est pas conduit directement dans la veine cave, pour gagner ensuite le cœur, mais il est dirigé vers les reins, et, dans quelques cas, vers le foie. Pour ce qui est des vaisseaux lymphati¬ ques, dont J. Hunter, Hewson, Tiedemann et Lauth ont fait l’objet de leurs recherches, nous les passerons sous silence, à cause de leur peu d’importance. Nous dirons seule¬ ment qu’ils existent nombreux sur plusieurs parties du corps de l’Oiseau, et notamment sur les pattes des Palmipèdes. Par suite de l’extension qu’a prise la respi¬ ration, la masse du sang, subissant en tota¬ lité l’influence de l’air, il en résulte une activité générale qui se traduit, non seule- (i) Le Balbuzard, oiseau pêcheur, nous a offert une veine Cave très volumineuse relativement à la taille (le l’Oiseau , un cœur fort développé et surtout des oreillettes «parieuses. Mais un fait de ce genre, le plus surprenant , est celui qui est rapporté par le capitaine W H. V. Webster , dans VE- dinburgh journal of science ( N. V., t. II, p. 26 ). Les recher¬ ches qu’il a faites sur les Oiseaux aquatiques l’ont conduit à constater que chez les Pingouins la veine jugulaire atteint usqu’à piès de G centimètres de diamètre, et la veine porte abdominale jusqu’à an centimètres. faut pas croire , comme quelques auteurs l’ont avancé, que le mouvement soit un be¬ soin pour lui; il n’est que la manifestation I nécessaire de sa nature. L’oiseau subit fata¬ lement les conséquences de son organisa¬ tion. C’est à une respiration double, à une circulation vive et rapide d’un sang forte¬ ment oxygéné, et, par suite, à une prédomi¬ nance marquée du système musculaire, que les Oiseaux doivent cette activité qui les caractérise. § VI. Organes des appareils digestif et URINAIRE. Nous venons de dire que l’intensité qu’a¬ vaient prise la respiration , et par suite la circulation , étendait , chez les Oiseaux , une. influence manifeste sur certaines fonc¬ tions : la digestion est de ce nombre. Elle est chez eux très active, et ce qui le prouve, c’est non seulement le besoin continuel de nourriture, mais encore le résultat même de la digestion, c’est-à dire V assimilation. Des observateurs dignes de foi ont avancé qu’un grand nombre d’espèces de la famille des Becs-Fins, placés au milieu des circon¬ stances les plus favorables pour une nourri¬ ture facile et abondante, engraissaient rapi¬ dement en moins de quarante-huit heures. O11 sait, d’ailleurs, que les Ortolans et les Grives peuvent , de la maigreur la plus grande, passer à l’obésité la plus complète, en cinq ou six jours. Or, de pareils résultats ne pourraient avoir lieu en aussi peu de temps, si, dans les Oiseaux, il n’y avait ac¬ tivité dans les organes digestifs. Mais quels sont ces organes? Nous allons succinctement les indiquer. Nous ne reviendrons plus sur ce que nous avons dit du bec et de la langue, tous deux accessoires de l’appareil digestif, l’un comme organe de trituration et de préhension, l’au¬ tre comme servant à la déglutition et, dans quelques cas très rares , à la gustation des aliments. Nous ferons notre point de départ de l’œsophage. Celui-ci n’offre de remarqua¬ ble qu’un renflement plus ou moins consolé- 32 OIS OTS rable , selon les espèces , renflement auquel on a donné le nom de jabot. Par ses fonctions, cette partie de Pœsophage est une sorte de premier estomac dans lequel les aliments subissent des modifications qui les préparent à une digestion stomacale plus facile. Une seconde dilatation de Pœsophage, que l’on rencontre immédiatement après l’entrée de cet organe dans la poitrine , est ce qu’on nomme ventricule succenturié ou jabot glan¬ duleux. Sa structure diffère du reste du ca¬ nal intestinal , surtout par le volume et le nombre de glandes rougeâtres qui le garnis¬ sent (1). Chez les Oiseaux granivores, le ven¬ tricule succenturié a généralement des parois plus épaisses, des glandes plus rapprochées et plus développées que dans les Carnivores ; chez ceux-ci, il est quelquefois extrêmement large, mais court et à parois minces. C’est également chez les Oiseaux qui font leur nourriture exclusive de semences , que le vrai estomac ou gésier a acquis une struc¬ ture musculeuse très prononcée. Les fibres des muscles qui le composent en grande partie, denses et d’un rouge foncé, aboutis¬ sent à un centre tendineux très solide, et comme la membrane interne ou l’épithélion a une texture parfaitement cornée , ce vis¬ cère peut agir avec une force extraordinaire sur les substances introduites dans son inté¬ rieur. Qui ne sait d’ailleurs que les petits cailloux avalés par les Gallinacés dans ie but d’aider leur gésier à broyer les grains dont ils se nourrissent, sont bientôt eux- mêmes réduits en sable fin ? Les expérien¬ ces que l’on a faites, afin de constater quelle (r) Dans les jeunes Pigeons , les cryptes muqueux ou glandes qui abondent sur la face interne du jabot et du ventricule succenturié , sont considérablement développés , et sécrètent un fluide muqueux et lactescent, auquel on a attribué pour usage de servir de premier aliment au jeune individu. C’est au point que quelques auteurs ont avancé que le Pigeon nouvellement éclos pouvait vivre , et vivait même quelques jours , sans recevoir d’aliments de la part des parents. Mais sans vouloir nier le rôle que le fluide sé¬ crété joue dans les premiers temps après l’éclosion , l’on ne saurait ne pas reconnaître l’importance de celui que la vé¬ sicule ombilicale est destinée à remplir. Cette vésicule , lorsqu'elle rentre dans l’abdomen du fœtus , est pourvue d’une quantité de matière vitelline assez considérable pour suffire, à elle seule, aux premiers besoins du nouveau-né. C’est là un fait commun à tous les Oiseaux. Pour nous , ce ne serait donc pas le fluide sécrété par les glar des du jabot et du ventricule succenturié qui servirait seul de première nourriture au jeune Pigeon ( si toutefois il sert), mais aussi et surtont le contenu de la vésicule ombilicale. est l’action de cet organe sur les corps étran¬ gers, ont donné des résultats surprenants. On a fait avaler à des Dindes, à des Poules, des boules vides de verre de cristal, d’une telle épaisseur, qu’en les jetant par terre elles ne se brisaient point ; et quelque temps après, en ouvrant ces Oiseaux, on a trouvé ces boules réduites presque en poussière. D’autres fois on a donné à ces mêmes es ¬ pèces des morceaux de verre aigus et tran¬ chants, des aiguilles, des morceaux de fer très irréguliers, des sous ; et toujours à l’ou¬ verture du gésier, qui avait lieu fort peu de jours après que ces corps avaient été avalés par les Oiseaux que l’on soumettait à ces ex¬ périences , ce verre , ces aiguilles , ce fer et ce cuivre, étaient profondément altérés, non pas dans leur substance , mais dans leurs formes : dans tous, les angles ou les pointes avaient été émoussés, sans que l’organe pa ¬ rût en avoir souffert. Les Oiseaux de proie nocturnes et même diurnes , privés d’un gésier très musculeux, ont, eux, la faculté de rejeter par petites pelotes les os brisés, les plumes ou les poils des animaux qui leur ont servi de pâture. Un autre fait à constater, pour les con¬ séquences qui en dérivent, c’est que le car¬ dia et le pylore , placés l’un au-dessus de l’autre et occupant le côté droit du gésier, sont privés de valvules. C’est par suite de cette disposition que les Oiseaux ont puis¬ samment contribué à peupler de végétaux une grande étendue de la surface du globe. Les semences introduites dans l’estomac, pouvant passer dans l’intestin avant d’avoir subi d’altération , sont rejetées avec les fèces ; et si elles tombent au milieu de cir¬ constances favorables à leur développement, elles végètent et s’accroissent pour réaliser la plante ou l’arbre duquel elles émanent. C’est ainsi qu’on a été surpris bien souvent de rencontrer dans tel ou tel pays des pro¬ ductions qui lui étaient étrangères, et qu’on savait n’appartenir qu’à un sol fort éloigné. Les Oiseaux , dans leurs lointaines migra¬ tions, en avaient transporté le germe. On a même constaté (et c’est Banks qui en a fait la remarque) que les grains qui ont tra¬ versé le canal alimentaire d’un Oiseau se développent plus promptement que d’au¬ tres. Quant à l’intestin, bien qu’il offre des OIS OJS 33 dilatations notables, cependant on ne sau¬ rait plus le diviser rigoureusement, comme dans les Mammifères, en intestin grêle et en gros intestin ; car les valvules qui servent à établir cette distinction, ou n’existent pas, ôu sont presque nulles. On peut poser comme thèse générale que sa longueur est en rapport avec le genre de nourriture de l’Oiseau, et que, très développé chez les es¬ pèces herbivores et granivores, il l’est beau¬ coup moins chez celles qui sont carnivo ¬ res (1). Il se termine inférieurement dans une poche de forme très variée selon les es¬ pèces , mais le plus souvent globuleuse, et c’est par cette poche ou cloaque que s’éva¬ cuent les excréments, l’urine et les produits de la génération ; c’est dans elle aussi que l’on rencontre cet organe particulier aux Oi¬ seaux, que l’on nomme bourse de Fabricius. Mais, avant sa terminaison au cloaque, le tube digestif qui ne se présente pas le même chez toutes les espèces (car, dans quelques unes, telles que les Oiseaux de proie et sur¬ tout les piscivores, il se simplifie au point d’être presque membraneux) ; avant sa ter¬ minaison, disons-nous, le tube digestif se renfle en un ou deux appendices de longueur variable, selon les espèces, et dont les usages ne sont point connus. Les autres organes de la digestion, tels que le foie , la rate , les pancréas , etc., n’of¬ frent rien de bien remarquable à considérer. Pour ce qui est de l’appareil de dépuration urinaire, nous bornerons nos considérations sur les organes qui le composent, à dire que (i) Le Balbuzard présente, parmi les Oiseaux de proie, une exception remarquable en ce sens que son intestin est non seulement fort grêle, mais qu’il est plus long que celui de la plupart îles Granivores. Son régime , presque exclusi¬ vement piscivore, peut rendre compte de cette particula. nté. Une autre exception , certainement la plus curieuse que l’on connaisse , nous ne craignons pas de le dire , est celle que l’on constate chez le Phytotoma rara. Cet Oiseau , qui est essentiellement phytophage , a un tube digestif de moitié, à peu près, plus court que celui de la plupart de nos Gros-Becs d’Europe. 11 ne présente qu’une seule circon¬ volution, est fort large et a ses parois intérieures pourvues de villosités longues et nombreuses La cause de cette orga¬ nisation anomale se déduit naturellement , ce nous semble , du genre de nourriture. Le Phytotoma rara , vivant de jeunes feuilles de Graminées qui, sous un volume assez con- sidéiable , renferment cependant fort peu de substance nu- tritive, avait besoin que son intestin se dilatât sous forme de vaste sac, afin qu’il pût contenir la quantité d’aliments né¬ cessaire à sa nutrition. C’est là, à ce qu’il nous paraît, la rai¬ son physiologique de cette organisation en apparence ex¬ ceptionnelle. les reins , au nombre de deux, ayant chacun leur uretère très distinct l’un de l’autre, ont à peu près la même structure que ceux des Mammifères; qu’ils remplissent les fosses qui sont creusées à la face inférieure des os sa¬ crés et iliaques, et que leur volume et leur forme varient selon les espèces. § V. Organes de la génération. Chez les Oiseaux, les organes génitaux présentent des particularités assez intéres¬ santes à connaître. En général, les mâles sont dépourvus d’organe excitateur, c’est-à- dire de pénis; du moins le tubercule qui le représente dans le plus grand nombre d’es¬ pèces est tellement réduit, il est si peu dis¬ tinct par lui-même, qu’en vérité on ne sau¬ rait le considérer comme existant réellement. Quelques espèces cependant semblent faire exception. Il est vrai que le tubercule qui, chez les Oiseaux tels que le Casoar, l’Autru¬ che (I), la Cigogne, le Hoceo, les Oies et les Canards en général, tient lieu d’organe ex¬ citateur, et que l’on considère comme tel, est loin, par sa structure et par sa forme, de ressembler à la verge des Mammifères ; mais il en est au moins l’analogue par ses fonc¬ tions ; car, chez les espèces que nous venons de citer, il y a intromission, sinon complète, du moins partielle, de ce tubercule. C’est par le moyen d’une gouttière creusée à sa face supérieure, lorsque cet organe est rentré dans le cloaque, mais devenant inférieur lorsque l’accouplement se fait, que le fluide fécon¬ dant est porté vers les organes génitaux de la femelle. On peut donc constater, chez cer¬ taines espèces , la présence d’un pénis de forme variable, selon les espèces, et dans la structure duquel entrent des muscles et des tissus fibreux et caverneux. Il y a par con¬ séquent, chez les Oiseaux, deux modes de copulation : dans un cas (et c’est l’exception), il y a accouplement réel, par intromission ; (i) Millier, dans un mémoire lu à l’Académie royale de sciences de Berlin (séance du 17 novembre i836 ) , sur les organes sexuels des Oiseaux mâles du genre Autruche , a re¬ connu deux types divers dans la structure de ces organes chez cette famille. Nous nous bornerons à signaler ce tra¬ vail. Entrer dans des considérations qui sont du domaine de l’anatomie descriptive, telle n’est point la tâche que nous nous sommes imposée. Nous dirons seulement que, d’après Millier, ces Oiseaux, par la forme de leur verge, se rapprochent autant et même plus des Reptiles amphibiens que des Mammifères. T. IX. 34 OIS OIS dans l’autre (c’est le cas général), l’accouple- mentnese fait que par affliction ou par juxta¬ position, en raison de l’absence de l’organe excitateur mâle. Mais les parties essentielles de l’appareil génital mâle consistent en deux testicules si- tués aurdessus des reins sur la ligne médiane. A ces testicules, sont contigus par l’intermé¬ diaire de l’épididyme , les canaux défé¬ rents, étroits et flexueux , qui se rendent dans le cloaque à côté de l’ouverture des uretères. Il paraîtrait, d’après les remarques de Tannenberg et de Tiédemann, que le testi¬ cule gauche est toujours plus gros que celui du côté droit. Ce fait, énoncé par des auteurs dont le nom seul est une garantie pour la science, semble établir la plus grande ana¬ logie entre les parties génitales du mâle et celles delà femelle. L’on sait, en effet, que, chez celle-ci, ce sont les organes de gauch.e qui persistent, tandis qu’au contraire ceux de droite s’atrophient. 11 est bien remarqua¬ ble qu’un animal qui, primitivement, offre, quant à son appareil génital , une symétrie parfaite, qui possède deux ovaires et deux oviductes très distincts les uns des autres et très identiques, perde, plus tard, en avançant vers l’âge adulte, cette conformation symé¬ trique; et, ce qui a lieu d’étonner, ce qui a donné cours à bien des conjectures, c’est que ce soit, en général, l’organe de gauche qui s’accroisse, et que ce soit celui de droite qui dépérisse. Celui-ci est en effet réduit à un petit tubercule, comme Emmerat l’a reconnu le premier, lorsque l’autre acquiert un dé¬ veloppement normal. Il n’est pas sans exem¬ ple pourtant que l’ovaire et l’oviducte droits aient persisté pour remplir les mêmes fonc¬ tions que ceux de gauche; mais ce sont là des cas exceptionnels très rares, et, chose digne d’être notée, ces cas n’ont encore été offerts que par les Oiseaux de proie. Quoi qu’il en soit, deux parties entrent ordinairement dans la composition de l’ap¬ pareil génital femelle : ce sont l’ovaire et l’o- viducte. L’un et l’autre diffèrent beaucoup de ce qui existe chez les Mammifères. L’un, tout bosselé et ayant la forme d’une grappe de raisin, renferme les œufs, et l’autre, dans lequel M. Geoffroy-Saint-Hilaire a reconnu un pavillon, une trompe de Fallope, un uté¬ rus et un vagin (distinction qu’on ne peut établir que par analogie), livre passage aux œufs pour être rejetés au dehors. Dans 1 un et dans l’autre sexe, les organes génitaux éprouvent d’une manière bien sen¬ sible l’intluence des saisons. Durant l’épo¬ que des amours, ils acquièrent un dévelop¬ pement notable. C’est ce qui avait déjà été remarqué dans les temps anciens, chez le mâle. Antequàm codant, dit Aristote, quibus- dam sunl parvi , quibusdam obscuri , tempore coïtûs majores fiuunt. L’âge influe également sur le développement de ces organes. Chez les vieilles femelles , l’ovaire et l’oviducte reviennent à des proportions presque aussi exiguës que celles qu’ils avaient pendant les premiers temps de la vie. Enfin, chez les Oiseaux, les plexus incuba¬ teurs que nous avons signalés en parlant de la circulation, peuvent être considérés comme des organes génitaux accessoires. Quant a ce qui est du système nerveux, nous dirons seulement d’une manière géné¬ rale que la masse encéphalique des Oiseaux, très considérable et d’un volume assez con¬ stant, est privé de circonvolutions. Les corps calleux sont remplacés par deux commissures étroites qui réunissent les hémisphères, et les tubercules quadrijumeaux consistent en une paire de lobes placés au dessous de ces hé¬ misphères et en avant du cervelet. Telles sont les considérations que nous avions a donner sur les principaux caractères organiques et physiologiques des Oiseaux. Nous devons maintenant faire connaître la somme des résultats de cette organisation, c’est-à-dire le genre de vie, les actes, les habitudes naturelles, etc., que nous com¬ prenons sous le titre général de mœurs. CHAPITRE III. M OE U R S DES OISEAUX. Il n’y a certes rien dans les Oiseaux qui soit aussi intéressant à connaître que leurs mœurs; il n’y a rien d’aussi piquant pour celui qui ne se borne pas à étudier la nature dans ses formes, mais qui veut en connaître le fond ; il n’y a également rien d’aussi at¬ trayant pour celui qui cherche des distrac¬ tions dans les objets qui l’environnent. Aussi peut-on dire qu'il n’y a pas d'animaux qui aient plus que ceux-ci le privilège de fixer l’attention des observateurs. Tout cap¬ tive, car tout peut devenir un sujet d’ad- ÜJS miration dans les mœurs des Oiseaux. Ici , ce qui plaît, ce n’est plus une riche parure, ce ne sont pas des formes gracieuses , ce n’est pas un aspect agréable ; mais c’est quelque chose de plus élevé, de plus sus¬ ceptible de captiver : ce sont les actes aux¬ quels se livre l’Oiseau. En est-il un , qui , dans ses habitudes, ait quelque chose de particulier? bien vite on le suit, on l’épie, on compte, pour ainsi dire, tous ses mou¬ vements; on aime à savoir de quelle ma ¬ niéré il vit, de quoi il se nourrit, quels sont les moyens et les matériaux qu’il emploie pour la construction de son nid. Quel est son chant? C’est là un sentiment de curio¬ sité naturel et commun au plus grand nom¬ bre ; mais une chose qui aurait lieu de sur¬ prendre si on ne savait que l’Homme est ainsi fait, qu’il oublie ou prête en général peu d’attention aux formes matérielles, pour ne s’enquérir que de ce qui peut flatter son imagination ou satisfaire son esprit curieux, c’est que tel vous rendra compte des actes d'une espèce, qui, le plus souvent, sera in¬ capable de vous indiquer quelle est la cou¬ leur de son plumage, quels sont ses attri¬ buts extérieurs. Le Faucon , cherchant du haut des airs une proie sur laquelle il puisse s’abattre, a attiré plus de regards que n’en attireront jamais et sa fierté et la puissance de ses serres ; l’Hirondelle, celte douce et un peu ennuyeuse habitante de nos cités , est devinée de tout le monde : on sait comment elle bâtit; on sait comment s’effectuent ses départs , et si ses caractères physiques ne sont pas moins connus que ses mœurs, c’est qu’elle est auprès de nous en trop grand nombre pour qu’on les ignore. Si ce désir général de connaître les actes des animaux qui vivent auprès de nous a eu ses avantages pour l’histoire des mœurs des Oiseaux, en ce sens qu’un plus grand nombre d’observateurs a concouru à en agrandir les limites , d’un autre côté l’on peut dire que de ce concours sont nées une foule d’erreurs; trop de gens, inhabiles à observer , ayant apporté pour cette histoire leur part de faits. Or il s’est rencontré des naturalistes crédules, qui, recueillant tous ces faits sans les approfondir, sans avoir égard aux impossibilités physiologiques, peu versés qu’ils étaient dans la connaissance de l’organisation des Oiseaux, ont le plus sou- | 018 35 vent consigné l’erreur à côté de la vérité. Il est des auteurs justement célèbres qui n’ont pas été exempts de cette facilité à ac¬ cepter tout ce qu’on rapportait d’un Oiseau, et cela précisément toutes les fois que celui- ci semblait être trop généralement connu pour qu’il parût inutile de confirmer par de nouvelles observations ce qu’on en disait. Et pourtant, s’il y a quelque chose qui , dans les Oiseaux , soit d’un intérêt réel , c’est l’étude approfondie et vraie de leurs mœurs; car, abstraction faite de la satis¬ faction morale qu’on éprouve à les connaî¬ tre , elles deviennent encore d’une utilité immense par leur application à la classifica¬ tion. Elles ont plus d’une fois servi à faire classer dans son groupe naturel telle espèce dont la place paraissait douteuse. Si quel¬ ques auteurs ont réussi , mieux qu’on ne l’avait fait avant eux, à instituer des familles ou des genres naturels, c’est que bien sou¬ vent ils ont consulté les mœurs des espèces. Bien connaître les habitudes d’un Oiseau est donc chose très importante. C’est là un point sur lequel nous ne sau¬ rions trop insister. Sans les mœurs, les Oi¬ seaux, quelque rares qu’ils soient, ne sont rien que des objets plus ou moins curieux; avec elles l’esprit est satisfait : l’espèce que nous avons sous l’œil devient plus intéres¬ sante, parce que nous sommes initiés, si nous pouvons dire , à ses secrets d’intérieur. Au reste, les mœurs des Oiseaux , ne fus¬ sent-elles comptées pour rien sous le rap¬ port du contentement moral qu’elles pro¬ curent à l’Homme qui les connaît, doivent, puisqu’elles sont l’ensemble des résultats de l’organisation, conduire à mieux apprécier celle-ci. Après ces considérations, dire le genre de vie, les habitudes, les amours, etc., des êtres qui nous occupent , telle est notre tâche. § I. Habitudes et régime des Oiseaux. <( Les habitudes des Oiseaux, ditBuffon, ne sont pas aussi libres qu’on pourrait se l’imaginer. Leur conduite n’est pas le pro¬ duit d’une pure liberté de volonté ni même un résultat de choix, mais un effet néces¬ saire qui dérive de l’exercice de leurs facul¬ tés physiques. Déterminés et fixés chacun à la manière de vivre que cette nécessité leur 36 OIS OIS impose, nul 11e cherche à l’enfreindre et ne peut s’en écarter ; c’est par cette nécessité , tout aussi variée que leurs formes , que se sont trouvés peuplés tous les districts de la nature. L’Aigle ne quitte point ses rochers ni le Héron ses rivages ; l’un fond du haut des airs sur l’Agneau qu'il enlève ou dé¬ chire , par le seul droit que lui donne la force de ses armes, et par l’usage qu’il fait de ses serres cruelles ; l’autre , le pied dans la fange , attend, à l’ordre du besoin, le passage de sa proie fugitive; le Pic n’a¬ bandonne jamais la tige des arbres à l’en¬ tour de laquelle il lui est ordonné de ram¬ per ; la Barge doit rester dans ses marais, l’Alouette dans ses sillons, la Fauvette sous ses bocages ; et ne voyons-nous pas tous les Oiseaux, granivores chercher les pays habités et suivre nos cultures , tandis que ceux qui préfèrent à nos grains, les fruits sauvages et les baies , constants à nous fuir, ne quittent pas les bois et les lieux escarpés des monta¬ gnes, où ils vivent loin de nous et seuls avec la nature, qui, d’avance, leur a dicté ses lois et donné les moyens de les exécuter? Elle retient la Gélinotte sous l’ombre épaisse des Sapins, le Merle solitaire sur son ro¬ cher, le Loriot dans les forêts dont il fait re¬ tentir les échos, tandis que l’Outarde va chercher les friches arides et le Râle les humides prairies. Les lois de la nature sont des décrets éternels, immuables, aussi con¬ stants que la forme des êtres. » Cette nécessité pour i’Oiseau de rester dans sa sphère, d’avoir des goûts et un in¬ stinct qui ne sont que le résultat de son or¬ ganisation, est un fait démontré et pour le¬ quel les preuves sont surabondantes. Ainsi, pour le genre de nourriture, ne suffit-il pas de jeter un coup d’œil même rapide sur toute la série ornithologique pour voir que le bec, qui est l’organe essentiel de la pré¬ hension des aliments, différant dans la forme selon les espèces, ceux-ci doivent différer dans leur nature, également selon les espè¬ ces ? Tous les Oiseaux n’ont donc pas et ne pouvaient pas avoir le même régime. Les uns vivent de proie sanglante : ils chassent et poursuivent de vive force les animaux que leur instinct leur a appris à dompter ; carnassiers de leur nature, ils ne se susten¬ tent qu’aux dépens des êtres que le besoin désigne à leur voracité ; les autres, plus la- | ches ou plus faibles , trouvent un aliment plus facile dans les cadavres des animaux que le hasard leur abandonne. Ceux-ci dé¬ ploient une activité incessante pour décou¬ vrir des Vers et des Insectes : ils en font leur nourriture exclusive ; ceux-là vivent à nos dépens, ils dévastent nos moissons, nos autres céréales : le plus grand nombre s’at¬ taque aux graines que l’IIomme n’a point semées de sa main. 11 en est qui gaspillent nos vergers, qui mangent nos fruits les plus succulents ; d’autres les épargnent pour ceux que la nature semble avoir fait mûrir pour eux ; d’autres encore se nourrissent de jeu¬ nes pousses d’arbres , broutent l’herbe des champs ou barbottent dans la fange des ma¬ rais; il en est enfin que l’on pourrait con¬ sidérer comme les Oiseaux de proie de l’eau. Ils sont à la quête des Mollusques, des Crus¬ tacés et des Vers marins ; ils purgent les rivages des cadavres de Poissons , et pour¬ suivent même ceux-ci jusqu’au fond des eaux, où ils les atteignent malgré la rapi¬ dité avec laquelle ils nagent. Mais s’il est des espèces qui font leur nourriture exclu¬ sive de telle ou telle autre substance, il en est aussi à qui tout aliment convient; tout leur agrée : elles sont donc omnivores et vivent selon les circonstances. C’est d’après le genre de nourriture des Oiseaux, c’est selon qu’ils mangent de la chair, des fruits, des baies, des Insectes, des grains, des Vers, des Poissons, etc. , qu’on les a distingués en carnivores , frugivores , baccivores, insectivores , granivores , i omni¬ vores, piscivores, etc. Mais en ayant égard à la nature des aliments, les Oiseaux, sous le rapport du régime , se distinguent seulement, d’une manière générale, en trois grandes catégories : en ceux qui se nourris¬ sent de substances animales , en ceux qui vivent de substances végétales , et en ceux qui ont un régime mixte, c’est-à-dire qui mangent indifféremment des matières ani¬ males et végétales. Il est à remarquer que tous les Oiseaux mettent la même activité à pourvoir à leur subsistance ; laissez un Moineau dans un champ de blé, il se hâtera de faire des ravages pour choisir à côté d’un bon grain un grain meilleur. Suivez le Martinet, l’Hirondelle; ce n’est pas le plaisir qu’ils ont à être dans les airs qui les fait s’agiter sans cesse dans cet « élément; mais le besoin, mais la nécessité ; ils volent, ils parcourent l’espace en tous sens, parce que là est leur subsistance. Les Van¬ neaux, les Pluviers ne cessent de frapper de leurs pieds la terre qu’alors que les Lombrics qui y sont cachés et qui se décèlent à ces Oi¬ seaux par leurs déjections terreuses, sortent de leur retraite pour se faire dévorer. Tous les Oiseaux ne cherchent pas leur nourriture à la même heure de la journée, ni dans les mêmes circonstances. Ceux-ci ont besoin du grand jour, et c’est le plus grand nombre ; ceux-là, au contraire, attendent la nuit; car c’est alors que, pour eux, commen¬ cent à paraître ceux des animaux dont ils font leur pâture. Les Ducs et les Chouettes chassent dans le silence de l’obscurité; non pas d’une obscurité complète (1), mais d’un jour crépusculaire; la Bécasse se rend dans la prairie quand tombe l’humidité du soir, parce qu’alors les Vers de terre dont elle se nourrit sont, eux aussi, en activité , et l’Engoulevent n’abandonne sa retraite, et ne vole bouche béante, qu’alors qu’il pourra rencontrer des Phalènes, c'est à-dire pendant le crépuscule. Chaque espèce a son instinct qui la guide. Les unes sont réglées dans leurs besoins; il est pour elles des heures fixes pendant les¬ quelles elles pourvoient à leur subsistance ; les Gallinacés et les Pigeons en sont un exemple. Les autres cherchent sans relâche un aliment pour apaiser leur faim, et celles- là sont les plus actives ; les Insectivores sont dansce cas. Toujours suspendus auxrameaux, comme les Mésanges, toujours perchés sur la cime des arbres, comme les Gobe-Mouches, ou sur une motte de terre, comme les Tra- quets, ils guettent et poursuivent le Mouche- (r) Les expériences que Spallanzani a faites sur le Scops ( Strix scops ), et sur la Chevêche ( Str. passerina ), démontrent de la manière la plus évidente que les Oiseaux de proie nocturnes , malgré la faculté qu’on leur attribue généralement de distinguer les objets pendant la nuit la plus noire, sont cependant incapables de voir, s’il y a ob¬ scurité complète. Lorsqu’on plonge ces Oiseaux au milieu des ténèbres , ils sont dans le cas de ceux qu’on aveugle ; ils restent dans l’inaction, quoi qu’on fasse pour les en reti¬ rer, ou bien ils tombent comme un corps inerte lorsqu’on les lanre en l’air. L» faible clarté des étoiles suffit poul¬ ies faiie sortir de cette inaction, et pour qu’ils puissent di¬ riger leur vol; mais ils distinguent d’autant mieux que la lumière est plus intense ; par exemple celle que projette la luire fait cesser toutes leurs hésitations. C’est ce qui prou¬ verait que c’est seulement pendant le crépuscule du soir et cl u matin, que les Oiseaux de proie nocturnes se livrent à la chasse. ion qui vole, le Grillon qui saute, ou l’In¬ secte qui se cache sous la feuille. Nous dirons encore que des habitudes so¬ litaires sont toujours en rapport avec une nourriture rare et difficile à se procurer, et qu’au contraire, là où il y a abondance, il y a aussi sociabilité. Voyez, en effet, si, près d’un Aigle, habite un autre Aigle? Un canton, quelque fécond qu’on le suppose, n’aurait pu suffire longtemps à en alimenter plusieurs. Voyez si tous les Oiseaux carnassiers, à l’ex ¬ ception de ceux qui se repaissent de voiries et de charognes, cherchent leur proie de compagnie? Non; chacun pour soi, et, les êtres qu’il est en leur pouvoir de dompter par la force, pour tous. C’est à qui exercera sur eux ses rapines avec le plus d’avantage. Au contraire, les Granivores, les Herbivores et les Piscivores , ceux pour qui la nature a fait croître une nourriture toujours abon¬ dante, toujours facile, ceux-là s’attroupent, vivent en société , exploitent un champ en commun. Toutes ces familles nomades que l’hiver nous amène ou chassede chez nous, ont presque toutes un régime végétal ; aussi for¬ ment-elles des bandes nombreuses. La terre est pour elles si fertile que le plus fort ne chasse jamais le plus faible pour l’empêcher d’avoir sa part du butin. Et, chose remar¬ quable, qui prouve combien l’abondance de nourriture contribue à la formation des fa¬ milles, les Oiseaux qui se nourrissent d’in¬ sectes et surtout d’insectes à él y très, ont quelque analogie de mœurs avec les Oiseaux de rapine; ils ne forment jamais de réu¬ nions (T); il leur faut pour subsister des li¬ mites sur lesquelles n’empiète pas le voisin. Aussi, qu’un même terrain en contienne quelques uns, on les verra toujours à distance (i) Nous avons trouvé dans un ouvrage moderne fort es¬ timé, « que les Becs-Fins voyageaient ordinairement par bandes si nombreuses et si épaisses que la lumière en était sensiblement interceptée * C’est, selon nous, la plus grande hérésie que l’on puisse avancer en Ornithologie Nous pou¬ vons dire en toute assurance que jamais , de mémoire d’homme, on n’a vu un seul fait pareil. Les Becs-Fins, sans avoir des mœurs trop solitaires, n’ont pas cependant l’in¬ stinct de sociabilité assez développé pour composer des bandes lorsqu’ils émigrent ( c’est à propos de leurs voyages qu’un a avancé ce fait) ; ils peuvent bien envahir une con¬ trée ; mais ils ne le font qu’en arrivant les uns à la suite des autres, en volant ordinairement d’arbi e en arbre , et non pas tous eu même temps D’ailleurs, lors même qu’un canton en nourrit beancoup, on les y trouve toujours isolés et ja- tn iis attroupés. 38 OIS OiS les uns des autres attendre patiemment, cha¬ cun de leur côté et pour leur propre compte, qu’un Insecte vienne s’offrir à leur vue. Si tous les Oiseaux, comme nous venons de le dire, déploient la même activité dans la recherche de leur nourriture, tous n’ont pas la faculté de supporter la faim au même degré. On conçoit qu’eu égard à la nature des aliments, il doit en être ainsi ; les uns étant plus riches que les autres en matières nutritives et plus aptes, par conséquent, à réparer pour un temps plus long les forces de l’Oiseau. En général, tous ceux qui se nour¬ rissent de chair supportent plus patiemment unlongjeûne. mais ils s’en ressentent d’au¬ tant moins qu’ils sont plus gras et qu’ils de¬ meurent plus inactifs (i). Les Oiseaux de proie peuvent vivre fort longtemps sans manger; les espèces insectivores, après eux, résistent le mieux à la faim; les Granivores, au con¬ traire, meurent ordinairement dans les qua¬ rante-huit heures, et les Frugivores sont dans le même cas ; elles ne sauraient résister long¬ temps au défaut de nourriture. Mais, de tou¬ tes les espèces d’Oiseaux aucune, à quelques exceptions près, ne paraît aussi sujette à la faim et au besoin fréquent de manger que celles qui se nourrissent exclusivement de Poissons. Aussi la nature leur a-t-elle donné ou de larges gosiers, ou de vastes poches dans lesquelles ils accumulent une grande quantité de nourriture pour les besoins à venir. La nature et la qualité des aliments dont les Oiseaux font usage influent considérable¬ ment, non seulement sur la bonté de leur chair, mais aussi sur celle de leurs produits. C’est là un fait que l’on ne saurait nier; car (i) C’est à ces deux conditions qu’il faut attribuer ce que dit Levaillant d’un Vautour cliasse-fiente, dont i 1 voulait avoir la dépouille. Cet Oiseau lui ayant paru trop gras pour pouvoir être empaillé, il le conserva vivant et le soumit au jeune. De jour en jour il s’attendait à le ti'ouv^r mort, ou au moins excessivement affaibli; cependant il annonçait toujours la même vigueur. Enfin , après onze jouis d’une privation to¬ tale de nourriture, il le tua Mais en le dépouillant il s’a¬ perçut qu’il aurait pu vivre encore longtemps, car, malgré ses privations , il restait si gras , qu’il fut obligé de le dé¬ graisser, pour qu’il pût être préparé Pareille chose nous est arrivée avec une Marouetce ( Gallinula porzana). Nous l’avons conservée pendant une semaine, en la privant de tout aliment, dans l’intention de la faire maigrir. Elle a parfaitement résisté au jeûne que nous lui imposions, et elle conservait, lorsque nous l’avons tuée, une partie de sa graisse. Du reste ou savait depuis longtemps que le Héron peut vivre quinze jours sans prendre de nourriture. il y a à cet égard des exemples bien connus et qui mettent en évidence ce que nous avan¬ çons. Il n’est personne qui ignore que les Oiseaux de proie sont généralement durs, coriaces et exhalent une odeur de bête fauve, quelquefois insupportable. Les petites espèces granivores qui, l’hiver, sont forcées par les circonstances à se rejeter sur les semences amères de plusieurs espèces de Chardons ou d’autres plantes, contractent aussi une amer¬ tume très prononcée. La plupart des Oiseaux d’eau qui ne vivent que de Poissons en pren¬ nent si bien l’odeur et le goût qu’ils répugnent même aux palais les moins délicats. Enfin, il est tellement vrai que la qualité des sub¬ stances dont se nourrit un Oiseau influe d’une manière notable sur celle de la chair que les Gallinacés , justement estimés chez nous, parce qu’ils nous procurent un aliment savoureux, acquièrent, selon la nourriture qu’on leur procure, bien moins de délicatesse et deviennent même tout-à-fait désagréables au goût. Ainsi, sur la côte du. Malabar, où les Oiseaux dits de basse-cour ne vivant plus dans une étroite domesticité, errent librement sur le rivage, non seulement la chair des Pou¬ les qu’on y élève contracte une saveur et une odeur qui rappelle celle des Poissons dont on les nourrit, mais leurs œufs même ont avec eux ce goût fortement prononcé. Tout ce que l’on peut dire de général de l’influence des aliments sur la qualité de la chair des Oiseaux, c’estqueceux qui se nour¬ rissent de petits Insectes ailés, de Y ers ou de petites baies, sont savoureux et délicats au palais. La fibre charnue , chez eux, n’a pas cette dureté ni cette sécheresse qu’offrent, par exemple, ceux des Granivores qui tritu¬ rent leurs aliments avant de les déglutir. Les espèces qui avalent les semences entières, comme les Gallinacés et les Pigeons, quelques unes de celles qui paissent l’herbe tendre, mais qui pourtant n’en font pas leur nour¬ riture exclusive, sont généralement estimées et recherchées. C’est sans doute en ayant égard autant et même plus au genre de vie des Oiseaux qu’à leurs autres habitudes naturelles ou à leur conformation, que quelques ornitho¬ logistes , avec Buffon , en les comparant aux Mammifères , ont cru trouver entre eux plus d’un rapport. Ainsi les Perroquets, par leur adresse et leur intelligence , représenteraient OIS OIS les Singes; les Rapaces seraient les Carnas¬ siers de cette classe; les espèces qui se nour¬ rissent d’insectes auraient pour analogues les Mammifères insectivores; les Conirostres qui rongent ou triturent au moyen de leur bec les graines, qui font la base de leur régime, pourraient être considérés comme des Rongeurs ; les Gallinacés rappelleraient les lourds Ruminants ; et les Inertes ou Inailés, tels que les Autruches , le Casoar, l’Emou, seraient les pesants Pachydermes de la classe dont nous traçons l’histoire. Certainement rien n’est plus ingénieux que ce rapprochement des Mammifères et des Oiseaux; des ordres d’une classe correspon- dantà ceux de l'autre classe; mais d’un côté lesÉdentés etles Cétacés, de l’autre les Échas¬ siers et les Palmipèdes, y trouvent diffici¬ lement leur place. Ne pourrait-on pas ce¬ pendant, ce nous semble, trouver dans les Palmipèdes plongeurs et lamellirostres les représentants des Édentés, et dans les Pal¬ mipèdes longipalmes et totipalmes , ceux des Cétacés? Ne pourrait-on pas également voir dans les Ruminants antilopes , les ana¬ logues des Échassiers? Au reste, toute com¬ paraison ne peut se faire et tout parallélisme ne peut se soutenir que dans des termes généraux. Si l’on descend aux divisions gé¬ nériques, alors l’analogie disparaît insen¬ siblement. § II. Reproduction des Oiseaux. Pariade, amours et combats. Une loi à laquelle tous les êtres parais¬ sent soumis , l’Homme excepté (1), est celle qui veut que les espèces se reproduisent dans le temps à une époque marquée pour cha¬ cune d’elles, et cette époque pour les Oiseaux commence quand viennent les beaux jours, et finit lorsque, dans la nature, tout rede¬ vient triste et froid. Sous les régions inter¬ tropicales, de même que sous les zones les plus glacées, il y a un temps fixé d’avance (i) Socrate , dans l’énumération des avantages que la di¬ vinité a faits à l’homme, parle de la faculté qu’il lui a donnée de jouir en tout temps des plaisirs de l’amour, plaisirs qu’elle a bornés à certaines saisons pour tous les autres animaux. Beaumarchais a dit de son coté : * Manger sans faim, boire sans soif, faire l’amour en tout temps, c’e.st ce qui distingue l’bomine de la bête ; « et bien avant Beaumar¬ chais, la célèbre Ninon de Lenclos, avait à peu près, dans les mêmes termes, établi la distinction de l’homme et des ani¬ 30 pour la reproduction, et c’est ce temps du¬ rant , que se fait la propagation des espèces. L’Homme, en soumettant celles qui ser¬ vent à ses besoins, a bien pu forcer quel¬ ques unes d’elles à donner en bien plus grande quantité qu’elles ne l'auraient fait dans l’élat de nature, et pendant presque toute l’année , des produits ovariens qui renferment en eux toutes les conditions né¬ cessaires à la réalisation d’un nouvel être (1) ; mais tous ses soins, toutes ses prévoyances pour ces espèces, n’ont jamais pu modifier la nature au point de rendre la reproduction complète. S’il suffisait qu’un produit qui au¬ rait en lui le germe d’un être futur, fût jeté dans le monde extérieur, pour que la reproduction fût accomplie, alors l’Homme aurait déterminé un grand fait; mais la re¬ production nécessite, entraîne avec elle d’autres conditions naturelles, et ces con¬ ditions sont l’incubation maternelle et les soins que les parents seuls peuvent conve¬ nablement fournir à leur progéniture. Or, il n’est pas au pouvoir de l’Homme de les faire naître à sa volonté. Dans cette foule d'Oiseaux qui encombrent nos basses-cours, voyez si la Poule, si la Dinde clossent selon le bon vouloir de l’Homme î Voyez si elles couvent à toutes les époques ! Il n’est qu’un temps pour que ces actes ou ces fonctions s’accomplissent; le besoin de se reproduire ne se fait sentir qu’aiors à ces espèces comme à toutes les autres. De la plus petite à la plus grande, toutes obéissent à la même in¬ fluence ; aucune ne peut s’y soustraire. (i) La quantité d’œufs que l’on peut faire produire, riiez nous, aux poules, est prodigieuse; on en jugera par le relevé que voici. Ce relevé, fait en i835, a été donne par un jour¬ nal allemand , dont nous rapportons textuellement les pa¬ roles et les chiffres : « La France, y est-il dit, fournit pal¬ an à l’Angleterre 76,091 ,120 œufs; à la Belgique 68,800: à l’Amérique du nord 4g,6c)6 ; à la Suisse 42,9(10; à l’Espa¬ gne 34,8oo; et à d'autres pays 3o(î,3o4 *. D’apres une date offîi ielle , la consommation dans Paris est de u5 et 5/8 d’œuf par tête, ce qui produit un total de 101,169,400. L’on pourrait sans exagération, faire monter cette somme d’œufs au double, ce qui porterait alors ce total à 7,231,1(10,000, et si l’on ajoutait à ce nombre 1 pour 100 à cause des œufs couvés ou gâtés, on arriverait à un total de 7.408,905,080. » Ce nombre d’œufs, quelque prodigieux qu’il paraisse, n’a certainement rien d’exagéré. S’il était possible de faire le relevé général de tous ceux que l’on consomme sur tous les points de la France, il est probable que ce chiffre serait porté au double. * Chaque œuf coûtant un sou , il en résulte pour la Fi’anre une somme totale de 3,829,284 fr. maux. 40 GIS OIS C’est pour elles une nécessité. Aussi , lorsque cette époque marquée pour leur reproduction arrive, lorsque cette influence les domine, les voyons-nous comme re¬ naître, pour ainsi dire, à vie ; il y a chez elles exubérance, et cette exubérance se manifeste dans un grand nombre, sur¬ tout chez les mâles , par des signes par¬ ticuliers. Ainsi les caroncules dont sont pourvus quelques Gallinacés, les parties dénudées de plumes qu’offrent plusieurs au¬ tres Oiseaux, se colorent plus vivement, et acquièrent même plus d’extension. Ces phé¬ nomènes, observés chez quelques Singes à l’époque du rut, s’offrent ici avec les mêmes caractères, et sont dus aux mêmes causes. Les mâles d’un grand nombre d’autres es¬ pèces , principalement dans les Gros-Becs , les Échassiers et les Palmipèdes, échangent, comme nous l’avons déjà dit , leur terne et triste parure d hiver contre un plumage plus brillant et plus distingué. Ils pren¬ nent ce qu’on nomme des pavillons d’amour, pavillons insolites et transitoires qui tom¬ bent après l’époque qui les avait fait naître. On dirait que l’intention de la nature, en les revêtant de pareils attributs, a été d’at¬ tirer plus vivement sur eux les regards des femelles. Mais cette transition , si nous pouvons le dire , de la laideur à la beauté , cette méta¬ morphose extérieure qui s’effectue constam¬ ment d’une saison triste et froide à une saison plus belle et plus vivifiante; ces chan¬ gements qui paraissent être en harmonie avec les sentiments intérieurs qui agitent deux êtres faits pour concourir ensemble à la reproduction de nouveaux êtres, ne sont pas les seuls qui s’opèrent dans les Oiseaux. Il en est d’autres plus profonds et dont l’ac¬ tion directe, en modifiant les organes, sem¬ ble expliquer jusqu’à un certain point toutes les mutations extérieures dont nous venons de parler. Nous voulons indiquer ici les modifications qu’éprouve l’appareil de la génération, modifications dont on ne sau¬ rait nier l’importance , puisque c’est de ieur manifestation que date le rapprochement des sexes. Après .les pontes, et l’hiver durant, les organes génitaux , chez les mâles comme chez les femelles, sont dans un état complet d’inertie. On les dirait frappés d’atrophie, tant leur volume diffère de celui qu’ils avaient pendant la saison des amours. Épuisés, ou peut-être fatigués par les fonc¬ tions qu’ils ont eu à remplir, ou mieux encore soustraits à l’influence qui les avait fait se développer, on les voit diminuer, pâlir et n’avoir de l’organe que la forme. Mais, comme nous l’avons dit, bientôt tout renaît, la torpeur fait place à la vie, et tout alors paraît tendre à un but; la re¬ production. Alors, les organes principaux destinés à cette grande fonction se tumé¬ fient, se développent; le sang afflue vers eux en plus grande abondance ; la liqueur fécondante du mâle est élaborée; chez la femelle, les œufs s’accroissent, et dès ce moment les couples se forment. Il y a vraiment alors sujet à contempla¬ tion , et si la nature est admirable dans ses moindres détails, c’est bien lorsqu’elle veille à ce que les espèces se perpétuent. C’est elle qui fait que deux êtres naguère indiffé¬ rents, étrangers l’un à l’autre, sont main¬ tenant unis par un sentiment si puissant , que bien souvent la mort de l’un devient un sujet de tristesse, et quelquefois aussi de mort pour l’autre. Si le Kamichi , surtout pendant la saison des amours, perd sa fi¬ dèle compagne , il dépérira ; si on enlève au Tourtereau la sienne, il languira. Nous pourrions multiplier à l’infini les exemples de ce besoin réciproque d’aimer. Les petites espèces surtout sont intéressantes sous ce rapport : elles ne se quittent plus. Le mâle devient l’esclave soumis de sa femelle, car c’est lui qui pourvoira à sa subsistance ; c’est lui qui la protégera contre ses ennemis na¬ turels , qui l’avertira des dangers qu’elle peut courir; c’est lui qui cherchera à la désennuyer; c’est lui encore qui la rempla¬ cera dans les soins de l’incubation. S’il la perd, il l’appelle, il la cherche partout. Si celle-ci couve , lui , perché non loin du nid, témoigne de sa présence par des chants ou des cris mille fois répétés. Et puis ce sont des agaceries , des trépignements coquets , un langage intime qu’il n’est donné qu’à eux seuls de comprendre. L’Aigle, lui aussi, ce solitaire du désert, qui, vivant en despote, paraît être l’ennemi même de son espèce, quand vient la saison des amours, est, au¬ près de la femelle ,1e plus soumis et le plus assidu des mâles. OIS 41 Il y a tellement nécessité pour les Oiseaux de s’unir, de s’aimer, de se reproduire, de vaquer aux soins de la paternité et de la maternité , que ceux-là même qu'on retient captifs pour le seul plaisir que leur voix nous procure, quand vient l’époque où les désirs s’éveillent en eux, deviennent impa¬ tients; tous leurs mouvements dénotent les sentiments qui les dominent ; souvent même ils en viennent aux actes. Donnez a un mâle un miroir qui lui répète son image, il se croira avec une femelle , ne chantera plus , cherchera partout des fétus pour en con¬ struire un nid ; donnez à une femelle un panier dans lequel elle puisse pondre , et vous la verrez y déposer ses œufs , les couver assidûment mais sans fruit, et ne les abandonner qu’à regret. Ils nourriront même des petits qui leur sont étrangers. C’est que , libres ou captifs, la nature les maîtrise impérieusement; ils ne peuvent, dans aucun cas, se dérober aux lois qu’elle leur a imposées. Mais si, dans quelques espèces , l’union que contractent les sexes est durable , si les Pigeons, que l’on a toujours cités comme exemple, ont été, de tous les temps, con¬ sidérés comme l’emblème de la fidélité, on peut dire qu’il n’en est pas de même du plus grand nombre. Il n’y a entre eux qu’une liaison passagère, dictée par le be¬ soin du moment, liaison après laquelle ils redeviennent indifférents l’un pour l’autre, comme auparavant. Tout lien de famille disparaît après que l’éducation des jeunes est terminée. Les mâles des espèces qui vivent dans un état de monogamie transi¬ toire, si l’on peut dire, c’est-à-dire qui s’associent à une seule femelle pour le temps des pontes seulement; ceux qui sont poly¬ games, qui régnent en maîtres au milieu d’une troupe de femelles, s’isolent volon¬ tairement de leurs compagnes, quelquefois avant même que la dernière ponte ne soit achevée, et leur laissent le soin d’élever seules les petits. Eux qui naguère s’étaient battus pour la possession d’une femelle, sont maintenant d’une froideur et d’une indiffé¬ rence qui ne s’évanouiront qu’au printemps prochain : alors, stimulés par des désirs nouveaux, ils combattront encore devant celle qui doit être le prix de leur ardeur. Les petites espèces monogames sont assez T. IX. OIS peu portées à se battre pour la possession d’une femelle ; elles sont aussi plus con¬ stantes en amour (1). Mais les mâles poly¬ games, ardents et jaloux, ne peuvent voir un concurrent approcher de leurs compa¬ gnes, sans incontinent lui déclarer la guerre. Les Gallinacés, un grand nombre d’Échas- siers, tels que les Combattants, les Jacanas, les Karnichis, sont toujours disposés à se livrer bataille. La nature, en donnant à ces espèces de pareilles mœurs, les a également pourvues d'armes propres à l’attaque et à la défense. Le Coq a des ergots robustes aux tarses; les Pluviers, les Vanneaux, les Ja¬ canas , etc. , ont le poignet armé d’un épe¬ ron corné; la Pintade porte à la tête un casque capable de la protéger, etc. Il est des choses dans la nature sur les¬ quelles l’homme formera bien longtemps encore des conjectures, avant de pouvoir en pénétrer le mystère. Par exemple, qui ja¬ mais nous dira pourquoi cette distinction des familles d’Oiseaux polygames et mono¬ games? Pourquoi ce mâle possède plusieurs femelles, et pourquoi cet autre ne s’attache qu’à une seule? Quelques auteurs en ont cherché la cause dans les conditions de tem¬ pérature. D’après eux, dans les pays froids, les femelles naissant en plus grande quan¬ tité que les mâles, pour un motif qu’on n’explique pas et qu’on ne saurait expli¬ quer, il y a polygamie nécessaire; dans les climats chauds, la monogamie a lieu , parce que le nombre des mâles qui naissent égale celui des femelles. Ce sont là tout autant de suppositions gratuites, que l’exarnen le plus superficiel des faits suffit pour faire crouler; car il est constant que, dans ies ré¬ gions les plus chaudes, vivent et se repro¬ duisent des espèces pulygames; de même que dans les régions les plus froides vivent et se reproduisent un grand nombre de mo¬ nogames. Ainsi , pour ne citer que les gran¬ des espèces, la plupart des Palmipèdes du nord de l’Europe , les Stercoraires, les Guil- lemots, les Macareux, les Cormorans, les (i) U» exemple de polygamie remarquable, le seul peut- être qui existe dans l’ordre des Passereaux, est celui qu’of¬ fre la Veuve à épaulettes rouges. Cet Oiseau , d’après Le- vaillaut ( 2e voyage en Afrique, t. III, p zgt) vit par fa¬ milles A peu pies quatre-vingts femelles composent une famille qui niche en commun ; or , il paraîtrait qu’il n’y a jamais pour ce nombre île femelles que douze ou quinze mâles. f> 42 OIS OIS Fous, les Plongeons, les Grèbes, etc., vivent à l’état de monogamie. Au reste, la conduite de tous les Oiseaux mâles dénote en eux, comme l’a dit Buffon, plus d’amour physique que d’amour moral. C’est pour satisfaire à des désirs pressants qu’ils se choisissent une ou plusieurs fe¬ melles. Les Pigeons eux-mêmes, ces poéti¬ ques emblèmes d’une constance à toute épreuve, ont, comme les autres Oiseaux, leur époque de bonheur et leurs jours d’in¬ différence. Ils sont époux autant que le veut le sort; ils demeurent attachés l’un à l’autre jusqu’à ce qu’un accident funeste à l’un des deux vienne les désunir; mais l’époque des amours est la seule durant laquelle ils se prodiguent des agaceries, et ce n’est que comme prélude à l’acte copulateur qu’ils échangent des caresses. Dans toute autre cir¬ constance, ils sont naturellement peu ex¬ pansifs (1). Ils se suivent presque machinalement , comme le feraient deux êtres qu’un hasard aurait rendus solidaires l’un de l’autre, mais sans manifester beaucoup d’affection. Et ce qui vient à l’appui de ce que nous avançons, c’est que, pendant l’hiver, les Pigeons forment des sociétés nombreuses, dans lesquelles se trouvent pêle-mêle les di¬ vers couples qu’on avait vus, auparavant, vaquer isolément à leurs besoins. Alors on ne les surprend pas dans leurs manifesta¬ tions de tendresse, et alors aussi disparaît la poésie dont, trop souvent, ils ont été l’objet. Nidification. Quoi qu’il en soit, c’est après que les cou¬ ples se sont formés, et quelques jours avant que l’acte de la génération ne soit consommé, que commence, pour la femelle , le rôle pé¬ nible de la maternité. Pour elle, c’est d’a¬ bord le soin de la nidification; car, en gé¬ néral , c’est elle qui travaille à élever lente¬ ment le berceau de sa progéniture. Dès ce moment, et chez presque toutes les espèces, le mâle paraît se sacrifier à sa femelle ; c’est un esclave soumis qui suit partout un maî¬ tre , qui chante pour le charmer; dans quel¬ ques cas, il devient le compagnon de ses (j) L’on remarquera que nous ne prétendons nullement parler des Pigeons domestiques ; nous ne prenons nos exemples que riiez 1rs espèces à l’état de liberté. peines, et l’allège en apportant sa part de matériaux; dans beaucoup d’autres, il ne fait que présider au travail. C’est ordinaire¬ ment la femelle qui construit à elle seule le nid; c’est elle qui amasse les matériaux et les coordonne; c’est elle aussi qui fait élection du lieu où s’élève l’édifice qui re¬ cevra ses œufs. Chez les espèces qui vivent en polygamie, ce fait ne paraît pas avoir d’exception; c’est bien toujours la femelle, qui, se sentant pressée du besoin de pon¬ dre, s’isole delà bande, et cherche un endroit propice pour se livrer à l’acte de la nidifi¬ cation. Il n’est pas de plaisir plus grand, pour quiconque se plaît dans la contemplation des choses de la nature, que celui qu’on éprouve en assistant à toutes les manœuvres auxquelles se livrent les Oiseaux, lorsqu’ils construisent leur nid. Que de soins, quel discernement et quelle adresse n’apportent- ils pas dans celte œuvre! Comment, sans autre instrument que leur bec et leurs pieds, peuvent-ils arranger, fasciculer, lier ensem¬ ble, plus artistementet plus solidement que ne pourrait le faire l’homme, mille et mille fétus? Comment se peut-il qu’un ouvrage aussi fragile en apparence, soit cependant assez fort pour résister aux plus violentes tempêtes? Pourquoi aussi font-ils d’une ma ¬ nière invariable, et toujours avec les mêmes matériaux, une chose qu’ils n’ont jamais appris à faire? Si, comme on l’a dit, c'est l’instinct qui dicte aux Oiseaux tous les actes dont ils nous rendent les témoins, il faut avouer que cet instinct ressemble beaucoup à de l’intelligence. Outre les matériaux que chaque espèce choisit et emploie avec tant de discernement , voyez l’habileté qu’elle déploie dans son œuvre; le lieu qu’elle choi¬ sit pour le placer; la forme qu’elle lui fait prendre; l’état de mollesse ou de consis¬ tance qu’elle lui donne. Ici, c’est la Rous- serole qui fixe son nid aux roseaux , au moyen de quelques anneaux, et en mate¬ lasse fortement le fond, pour que l’évapo¬ ration continuelle de l’eau ne puisse porter atteinte à ses œufs, et plus tard à ses pe¬ tits; c’est la Pie, qui, avec des matériaux grossiers, bâtit à la plus haute cîme d’un arbre, un fort, inaccessible et impénétra¬ ble; là, c’est le Loriot suspendant, hors de l’atteinte de tout petit quadrupède, et sur OIS 43 une branche horizontale, un nid en forme de panier; c'est le Pic creusant le sien dans le tronc des arbres; c’est enfin une foule innombrable d'Oiseaux, qui, avec les mêmes moyens, rivalisent entre eux d’adresse. On dirait qu’ils cherchent à mettre plus d’in¬ telligence les uns que les autres dans la ma¬ nière de loger leurs petits. Qui ne s’est ex¬ tasié devant le travail élégant et parfait du Pinson et du Chardonneret? Qui ne s’est arrêté pour contempler ces gracieux maçons ailés, suspendus sous l’auvent d’une fenêtre ou sous la toiture d’une maison, et y jetant les premiers fondements de leur solide de¬ meure? Et parmi les espèces étrangères, que d'exemples d’une admirable sagacité ne trouve-t-on pas! que d’ingénieuses ressour¬ ces mises en œuvre! Nous admirons, chez nous, l’adresse avec laquelle la Fauvette cis- ticole sait lier une touffe de blé ou de toute autre graminée pour cacher son nid; mais qui ne voit avec surprise celui de l’Ortho- tome, de ce petit Oiseau, qui, choisissant une feuille de l’extrémité d’une branche, et s’assurant de la solidité du pétiole en s’y suspendant, apporte une autre feuille qu’il coud à la première avec des filaments déliés et flexibles tirés des plantes. Le Carouge de la Martinique agit, lui aussi, à peu près de même, et confie à la feuille du Bananier ce qu’il a de plus cher. Cependant, tous les Oiseaux n’emploient pas le même art dans l’acte de la nidifica¬ tion; tous ne donnent également pas à leur ouvrage la même forme. L’Aigle bâtit, dans le creux d’un rocher, un nid vaste, plat et découvert; le Troglodyte et les Pouil- lots font affecter au leur une forme sphé¬ rique ; celui du Cassique Yapou ressem¬ ble à une cucurbite étroite surmontée de son alambic; le Fournier construit le sien avec de la terre, lui donne la disposition d’un four à cuire le pain, et en partage l’in¬ térieur en deux parties , au moyen d’une cloison circulaire; en un mot, les nids of¬ frent presque autant de variétés de formes qu'il y a d’espèces. On pourrait presque en dire autant des matériaux mis en œuvre. La plus grande partie de ces matériaux est empruntée à tout le règne végétal. Beaucoup de nids sont exclusivement composés de brins d'herbes, de filaments provenant de l’écorce d’arbustes , de petites bûchettes. OiS j Quelquefois à ces éléments se trouvent mê¬ lées des matières animales, telles que des plumes, du crin ou de la bourre; d’autres fois aussi la terre leur est associée. Si la plupart des Oiseaux mettent un soin extrême à cacher à tous les regards le ber¬ ceau qui recevra le fruit de leurs amours, d’autres paraissent se soucier peu de le met¬ tre en évidence; de ceux-ci, les uns l’éta¬ blissent dans un endroit de difficile accès, les autres l’exposent dans un lieu découvert et accessible de toutes part&. On se tromperait, si l’on pensait que tous les Oiseaux vaquent isolément à l’œuvre de la nidification; le plus grand nombre, il est vrai, élève un nid à part, mais beaucoup nichent en commun. Les Veuves à épau¬ lettes rouges , vivant en société dans une sorte de république, font des nids remar¬ quables par leurs complications; elles se réunissent en troupes très nombreuses pour construire une habitation commune, divisée en autant de cellules qu’il doit y avoir de pondeuses. Sur la côte du Jutland, sur celle des Orcades , une foule d’espèces des genres Mouette et Goéland nichent égale¬ ment en troupes, et aux Malouines, les Al¬ batros agissent de même, et établissent leurs nids pêle-mêle sur le sable. En admettant qu’il y ait plus d’intelli¬ gence que d’instinct dans la manière dont les Oiseaux font leur nid, on pourrait dire qu’il y a plus d’instinct que d’intelligence dans le choix qu’ils font de l’endroit où ils le posent. Si la Perdrix cherche les hailiers, les buissons , les grandes herbes , et l’A¬ louette, les champs nouvellement ensemen¬ cés, les prairies émaillées; si le Martin-Pê¬ cheur préfère le bord de l’eau, et le Ramier l’arbre des forêts , c’est que là sont leurs besoins, c’est que, hors de là, ils ne sont plus dans leur sphère naturelle, de sorte qu’on pourrait établir, en thèse générale, que l’habitation ordinaire que la nature a assignée aux espèces diverses, celle dont cha¬ cune d’elles ne s’écarte jamais, est aussi celle dont les espèces font choix pour y établir leur nid. Les Oiseaux qui ont coutume de i voler haut et de se percher, placent ordi¬ nairement le leur sur les arbres élevés; les très grands Oiseaux sur le sommet des ro¬ chers; les petites espèces à différentes élé¬ vations , et quelques unes près de terre. 44 OIS OIS Ceux qui ne se perchent pas construisent leur nid au pied des arbres ou parmi les plantes touffues; tes espèces aquatiques le placent au milieu des joncs et des roseaux ; plusieurs d’entre elles le posent sur l’eau même; enfin les Oiseaux pélagiens et rive¬ rains choisissent toujours, ou presque tou¬ jours, un lieu voisin du rivage. Cependant tous les Oiseaux ne construisent pas de nid (1). Il y a parmi eux des espèces qui déposent leurs œufs sur la terre nue sans aucune préparation; d’autres se contentent de pratiquer une petite excavation ; le Cou ¬ cou laisse à une mère étrangère dont il em¬ prunte le nid le soin de faire éclore ses petits; beaucoup d’Oiseaux de proie nocturnes font leurs pontes dans les anfractuosités d’un ro¬ cher ou sur la pierre; d’autres, comme les Guillemots et les Pingouins, se creusent des terriers; il en est enfin qui déposent leurs œufs dans un creux d’arbre, sur la poussière provenant de la décomposition du bois, ou bien qui se contentent, ainsi que le font quelques Mésanges, les Grimpereaux, les Sitelles, de garnir le fond de ces trous de fétus, d’un peu de foin et de quelques plu¬ mes. Accouplement et ponte. Lorsque les nids sont sur le point d’être achevés, mais seulement alors, les désirs de¬ venant plus pressants, le mâle et la femelle se recherchent. Chez la plupart des Oiseaux, chez les Gallinacés et les Palmipèdes, par exemple, un seul rapprochement des sexes suffit ordinairement pour que la génération s’accomplisse. Mais, chez beaucoup d’autres, le mâle est dans la nécessité d’approcher plusieurs fois la femelle avant que l’accouple¬ ment soit consommé. On a dit de ces derniers qu’ils étaient ardents et puissants en amour; c’est là une erreur très grave. Les espèces auxquelles les naturalistes, et Bu (Ton, entre autres, se sont plu à reconnaître des passions ardentes, sont loin de mériter cette réputa¬ tion qu’on leur a faite. De tous les rappro- (i) Un caractère remarquable de la plupart des Palmipè¬ des monogames qui ne font point de nid, et chez, lesquels les deux sexes ce partagent l’incubation, par exemple des Guillemots, des Macareux et des Stercoraires , est que le male et la femelle se déplument le ventre de manière à y présenter un ou plusieurs endroits entièrement nus formant des espèces de cellules dans lesquelles les œufs se logent pendant l’incubation. chements auxquels nous les voyons se livrer, rapprochements qui sont accompagnés de certaines trépidations qui paraissent expri¬ mer le plaisir, un seul a des résultats pour l’acte qu’ils accomplissent, et c’est le dernier ; car c’est seulement alors qu’il y a émission du fluide fécondateur. Toutes les tentatives que le mâle fait avant ce moment sont infé¬ condes, s’il nous est permis d’ainsi dire ; ce ne sont que des manœuvres préliminaires propres, sans doute, à produire chez lui une excitation suffisante pour provoquer l’émis¬ sion de la liqueur séminale. Jugées a ce point de vue, ces espèces seraient donc plus pares¬ seuses qu’ardentes en amour. Un seul accouplement fructueux peut-il féconder un grand nombre d’œufs? Ici les documents manquent presque complètement. Buffon a seulement admis, en s’appuyant sur une observation de Harvey, que le Coq fé¬ conde par un seul acte tous les œufs qu’une Poule peut pondre en vingt jours ; mais nous ne saurions dire jusqu’à quel point ce fait est vrai, et si les expériences qui l’ont produit ont été faites dans des circonstances telles qu’il ne put y avoir lieu à illusion ou à er¬ reur; ce que nous pouvons avancer c’est que les Oiseaux, à l’état de liberté, paraissent avoir un fluide séminal moins prolifique que celui de nos races domestiques (s’il est vrai, toutefois, qu’il n’y ait pas d’exagération dans l’observation rapportée par Buffon), car, chez eux, le rapprochement des sexes se fait toutes les fois que la femelle va pondre ou a pondu. Quoi qu’il en soit, c’est ordinairement après que les premiers désirs ont été satis¬ faits, et lorsque le nid est achevé, que com¬ mence la ponte. Il est à la connaissance de tout le monde que, selon les espèces, le nombre d’œufs, dans une nichée, varie. Ainsi les unes en pondent constamment deux, d’autres même n’en font qu’un seul ; celles-ci en produisent quatre, cinq, quelquefois six, et celles-là de quinze à vingt. Mais, ce qu’on ignore géné¬ ralement c’est que, à l’exception de certaines espèces, telles que les grands Oiseaux de proie, que la nature semble avoir rendus moins féconds que les autres, sans doute pour que, par leur trop grande multiplicité, l’é¬ quilibre ne fût pas détruit; telles aussi que les Pigeons dont les pontes peu fréquen¬ tes, sont ordinairement de deux; que les OIS 45 OIS Plongeonsquien fontégalement très peu, etc.; l’on ignore, disons-nous, qu’à l’exception de ces espèces, toutes les autres pondent par an à peu près le même nombre d’œufs. La Perdrix, la Caille, les Gallinacés, en un mot, et même généralement toutes les espèces polygames, sont très fécondes. Elles peuvent, par une seule nichée, donner le jour à dix ou vingt petits Oiseaux; mais elles ne pon¬ dent ordinairement qu’une fois. 11 est rare qu’elles fassent annuellement deux couvées ; il faut, pour que cela ait lieu, qu'elles y soient déterminées par les circonstances. Or, les autres espèces monogames faisant deux, trois, quelquefois même quatre nichées par an , et pondant chaque fois de quatre à six œufs, il est aisé de voir que leur fécon¬ dité doit être sans contredit aussi grande que celle des Oiseaux polygames. Le nombre des pontes peut donc suppléer au nombre des œufs. Dans ce fait, la nature se dévoile en¬ core à nous sublime et prévoyante. Pondre, incuber, élever les jeunes , ce sont pour les Gallinacés, pour certains Échassiers et pour le plus grand nombre de Palmipèdes, des actes qui se prolongent jusqu’au terme qui leur a été assigné pour la reproduction; or, si, comme les Passereaux en général, qui ar¬ rivent plus tôt à l’état adulte, les Oiseaux po¬ lygames n’avaient fait qu’un petit nombre d’œufs, en raison de la lenteur qu’ont leur petits à acquérir assez de force et d’intelli¬ gence pour rendre inutiles les soins des pa¬ rents, la femelle occupée auprès d’eux, n’eût pu faire d’autres pontes ; l’espèce, par ce fait, eût été bien moins multipliée et aurait peut- être fini par s’éteindre. Les œufs des Oiseaux varient encore, selon les espèces, non seulement sous le rapport des couleurs, mais sous celui de la forme. Quant aux couleurs, ils prennent les diverses nuances du blanc, ils sont bleuâtres, ou verts, ou jaunâtres, ou fauves, ou roux; mais, en outre de ces couleurs dominantes qui sont toujours uniformes et composent le fond de la coquille, les œufs sont très souvent bigar¬ rés ou parsemés de taches de différentes gran¬ deurs et de diverses nuances. Ces taches, régulièrement ou irrégulièrement groupées, tantôt vers l’un ou l’autre pôle, tantôt dans le milieu de l’œuf, sont généralement noi¬ res, rousses, rougeâtres ou brunes (l). (i) Lorsqu’un œuf présente des taches , celles-ci sont On a cru devoir attribuer les teintes di¬ verses qui existent sur les œufs des Oiseaux à la décomposition du sang qui se trouve mêlé aux éléments, dont la coquille est for¬ mée. Celle-ci ne résulterait pas uniquement, selon Carus, d’une excrétion de sels calcaires, mais le sang de l’oviducte qui, ail moment de la ponte, se trouve dans une sorte d’état inflammatoire, mêlerait encore à ces sels des produits auxquels doivent être attribuées les couleurs diverses qui se manifestent sur les œufs. « Toutes ces teintes, dit il, nous rap¬ pellent donc la décomposition du sang, et c’est ce qui explique pourquoi les couleurs élémentaires en sont exclues. » Il est proba¬ ble que, dans les œufs, les couleurs sont dues à quelque chose de semblable ; cependant on ne peut encore rien dire de positif a ce sujet ; car, si la cause de ces taches est dans le sang que les capillaires utérins mêlent aux sels de la coquille, il est bien difficile de concevoir pourquoi, dans toutes les espèces, les œufs ne sont pas tachés, et pourquoi ceux qui le sont n’offrent pas les mêmes teintes. L’on admet en principe, que, de la même cause, résultent les mêmes effets ; or, ici, la cause est la même; puisque le phénomène, identique chez toutes les espèces, se passe dans des organes qui n’admettent pas la moin¬ dre différence dans la série ornithologique, et pourtant les faits prouvent que les résul¬ tats diffèrent. Ceci ferait soupçonner que l’opinion de Carus n’est pas entièrement fondée. En outre, la couleur, quelle que soit son intensité, est tout-à fait extérieure et ne forme sur la coquille qu’une couche légère ; dans tout le reste de son épaisseur, elle est d’un blanc uniforme. Or, si le sang avait mêlé aux sels calcaires qui la composent des produits colorants, il est probable que ces produits devraient se retrouver dans toute la coquille; ce qui est loin d’être. presque toujours produites par une teinte unique , quoiqu cependant la plupart d’entre elles paraissent pouvoir être rapportées à une autre couleur. Ainsi qu’un œuf ayant un fond blanc soit parsemé de points noirs, le plus ordinaire¬ ment à côté de ces points il s’en rencontrera d’autres d’ap¬ parence cendrée Or ceux-ci ne sont pas différents des pre¬ miers; ils ne sont que plus profonds , et pour s’en con¬ vaincre, il suffit d’enlever la légère couche calcaire qui les voile. On voit manifestement alors que res points qui semblaient cendrés, sont parfaitement noirs , et que s’ils ne paraissent point tels sur l’œuf pondu et intègre, c’est que déposés sur la coquille avant que celle-ci ne fût entièrement formée , leur couleur primitive a été dissimulée par un dépôt de matière calcaire, 46 OJS OIS Ce que nous dirons , c’est que les œufs , pondus dans des cavités qui les mettent hors de l’atteinte delà lumière, sont généralement d’un blanc pur, rarement piquetés ou tachés; tels sont ceux des Hibous, des Pics, des Mar¬ tinets, des Guêpiers, des Martins-Pêcheurs , de quelques Mésanges , etc. ; ceux, au con¬ traire, qui sont déposés dans des nids qui ne les défendent pas de l’action des rayons lumineux , sont plus ou moins colorés (1). Ne pourrait-on pas arguer de ces exemples que la lumière a une action sur les produits ovariens des Oiseaux, comme elle en a une sur les autres productions de la nature? Trop de faits contraires s’y opposent. Ainsi les œufs que le Ramier et la Tourterelle dé¬ posent dans des nids situés à la cime des arbres ou sur les anfractuosités des rochers, dans des positions, par conséquent, où la lumière arrive avec facilité , sont entière¬ ment blancs. Au reste, les œufs, quelle que soit leur couleur, étant tels lorsqu’ils sor¬ tent du sein de la mère, il est dès lors évi¬ dent qu’ils ne peuvent devoir leur coloration ou leur décoloration à un agent extérieur; la vraie cause des différences qu’ils présen¬ tent sous ce rapport, doit donc, ce nous semble, être l’objet de nouvelles recherches. Comme les œufs sont assez généralement tachés ; comme ces taches augmentent , non pas en grandeur, mais en intensité à me¬ sure que l’embryon se développe , quelques ornithologistes ont cru trouver des rapports, dans la couleur du fond et les taches des œufs, avec les teintes du plumage (2). Toute (1) Nous ne pouvons admettre avec Gloger , à qui la science doit d’excellentes recherches zooIog;ques, que les Oi¬ seaux dont le nid est le plus à découvert pondent des œufs dont la couleur est la moins distincte possible de celle des objets environnants, de façon à tromper l’œil des animaux i avisseurs ; nous ne saurions admettre aussi avec lui, d’une manieie absolue, que ceux dont les œufs ont une couleur vive, tranchée, et conséquemment très capables de frapper la vue, cachent leurs nids , soit dans les arbres creux , soit ailleurs ; ou bien se mettent à couver après la ponte. Nous pi uduii ons deux faits, qui répondront l’un et l’autre à ces deux pi opositions. Le Ramier et le Loriot font un nid à dé¬ couvert sur les branches des arbres, et cependant leurs œufs ont une couleur très vive, puisqu’ils sont blancs. (2) L intensité de coloration dans les œufs qui sont couvés est un phénomène qui s’explique très naturellement.il pro¬ vient, d’une part, de ce que les matériaux aqueux de l’œuf, c est-à-dire les diverses couches albumineuses qui tendaient à lui donner de la transparence, ont disparu par suite de l’absorption que le fœtus a exercée sur eux , et d’autre part de ce que toute la surface interne de la coquille se trouve à ce moment tapissée par une membrane vasculaire qui doit néi essaiiement avoir pour effet d’en obscurcir les parois. application d’une règle quelconque, tendant à déduire la couleur du plumage d’un Oi¬ seau , de la couleur qu’ont les œufs, nous paraît pour le moins hasardée. En effet, qui 11e sait qup le Faisan doré, dont la livrée est si riche et si diversement nuancée, provient d’un œuf roussâtre, pâle et uniforme? que le Martin-Pêcheur, dont le plumage est si brillamment nuancé de bleu et de vert d’aigue marine , a pris naissance dans un œuf pur et lustré ? Nous pourrions encore citer mille exemples, qui, tous, prouveraient que la couleur des œufs n’a aucun rapport avec celle du plumage. Quant à leur forme et à leur volume, rien n’est plus variable. Depuis celui que l’Au¬ truche confie au sable du désert jusqu’à ce¬ lui que l’Oiseau-Mouche dépose sur l’ouate, on trouve sous ces deux rapports toutes les différences possibles (i). Incubation. Lorsque les nids sont faits, lorsque les œufs sont pondus , c’est à peine si les solli¬ citudes maternelles ont commencé : alors c’est le soin pénible de l’incubation. Il faut que ces tendres mères , oublieuses de leurs autres besoins, et redevables quel¬ quefois à leurs mâles du peu de nourri¬ ture qu’elles prennent , demeurent accrou¬ pies sur les œufs jusqu’au moment où ils éclosent. I! est des espèces chez lesquelles le couple se partage le soin de couver : ce sont, en général, celles qui vivent en mono¬ gamie. A des heures fixes la femelle peut va¬ quer à ses besoins, sans que les œufs qu’elle abandonne aient à souffrir de l’action de l’air, car le mâle la remplace alors dans ses fonctions. Beaucoup d’Oiseaux d’eau, parmi ceux qui nichent en commun , pondent et couvent aussi en commun. Une famille com¬ muniquera sa chaleur à ses œufs aussi bien qu’à ceux de sa voisine, il est d’autres es¬ pèces qui, vivant en polygamie, doivent seules prendre souci de leur couvée, comme (1) O11 i çsqseï vi de la forme des œufs pour déterminer d’avance le sexe. M. Geoffroy Saint-Hilaire et M. Floront- Prevost ont fait, chacun de leur côté, des expériences, pour pouvoir dire en voyant un œuf de Poule ou de Pigeon, quel était le sexe qui devait en résulter ; et ils sont arrivés, après de nombreuses observations, à conclure que des œufs dont les extrémités sont grosses et mousses, naissaient des fe¬ melles; tandis que les mâles provenaient de ceux dont les pôles ont une certaine acuité. OIS OIS 47 aussi elles veilleront seules à l’éducation de leurs petits. Mais alors, par une prévoyance que l’instinct leur dicte, elles ont soin, tou¬ tes les fois qu’elles abandonnent le nid qui recèle leurs œufs, de recouvrir ceux-ci, soit de feuilles sèches , soit de plumes que préa¬ lablement elles se sont arrachées du ventre. L’édredon, cette matière douce et élastique que la sensualité humaine a su si bien uti¬ liser, n’est autre chose que le duvet dont l’Eider (Anas mollissima) enveloppe ses œufs, et qu’il fait tomber de tout son corps, mais principalement de l’abdomen. Toutes les femelles polygames ne prennent pas , il est vrai , les mêmes précautions; il en est beau¬ coup qui vont pourvoir à leur subsistance, sans paraître avoir souci de ce qu’elles aban¬ donnent; mais la plupart de celles-ci ont rendu toute précaution inutile , en choisis¬ sant, pour y faire leur ponte, des lieux abrités et exposés au midi. Enfin il n’est pas d’Oiseaux, qui , par ses actes, ne tra¬ hisse rattachement qu’il a pour les produits émanés de son sein , et destinés à le per¬ pétuer. Qu’on ne dise pas que, sous ce rapport, il est des exceptions ; qu’on ne nous repré¬ sente pas l’Autruche et le Coucou femelle comme des marâtres qui abandonnent ou qui confient ce qu’elles devraient avoir de plus cher, l’une au sable brûlant qui lui sert de demeure , et l’autre à des Oiseaux qui lui sont étrangers : la nature peut avoir inspiré à une espèce plus d’attachement pour sa couvée qu’à une autre ; mais aucune n’en est entièrement privée. L’Autruche et le Coucou ne forment que des exceptions ap¬ parentes ; quand ces Oiseaux ont été mieux observés, on s’est aperçu que l’une , après avoir erré dans les plaines désertes , s’en vient tous les soirs reposer sur ses œufs, que même assez souvent elle les couve pendant la journée ; et que l’autre ne cesse de sur¬ veiller celui ou ceux qu’elle a pondus dans le nid d’autrui, ce que nous ont appris des observations faites par M. Prévost. Le volume des œufs variant, et le degré de température que développent les Oiseaux étant à peu près le même chez tous ( 30 ou 32 environ), on eût pu dire d’avance que le terme de l’éclosion doit varier selon les espèces. Mais , en outre du degré de cha¬ leur que chaque couveuse peut communi¬ quer aux œufs, il est encore des circonstan¬ ces extérieures qui contribuent puissamment à hâter ou à retarder l’éclosion de ceux-ci , et ces circonstances sont celles d’une atmo¬ sphère plus ou moins chaude. 11 est, en ef¬ fet , certain que , durant les fortes chaleurs de l’été, l’éclosion est plus hâtive. Quoi qu’il en soit des circonstances favorables ou dé¬ favorables, on a constaté, ce qui nécessai¬ rement devait être, que les petites espèces naissent bien plus tôt que les grandes. Ainsi aux œufs des Pinsons, des Roitelets, des Mé¬ sanges , etc. , il faut onze ou douze jours pour éclore, aux Pigeons dix huit, aux Poules vingt et un (1) ; plusieurs Échassiers, l’Oie, le Cygne couvent, sans interruption, trente jours environ ; et, s’il faut en croire les ob¬ servateurs , les œufs du Harle huppé n’é¬ closent qu’au bout de cinquante-sept jours. Plus 1 incubation est proche de son terme, et plus la femelle met d’assiduité et d’ardeur à couver. Alors toutes ses affections sont concentrées sur les produits de ses amours; tout en ce moment paraît leur être sacrifié; elle ne néglige rien de ce que son instinct lui dicte, pour maintenir toujours ses œufs dans un degré convenable de température. On dirait qu’elle a hâte de voir le résultat de la fonction qu’elle remplit avec tant de patience, et qu’elle voudrait pouvoir faire avancer le jour qui la verra se livrer à d’au¬ tres soins. Mais ce terme approche, il arrive, sa petite famille vient d’éclore. Alors tout n’est pas fini pour elle; au contraire, re¬ doublant de tendresse et d’énergie pour ses petits, elle met plus de zèle, plus de senti¬ ment dans ses soins. Les premiers jours elle ne les abandonne pas encore; c’est douce joie pour elle de pouvoir les réchauffer sous ses ailes, et pendant que le mâle pourvoit à leur subsistance à tous, elle, doucement posée sur ses faibles petits , les protège et semble les couver encore , afin que la cha¬ leur qu’elle leur communique hâte leur pro¬ grès. Mais l’incubation, sous l’influence de la- (i) 1,’œuf brisseaux, escoutant si plaisante mélo- » die. » Ce qu’écrivait Belon en 1551 peut s’appliquer à tous les temps. Le chant des Oiseaux a toujours eu la puissance d’affecter certaines organisations, au point d’en chan¬ ger l’état moral , et cette puissance appar¬ tient aussi bien à ceux que l’homme retient captifs qu’à ceux qui jouissent de leur pleine liberté. On prend plaisir, quelquefois malgré soi, à entendre, au lever d’un beau jour, l’Alouette qui s’élève dans les airs, le Rossignol qui se cache sous la feuillée, et la Fauvette dans le buisson; on prend égale¬ ment du plaisir à ouïr, le soir, les siffle¬ ments harmonieux du Merle. Tous les Oi¬ seaux chanteurs ne font pas entendre leur voix au même instant; les uns chantent surtout au lever du soleil, les autres sem¬ blent attendre l’heure où cet astre se couche. Les petites espèces granivores préfèrent, pour l’heure de leurs concerts, celle durant laquelle les fortes chaleurs de la journée se font sentir; alors, attroupés sur un arbre, elles font entendre un gazouillement confus qui n’est pas sans quelque charme. La nuit même est troublée par les lugubres plaintes, par les râlements sinistres des Rapaces noc¬ turnes. Le chant dans les Oiseaux n’a pas la même durée. Les uns commencent bien plus tôt que les autres à se faire entendre , les autres se taisent bien plus tard. Parmi les espèces d’Europe, il en est qui, telles que le Rouge-gorge, le Troglodyte, la Draine, la l auvette-Cetti, etc , chantent presque toute l’année; d’autres, comme le Rossignol , la Fauvette-Effarvate, etc., ne se font entendre que pendant deux ou trois mois de l’année, d’avril ou mai , en juillet , en un mot le temps seulement que dure pour eux l’époque des amours. On a reconnu qu’en général , les espèces qui chantent le mieux , ou du moins qui nous plaisent le plus par la douceur de leurs concerts, sont les insectivores. Elles ont or¬ dinairement un son de voix filé, qui est bien moins dur, bien plus moelleux que les cris cadencés , mais quelquefois étourdis¬ sants, des espèces granivores. Cette diffé¬ rence dans le chant des Oiseaux doit être attribuée à la différence dans la forme de leur bec ; chez les premiers , cet organe est plus effilé, plus mince et un peu plus long, tandis que chez les autres il est épais, court et conique. La voix des Oiseaux a tellement d’étendue qu’elle serait pour nous un sujet d’étonne¬ ment si nous ne connaissions toute la per¬ fection qu’a acquise l’organe dans lequel elle s effectue. « L’Oiseau, ditBuffon, en se fai¬ sant entendre d’une lieue (comme les Cigo ¬ gnes , les Oies , les Canards , etc.) du haut des airs, et produisant des sons dans un mi¬ lieu qui en diminue l’intensité et en raccour¬ cit de plus en plus la propagation (1), a, par conséquent , la voix quatre fois plus forte que l’Homme ou le Quadrupède , qui ne peut se faire entendre à une demi -lieue à la surface de la terre, et cette estimation est peut-être plus faible que trop forte; car, indépendamment de ce que nous venons d’exposer , il y a encore une considération qui vient à l’appui de nos conclusions : c’est que le son rendu dans le milieu des airs doit, en se propageant, remplir une sphère dont l’Oiseau est le centre, tandis que le son produit à la surface de la terre ne remplit qu’une demi-sphère, et que la partie du son qui se réfléchit contre la terre aide et sert à la propagation de celui qui s’étend en haut et à côté. » Les Oiseaux , indépendamment du chant et de l’étendue de leur voix ou de leurs cris, (i) A cause de la plus grande raréfaction de l’air dans les régions supérieures de l’atmosphère, que près du sol. OIS OIS ont encore entre eux un certain langage qu’il n’est donné qu’à eux seuls de com¬ prendre. Telle est l’importance de cette sorte de langage , que plusieurs familles semblent se communiquer ainsi leurs sen¬ sations, leurs intentions, au moyen de sons diversement modulés, et les émotions que ces animaux ressentent, comme leurs peti¬ tes joies, leurs craintes et leurs amours. Les mères devinent leurs petits à leurs piaule¬ ments , et elles ont un cri particulier pour avertir ceux-ci du danger qui les menace. A ce cri , les jeunes des espèces de l’ordre des Gallinacés viennent se tapir aussitôt sous l’aile de leur mère ou se cachent ; les autres Oiseaux restent coi et s’enfoncent dans le nid. Il suffit d’un petit sifflement plaintif poussé par le Merle, le Rouge-gorge ou tout autre Oiseau , pour jeter l’alarme et faire rester subitement dans l’immobilité tous les Oiseaux d’un canton ; car ce sifflement est pour eux l’indice de la présence d’un Oiseau de proie dans le voisinage. Selon Yirey, ce langage est celui de la nature, tous les ani¬ maux le possèdent*; car tous se communi¬ quent entre eux , non pas leurs idées, mais leurs affections. Il semblerait que les Oiseaux dussent se borner à répéter, chacun selon leur espèce , le langage de la nature. Il semblerait que l’un ne doive jamais emprunter les accents de l’autre, et pourtant il n’en est rien. Non seulement il existe des espèces qui imitent merveilleusement les cris ou les chants des autres animaux (tels sont le Moqueur, le Merle de roches, leTraquet imitateur), mais il en est aussi qui ont la facilité de retenir et de répéter des airs factices qu’on leur joue ou qu’on leur siffle : c’est ce qu'on appelle le chant artificiel ou emprunté. Les petites espèces, les Merles entre autres, les Alouet¬ tes , les Serins , etc. , sont admirables sous ce rapport; mais ce qui a bien plus lieu d’étonner, c’est qu’il soit donné aux Oiseaux, non pas à tous pourtant, d’imiter la voix humaine, de retenir des mots , des phrases entières qu’ils n’oublient jamais (1). Les (i) En consultant l’histoire, on voit qu’il faudrait remon¬ ter peut-être jusqu’aux premiers temps de la formation des sociétés humaines, pour y rencontrer l’origine de l’usage où nous sommes d’apprendre à parler aux Oiseaux Aristote eu parle comme de quelque chose de fort connu de son temps , et Pline nous apprend que les Romains aimaient beaucoup ces sortes de distractions. 63 Perroquets, tout le monde le sait, possèdent cette faculté au plus haut degré; cependant quelques autres espèces , les Pies, les Geais , les Corneilles, les Sansonnets, par exemple, peuvent aussi prononcer quelques phrases. M. Yirey a écrit, sur le langage artificiel de ces Oiseaux , une fort belle page , que nous ne pouvons nous dispenser de lui emprun¬ ter: « On peut, dit-il, leur apprendre à ar¬ ticuler quelques mots , à exprimer, si je l’ose dire, le matériel de la pensée, à frap¬ per l’air de sons semblables aux nôtres , mais sans pouvoir leur en faire comprendre la valeur, sans leur en donner l’idée que nous y attachons. Ces animaux ne compren¬ nent donc aucun des lahgages humains , quoiqu’ils puissent très bien les articuler; et si on les a vus appliquer, par un hasard heu¬ reux, un mot dans une circonstance favo¬ rable, et qui pouvait les faire soupçonner d’intelligence, ce n’était qu’un pur effet du hasard, puisqu’ils le disent beaucoup plus souvent à contre-temps et sans raison. Il n’est donc pas étonnant qu’ils ne puissent, dans une multitude d’occasions, en rencon¬ trer une qui frappe de surprise ceux qui les écoutent, par cette justesse fortuite dont ces Oiseaux eux-mêmes ne sentent nullement le prix. Us jasent à tout propos , mais ils ne parlent pas véritablement, puisque le lan¬ gage n’est que l’expression des pensées : or, les idées que peuvent avoir les animaux étant simples et presque physiques, n’ayant même aucun rapport avec les pensées abs¬ traites des hommes , il ne peut s’établir entre# eux aucun commerce d’intelligence pure , mais seulement un échange d’affec¬ tions et de sensations physiques. » Cela est si vrai que ces animaux ne trans¬ portent jamais cet art de la parole dans leur sphère; ils s’en tiennent entre eux au seul langage des signes et des cris naturels; l’es¬ pèce ne participe point de la science des in¬ dividus, et ce n’est que dans leurs rapports avec nous qu’ils répètent les voix que nous leur avons enseignées, à peu près comme on ferait réciterde mémoire à un enfant les mots d’une langue qu’il ne comprendrait pas. » Toutefois cette imitation de la parole suppose dans ces Oiseaux une aptitude parti¬ culière et une sorte d’analogie de sensibilité avec nous, puisque la nature des autres es¬ pèces est plus revêche et plus inflexible; car OIS OIS 54 celles-ci ne s’apprivoisent jamais autant que les Oiseaux qui peuvent parler ou qui ap¬ prennent à siffler des airs. En effet, ni les Oiseaux de proie, ni les Gallinacés, ni les Oiseaux a longues jambes, ni les Palmipèdes ne sont capables d’un certain degré de per¬ fectionnement et surtout d’imiter le chant ou la voix humaine, de même que le font les petites races d’Oiseaux. » § IV. Intelligence des Oiseaux. Les Oiseaux ayant des aptitudes différentes ne doivent pas avoir le même degré d’intel¬ ligence. En effet, l’on observe que, sous ce rapport, les uns ont été plus favorisés que les autres. A l’état de nature, les Oiseaux se montrent intelligents dans bien des circon¬ stances; mais, réduits en captivité, cette fa¬ culté semble se développer en eux en raison inverse de leurs besoins. Environnés de soins, au milieu d’une nourriture facile qu’ils n’ont plus le souci de chercher, on les voit plus attentifs, plus dociles, et partant plus aptes à nous donner des preuves de ce qu’ils peu¬ vent comprendre et faire. La plupart d’entre eux sont très disciplinables et aptes à recevoir nos instructions. Des Oiseaux même qui, par leur nature, semblent devoir se plier diffi¬ cilement à ce que nous exigeons d’eux, les Rapaces, par exemple, deviennent très do¬ ciles à la voix du maître qui les instruit. Quant aux petites espèces, on les condamne à la galère, on leur fait exécuter une foule d’exercices amusants, et toujours ils mettent dans leur jeu une précision qui étonne. Ici, ne pourrions-nous pas nous demander s’jj n’y a pas chez les Oiseaux faculté déjuger? Cette question paraîtra peut-être un peu hasardée et rencontrera de l’opposition de la part des personnes qui pensent que, en de¬ hors de l’homme, tout est instinct dans la série animale. Notre intention n’est pas de faire de la métaphysique; mais, comme l’o¬ pinion d’autrui ne nous impose pas ici l’o¬ bligation de taire la nôtre, nous dirons que tous les actes des êtres placés bien au-dessous de l’homme, de ceux, par exemple, dont nous faisons l’histoire, ne sont pas toujours purement instinctifs. Nous ne prétendons pas affirmer que tous les Oiseaux puissent juger au même degré; nous croyons même qu’il peut s’en trouver qui soient incapables de réflexion; mais, n’en existerait -il que quelques unes qui fussent susceptibles de juger, nous nous croirions en droit de soute¬ nir la question que nous nous posons. Or, il est évident pour nous que les Oi¬ seaux forment des jugements. Ceux qui vi¬ vent en liberté, en donnent des preuves fréquentes , lorsqu’on les observe bien. Le Moineau ne s’approchera point d’un appât qui lui déguise un piège, surtout s’il a déjà failli s’y prendre , ou s’il a vu un de ses compagnons en être la victime. Serait-ce machinalement que les Oiseaux ont non seulement la faculté de se communiquer ce qu’ils ressentent , mais de deviner même, dans nos mouvements et nos gestes, ce que nous exigeons d’eux, lorsque nous les éle¬ vons en domesticité? Est-ce par un pur ins¬ tinct que le Corbeau, la Pie et tant d’autres Oiseaux apprennent à parler et retiennent des phrases? Nous avons été témoin nous- même d’un fait qui nous a frappé, et qui nous a montré que l’Oiseau n’agissait pas toujours instinctivement. Nous avons vu qu’un jeune Serin à qui le hasard , proba¬ blement, avait appris que certaine sub¬ stance dont on le nourrissait parfois, acqué¬ rait plus de tendreté, ou peut-être un goût plus agréable, après qu’elle avait été trem ¬ pée dans l’eau, aller lui-même faire macérer cette substance dans son abreuvoir , avant de s’en nourrir. Évidemment cet acte de sa part résultait d’une comparaison; or, com¬ parer, c’est juger. D’ailleurs, si nous avions besoin de nous appuyer d’une puissante autorité, G. Cuvier dirait avec nous « que les Oiseaux ne man¬ quent ni de mémoire ni même d’imagina¬ tion, car ils rêvent (1) ; » or, avec de la mé- (r) Voici un fait dont il nous serait difficile , on le com¬ prendra, de garantir l’authenticité. Si nous le citons, c’est plutôt à cause de son originalité que pour le faire servir de preuve à ce que dit G. Cuvier. Plutarque , dans son Traité de l’industrie des animaux ( cli. 18, V) ( rapporte qu’à Rome un barbier possédait une Pie qui répétait tout ce qu’elle entendait. Un jour il advint que certains trompettes s’arrêtèrent longtemps à sonner devant la boutique du bar¬ bier. Depuis ce moment et tout le lendemain , voilà cette Pie pensive, muette et mélancolique, ce qui étonna tout le monde, et fit penser que le son des instruments l’avait peut- être étourdie et qu’avec l’ouïe sa voix s’était éteinte. Mais enfin on fut trompé, et l’on vit qu’elle était livrée seule¬ ment à la réflexion ; qu’elle étudiait intérieurement com¬ ment elle reproduirait le son des trompettes qu’elle avait entendues. Aussi parvint-elle à les imiter parfaitement ; c’est au point , ajoute PJutarque, qu’elle oublia même pour ces sous nouveaux, et qui l’avaient tant préoccupée, tout ce qu’elle savait auparavant. OIS OIS moire et de l’imagination, il paraît.impos- sible qu’il puisse n’y avoir autre chose en eux, que de l’instinct. Virey dit également que l’on peut enseigner aux Perroquets mille choses qui exigent non seulement de la do¬ cilité et une certaine flexibilité dans l’orga¬ nisation, mais même beaucoup de mémoire et quelques lueurs de raisonnement. Ce qu’on a dit de l’intelligence bornée de certains Oiseaux est quelquefois exagéré. L’homme a cru voir dans la stupidité appa¬ rente de quelques uns, matière à proverbes ; Ainsi il a dit : bête comme un Oie, pour dé¬ signer le dernier degré d’intellect; dans son espèce : tête de Linol , pour un homme de peu de sens : butor ( nom d’un Héron, que l’on s’est plu à considérer comme l’emblème de la stupidité ) , pour une personne stu¬ pide; mais des proverbes ou des maximes qui émanent d’une observation mal faite, ne prouvent rien : l’Oie, le Héron, et sur¬ tout le Linot, ne sont pas plus dépourvus d’intelligence que la masse des Oiseaux. Il paraîtrait pourtant que cette faculté est plus considérable , à mesure que l’on re¬ monte des Palmipèdes, par les Échassiers et les Gallinacés , aux Passereaux, aux Rapaces et aux Grimpeurs. § V. Migrations des Oiseaux. Nous avons dit les amours des Oiseaux, nous avons parlé de leur reproduction , de leur chant, de leur langage naturel ; eh bien ! toutes ces facultés, tout ce luxe de plumage dont nous avons vu la plupart des rr aies se revêtir, tous ces témoignages d’une affection vive, d’une sympathie étroite, toute cette exubérance de vie, ces jalousies, ces com¬ bats, en un mot tout ce que le printemps avait fait naître en eux de beauté, d’amour, de tendresse, tout cela cesse, tout cela dis¬ paraît avec les beaux jours. Le printemps avait commencé une métamorphose, l’au¬ tomne en opère une autre; et ce changement ne s’effectue pas seulement à la superficie de l’animal; ce ne sont pas seulement des plumes qui tombent pour faire place à d’autres plumes ; c’est quelque chose de plus profond ; ce sont, comme nous l’avons déjà dit, les organes de la génération qui se rapetissent, et, avec cette modification en eux, les sentiments qui s’éteignent. L’Oiseau a impérieusement obéi à la nature en ac¬ complissant le grand acte de la reproduc¬ tion. A cet effet, son instinct l’avait guidé vers des lieux propices; son instinct le con¬ duit maintenant vers d’autres lieux. Il part ; et lorsque l’influence des saisons se fera en¬ core sentir, alors seulement ses affections renaîtront pour disparaître encore. Cependant tous les Oiseaux n’abandon¬ nent pas le sol natal ; il en est qui y demeu¬ rent fixés, ou qui ne s’en écartent qu’à de faibles distances ; les autres, après un séjour plus ou moins long dans le pays où ils se sont reproduits, le quittent pour des voya¬ ges plus ou moins lointains. Or, c’est en raison de ces différences qu’on a distingué les Oiseaux en sédentaires et en émigrants. Parmi les phénomènes variés que la na¬ ture nous présente , les voyages des Oiseaux sont certainement un des plus curieux, et sur lequel l’attention des naturalistes s’est le plus exercé, ce qu’attestent les nombreu¬ ses observations publiées à ce sujet Malgré ce qui en a été dit, malgré ce qu’ont écrit à cet égard MM. Brehrn , Temmink, Schlegel et une foule d’autres ornithologistes , beaucoup de faits intéressants restent inexpliqués et demeureront probablement longtemps en¬ core à l’état de problème. Lorsque l’on considère la. manière dont les migrations des Oiseaux ont lieu , lors¬ qu’on a égard aux causes qui les provoquent, on est conduit à les distinguer naturelle¬ ment en migrations annuelles ou régulières et en migrations irrégulières ou acciden¬ telles. Celles ci, qui n’ont rien de réglé, rien de périodique , ne sont entreprises que dans des moments d’extrême nécessité , ou sont la conséquence d’une perturbation at¬ mosphérique. C’est lorsque la disette frappe une contrée, que les espèces qui l’habitent n’y trouvant plus de quoi s’y nourrir, pas¬ sent dans d’autres localités plus favorables. Mais ces causes ne se produisant pas tous les ans, il en résulte ces irrégularités que nous observons dans le passage de ces es¬ pèces. Quant aux migrations annuelles , ce sont celles auxquelles sont constamment soumis, dans un temps et dans des circon¬ stances données, le plus grand nombre des Oi¬ seaux. Toutefois, parmi ceux-ci, il en est qui , grâce à la puissance de leur appareil locomoteur, se transportent à des dis¬ tances sans limites , pour ainsi dire , traver- 56 OIS Oi S sent les mers , passent d’un continent à l’autre ; tandis que d’autres paraissent bor¬ ner leurs courses au continent qui les a vus naître. Émigrant à des époques fixes , ils s’avancent de proche en proche du nord , vers les contrées méridionales , à mesure que le froid les poursuit. Ces espèces, que l’on a appelées erratiques, habitent ordi¬ nairement pendant quelque temps une contrée avant de passer dans une autre. Une chose digne de remarque, c’est que certains Oiseaux qui voyagent de très bonne heure sont l’indice certain d’un hiver ri¬ goureux. Il semblerait que les Oiseaux devraient avoir besoin du grand jour pour pouvoir se diriger dans leur vol , et cependant il n’en est rien. Si, parmi eux, il en est, comme les Rapaces diurnes , les Corbeaux , les Mé¬ sanges, les Gros-Becs, etc. , qui voyagent pendant la journée, un très grand nombre émigre durant la nuit. Ce fait est sans nul doute fort extraordinaire, mais pourtant il est certain. Les Rapaces nocturnes., les Merles , tous les Becs-Fins , une très grande partie des Oiseaux aquatiques, sont dans ce cas. Beaucoup d’autres émigrent en même temps et la nuit et le jour. On ne conçoit guère comment tous ces voyageurs noctur¬ nes peuvent passer le temps de la migration sans dormir ; et ce qu’il y a de remarquable, c’est que cette insomnie n’existe pas seule¬ ment chez ceux qui sont en liberté , mais encore chez ceux qu’on retient captifs. Il n’y a rien de si singulier que d’entendre ceux- ci , tant que dure l’époque des voyages , voltiger ou chanter toute la nuit dans leur cage. Lorsqu’il fait clair de lune, ils sont beaucoup plus agités , beaucoup plus in¬ quiets que lorsque l’obscurité est profonde. Cette même agitation s’observe chez les es¬ pèces libres; car ils voyagent en plus grand nombre et bien plus volontiers lorsqu’ils sont éclairés par la lune. Ce serait une erreur de croire que les Oi¬ seaux font leur voyage tout d’une traite sans s’arrêter, etsurtoutsans manger. Tous s’arrê¬ tent dans des localités en rapport avec leur nature, soit pour s’y reposer, soit pour y prendre de la nourriture; mais ils ne s’y établissent pas; ils disparaissent de ces lieux lorsqu’ils ont satisfait à leurs besoins. Ordinairement , quand les migrations ne sont troublées par aucune perturbation at¬ mosphérique , il est rare que les Oiseaux s’arrêtent plus de un ou deux jours dans un endroit. Si la plupart des Oiseaux migrateurs , comme les Oies, les Grues (1), les Cigo¬ gnes , les Hérons et beaucoup d’autres . tiennent le haut des airs lorsqu’ils émi¬ grent , il en est , et c’est le plus grand nom¬ bre , qui ne s’élèvent jamais au-dessus des régions moyennes. Du reste, tous parais¬ sent vouloir se maintenir à une certaine distance de la surface du sol; car ils s’élè¬ vent lorsqu’ils ont des montagnes sous eux, et ils s’abaissent lorsqu’ils traversent des vallées. Quand l’atmosphère est envahie par des brouillards, tous volent également dans les basses régions. Il ne suffit pas , pour qu’un Oiseau émi¬ gre , que le moment où s'effectue d’ordi¬ naire son déplacement soit arrivé; il faut encore que le temps lui convienne et que le vent lui soit favorable. II sait choisir l’un et l’autre, et l’instinct le guide à cet effet. Lorsque les vents contraires ont une durée trop grande, il part cependant; mais alors, pour atténuer les fatigues du voyage , il multiplie ses stations. Ce qui est difficile à concevoir , c’est que les petites espèces puissent suffire aux mi¬ grations que nous leur voyons entrepren¬ dre. Comment la plupart de celles qui habi¬ tent le nord de l’Europe , en Islande et en Norvège, osent-elles braver les tempêtes de l’Océan pour arriver jusqu’à nous'? Comment la Caille, avec une aussi faible puissance de vol, se hasarde-t-elle à traverser deux fois l’an la Méditerranée? Ce sont là de ces faits que l’on constate , mais qui ne trouvent pas d’explications suffisantes. Le vol n’est pas le seul mode de locomo¬ tion que certains Oiseaux emploient pour (i) Une opinion généralement accréditée parmi les oise¬ leurs, c'est que les Grues conduisent les autres Oiseaux de passage , et emmènent tous ceux qu’elles trouvent sur leur chemin. M Brueli (Lis, G0 livr , t8?.4, p. G74), à l’appui de cette assertion, cite les deux faits que voici : Étant un jour a la chasse aux Alouettes , une compagnie de Grues vint à passet , et dans le meme instant il vit toutes les Alouettes se joindre à elles et émigrer avec ces Oiseaux. Une autre foi*, M. Bru. h étant à une chasse o.j il y avait un très grand nombre d’Oiseaux de rivage, ainsi que beaucoup de Palmi¬ pèdes, les chasseurs firent lever une compagnie de Grues, et aussitôt tous les Oiseaux de passage qui se trouvaient dans les environs partirent avec elles. OIS o/ opérer leur déplacement. Les Poules d’eau et les Râles étant hors d’état de voler à une distance même peu considérable, font une grande partie de leur migration à pied. Enfin quelques Oiseaux aquatiques , dont les ailes sont tout-à- fait impropres au vol , font leur voyage à la nage. Ainsi le grand Pingouin ne peut abandonner les glaces du nord qu’en se mettant à nager. Il en est de même pour les Manchots. Les Guillemots , les Plongeurs et plusieurs autres Oiseaux semblables font également une bonne partie de la route sur l’eau. Quant à la direction des voyages, on peut dire , règle générale , que , dans l’ancien continent, les Oiseaux gagnent le sud-ouest en automne et le nord-est au printemps; cependant on conçoit qu’ils puissent dévier de leur route , car le cours des rivières , la direction des montagnes, sont des causes qui peuvent changer leur marche. Dans le nou¬ veau continent, les Oiseaux ne suivent pas, lors de leur passage, la même direction que ceux de l’ancien monde ; ainsi les Oiseaux aquatiques du Groenland vont dans le sens du sud-est. On a cru longtemps que les es¬ pèces des pays inter-tropicaux n’étaient point sujettes a émigrer , et qu’elles ne passaient jamais l’équateur; mais M. de Humboldta observé que plusieurs Canards et plusieurs Hérons , qui étaient à quelques degrés au nord de l'équateur, passaient la ligue, et allaient à quelques degrés au sud, et que le gonflement des rivières déterminait ces mi¬ grations. Une chose remarquable , c’est que, chez beaucoup d’espèces, les jeunes ne voyagent point avec les vieux, et, ce qui est plus cu- rienx, ne suivent pas la même route. Il en résulterait qu’un grand nombre d’Oiseaux doivent faire, dans leur première année, un voyage qu’ils ne feront plus de leur vie. Mais qu’est-ce qui porte les Oiseaux à émigrer? Pour celui qui veut s’élever à la connais¬ sance des causes, celles qui déterminent les migrations sont certainement intéressantes à chercher. Mais cette question a déjà été peut-être trop agitée pour qu’on puisse es¬ pérer de la résoudre d’une manière satisfai¬ sante ; il en est résulté trop d’opinions op¬ posées les unes aux autres. Tout ce que l’on peut dire, c’est qu’ici, comme en beau- t. ix. OIS coup d’autres choses , les causes générales nous échappent, et que de ce phénomène longtemps étudié , l’esprit humain n’a pu que formuler des hypothèses ou à peu près. Cependant nous devons tenir compte de ce qui a été écrit à ce sujet. Nous ne dirons rien de l’opinion de quel¬ ques naturalistes du siècle dernier , qui avançaient que le désir qu’avaient les Oi¬ seaux de visiter les pays qu’ils découvraient en s’élevant dans les airs, était ce qui les déterminait à faire les voyages qu’ils en¬ treprennent; nous ne nous arrêterons pas non plus à celle qui veut que les migrations soient dues à certains courants atmosphé¬ riques : de pareilles opinions se réfutent d’elies-rnêmes. Nous n’examinerons pas non plus s’il est vrai, comme on l’a avancé, que les Oiseaux n’émigrent que parce que les vieux, auxquels est dévolu le soin de l’édu¬ cation des jeunes, sont forcés d’entreprendre avec eux des voyages , ahn de leur faire connaître du pays. Cette raison , qui a en elle quelque chose d’exagéré , tomberait d’elle -même si Ton n’avait positivement constaté qu’en général les jeunes et les vieux font bande à part. Nous ne parlerons que des hypothèses qui ont pour elles l’ap¬ parence de la vérité. L’illustre auteur de la découverte de la vaccine, E. Jenner, a attribué aux modifica¬ tions périodiques que subissent les organes sexuels chez les Oiseaux, la cause excitatrice de leurs migrations; il est certain, d’après lui, que ces modifications les déterminent à chercher un climat plus favorable à l’accou¬ plement et à la propagation des petits, ainsi qu’à leur nutrition. A bien considérer cette opinion, on pourrait dire qu’elle n’est pas dénuée de tout fondement. Il paraît proba¬ ble que les circonstances de reproduction ont leur part dans les causes qui déterminent les Oiseaux à se déplacer; car nous voyons une foule d’espèces qui semblent ne venir chez nous que dans le seul but de se reproduire. Malheureusement cette raison, apportée par Jenner, ne servirait à expliquer qu’une par¬ tie du phénomène, puisqu’elle n’aurait rap¬ port qu’à l’arrivée des Oiseaux au printemps ; et lors même que l’on supposerait que l’a¬ trophie des organes génitaux provoque leur départ, comme leur développement a dé¬ terminé leur arrivée, il resterait toujours à 8 58 OIS OIS expliquer pourquoi les testicules et les ovai¬ res se tuméfiant également chez toutes les espèces, toutes n’émigrent pas. Une autre opinion est celle qui attribue aux Oiseaux la faculté de pressentir le temps qui doit avoir lieu, ce qui, par conséquent, les porte à émigrer; c’est celle que M. Brehm regarde comme étant le plus en harmonie avec les faits. Il y a, d’après lui, dans les Oiseaux un instinct qui les fait partir, et qui les initie aux événements météoriques qui se préparent; il y a chez eux une faculté particulière de pressentir tout ce que la sai¬ son doit avoir de rigoureux; une sensibilité exquise pourles changements atmosphériques qui ne sont pas encore arrivés, mais qui s’ap¬ prêtent. Dès lors, avertis qu’ils n’auront pas suffisamment de quoi se nourrir là où ils se trouvent, ils se précipitent, malgré les dan¬ gers , vers les contrées qui leur promettent davantage. Mais certains Becs-Fins, les Mar¬ tinets, quittent nos pays dans les premiers jours de juillet, bien avant qu’ils ne puis¬ sent prévoir la rigueur du temps; mais tou¬ tes les Fauvettes, les Rossignols, qu’on en¬ vironne de soins, qu’on soustrait aux influen¬ ces météoriques, voyagent chaque nuit dans leur cage, quand vient l’époque des migra¬ tions. Le pressentiment de ce qui doit arri¬ ver ne serait donc pas la cause unique qui porterait les Oiseaux à émigrer. Enfin une troisième hypothèse est celle qui a pour objet la question de nourriture , c’est-à-dire ce besoin qu’éprouvent les ani¬ maux de trouver en tout temps les moyens de contenter leur appétit, selon leur goût. C’est ainsi que l’on pourrait expliquer ics migrations de la plupart des Oiseaux insec¬ tivores de notre pays. Ce neseraient, par con¬ séquent, pas les circonstances de froid et de chaud qui les forceraient à nous quitter, mais le besoin, et les Palmipèdes pourraient encore en fournir la preuve ; car les Canards qui arrivent chez nous l’hiver cherchent moins la température qu’ils ne cherchent les étangs, les rivières et les lacs que la glace n’a point envahis. Cette hypothèse, que l’on pourrait étendre à beaucoup d’espèces voya¬ geuses , quoique très vraisemblable , n’est pas pour cela entièrement satisfaisante. Les expériences de tous les jours prouvent que les Oiseaux partent indépendamment de toute nourriture, et ce qui se manifeste chez ceux que nous élevons sera toujours une objection sérieuse à toutes les opinions qui ont été émises. Un Oiseau de passage que l’on tient dans une température constante et au milieu, pour ainsi dire, d’une nourriture abondante et convenable , n’en éprouve pas moins, comme dans l’état de nature, le be¬ soin d’émigrer lorsque l’époque du départ est venue. Les Cailles, par exemple, annon¬ cent alors leur désir de partir par des batte¬ ments d’ailes, par de l’agitation, par des clameurs; elles dépérissent et meuren t même, sans que, par l’examen de leurs organes, on puisse se rendre compte de cette mort. Le Coucou est dans le même cas. On dirait qu’une sorte de nostalgie est, comme l’a voulu Eckstrœm, la cause des migrations de ces espèces. Ce désir de voyager, quelles que soient les circonstances favorables dont on environne les Oiseaux, explique, jusqu’à un certain point, pourquoi la plupart des es¬ pèces qui nichent dans nos climats, mais dont le départ a lieu presque immédiatement après la ponte, ou aussitôt que l’éducation des jeunes est finie, ne peuvent être élevées en cage qu’avec la plus grande difficulté. Toutes les raisons que l’on a données pour expliquer les voyages des Oiseaux ne peuvent donc, prises isolément, s'appliquer à tous les cas. Si le besoin de se reproduire semble pousser, au printemps, les Oiseaux à chercher un lieu où ils puissent accomplir convenable¬ ment cette fonction; à l’automne, ils sont certainement avertis par d’autres besoins: tantôt ce sont des changements atmosphéri¬ ques à venir qui paraissent les faire partir, le plus souvent c’est la nécessité de pourvoir à leur subsistance; mais, par-dessus tout, comme le prouvent les Oiseaux captifs, un sentiment ou un instinct indépendant de toutes ces causes. § YI. Durée de la vie des Oiseaux. Nous placerons ici quelques considérations sur l’âge auquel les Oiseaux peuvent at¬ teindre. On conçoit que, pour une pareille question, les données que possède la science doivent être fort restreintes , parce qu’il nous est impossible de suivre les espèces dans leur vie errante. Le seul fait authentique et un peu concluant , ayant trait à la longévité de certaines espèces libres, est celui qui nous OIS OIS 59 est fourni par le Héron dont parle Girardin dans son Tableau des Oiseaux qu’on rencon¬ tre communément en France. Ce Héron a vécu cinquante-deux ans , ce qu’attestent les anneaux qu’il portait à l’une de ses jam¬ bes , car il fut tué dans le département des Vosges en 1783, et le plus ancien des an¬ neaux où se trouvait inscrite l’époque de la première prise qu’on en avait faite , était à la date de 1731. 11 est probable que cet oiseau qui, dit-on, était plein de vigueur et de santé au moment où il perdit la Yie , aurait pu fournir encore une assez longue carrière. Quoi qu’il en soit, on pourrait conclure de ce fait que les Hérons vivent d-e longues années. Il en serait de même des Cigognes : on cite un couple qui était venu nicher sur le même toit pendant plus de quarante ans, ce qui laisserait supposer que ces Oiseaux ont une existence au moins aussi durable que celle des Hérons. Mais si nos connaissances relativement à la durée de la vie des Oiseaux vivant en pleine liberté sont fort bornées, au moins pouvons-nous connaître d’une manière un peu plus certaine celle des espèces que nous élevons en domesticité, ou que nous rete- nons captives. Cependant ici la longévité d’un Oiseau dépendant beaucoup des soins qu’on prend de lui, des circonstances plus ou moins favorables dont ont l’environne, elle doit présenter de nombreuses variations. On cite des Perroquets qui ont vécu au-delà d’un siècle ; et l’on a vu des Rossignols , des Pin¬ sons , des Cbardonneretsvivre jusqu’à vingt- quatre ans en cage. L’âge des Oiseaux de basse-cour et de volière serait d’autant plus intéressant à observer, que c’est par lui seul que nous pouvons acquérir, non pas des données certaines, mais approximatives, sur la durée de la vie des Oiseaux en général ; encore faudrait-il qu’il fût possible de placer ces espèces dans des conditions les plus voi¬ sines de l'état de nature. Nous sommes per¬ suadés qu'en agissant ainsi on trouverait beaucoup à rabattre sur ce qu’on a dit de la longévité de certains Oiseaux. Du reste , sans qu’il soit besoin de nouvelles observa¬ tions, il est permis de mettre en doute la longue existence qu'on attribue au Cygne , à la Corneille et au Corbeau. Le premier , a-t-on dit, vit trois cents ans , et Hésiode , au rapport de Pline, donne à la Corneille neuf fois la vie de l’Homme et trois fois au Corbeau , ce qui, d’après son calcul , serait pour l’une sept cent vingt ans , et pour l’autre deux cent quarante. Nous ne dirons pas quelle croyance il faut attacher à de pareils contes. Un fait assez remarquable, c’est que la croissance plus prompte des Oiseaux n’em¬ pêche pas qu’ils ne vivent un temps bien plus long que les Mammifères. La durée de la vie de ceux-ci est estimée à six ou sept fois le temps qu’ils mettent à croître, tandis que les autres vivent quinze , vingt et jus¬ qu’à trente fois ce même temps. CHAPITRE IV. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DES OISEAUX. S’il a été possible de découvrir les lois qui régissent la distribution des Mammifè¬ res à la surface du globe , s’il a été facile d’assigner à chacun d’eux une patrie, et par conséquent une circonscription géographi¬ que , la difficulté a été grande , lorsqu’on a voulu entreprendre pour les oiseaux ce qu’on avait fait pour les Mammifères. Ce qui était possible avec les uns, parce qu’ils sont fixés, pour ainsi dire, au sol, devenait presque impossible avec les autres, à cause de leur nature et de leur humeur vagabonde. Ceux- ci, généralement aides par des moyens puis¬ sants de locomotion, qui leur permettent de se transporter dans tous les lieux , et favo¬ risés par une organisation qui les rend capa¬ bles de supporter des températures extrê¬ mes, pouvant par conséquent devenir cos¬ mopolites , si l’on peut ainsi dire , ont tou¬ jours fait naître des difficultés lorsqu’il a fallu les distribuer géographiquement. Ainsi une espèce d’Oiseaux passe alternativement d’une contrée du monde à l’autre , d’un continent sur un autre continent. Telle espèce, après avoir séjourné plus ou moins longtemps en Europe, va habiter l’Afrique, et telle autre, qu’on trouve ordinairement en Asie ou dans l’Amérique du Nord , fait assez souvent des apparitions chez nous. Cette sorte de fluctuation est peu propre , on en conviendra, à établir une géographie ornithologique. Cependant, beaucoup d’Oi¬ seaux, on ne saurait le nier, ont une rési¬ dence habituelle, et sont soumis à une cir¬ conscription bien déterminée. Par exemple, les Colibris n’ont pu être encore observés 60 OIS OIS que dans une partie bornée de l’Amérique; l’on a reconnu aussi que les Eurylaimes, les Toucans, les Philédons, et quelques au¬ tres genres , sont confinés dans des habita¬ tions restreintes. Dans l’impuissance où l’on s’est trouvé jus¬ qu’ici de pouvoir circonscrire géographique¬ ment les Oiseaux d’après des lois certaines, quelques auteurs se sont bornés à faire une récapitulation numérique des espèces obser¬ vées dans les diverses contrées du globe, considérées isolément dans leurs limites na¬ turelles ou politiques. Mais un pareil travail, qui consiste à reconnaître que l’Europe et l’Afrique australe comptent environ cinq cents espèces , les États-Unis d’Amérique quatre cents, le Brésil et les îles de l’Ar¬ chipel plus d’un mille, les parties explorées de la Nouvelle-Hollande à peu près trois cents, etc. , ne peut être d’aucun intérêt réel pour la science. Il nous paraît cependant possible, en sui¬ vant une autre voie, d’arriver à des consé¬ quences capables de satisfaire. Que faudrait - il pour cela ? donner une patrie aux Oiseaux, les fixer en quelque sorte au sol. Or , on le peut, en considérant le pays natal d’une espèce comme sa vraie patrie. Nous sommes persuadés que cet expédient conduirait à des résultats importants , et'qu’une distribution géographique des Oiseaux ne peut être effi¬ cacement et logiquement établie qu’en tant qu’on aura égard au lieu où ils se reprodui¬ sent. On ne saurait se dissimuler qu’en adoptant ce moyen, il ne faille de longues années de recherches avant que la science ait à enregistrer les considérations générales qui en résulteront ; mais si celte voie est la plus longue, elle est aussi la plus féconde et en même temps la plus rationnelle. Une question qui se rattache à la distri¬ bution géographique des Oiseaux est celle de leur création et de leur dispersion à la surface de la terre. Les débris fossiles en¬ fouis dans les diverses couches dont la croûte de notre globe est composée, témoignent que les animaux n’ont pas été formés en même temps , mais qu’il y a eu plusieurs créations successives, et que les espèces les plus inférieures sous le rapport de Lanima- lité, ont précédé celles d’une organisation plus élevée. Prenant en considération ces données géologiques, et faisant son point de départ de la genèse du globe , M. Lesson s’est demandé si l’on ne pourrait pas attri¬ buer la dispersion de certains Oiseaux sur tous les points de notre univers, à la créa¬ tion successive des espèces , création qui au¬ rait précédé ou suivi immédiatement le dégagement des terres du sein des eaux. D’après lui, les Oiseaux n’ont pu être créés que successivement et non simulta¬ nément. « Si l’on admet , dit-il , que la surface de la terre a été couverte d’eau , il faut admettre aussi que les Palmipèdes ont été créés pour vivre dans un fluide qui seul renfermait alors leur pâture ; que par suite les Rapaces , fixés sur les sommets sourcil¬ leux des hautes montagnes, vivant de proie ou de charognes rejetées par les flots , appa¬ rurent lorsque les terres se dégagèrent du sein des mers; qu’enfin, les Échassiers se disséminèrent sur les grèves au niveau de la ligne des eaux, et que c’est ainsi qu’on peut se rendre compte de l’identité de quelques espèces sur presque tous les rivages du globe. Enfin , lorsque la végétation fut établie, ap¬ parurent les Oiseaux omnivores, etc., les Granivores ne purent naître que lorsque les plantes herbacées qui donnent les graines dont ils s’alimentent, ou les végétaux qui portent des fruits , se furent développés. « U y a dans cette manière d’expliquer la dispersion de certains Oiseaux sur toute la terre, quelque chose de séduisant. Mais, on l’a dit depuis longtemps, rien n’est re¬ belle comme un fait, et les faits ici sont contraires à cette conception , ou du moins on ne pourrait en citer aucun qui lui serve de base. Rien ne prouve que certains Pal¬ mipèdes, que certains Rapaces , que des Échassiers que l’on trouve presque sur tous les points du globe , datent de la sortie des terres du sein des flots, et aient été créés successivement les uns après les autres. II résulterait, au contraire, des nombreuses recherches faites par M. Gervais sur les Oi¬ seaux fossiles ( Thèse inaugurale pour le doc¬ torat ès-sciences ) qu’il est impossible au¬ jourd’hui d’indiquer à quelle époque cette classe d’animaux a commencé d’exister sur le globe terrestre, et que toute conclusion fondée est rendue impossible par l’imper¬ fection de nos connaissances à cet égard. OIS CHAPITRE Y. UTILITÉ DES OISEAUX POUR L’HOMME ET PROFITS QU’IL EN RETIRE. L’attachement que l’Homme a pour les êtres qui l’environnent est en raison des avantages ou de la satisfaction qu’il peut en retirer. C’est là un axiome de tous les temps, tellement clair et tellement démon¬ tré, qu’il suffit de l’énoncer pour qu’il soit admis. Ainsi, les animaux qui lui sont le plus utiles, ceux qui partagent ses travaux et ses fatigues, ceux qui veillent sur lui , ceux qui lui procurent une nourriture facile et agréable en même temps , sont aussi ceux sur lesquels il veille , qu’il élève auprès de lui, et dont il favorise la propagation par des moyens qu’il emploie à cet effet. Si les Oiseaux n’avaient eu qu’un exté¬ rieur agréable; si leurs mœurs n’avaient été que douces, gaies et aimables, ils n’au¬ raient peut-être mérité de notre part qu’une admiration passagère; mais aux agréments de leur physique, comme à leur gentillesse, se joignait une utilité réelle qui nous les ren¬ dait très précieux, et nous avons fait la conquête des uns, et des autres le but de nos chasses continuelles. Il y a une foule d’espèces chez lesquelles toutes les parties, ainsi que les produits qu’elles donnent et les services qu’elles ren¬ dent, sont d’un immense avantage pour l’économie domestique, pour le commerce et pour l’agriculture, et celles-là, l’homme les protège ou les a multipliées en assez grand nombre pour que ses besoins en soient satisfaits. La Poule, l’Oie, le Pigeon, la Dinde, en un mot, toutes les espèces qu’on est convenu d’appeler Oiseaux de volière et de basse-cour, lui fournissent tous une nourriture succulente; mais, en outre, l’une lui produit des œufs en si grande abon¬ dance, qu’ils font la richesse de certaines contrées ( voy . la note, p. 39) ; l’autre n’est pas moins productive par les plumes et le duvet qu’elle lui procure; celle -ci four¬ nit des matières fécales, qui, desséchées et mises en poussière , sont , pour les terres sur lesquelles on les répand , un tonique puissant , par conséquent une cause de bonne récolte (1); enfin celle-là lui rend (r) II existe des parties du littoral de la mer, et des iles dont le sol entier, jusqu’à une assez grande profondeur, 018 61 encore des services éminents, en détruisant les Insectes nuisibles aux champs. Du reste, les Oiseaux domestiques ne sont pas les seuls dont l’homme retire quelque avantage; la plupart de ceux qui vivent en liberté lui ont fourni et lui fournissent en¬ core un aliment exquis et des produits d’une utilité incontestable. Aussi ne devons-nous pas nous éionner, si , dans les temps anciens et modernes, mille moyens de destruction ont été employés contre eux. Columelle et Varron, les deux auteurs latins qui nous ont transmis le plus de documents touchant l’économie domestique et rurale, rapportent que, de leur temps, la chasse aux Oiseaux, et notamment aux Canards sauvages, for¬ mait une branche considérable d’industrie dans certaines localités. Ce qui avait lieu à l’époque dont parlent Columelle et Var¬ ron , existe encore chez nous sur certains points du littoral de l’Océan, par exemple, à Arcanchon et à Mon treuil-sur -Mer. On prend annuellement, dans ces localités, plu¬ sieurs milliers de ces Palmipèdes et autres, qui sont d’une grande ressource pour les villes des environs et même pour Paris. Sur d’autres points , ce ne sont plus les Oiseaux qui forment une grande partie de la nour¬ riture des habitants, mais leurs œufs. Ainsi, dans les îles de la Norwége, en Islande, à Féroé, aux Orcades, les insulaires se nour¬ rissent une partie de l’année des œufs des espèces aquatiques. Quoique la chair de tous les Oiseaux ne soit pas également bonne; quoique les pays civilisés, au sein desquels règne l’abondance et le bien-être, aient aujourd’hui leurs es¬ pèces de choix, et que celles dont la chair peut affecter désagréablement le goût y soient repoussées, cependant il n’en a pas toujours été ainsi. Jadis les Hérons , les Cigognes , les Paons figuraient sur nos tables; les Ro¬ mains, nos pères en gastronomie, pour sa¬ tisfaire un fol orgueil et un luxe excessive¬ ment destructeur en introduisant sur leurs tables quelque mets nouveau, non seule¬ ment présentaient à leurs convives les es- n’est composé que de la fiente des Oiseaux aquatiques; telle est, vers la côte du Pérou, l’île d’Iquique, dont les Es¬ pagnols tiraient ce fumier, et le transportaient pour servir d’engrais aux terres du continent. Les rochers du Groenland sont couverts, au sommet, d’une espèce de tourbe foi niée de cette même matière et des débris des nids de ces Oiseaux. (A. Malheb.ee.) 62 OIS OIS pèces dont nous venons de parler (1), mais leur offraient encore des langues de Phénico- ptères et de la chair d’Autruche. L’empereur Héliogabale, ce même homme qui faisait ser¬ vir à sa table six cents cervelles de cette dernière espèce, trouvait un plaisir inouï à manger des Perroquets, devenus, sous son règne, fort communs à Rome. Au reste, on peut dire que la chair d’aucun Oiseau n’a été négligée. Les Mouettes et les Goélands sont une ressource pour les Groënlandais. Les Sauvages des Antilles, selon le R. P. Du- tertre , se contentent aussi de ce mauvais gibier, et autrefois les austères cénobites vivaient, pendant le carême, d’une partie de ces Oiseaux, qu’on apportait sur les mar¬ chés de Paris. Encore aujourd’hui, les ha¬ bitants de la Libye se nourrissent des Au¬ truches privées, dont ils mangent la chair et vendent les plumes, ce que naguère fai¬ saient ceux de la Barbarie. Au reste, il pa¬ raîtrait que les diverses peuplades d’Afrique se sont, de tous temps, nourries de la chair de l’Autruche ; car Moïse, dans ses lois, en dé¬ fendait l’usage à son peuple. Enfin, le besoin fait tous les jours trouver excellents des Oi¬ seaux pour lesquels , dans des circonstances plus heureuses, on se fût senti peu de goût. Ainsi les navigateurs, auxquels la nécessité a donné assez fréquemment l’expérience de rendre profitables les choses même les plus mauvaises, sont souvent bien aises de ren¬ contrer des localités où les Oiseaux marins (en général détestables sous le rapport de l’odeur infecte et repoussante que leur chair exhale) puissent remplacer leurs ressources épuisées (2). A toutes les époques et dans tous les lieux, les Oiseaux ont donc fourni une nour- (1) Le Paon , autrefois , était servi à Rome dans tous les repas un peu distingués. Ilirtius Pansa s’étant avisé de donner un festin où ee mets obligé ne figurait pas, passa pour un bomme sans goût et perdit toute considération parmi les gastronomes romains. Aussi, les Paons étaient-ils chez eux une branche considérable de commerce. Pausidius Lucro retirait i3 ou r4 mille livres de rente du métier d’en- graisseur de Paons. Un troupeau de cent de ces Oiseaux rendait habituellement plus de 60,000 sesterces , lesquels selon l’évaluation de Gassendi, représentent to ou 12 mille francs. Chez les Grecs, les Paons, beaucoup plus rares, se vendaient mille drachmes ( environ 8 à 900 francs la paire. (2) L’équipage de l’Uranie , dans l’expédition de décou¬ vrîtes, commandée par le capitaine Freycinet, fut réduit, apres un naufrage aux Malouincs, à manger des Manchots. MM Quoy et Gaimard, naturalistes et médecins de l’expé- r i tu re à l’homme; mais on ne s’est pas borné à les faire servir d’aliment , on a en¬ core demandé aux plumes qui les revêtent et à leur chair des agents thérapeutiques susceptibles d’être efficacement employés dans certaines maladies. Si l’expérience, ou plutôt la raison a fini par faire disparaître de nos pharmacopées tous les médicaments qu’on retirait des Oiseaux; si, dans tous les pays éclairés, on ne croit plus à la vertu médicatrice de telle ou telle de leurs parties, toujours est-il qu’il n’en est pas de même là où la civilisation n’a pas encore fait de grands progrès. Certaines peuplades de l’A¬ frique attachent un grand prix au fiel de l’Outarde houbara, et le regardent comme un remède souverain contre la cécité. Ce n’est pas à dire que, de nos jours, on ne re¬ connaisse quelques qualités a la chair des Oiseaux ; ainsi , celle de la plupart des Gal¬ linacés , en général blanche et délicate au goût, a la réputation d’être fort saine et de digestion facile, tandis que la chair des In¬ sectivores et des Vermivores, ni moins sa¬ voureuse, ni moins nourrissante cependant que celle des Gallinacés , n’est qu’un peu plus excitante : toutefois il y a loin de ces qualités aux propriétés qu’on lui attri¬ buait. Mais c’est principalement sous le rapport des arts, de l’industrie, du luxe, de la mol¬ lesse, etc., que les Oiseauxsont d’unegrande utilité et d’un emploi, l’on pourrait dire général; car les peuples policés , comme les sauvages , ont toujours su mettre à profit une partie de leurs dépouilles. Ici, les Péru¬ viens, selon Marcgrave, ont le talent de composer, avec les plumes des Perroquets, des tableaux dont rien n’égale l’harmonie et les variétés des couleurs ; là, les Chinois em¬ pruntent au Faisan doré et au Paon les par¬ ties les plus riches de leur parure, pour en fa¬ briquer des éventails et des écrans; ailleurs, ce sont les Lapons qui se font des bonnets d’hiver avec la peau des Plongeons; d’un autre côté, ce sont les sauvages de la mer du Sud qui taillent leurs vêtements dans dition , rapportent que , quoique ces Oiseaux fussent pour tout le inonde un très mauvais aliment , cependant lorsque leurs provisions manquaient, ils 11e laissaient pas (l’aller à l 'Ile des Pingouins , qu’ils considéraient comme leur maga¬ sin de réserve, et d’en rapporter des Manchots en nombre tel, que l’équipage pouvait s’en nourrir pendant deux jours. OIS OIS 63 celle des Manchots et des Pingouins , ou les Indiens de l’Amérique qui composent les leurs avec des plumes de Toucans et de Per¬ roquets. D’ailleurs, qui ne sait que les plu¬ mes qui ornent l’aile du Geai et les flancs de la Perdrix rouge, que le duvet du Cygne, la gorge veloutée du Manchot, .celle du Tou¬ can, le plumage soyeux et argenté des Grèbes, servent, chez nous, non plus à confection¬ ner des vêtements, mais à garnir les robes des dames? C’est encore pour la toilette des dames qu’ont été mis à contribution ces brillants et précieux Oiseaux quedepuis deux siècles nous lirons de la Nouvelle-Guinée ; ces plumes vaporeuses que fournit la Cigo¬ gne connue vulgairement sous le nom de Marabou; ces autres plumes décomposées, qui garnissent le croupion du Casoar; enfin celles dont on dépouille l’Autruche depuis un temps immémorial. Les anciens em¬ ployaient ces dernières comme distinction militaire; ainsi les Grecs ornaient de plumes d’Autruche le casque des statues représen¬ tant Minerve et Pyrrhus. De nos jours, la consommation que l’on fait de ces plumes dans tous les pays civilisés est vraiment prodigieuse; car elles ne servent pas seule¬ ment à la parure des femmes, mais elles ornent quelquefois le chapeau des rois, le casque des guerriers, les habillements de théâtre; enfin on les emploie encore pour parer les dais dans les cérémonies religieu¬ ses et funèbres. L’industrie, le luxe, ne sont pas seuls à avoir utilisé les plumes des Oiseaux; la mol¬ lesse et la sensualité les ont également mises à profit. Ainsi, le duvet de certains Oiseaux d’eau, tels que l’Éider, le Cygne, fournit à la molle volupté des coussins ou des vêtements chauds et doux, et les plumes del’Oie, du Canard, de la Pouleetd’une foule d’autres espèces, procurent des lits en même temps élastiques et souples. Enfin l’art retire aussi de grands avan¬ tages des plumes des Oiseaux. C’est dans les grandes pennes des ailes de quelques espè¬ ces, par exemple, de l’Oie, du Cygne et delà grande Outarde (1), que l’homme, du ve au Yie siècle de notre ère, a trouvé des instru- (i) M. Malherbe , dans son ouvrage intitulé : Du râle des Oiseaux chez les anciens et les modernes , dit que les pê- rheurs recherchent les plumes de l’Outarde pour les atta¬ cher à leurs hameçons, parce qu’ils croient que les petites menls propres à fixer ses pensées; celles du corbeau servent à armer les touches du cla¬ vecin, et deviennent, en outre, d’une grande utilité pour les dessins linéaires et à la sé¬ pia. Nous dirons, en dernier lieu, que les anciens utilisaient encore les plumes des Oi¬ seaux en en garnissant leurs flèches, qui, parce moyen, acquéraient un degré de jus¬ tesse , dont elles auraient été, sans cela, dépourvues : de nos jours, les peuplades sau¬ vages les emploient aux mêmes fins. Ces profits, ces avantages que l’homme retire de la plupart des Oiseaux , seraient seuls suffisants, sans doute, pour expliquer pourquoi il a attiré les uns auprès de lui , et pourquoi il fait une guerre continuelle aux autres ; mais il est certaines espèces qui sont d’une utilité non moins grande, et celles-ci sont en général placées sous la protection des peuples. De ce nombre, sont quelques Échassiers, qui purgent la terre des Reptiles venimeux; tels sont encore la plupart des Oiseaux de proie tant diurnes que nocturnes , dont le rôle , dans l’écono¬ mie de la nature, paraît être de débarrasser nos champs et nos moissons d’une foule de petits Mammifères qui pourraient leur être nuisibles. L’Ibis, la Cigogne, le Vautour percn’bptère, étaient, dans l'ancienneÉgyple, placés sous la sauvegarde des lois , parce qu’il importait que leur vie fut respectée, à cause des services signalés qu’ils rendaient en dévorant, soit les cadavres d’animaux que le Nil, dans son retrait, abandonnait, soit les voiries dont la putréfaction, en vi¬ ciant l’air, serait devenue une source de maladies pestilentielles. De nos jours, les Cathartes Aura et Urubu reçoivent au Chili et surtout au Pérou la protection que jadis , en Égypte, on accordait aux Oiseaux dont nous venons de parler. Les habitudes de ces espèces , par suite de la sécurité dont elles jouissent , sont devenues tellement fa¬ milières, qu’on les voit n’éprouver nulle crainte, et vivre au milieu des rues et sur les toits des maisons. Leur utilité est d’au¬ tant mieux appréciée sous une température constamment élevée , et sous un ciel habité par la race espagnole, que ces Oiseaux sem¬ blent seuls chargés de l’exercice de la police, taches noires dont elles sont émaillées paraissent autant de petites mouches aux poissons , qu’elles attirent par cette fausse apparence. 64 OIS OIS relativement aux préceptes d’hygiène publi¬ que, en purgeant les alentours des habita¬ tions , des charognes et des immondices de toute sorte, que l’incurie des habitants sème au milieu d’eux. Des amendes assez fortes sont imposées à ceux qui tuent un de ces Oiseaux, comme jadis à Thèbes, à Alexandrie, à Damas, etc., on punissait de mort celui qui avait eu l’imprudence de tuer le dieu protecteur de l’Egypte , l’Ibis. Le rôle que les Cathartes remplissent au Pérou et au Chili, est dévolu , dans les en¬ virons de Calcutta et de Madras, aux Cigo¬ gnes Marabou, Argale et Chevelue. Elles contribuent, en dévorant les cadavres, à préserver ces contrées du fléau redoutable auquel elles sont exposées, et pour ces mo¬ tifs elles sont respectées et protégées. Les petites espèces ne nous rendent pas de services moins signalés en détruisant les Chenilles , les Vers , et une multitude d’in¬ sectes nuisibles à l’agriculture. Elles sont quelquefois le seul obstacle que la nature ait opposé à la trop grande multiplication des Sauterelles, et par conséquent aux dé¬ gâts qu’elles auraient pu occasionner. Les Martins roselins sont de véritables bienfai¬ teurs pour les contrées exposées à ce formi¬ dable fléau; ils poursuivent ces Insectes en ennemis implacables, et ne se lassent pas dans l’œuvre de la destruction qu’ils font , non seulement des individus à l’état parfait, mais encore de leurs œufs et de leurs lar¬ ves: aussi les Tatars et les Arméniens les considèrent-ils comme étant en quelque sorte des Oiseaux sacrés. Les Étourneaux sont pour nos contrées ce que les Martins roselins sont pour l’Arménie, la Crimée, la basse Arabie, etc. Ils purgent nos champs d’une foule d’animaux destructeurs. Seule¬ ment, comme nous n’avons plus rien de sacré chez nous , nous nous permettons, à notre détriment , de leur faire une chasse assidue. Du reste , nous ne respectons pas davantage les autres petits Insectivores , dont le précieux secours a cependant plus d une fois contribué à nous conserver quel¬ ques unes de nos récoltes. Nous sommes loin d’avoir, comme autrefois les habitants de l’île de Lemnos , les Alouettes et plu¬ sieurs autres petits Becs-Fins en grande vé¬ nération. L homme a encore retiré des Oiseaux un autre genre d’avantage bien différent de tous ceux que nous avons signalés jusqu’ici, en mettant à proüt l’instinct de certaines espèces pour la chasse et pour la pêche, et en leur apprenant à asservir et à conquérir pour lui les animaux dont il avait besoin. Les Chinois et les Japonais, aujourd’hui en¬ core, se servent du Cormoran et du Pélican pour la pêche des rivières. Ce moyen, au¬ trefois en usage en Angleterre , est actuel¬ lement tombé en Europe dans une désué¬ tude complète. Mais c’est surtout l’art de la chasse à l’aide des Oiseaux de proie , en d’autres termes la fauconnerie , qui avait pris et qui conserve encore dans certains pays une importance immense. « Inconnue chez les anciens, ditM. A. Malherbe, quoi¬ que Aristote parle d’une chasse à l’Oiseau pratiquée par les Thraces , la fauconnerie nous est venue des peuples barbares, princi¬ palement des nations du Nord. Ce divertis¬ sement était réservé à la noblesse, et les dames le partageaient avec les gentilshom¬ mes (1). » Or, l’usage de cette chasse, que, vers ces derniers temps on a essayé de faire renaître dans quelques parties du nord-ouest de l’Allemagne , en France (2) et en Hol¬ lande, existe encore dans toute sa vigueur, dans quelques contrées de l’Orient. C’est ce qui résulte des détails curieux donnés à ce sujet par M. A. Jaubert , dans son voyage en Arménie et en Perse. « Les Persans, dit- il, ne déploient plus dans leurs parties de chasse cette magnificence dont Chardin a tracé le tableau. Cependant ils ont conservé la chasse au Faucon , plaisir dispendieux , dont le goût leur vient probablement des Tartares. Le shah possède un grand nom¬ bre d’Oiseaux de cette espèce, provenant des pays situés au nord-est d’Astrakhan, et qui sont dressés avec beaucoup d’art. « Les peu¬ plades des montagnes du Caucase et des provinces transcaucasiennes pratiquent, comme les Persans, la chasse au vol. (1) I elle était la passion avec laquelle les seigneurs et les princes se livraient à cet exercice , que l’on avait fait du Faucon un attribut nobiliaire, et que les rois confiaient des cliaiges de fauconniers ou grands fauconniers aux premiers dignitaires du royaume. François I r avait plusieurs cen¬ taines de Faucons, et dépensait des sommes énormes pour la fauconnerie. Henri IV lui-même, sans se livrer à de si folles prodigalités, partageait cependant le goût de François Fr. (2) M, le prince de Beauffremont a chassé en 1843 , a l’Oiseau de proie , dans le voisinage de la forêt de Com- piègne. OIS OIS S’il y a lieu de s’étonner que l’homme ait pu parvenir à dresser, à son profit, les Oiseaux aux exercices de la chasse et de la pêche, combien ne doit-on pas admirer le parti qu’il a su tirer de cet instinct, qui porte certaines espèces à revenir aux lieux dont ils font leur demeure habituelle. L’usage fréquent où l’on est aujourd’hui de con¬ vertir ces espèces en messagers fidèles et agiles, n’est d’ailleurs pas nouveau, puis¬ que, selon Pietro délia Valle, depuis fort longtemps, en Asie, on envoie des pigeons porter des billets à plus de cent lieues de distance. Il paraîtrait, du reste, que dès la plus haute antiquité on connaissait l’avan¬ tage que l’on pouvait tirer des Oiseaux sous ce rapport , car, selon les légendes orien¬ tales, le roi Salomon, fils de David, avait une Huppe apprivoisée qui portait ses or¬ dres dans toutes les parties du globe. C’est par le moyen de cette Huppe qu’il entrete¬ nait des relations avec la célèbre Balkis, reine de Saba. Ce fait, qui renferme un peu de merveilleux , n’indique pas moins , d’une manière certaine, que, vers ces époques reculées , l’on savait déjà que certains Oi¬ seaux peuvent servir de messagers. Par leur nature et leur organisation , les Oiseaux généralement peu susceptibles à se plier au joug et à la discipline, n’ont pu, comme les Mammifères, devenir les com¬ pagnons de nos peines et de nos travaux; cependant il existe une espèce que l’homme a su transformer en serviteur fidèle : c’est le Jacana. Cèt oiseau apprend à garder les troupeaux , il fait la ronde , il appelle de sa grande voix les brebis qui s’éloignent, et devient, à cet égard, le rival de l’animal le plus intelligent et le plus utile, du chien. Enfin , si nous voulions dire tous les ser¬ vices que les Oiseaux ont rendus ou rendent à l’homme, nous aurions encore à parler de ces espèces pclagiennes , qui viennent ap¬ porter l’espoir au navigateur perdu entre le ciel et l’eau , en lui annonçant une côte prochaine; nous dirions que ce sont eux qui , dans l’enfance de l’humanité , ont pro¬ bablement indiqué au laboureur l’époque de leurs cultures. Nul doute que l’homme n’ait cherché à se diriger dans ses travaux , soit d’après l’arrivée, soit d’après le départ de telle ou telle autre espèce. Avant qu’il eût appris à mesurer l’année, avant que T. ix. 05 pour lui il y eût des mois et des saisons, les Oiseaux devaient être son guide (1). D’ail ¬ leurs, même encore de nos jours, le peuple de la campagne ne voit-il pas dans le chant du Coq un indice de pluie; dans l’appari¬ tion inaccoutumée, soit d’une troupe de Jaseurs, soit des volées innombrables des Corneilles ou des Canards que le froid chasse du Nord , le pronostic certain d’un hiver ri¬ goureux ? Nous trouverions encore des faits qui tendraient à démontrer que les Oiseaux n’étaient pas étrangers à certaines détermi¬ nations que jadis le laboureur prenait pour hâter ses semailles ou pour retarder ses ré¬ coltes. Sous un autre rapport, ne voyons-nous pas, à une époque qui est éloignée de nous de deux mille ans, un peuple, lorsque le besoin de connaître l’issue d’un événement futur le tourmentait, chercher à lire cette issue dans le vol, dans les cris d’un Oiseau ? ne voyons-nous pas ce peuple, tant sa su¬ perstition était grande, tant ses préjugés étaient enracinés, se laisser abattre ou rele¬ ver son courage, en entendant le devin se prononcer sur la manière dont les Poulets sacrés avaient mangé? Tout cela se passait à Rome, à une époque où Rome n’était pas encore allée chercher dans la Grèce d’autres superstitions; car la patrie d’Aristote a eu les siennes en ce genre, et c’est dans les li¬ vres grecs que les Romains qui nous ont transmis toutes ces fables avaient puisé que, de l’Ibis ou du Courlis, l’homme a appris à prendre un lavement; que l’Oiseau qu’ils nommaient Alcyon lui avait donné l’exemple de l’amour du prochain ; le Vautour brun (ce qu’on a attribué au Pélican), celui de la famille, et le Cygne, les moyens d’avancer sur les flots. Au reste, les Romains n’ont pas été les seuls à tirer des augures des actes, du vol et des cris des Oiseaux; les Chaldéens, les Grecs, les Gaulois et la plupart des an- (r) Les anciens observaient le temps (le l’apparition et de la disparition du Coucou en Italie. Les vignerons qui n’a¬ vaient point achevé de tailler leurs vignes à son arrivée, dit Columelle, étaient icgardés comme des paresseux, et deve¬ naient l’objet de la risée publique ; les passants qui les voyaient en retard leur reprochaient leur paresse en ré¬ pétant le cri de cet Oiseau. Olaus Magnus dit aussi que les laboureurs avaient égard à la position des nids des Hiron¬ delles de rivage, et que selon que ces nids étaient construits sur un lieu bas ou élevé ( ce qui indiquait un accroissement ou un décroissement dans la pluie) , ils se décidaient à se¬ mer ou dans les vallons ou sur les montagnes, 9 66 OIS OIS ciens peuples avaient aussi cette habitude. Mais, ce qu’il y a de plus curieux, c’est que de nos jours, dans les îles Célèbes, à Manado, certaines espèces, au rapport de Dumont- Durville, sont encore un objet de culte, et que les fonctions de prêtre y consistent, comme autrefois à Rome, dans la divination par le chant et le vol des Oiseaux, ainsi que par l’aspect des entrailles palpitantes. L’enfance de presque toutes les nations semble donc avoir eu des hommes qui ont jeté leurs re¬ gards sur les Oiseaux pour leur demander soit des services réels, soit des services fac¬ tices ou imaginaires. Aujourd’hui nous ne leur demandons plus que ce qui peut nous être d’une utilité immédiate. Mais si les Oiseaux procurent des avanta¬ ges à l’homme, ne lui causent-ils pas quel¬ ques dommages? Il n’est que trop vrai que certains d’entre eux sont extrêmement nui¬ sibles à ses moissons et à ses autres récoltes; aussi a-t-il fait parfois contre eux des lois sévères et répressives. Si celles qu’il a lan¬ cées contre les Rapaces sont injustes, en ce sens que les services que ces Oiseaux rendent en dévorant les petits animaux nuisibles, compensent grandement la destruction qu’ils font du gibier, l’on peut dire que celles qu’il a rendues contre quelques espèces granivo¬ res sont parfaitement motivées par les rava¬ ges que celles-ci font, sans compensation, à nos récoltes. Pourtant, il est des personnes assez igno¬ rantes des faits pour avoir entrepris de faire l’apologie des Oiseaux qui font le plus de tort à l’homme. Les grains et les fruits qu’ils dé¬ robent au propriétaire leur étaient dus ; car, sans eux, toute une moisson , toute une ré¬ colte, serait devenue, à les entendre, la proie des Insectes. C’est, selon eux, un grand crime de faire la chasse aux Moineaux, parce que ces Oiseaux détruisent quelques épis et quel¬ ques fruits en voulant saisir un Insecte qui les ronge ; mais surtout ce ne peut être que par une aberration des plus fortes que l’homme, à les entendre, a dicté ces lois qui frappent d’anathème et vouent à la mort une des plus utiles et des plus aimables fa¬ milles, celle des Pigeons bisets. Certes, nous comprenons aussi bien que ceux qui se font les justificateurs des déprédations des Oiseaux que l’homme n’est pas le maître exclusif de la terre, et que tous les pitres animaux ont leur part au soleil et aux productions de la nature; car celle-ci, en les créant, a voulu qu’ils vécussent. Mais, cette même nature, en faisant que l’homme fût leur ennemi, en lui inspirant les moyens d’en détruire des quantités considérables et, par conséquent, de s’opposer à la trop grande multiplicité de ceux qui auraient pu lui être nui&ibles, n’a- t-elle pas voulu établir par là une sorte d’é¬ quilibre dans son économie, comme elle a voulu que les Carnivores fussent proportion¬ nellement moins nombreux que les petites espèces qui doivent leur servir de pâture. Toutestprovidentiel dansce monde; l’homme ne fait, à l’égard des autres êtres, que ce qu’il devait faire ; car la nature, en le créant roi de la terre, a sacrifié tout le reste , soit à ses besoins, soit à ses intérêts. Quoi qu’il en soit, ce qu’il y a de bien certain, c’est que, si on laissait multiplier tranquillement le Moineau et tant d’autres petits Granivores , si on laissait l’innocent Biset accroître paisiblement sa race et vaga¬ bonder sans porter contre lui des lois qui permettent de le tuer à telle époque de l’an¬ née, celle des semailles par exemple, il est bien certain, disons-nous, qu'au lieu d’avoir une belle moisson, au lieu de voir prospérer un champ de Pois, de Fèves, de Haricots, etc., on n’aurait à contempler que de rares épis, de l’Ivraie ou des Chardons. Mais, en général, les dégâts que font les Oiseaux et surtout les grandes espèces Gra¬ nivores sont avantageusement compensés par l’utilité de ces mêmes espèces comme aliment. De sorte que nous répéterons ce que nous avons déjà dit d’une manière générale, que les Oiseaux sont plus utiles que nui¬ sibles. CHAPITRE VI. CLASSIFICATION DES OISEAUX. Les singularités que présente l’organisa¬ tion des Oiseaux, la variété de leurs mœurs, de leur chant, etc., sont des circonstances dignes de toute l’attention des naturalistes ; mais, pour étudier avec fruit ces circonstan¬ ces dans tous leurs détails, il était nécessaire, avant tout, que l’on pût distinguer avec précision les espèces dans lesquelles on vou¬ lait les observer, et c’est pour arriver plus facilement à cette distinction que les natu¬ ralistes ont eu besoin de créer la nomenela- OIS OIS 67 ture et la méthode , c’est-à-dire ces deux parties fondamentales delà science qui con¬ sistent, l’une à imposer des noms aux objets, et l’autre à disposer ces objets selon leurs rapports ou affinités réciproques. Lorsque les collections , lorsque les cata¬ logues étaient peu riches en espèces, la dé¬ termination de celles-ci et leur disposition en ordres, en genres, etc., étaient faciles. On pouvait alors établir des coupes bien tranchées, très distinctes les unes des autres, et circonscrites par des caractères assez nets ; mais, à mesure que les découvertes de tous les jours sont venues augmenter le nombre des Oiseaux connus, à mesure que des faits plus nombreux et mieux appréciés, que des observations plus exactes et plus complètes sur les espèces se sont successivement intro¬ duits dans la science , on n’a pas tardé à s’apercevoir des irrégularités que présen taien t les travaux entrepris dans le but de classer ces espèces et de la difficulté qu’il y avait de les distribuer d’une manière systématique et sûre en même temps, sans que cette dis¬ tribution prêtât beaucoup à l’arbitraire. Mais, plus la difficulté était grande, et plus il semblerait que les efforts se soient multi¬ pliés pour la vaincre. Aujourd’hui on pour¬ rait compter par centaines les essais qui ont été faits aux diverses époques pour modifier et pour perfectionner la classification des Oiseaux. Cependant, malgré ces tentatives sans nombre, tentatives qui sont, il faut le dire, un indice non équivoque de l’embarras où se sont toujours trouvés les naturalistes en présence des faits, la méthode ornitholo¬ gique, dans plusieurs de ses parties, reste dans un état d’imperfection que le temps seul pourra faire disparaître; carie temps, en nous initiant de plus en plus à la connais¬ sance des mœurs des Oiseaux, finira par nous fournir les éléments à la faveur des¬ quels il sera possible d’instituer des groupes naturels. Les auteurs qui ont essayé de classer sys¬ tématiquement ou méthodiquement les Oi¬ seaux, n’ayant pas pris pour base de leur classification les mêmes caractères et n’étant point partis des mêmes principes, ont dû ar¬ river nécessairementà des résultats différents; or c’est à l’exposé de ces résultats que nous consacrerons ce chapitre. On voit, lorsqu’on se reporte aux temps anciens, que, si les naturalistes ont été plus soucieux d’étudier les Oiseaux sous le point de vue de l’économie domestique , ils n’ont cependant pas tout-à-fait négligé les rapports des espèces entre elles. Ainsi Aristote, dans son immortel ouvrage sur les animaux, ne se borne pas , comme on l’a dit, à donner un simple tableau des mœurs, des habitudes et de la conformation extérieure des Oiseaux ; mais il indique encore sur quelles bases doit être fondée leur classification. En effet, pre¬ nant en considération les différences que présentent les pieds des diverses espèces, il distingue celles-ci en deux grandes sections. Dans la première, il place celles qui ont les doigts divisés, et dans la seconde, celles qui les ont réunis. D’un autre côté , Aristote pense qu’on peut encore, en ayant égard au genre de nourriture, distinguer les Oiseaux en ceux qui mangent de la chair vi¬ vante, en ceux qui vivent de vers et de cada¬ vres d’animaux, et en ceux qui ont un régime frugivore. En dernier lieu, le séjour était encore pour le grand philosophe de l’anti¬ quité un élément de classification ; car, selon lui, on pouvait établir une distinction entre les espèces qui vivent à terre, celles qui fré- quententles fleuves et les lacs, et celles enfin qui séjournent sur la mer. Après Aristote, Pline, dans le livre X de son Histoire naturelle, n’établit pas entre les Oiseaux de distinctions plus heureuses , car il adopta la manière de voir de son devan¬ cier. Seulement, eu égard à la forme cro¬ chue ou droite des ongles, il établit deux groupes pour les espèces à doigts divisés , qu'il distingua encore en Oscines (Oiseaux chanteurs) et en Alites (Oiseaux de grande taille). En outre, il rangea à part les Perro¬ quets et les autres Oiseaux qui ont , comme eux, la faculté de prononcer des mots. De Pline , il faut remonter jusqu’à la renaissance des lettres et des arts pour rencontrer des auteurs qui aient fait quel¬ ques tentatives afin de perfectionner l’or¬ nithologie. Dans cet intervalle, cette science demeura informe et stationnaire. Pierre Belon fut un des premiers qui essaya de la retirer de l’obscurité où elle restait plongée. Il fit paraître, en 1555 , son Histoire de la nature des Oiseaux, avec leurs descriptions, et Naifz pourtraicts , relirez du naturel , et , dans cet ouvrage vraiment remarquabl OIS OIS pour le temps où il parut, à cause des ob¬ servations intéressantes qu’il renferme, les espèces, sans être distribuées en genres, sont cependant groupées de façon à montrer que Belon avait eu égard en grande partie aux caractères généraux qui ont servi plus tard à former les ordres. Ainsi, il consacre six livres à la description des Oiseaux; un pour les Rapaces, tant diurnes que nocturnes; un second pour les Oiseaux de rivage qui ont les pieds palmés; un troisième pour les espèces aquatiques qui n’ont point les pieds organisés pour la natation (Échassiers); un quatrième pour les Oiseaux des champs qui font leur nid à terre (Gallinacés); un cin¬ quième et un sixième pour les Oiseaux diffi¬ ciles à caractériser d’une manière générale, et qui ont reçu le nom de Passereaux. Conrad Gesner, à la même époque (1 555) , publia son Histoire naturelle des Oiseaux. Mais, au lieu de disposer les espèces selon une méthode susceptible d’en faire saisir les affinités, C. Gesner les rangea par ordre alphabétique. Quoique l’ouvrage de ce na¬ turaliste puisse, en général, être considéré comme un travail de compilation, cepen¬ dant la plupart des articles qu’il renferme, rédigés avec originalité, sont d’une érudi¬ tion remarquable. En outre, plusieurs gen¬ res y sont nettement définis et délimités, et de plus, ce qui est digne d’attention, la no¬ menclature binaire s’y trouve en germe et y reçoit des applications. En 1559, Aldrovande, d*ont le dévoue¬ ment pour l’histoire naturelle n’eut point de bornes, fit paraître trois énormes volu¬ mes in-folio, renfermant tout ce qui avait été dit jusqu’alors sur les Oiseaux ; comme Belon, il prit surtout en considération, pour classer les espèces, l’habitat et le régime; mais il établit plus de divisions que le pa¬ triarche de l’ornithologie en France ne l’a¬ vait fait, et si les groupes qu’il institue ne peuvent pas encore être considérés comme des genres, la plupart d’entre eux du moins correspondent- ils à ces grandes sections qu’on a nommées plus tard ordres et fa¬ milles. Sous la plume de Johnston, la méthode ornithologique ne fit aucun progrès, car l’ouvrage qu’il publia à ce sujet, en 1659, n est qu’une analyse de tout ce qu’on avait écrit avant lui sur les Oiseaux. Mais une ère nouvelle va s’ouvrir pour l’ornithologie. Les naturalistes, au lieu de chercher dans la manière de vivre des espèces, dans leur habitat, un moyen de classifica¬ tion, vont faire en sorte de découvrir, dans leur conformation extérieure, des caractères propres à les distribuer plus naturellement. Willugby s’engagea le premier dans cette voie. Son traité sur les Oiseaux ( Ornithol ., lib. 3, Londini , 1676), mais principalement l’édition corrigée par Jean Ray, et publiée en 1713, attira l’attention de tous les zoo¬ logistes. Dans ce travail, les espèces classées, non pas seulement d’après leurs habitudes, mais principalement, d’après des caractères tirés des pattes et du bec, sont distribuées dans vingt sections différentes. Les six pre¬ mières comprennent les Oiseaux de proie diurnes et nocturnes : les premiers sont sub¬ divisés en grands, tels que les Aigles, en moyens , comme les Éperviers, et en petits, distingués en indigènes et en étrangers; parmi les premiers comptent les Pies-Griè¬ ches, et aux seconds appartiennent les Oi¬ seaux de Paradis : les Oiseaux de proie noc¬ turnes sont, pour Willugby, réguliers, comme les Chouettes, ou irréguliers, tels que les Engoulevents. La septième division renferme les Oiseaux frugivores à bec et on¬ gles crochus, par exemple , les Perroquets ; la huitième les espèces dont les ailes sont in¬ aptes au vol et dont le bec est peu crochu , telles que l’Autruche; la neuvième celles à bec gr'os et droit, comme les .Corbeaux, les Pies, etc. ; la dixième, les Oiseaux terrestres à bec long, tels que le Martin-Pêcheur; la onzième les Gallinacés ; la douzième les Pi¬ geons ; la treizième les Frugivores à bec fin, comme les Grives; la quatorzième les petits Insectivores ; les quatre suivantes, les Gra¬ nivores à bec assez gros, et distinguées en grandes, moyennes et petites espèces, en in¬ digènes et exotiques ; la dix -neuvième com¬ prend les Oiseaux aquatiques à pieds fendus qui se tiennent sur le bord des eaux, comme le Héron , la Bécasse et le Vanneau; enfin la vingtième, 1 es Palmipèdes. Quoique cette classification soit vicieuse dans plusieurs de ses parties , elle n’en est pas moins un pas fait vers le progrès. Du reste, Linné, avant de rompre avec le passé, avait longtemps pris Willugby pour guide. Ce fut soixante ans après la publicatio OIS OIS 69 de l’ouvrage de l’ornithologiste anglais, que parut la première édition du Systema na¬ tures (1735). Cette tentative inattendue ré¬ véla de prime abord un vaste génie destiné a inlluer puissamment sur toutes les par¬ ties de l’histoire naturelle. Linné , en effet, devait opérer une révolution scientifique et soustraire les classifications à cette sorte d’empirisme, à la faveur duquel elles avaient cherché à se produire. Les réformes qu’il introduisit dans la méthode ornitholo¬ gique sont, si nous pouvons dire, l’abolition complète de tout ce qui avait été fait jus¬ qu’alors. Tirant ses caractères du bec et des pieds seulement, il établit six ordres : Un pour les espèces qui ont le bec un peu courbé en bas ; la mandibule supérieure di¬ latée de chaque côté, ou armée d’une dent ; des pieds courts, robustes; des doigts verru- queux en dessous, et des ongles arqués et très pointus ( Accipitres ). Un second pour celles qui , avec un bec convexe ou arrondi en dessus , aminci et tranchant sur sa partie inférieure , ont des pieds courts , robustes et des doigts lisses ( Picœ ). Un troisième pour les espèces à bec lisse, couvert d’un épiderme épaissi à sa pointe ; à pieds propres à nager et à doigts palmés ou réunis par une membrane ( Anseres ). Un quatrième pour les Oiseaux à bec pres¬ que cylindrique, à tarses allongés et à jam¬ bes demi- nues ( Grallœ ). Un cinquième pour les espèces à bec con¬ vexe , à mandibule supérieure voûtée sur l’inférieure; à pieds propres à la course et à doigts rudes en dessous ( Gallinœ ). Enfin un sixième pour celles qui, avec un bec en cône acuminé, ont des pieds propres à sauter, grêles, à doigts séparés ( Passe - res ) . ( 1 ) Telle est l’analyse générale de la mé¬ thode proposée par Linné , dès 1740 , dans son Systema naturœ. Dire qu’elle a servi de point de départ à presque tous les hommes qui se sont livrés à l’étude des sciences ornitho¬ logiques , et que tous les efforts que l’on a tentés n’ont tendu qu’à la modifier sans en (r) Dans la première édition de so-n Systema naturœ, Linné avait ajouté un septième ordre, celui des Macrorhyn- chœ , pour les espèces qui ont un bec assez long et à pointe aigue. Ces espèces, dans les éditions qui suivirent , furent confondues avec 1rs Grallx, altérer le fond , c’est indiquer sa supériorité sur toutes celles qui l’avaient précédée, et sur quelques autres qui se produisirent peu de temps après ou dans le même mo¬ ment. En effet, Friscli, Barrère, Klein, qui, en même temps que les éditions du Systema naturœ se succédaient rapidement, produi¬ sirent des essais de classification des Oi¬ seaux , ne furent pas assez heureux dans l’ordonnance de leurs groupes pour faire prévaloir leur méthode sur celle de Linné. Le premier de ces auteurs, dans son His¬ toire naturelle des Oiseaux , publiée de 1734 à 1763, se servant des caractères invoqués d’une part par Belon, et de l’autre par Wil- lugby, dispersa les espèces dans douze sec¬ tions assez peu naturelles, car dans l’une d’elles se trouvent côte à côte les Pies, les Coucous, les Huppes et les Perroquets. Barrère , dans son Ornithologiœ specimen novum (1745), distribua les Oiseaux dans quatre classes : celle des Palmipèdes , parmi lesquels compte le genre xVvocette ; celle des Semipalmipèdes , pour les espèces dont quel¬ ques auteurs ont fait de nos jours l’ordre des Pinnatipèdes ; une troisième pour celles qu’il nomme Fissipedes , dans laquelle se trouvent confondus les Phœnicoptères , les Oiseaux de proie, les Perroquets, l’Au¬ truche ; une quatrième enfin pour les Se- mifissipèdes , dont font indifféremment par¬ tie les genres Héron, Martin-Pêcheur, Per¬ drix, etc. Il en est de même de G. T. Klein. Dans son Histoire des Oiseaux , qu’il a publiée en 1750 , et dans laquelle il établit quatre familles, tout se trouve pêle-mêle; l’Aigle, le Colibri, le Coq, la Grive, appartiennent à la même section, parce que ces Oiseaux ont quatre doigts à chaque pied , trois de¬ vant et un derrière. Une classification à laquelle il nous sem¬ ble qu’on n’a pas prêté assez d’attention , est celle que Mœhring proposa dans VAvium généra qu’il publia en 1752. Si cet auteur a eu le tort grave d’emprunter quelquefois le nom ancien d’une espèce très connue, pour l’appliquer génériquement à d’autres espèces qui n’ont souvent avec elle aucune sorte de rapport, toujours est-il que sa mé¬ thode, qui se ressent beaucoup de l’influence exercée par Linné, offre des coupes assez 70 OIS OIS naturelles , coupes que nous verrons plus tard se reproduire et être généralement ac¬ ceptées. Ainsi il propose de comprendre les Oi¬ seaux dans quatre classes, et il se sert, à cet effet, de caractères que, vers ces derniers temps, MM. Keyserling et Blasius ont pris en partie pour éléments d’une nouvelle classi ¬ fication. En premier lieu il groupe sous le nom d’ Hyménopodes , les espèces qui, avec l’articulation tibio-tarsienne emplumée, ont les pieds recouverts en dessous par une membrane ténue et écailleuse et les doigts étroitement unis à leur origine. Deux or¬ dres sont affectés à cette classe, celui des Picæ pour les espèces qui ont un bec al¬ longé, convexe, à arête saillante, et celui des Passeres pour celles qui offrent un bec conique et subitement fléchi; ces dernières sont encore distinguées par Mœhring en Crassirostres et en Ténuirostres , qui corres¬ pondent les uns aux Conirostres , et les au¬ tres aux Dentirostres , de la plupart des or¬ nithologistes modernes. La seconde classe établie sous le nom de Dermatopodes , renferme les Oiseaux qui ont l’articulation tibio-tarsienne emplumée et les pieds couverts en dessous par une peau co¬ riace et rugueuse, et comprend deux ordres, celui des Accipitres pour les espèces qui ont un bec et des ongles recourbés , et celui des Gallinœ pour celles qui ont un bec conique, fléchi seulement à la pointe. Ces derniers sont encore distingués en vrais Gallinacés , lorsque leurs doigts sont réunis à la base par une membrane rudimentaire , et en Pigeons , lorsque cette membrane est moins étendue. Mœhring, dès 1752, tout en ran¬ geant les Pigeons parmi les Gallinacés, comme le font aujourd’hui plusieurs au¬ teurs, en formait non pas un ordre, il est vrai, mais une division particulière. Dans la troisième classe sont compris les Oiseaux qui ont l’articulation tibio-tarsienne dénudée de plumes ; les ailes peu propres au vol, les doigts divisés et les pieds propres à la course. Cette classe, à laquelle l’auteur de VAvium généra donne le nom de Bra- chypterœ , correspond presque entièrement à l’ordre des Coureurs, que MM. Illiger et Temminck créaient 70 ans plus tard. Enfin la quatrième classe , celle des Hy- drophilæ , comprend les Oiseaux qui ont l’articulation tibio-tarsienne nue et les pieds recouverts d’une peau molle ou coriace. Cette classe, la plus nombreuse de toutes, est ensuite divisée en cinq ordres : un pour les espèces qui ont les côtés du bec pourvus de dents en forme de scie [Odontorhynchœ) ; il est représenté en partie par la famille des Lamelliroslres de G. Cuvier; un second pour celles qui, comme les Manchots, ont le bec très comprimé ( Platyrhynchœ ) ; un troisième pour celles qui, avec les pieds palmés , ont le bec comprimé ( Stenorhynchæ ), celles-ci étant ensuite distinguées en espèces à bec droit à l’origine et ensuite recourbé ; en es¬ pèces à bec subulé, droit, peu fléchi à son extrémité, et en espèces à bec subulé, droit ; un quatrième ordre, celui des Urinatrices, est affecté aux espèces qui ont les doigts pourvus de membranes divisées. Schœffer, et plus tard Latham et M. Temminck, ont fait de celui-ci leur ordre des Pinnatipèdes . Enfin dans un cinquième ordre, Mœhring met les Oiseaux qui sont nettement carac¬ térisés par un sillon situé en avant des na ¬ rines ; mais cet ordre que l’auteur de YA~ vium généra distingue sous le nom de Sco - lopaces, est également subdivisé en espèces qui, avec des pieds semi-palmés, ont un bec conique et comprimé ; en espèces dont les doigts sont dépourvus de membrane et qui ont le bec comme les précédentes ; en espèces qui, avec des doigts libres, ont un bec tri- quêlre; en espèces semi-palmées, avec un bec subulé, et en espèces offrant, quant au bec, le même caractère, mais ayant les doigts libres. Nous avons insisté sur cette méthode, pour montrer, d’une part, que le reproche que l’on fait à Mœhring de ne s’être point conformé aux préceptes de Linné , et d’avoir contribué à ramener le désordre dans l’or¬ nithologie, en basant ses divisions sur des caractères artificiels, est en partie mal fondé; et d’autre part, que certaines des grandes divisions proposées par les méthodistes mo¬ dernes étaient déjà inscrites dans VAvium généra. En 1760 parut l’ornithologie de Brisson, ouvrage for t estimé, et dans lequel les Oiseaux sont classés d’après une méthode qui diffère notablement de celle de Linné. Tirant ses caractères de la forme du bec et des pieds , du nombre des doigts et de la manière dont 4 OIS OIS 71 ils sont unis entre eux avec ou sans membra¬ nes, Brisson établit deux grandes divisions ; d’un côté se trouvent tous les Oiseaux qui ont les doigts dénués de membranes , et de l’autre ceux qui les ont garnis d’une peau membraneuse dans toute leur longueur. Ensuite i! disperse les espèces dans vingt- six ordres et cent quinze genres. Les Pigeons que Linné rangeait parmi les Passereaux, composent les premiers ordres de Brisson ; le deuxième comprend les Gallinacés, le troisième les Oiseaux de proie, desquels il sépare les Pies-Grièches que Linné leur associait ; les onze suivants , parmi les¬ quels nous signalerons seulement celui qui se compose des genres Martinet, Hirondelle et Engoulevent , sont des démembrements des Picœ et des Passeres , du Systema na: turœ; le quinzième ordre, sauf le genre Outarde, correspond aux Brachyplères de Mœhring ; les seizième, dix-septième et le vingt-sixième, renferment les Échassiers, et tous les autres ordres sont autant de di¬ visions des Anseres de Linné. Nous ferons ici la remarque que nous avons faite à pro¬ pos de la méthode de Mœhring; que les es¬ pèces dont SchœlTer et Latham ont fait les Pinnatipèdes composent le dix-huitième ordre de la classification en question , et que beaucoup d’autres correspondent à des fa¬ milles actuellement acceptées. Mœhring avait déjà placé l’Autruche et ses congénères dans une division à part; Brisson a reproduit cette division ; mais de plus il sépare totalement les Pigeons des Passereaux et les Pinnatipèdes des Palmi¬ pèdes de Linné. Dans ses Elementa ornitholigiœ , publiés en 1774 , J.-C. Schœffer s’écarte également beaucoup de la méthode proposée par l’au¬ teur du Systema naturæ, et conserve à peu près le même nombre de genres que Brisson et Mœhring. Pour lui, les Oiseaux forment deux grandes familles, celle des nudipèdes, renfermant les espèces dont les jambes sont dégarnies de plumes à leur partie infé¬ rieure, et celle des plumipèdes, comprenant celles dont les jambes sont emplumées jus¬ qu’à l’articulation tibio tarsienne. Ensuite, suivant que les espèces de la première fa¬ mille ont les doigts libres ou réunis par une membrane, il les distingue en Fissipèdes , qui sont didactyles , tridactyles ou télradac- tyles , selon qu’ils ont deux, trois ou quatre doigts ; en pinnatipèdes lorsque la mem¬ brane qui garnit les doigts est découpée en festons, et en palmipèdes tridactyles et tétra- dactyles, lorsque les doigts, au nombre de trois ou de quatre , sont unis entre eux par une peau molle. Le même système appliqué à la deuxième famille, a conduit SchœlTer à distinguer des Fissipèdes isodacly les, c’est- à-dire des Oiseaux ayant quatre doigts sé¬ parés, trois devant, un derrière, et des Fis¬ sipèdes anisodactyles distribués dans neuf ordres, qui sont fondés sur des différences tirées du bec. Un dernier Ordre, dans la méthode de SchœlTer, celui des Anomali- pèdes , est destiné aux espèces qui ont le doigt du milieu uni à l’extérieur jusqu’à la troisième phalange. Nous ne ferons pas ressortir tout ce qu’a de vicieux une pareille méthode; il nous suffira de dire que son emploi a eu pour consé¬ quence de faire placer les Oiseaux-Mouches dans un ordre différent de celui des Coli¬ bris ; les Pigeons et les Corbeaux dans le même ordre; le Pingouin à côté de l’Alba¬ tros, etc. Si la classification admise par SchœlTer est loin de pouvoir être considérée comme un progrès sur celle de Linné ; la méthode que donna en 1777 J. -A. Scopoli, dans son Introductio ad historiam naluralem , n’est pas beaucoup plus heureuse. Comme Schœf¬ fer, Scopoli reconnaît deux grandes familles fondées sur la forme des écailles qui recou¬ vrent le tarse. Les espèces dont la peau des jambes est partagée en petites écailles poly¬ gones , telles qu’on les voit chez les Rapaces, les Perroquets, les Gallinacés , les Échas¬ siers et les Palmipèdes, sont pour lui des Rétipèdes ; toutes celles, au contraire, qui ont le devant des tarses couvert de segments ou d’anneaux inégaux, aboutissant de cha¬ que côté à un sillon longitudinal , sont des Scutipèdes. Ces deux familles sont ensuite partagées en ordres : les Plongeurs , les Palmipèdes , les Longipèdes ou Grades, les Gallinacés ; les Rapaces et les Perroquets , appartiennent à la première; les Négligés, les (J hauteurs et les Brévipèdes , font partie de la seconde. Une observation générale que l’on peut faire sur cette méthode, c’est qu’elle rompt les rapports naturels des grandes divisions, 72 OIS OIS car elle met sur le même plan les Perro¬ quets et les Palmipèdes , et relègue dans une famille à part la plupart des Grimpeurs et les Passereaux, qui cependant sont, à tout prendre, plus élevés en organisation. Ceci dit , nous devons constater que Seopoii place dans des divisions distinctes d’une part les Perroquets , et d’une autre part les Hiron¬ delles et les Engoulevents , comme déjà l’a¬ vait fait Brisson; or, nous verrons ces deux ordres acceptés et reproduits par des ornitho¬ logistes ultérieurs. Latham ,dans ses divers ouvrages d’orni¬ thologie, son Synopsis avium, qui parut en 1781 , et son Index ornithologicus, qui porte la date de 1790, adopta complètement la clas¬ sification de Linné; seulement il lui fît subir des améliorations importantes en ce sens qu’il adopta l’ordre des Pigeons, fondé par Brisson, et ceux des Brac.hyptères ou Au¬ truches et des Pinnatipèdes indiqués par Mœhring ; mais, de plus, il consigna dans ses ouvrages une foule de genres fondés, la plupart, par Brisson. Latham, sans innover, contribua donc beaucoup, par le seul fait de son adhésion à des réformes qui ne ve¬ naient point de Linné, au progrès de l’or¬ nithologie; car, après l’auteur du Syslema naturœ , c’était la plus puissante autorité que les ornithologistes eussent à consulter. Dans la 1 3e édition de ce Syslema naluræ , publié en 1789 par les soins de Gmelin , la classification des Oiseaux n’éprouve aucune modification ; son nouvel éditeur se borna seulement à y introduire plusieurs genres qui étaient généralement adoptés. Ce ne fut que dix ans après , en 1798 , que G. Cuvier, dans son Tableau élémen¬ taire d'histoire naturelle , jeta les bases d’un système de classification qu’il perfectionna plus tard , et dont nous aurons bientôt à nous occuper. A peu près vers la même époque ( 1 799) dans son Tableau des Mammifères et des Oiseaux , Lacépède essaya de partager ces derniers en deux sous-classes. Dans l’uneil rangea les es¬ pèces qui ont le bas de la jambe garni de plu¬ mes et les doigts libres, et dans l’autre celles qui possèdent les caractères opposés. Prenant ensuite en considération le nombre des doigts et leur disposition, il établit dans chacune de ces sous-classes deux grandes di¬ visions, subdivisées elles-mêmes en plu¬ sieurs sections qui correspondent la plupart à des ordres précédemment établis. En 1810, Meyer et Wolf , dans leur Tas- chenbuch der deulschen vogelkunde, tout en adoptant la classification de Linné, la mo¬ difièrent cependant , quant à la forme et quant à la nomenclature. Ils divisèrent les Picæ en deux ordres : dans l’un ils placèrent les Grimpeurs , caractérisés par deux doigts devant et deux derrière , et dans l’autre les Coraces ; de plus iis adoptèrent l’ordre des Pigeons, créé par Brisson ; celui des Cheli- dons , également proposé par cet auteur et admis par Scopoli. Enfin ils changèrent le nom de Passeres , donné par Linné à un de ses ordres, en celui de Chanteurs, et substi¬ tuèrent à la dénomination de Anseres celle de Notantes. Des modifications de même nature furent introduites par llliger dans la méthode 1 in¬ né e n n e . Il divisa les Oiseaux en sept ordres, quarante- une familles, et porta le nombre des genres à cent quarante-sept. De plus, il changea complètement la nomenclature des ordres : ainsi les Grimpeurs furent pour lui des Scansores, les Passereaux des Amrula- tores, les Rapaces des Raptatores , les Gal¬ linacés des Rasores , les Echassiers des Gral- latores , et les Palmipèdes des Natatores ; il nomma Cursores l’ordre dont font partie les Autruches et les Outardes, auxquelles il associe certains Échassiers coureurs. Ces changements, il les proposa dans son Pro- dromus systemalis mammalium et avium , publié en 1811. Quatre ans plus tard (1815), parut la lre édition du ïïlanuel d'ornithologie de M. Temminck. Dans cet ouvrage , affecté seulement aux espèces européennes, les Oi¬ seaux sont distribués en treize ordres et quatre-vingt-trois genres. Plus tard (1820) M. Temminck, dans une nouvelle édition de son Manuel , donna une Analyse d'un sys¬ tème général d' ornithologie , et dans cette analyse le nombre des ordres fut porté à seize , et celui des genres considérablement augmenté. Pour la formation de ses grandes divisions, l’auteur du Manuel a eu égard non seulemcn! a 4x caractères physiques, mais aussi aux mœurs ; ce qui l’a porté à adopter, pour plusieurs d’entre elles, une nomencla¬ ture en rapport avec le genre de vie des Oi¬ seaux. Voici , du reste, l’aperçu général de OIS OIS 73 la méthode ornithologique proposée par M. Temminck. Comme la plupart des au¬ teurs , il met les Rapaces en tête de la sé¬ rie ; viennent ensuite les Omnivores, qui ne sont autres que les Coraces de Meyer et Wolf; les Insectivores, qui correspondent aux Chanteurs des mêmes ornithologistes ; les Granivores , qui comprennent les Cras- sirostfes de Mœhring ; les Zigodactyles, qui représentent les Grimpeurs de plusieurs au¬ teurs; les Anisodactyles , les Alcyons, or¬ dres nouveaux établis sur des caractères dif¬ ficiles à saisir; les Chélidons (Passereaux fissirostres de G.. Cuvier, voy. leurs carac¬ tères, p. 61, fig. 5, 5 a -b), déjà établis par Meyer et Wolf; les Pigeons, les Gallinacés, ordres que nous trouvons fondés dans beau¬ coup de méthodes antérieures ; les Alecto- rides, division nouvelle, démembrée des Échassiers des méthodistes ; les Coureurs , les Gralles , les Pinnatipèdes (pl. 60, 18), les Palmipèdes, tous ordres créés avant lui; enfin les Inertes, comprenant l’Aptéryx et le Dronte, espèce que l’on plaçait avec les Au¬ truches. Le grand mérite de la classification de M. Temminck consiste dans la simplicité , dans la circonscription plus nette des grandes divisions, et surtout des genres. Un essai de classification qui s’écarte beau¬ coup de la-méthode de Linné est celui que fit paraître Vieillot sous le titre d 'Analyse d’une nouvelle Ornithologie élémentaire. Dans ce travail qui porte la date de 1816 , mais qui, dès 181 3 et 1814, avait été communiqué à l’Académie des sciences de Turin et à celle de Paris , les Picœ du Systema naturœ sont confondus avec les Passeres, et le nombre des genres est porté à 273. Vieillot , d’ail¬ leurs, n’a admis que cinq ordres : un pour les Accipitres, un second pour les Sylvains , un pour les Gallinacés , un pour les Échas¬ siers, et un cinquième pour les Nageurs ou Palmipèdes. C’est également en 1816 que M. deBlain- ville, dans son Prodrome d’une classification du règne animal, fit connaître sa méthode ornithologique , laquelle repose sur des ca¬ ractères tirés de la forme du sternum. Dans ce travail, aussi recommandable par la nou¬ veauté de l’aperçu que par l’importance des résultats qui en découlent, les Oiseaux sont partagés en neuf ordres : les Préhenseurs ou Perroquets (Prehensores) , ordre que nous avons déjà vu proposé par Brisson ; les Ra¬ visseurs ou Oiseaux de proie ( Raptatores ) , divisés en diurnes et en nocturnes ; les Grimpeurs {Scansores) , les Passereaux (Sal- tatores ) , les Pigeons ( Giratores ) , les Galli¬ nacés ( Gradatores ) , les Autruches ( Curso- res ) , les Échassiers ( Grallatores ) , et les Palmipèdes ( Natatores ). Un ordre définiti¬ vement établi (celui des Préhenseurs), les Pigeons irrévocablement séparés des Galli¬ nacés , les autres ordres confirmés, telles sont les conséquences auxquelles M. deBIain- ville a été conduit, en invoquant des carac¬ tères bien différents de ceux dont on s’était jusqu’alors servi. La méthode proposée la même année ( 1816 ) par Merrem , dans son Tentamen systematis naturalis avium , repose sur les mêmes caractères, mais diffère quant aux résultats. Ainsi , pour Merrem , les Oiseaux composent deux grandes divisions : les uns ont le sternum caréné, c’est-à-dire pourvu d’un bréchet : il les nomme Aves carinatœ ; et les autres n’ont pas de bréchet : ce sont des Aves ratitœ. Les Autruches forment seules cette seconde division : la première se subdivise, pour l’auteur du Tentamen sys¬ tematis, en Oiseaux aériens, qui compren¬ nent les Rapaces , les Grimpeurs et les Pas¬ sereaux ; en Oiseaux terrestres, renfermant les Pigeons et les Gallinacés ; en Oiseaux aquatiques, représentant les Palmipèdes ; et en Oiseaux de marais , correspondant aux Échassiers. Nous avons dit qu’en 1798, G. Cuvier, dans les Tableaux élémentaires des animaux, avait jeté les fondements d’une classifica¬ tion des Oiseaux : ce fut en 1817 que, dans son Règne animal, il lui donna tout le dé¬ veloppement qu’elle comportait. Celte clas¬ sification , parce qu’elle est la plus suivie, parce qu’elle a été généralement adoptée dans le cours de cet ouvrage, mériterait déjà que nous lui donnassions quelques développements, si, sous un autre rap¬ port, elle ne devait fixer notre attention. C’est parce que la méthode de G. Cuvier nous paraît être la source des efforts qui se sont produits depuis son apparition, et qu’elle est le lien qui relie la méthode de Linné aux méthodes actuelles , que nous • ' l’examinerons avec quelques détails. 10 T. IX, 74 OIS OIS Tirant ses caractères généraux des orga¬ nes delà manducation et de la préhension, c’est-à-dire du bec et des pieds , et procé¬ dant par voie d’exclusion, l’auteur du Règne animal a divisé la classe des Oiseaux en six ordres : les Oiseaux de proie, les Passe¬ reaux, les Grimpeurs, les Gallinacés, les Échassiers et les Palmipèdes. Lorsque , sans avoir égard à la subordi¬ nation méthodique , on cherche seulement à voir quel est, de tous ces ordres, celui qui se circonscrit le plus nettement par ses caractères distinctifs, on trouve que c’est celui que composent les Palmipèdes, qui ont, avec des tarses courts et comprimés latérale¬ ment, les doigts ou entièrement palmés, ou semi-palmés, ou simplement bordés d’expan¬ sions membraneuses assez larges (pl. 61, f. 8 et 9). Les Échassiers ou Gr allés , ainsi nommés à cause de leurs formes légères, élancées, et de la hauteur que les tarses ont prise chez le plus grand nombre d’espèces, forment ensuite l’ordre le plus naturel. Le caractère essen¬ tiel de ces Oiseaux est que le bas de leurs jambes est en partie dénudé déplumés [pl . 61, f. 7); ils ont aussi les doigts réunis à leur base par une membrane peu développée. L’ordre des Gallinacés , voisin de celui des Échassiers, s’en distingue toutefois par un port plus lourd, des jambes générale¬ ment plus courtes et non dénudées (pl. 61, f. 6), et par des narines largement percées dans un espace membraneux de la base du bec, et recouvertes par une écaille cartilagi¬ neuse (pl. 60, f. 4). Les Rapaces, qui paraissent assez distinc¬ tement caractérisés par la cire qui enveloppe la base de la mandibule supérieure (pl. 60, f. 3), peuvent cependant encore être con¬ fondus avec les perroquets (dans l’ordre des Grimpeurs), parla raison que ceux-ci ont également une cire, et que certains Oiseaux de proie nocturnes peuvent , comme un grand nombre de Grimpeurs, porter le doigt externe en arrière. Cependant, en ayant égard à Vacuité du bec et des ongles et au développement de ces derniers (pl. 61, f. 1), on ne saurait les confondre. Vient ensuite l’ordre des Grimpeurs , composé d’espèces chez lesquelles le doigt externe se dirige en arrière comme le pouce (pl. 61, f. 2); mais cet ordre, tel que l’a institué G. Cuvier, paraît peu naturel en ce sens qu’il réunit des Oiseaux qui ont entre eux des rapports fort éloignés , et que le seul caractère qui le distingue n’est peut- être pas assez suffisant. Enfin l’ordre des Passereaux est formé de tous les Oiseaux dont les caractères sont négatifs, c’est-à-dire de tous ceux qui n’ont ni les doigts palmés , ni le bas de la jambe dénudé de plumes , ni de cire à la base de la mandibule supérieure, ni le doigt externe porté en arrière; ce doigt, au contraire, étant par sa base uni, dans une étendue plus ou moins grande, à celui clu milieu (pl. 61, f. 3, 4 et 5 ). Chacun de ces ordres , principalement fondé, comme on peut le voir, sur des ca¬ ractères empruntés aux membres qui ser¬ vent à la locomotion terrestre et aquatique, et à la préhension , est ensuite subdivisé d’après la conformation du bec, celle des pattes, etc., en grandes familles et en gen¬ res. Mais ces genres, la plupart empruntés au .Systema naturœ, sont présentés de façon à ce qu’il semble qu’ils étaient, pour G. Cu¬ vier, des groupes ayant une valeur supé¬ rieure à celle des genres proprement dits; car il introduit dans chacun d’eux des coupes secondaires auxquelles il assigne une valeur sub -générique. Nous verrons qu’après l’effort de G. Cuvier, le pas à faire n’était pas grand pour arriver à la réalisation des familles naturelles, caractère dominant des méthodes actuelles; c’est ce que nous permettra de mieux constater l’analyse que nous allons donner de la classification des Oiseaux, telle qu’elle est présentée dans la dernière édi¬ tion du Règne animal (1829). Ordre I.— OISEAUX DE PROIE. ( Accipitres , Linn. ) Famille 1. — Diurnes. Yeux dirigés sur les côtés. 1° Vautours ( Vultur Linn. ). Vautours proprement dits , Cathartes , Percnoptères , Griffons. 2° Faucons ( Falco Linn. ). Faucons pro¬ prement dits, Gerfauts. 3° Aigues ( Aquila Briss.). lrc division. Aigles proprement dits , Aigles-pêcheurs, Balbuzards, Circaètes, Har¬ pies, Aigles-Autours. 2e division. Autours, Éperviers, Milans, OIS 75 OIS Elanions , Bondrécs, Buses, Busards, Mes¬ sagers. Famille 2. — Nocturnes. De grands yeux dirigés en avant , entourés d’un cercle de plumes effilées , dont les an¬ térieures recouvrent la cire du bec , et les postérieures V ouverture de l’oreille. 1° Chouettes ( Slrix Linn. ). Hiboux, Chouettes proprement dites, Effrayes, Chats- Huants , Ducs , Chevêches , Scops. Ordre II. — PASSEREAUX. lre division. Espèces chez lesquelles le doigt externe est réuni à l’interne, seule¬ ment par une ou par deux phalanges. . Famille 1. — Dentirostres. Bec échancré aux côtés de la pointe (Insectivores, Tein.). 1° Pies-Grièches ( Lanius Linn. ). Pies- Grièches proprement dites, Vongas, Lan- grayens, Cassicans, Calybés, Bécardes, Chou- caris, Béthyles , Falconelles, Pardalotes. 2° Gobe-Mouches ( Muscicapa Linn.). Tyrans, Moucherolles , Gobe-Mouches pro¬ prement dits , Gymnocéphales , Céphalo- ptères. 3° Cotingas ( Amp élis Linn.). Piauhaus , Cotingas ordinaires, Tersines, Échenilleurs, Jaseurs, Procnias, Averanos, Gymnodères. 4° Drongos ( Edolius Cuv.). Drongos pro¬ prement dits, Phibalures. 5" Tangaras ( Tanagra Linn.). Euphories ou Tangaras-Bouvreuils, Tangaras Gros-Bec, Tangaras proprement dits, Tangaras-Lo- riots, Tangaras Cardinals, Tangaras-Ram- phocèles. 6° Merles (Turdus Linn.). Merles propre¬ ment dits, Grives, Stournes , Turdo'ides , Grallines , Crinons. 7° Fourmilliers ( Myothera II 1 ig.) . Brèves, Grallaires, Fourmiliers proprement dits, Ramphocèles, Orthonyx. . 8° Cincles , vulgairement Merles d’eau ( Cinclus Bechst.). 9° Philedons ( Philedon Cuv.). 10° Mainates ( Eulabes Cuv.). 11e Martins ( Gracula Cuv.). Martins proprement dits, Manorhines. 12° Choquards ( Pyrrhocorax Cuv.). 13° Loriots ( Oriolus Linn.). 14° Goulins ( Gymnops Cuv.). 4 3° Lyres ( Mœnura Cuy.). IG” Becs-Fins ( Molacilla Linn.). lre division. Traquets, Rubiettes , Fau¬ vettes , Accenteurs , Roitelets ou Figuiers, Troglodytes. 2e division. Hochequeues ou Lavandières, Bergeronettes, Farlouses. 17°MANAKiNs(Pipm Lin.). Coqs déroché, Calyptomènes , Manakins proprement dits. 18° Eurylaimes ( Eurylaimus Horsfield). Famille 2. — Fissirostres. Bec court, large , aplati horizontalement, et très profondément fendu (Chélidons, Tem .). lre division. Diurnes. 1° Hirondelles (. lîirundo Linn.). Marti¬ nets, Hirondelles proprement dites. 2e division. Nocturnes. 2° Engoulevents ( Caprimulgus Linn.). Engoulevents proprement dits, Podarges. Famille 3. — Conirostres. Bec fort, plus ou moins conique, et sans échancrures (Granivores et Omnivores, Tem. ). 1° Alouettes ( Alauda Linn.). 2° Mésanges ( Parus Linn.). Mésanges proprement dites, Moustaches, Rémiz. 3° Bruants ( Emberiza Linn.). Bruants proprement dits, Plectrophanes. 4° Moineaux (. Fringilla Linn.). Tisserins, Moineaux proprement dits, Pinsons, Linot¬ tes , Chardonnerets, Serins, Tarins, Veuves, Gros-Becs, Pytiles, Bouvreuils. 5° Becs-Croisés ( Loxia Briss.), 6° Durbecs ( Corythus Cuv.). 7° Colious ( Colins Gmel.). 8° Pique-Boeufs ( Buphaga Briss.). 9° Cassiques ( Cassions Cuv. ). Cassiques proprement dits, Troupiales, Carouges, Oxy- rhynques, Pit-pits. -10° Étourneaux ( Sturnus Linn.). 41° Corbeaux ( Corvus Linn. ). Corbeaux proprement dits , Pies , Geais , Casse-Noix , Tunies, Glaucopes. 42° Rolliers ( Coracias Linn.). Rolliers proprement dits, Rolles. 13° Oiseaux de paradis (Paradisœa Lin.). Famille 4. — Ténuirostres. Bec grêle , allongé, droit ou plus ou moins arqué , et sans échancrure. 4° Sittelles , vulgairement Torciiepots ( Sitta Linn. ). Sittelles proprement dites , Sittines, Anabates, Synallaxes. 76 OIS 2° Grimpereaux (Certhia Lion.)- Grimpe¬ reaux vrais, Picucules, Échelettes, Sucriers, Guitguits, Fourniers, Dicées, Iléorotaires , Souï-Mangas, Arachnotères. 3° Colibris ( Trochilus Linn.). Colibris , Oiseaux-Mouches. 4° Huppes ( Upupa Linn.). Craves, Huppes proprement dites, Promerops, Epimaques. 2e division. Espèces chez lesquelles le doigt externe , presque aussi long que celui du milieu, lui est uni jusqu’à l’avant-der¬ nière articulation. Famille unique. — Syndactyles (Alcyons, Tem.). 1° Guêpiers ( Merops Linn.). 2° Momots ( Prionites Illig.). 3° Martins-Pêcheurs ( Alcedo Linn.). 4° Ceyx ( Ceyx Lacép.). 5° Todiers ( Todus Linn.). 6° Calaos ( Buceros Linn.). Ordre III. — GRIMPEURS. ( Scansores IHig. ) 1° Jacamars ( Galbula Briss. ). Jacamars proprement dits , Jacamerops , Jacamar-Al- cyon. 2° Pics ( Picus Linn.). Pics proprement dits, Picoïdes. 3° Torcols ( Yunx Linn.). Torcols propre¬ ment dits , Picumnes. 4° Coucous (Cuculus Linn.) Coucous vrais, Couas, Coucals, Courols ou Vouroudrious , Indicateurs, Barbacous. 5° Malcohas ( Phænicophæus Vieill.). 6° Scythrops (* Scythrops Lath.). 7° Barbus ( Bucco Linn.). Barbicans, Bar¬ bus proprement dits, Tamatias. * 8° Couroucous ( Trogon Linn.). 9° Anis ( Crotophaga Linn.). 10° Toucans ( Ramphastos Linn.). Toucans proprement dits, Aracaris. 11° Perroquets ( Psittacus Linn. ). Aras , Perruches-Aras , Palœornis , Plalycercus , Perruches ordinaires, Cacatois, Perroquets proprement dits, Loris, Psittacules, Perro¬ quets à trompe ou Microglosses , Pézopores. 12° Touracos ( Corythaix Illig.). 13° Musophages ( Musophaga Isert.) . Ordre IV. — GALLINACÉS. ( Gallinœ Linn.) lre division. Espèces chez lesquelles les doigts antérieurs, réunis à leur base par une OIS courte membrane, sont dentelés le long de leurs bords. 1 0 Alectors ( Alectors Merrem) . Hoccos pro- prement dit», Pauxis, Guans ou Yacous, Parraquas, Hoazins . 2° Paons ( Pavo Linn.). Paons proprement dits, Lophophores. 3o Dindons (Meleagris Linn.). 4° Pintades (Numida Linn.). * 5° Faisans ( Phasianus Linn.). Coqs, Fai¬ sans proprement dits, Argus, Ilouppifères , Tragopans, Cryptonyx. 6° Tétras ( Tétras Linn.). Coqs de Bruyè¬ res , Lagopèdes , Gangas ou Attagens , Per¬ drix, Francolins, Cailles, Colins. 7° Tridactyles ( Hemipodius Temm. ). Turnix, Syrrhaptes. 8° Tinamous ( Tinamus Lath.). Tinamous proprement dits, Pezus. Rhynchotus. 2e division. Espèces chez lesquelles les doigts sont dépourvus de membranes inter¬ digitales. lo Pigeons ( Columba Linn.). Columbi- Gallines , Colombes ou Pigeons ordinaires , Colombars. Ordre V. — ÉCHASSIERS. ( Grallæ Linn.). Famille 1. — Brévipennes. Ailes tout-à-fait impropres au vol. 1° Autruches ( Struthio Linn.). 2° Casoars ( Casuarius Briss.). Famille 2. — Pressirostres. Bec médiocre et fort ; pouce nul ou trop court , pour porter à terre. 1° Outardes ( Oiis Linn.). 2° Pluviers ( Charadrius Linn. ). OEçlic- nèmes, Pluviers proprement dits. 3° Vanneaux ( Vanellus Beechst.). Van¬ neaux-Pluviers, Vanneaux proprement dits. 4° Huîtriers ( Hæmatopus Linn.). 5° Court-Vite ( Cursorius Lacép.). 6° Cariamas ( Microdqctylus Geoff.). Famille 3. — Cultrirostres. Bec gros , long et fort , le plus souvent tranchant et pointu. lre Tribu. 1° Grues (GrwsCuv.). Agamis, Grues or¬ dinaires. 2e Tribu. 2° Savacous ( Cancroma Linn.) OIS 3° Hérons ( Ardea Cuv. ). Hérons vrais , Crabiers, Onorés , Aigrettes, Butors, Biho¬ reaux. 3e Tribu. 4° Cigognes ( Ciconici Cuv.). 5° Jabirus ( Mycteria Linn.). 6° Ombrettes ( Scopus Briss.). 7° Becs-Ouverts ( Ilians Lacép.). Becs-Ou- verts proprement dits, Droines. 8° Tantales ( Tantalus Linn.). 9° Spatules ( Platalea Linn.). Famille 4. — Longirostres. Bec grêle , long et faible. 1° Bécasses ( Scolopax Linn.). Ibis, Cour¬ lis , Bécasses proprement dites , Rhynchées, Barges , Maubêches, Sanderlings, Alouettes de mer, Falcinelles, Combattants, IJemipa- lama, Eurinorhynque, Phalaropes, l’ourne- pierres , Chevaliers, Lobipèdes, Échasses. 2° Ayocettes ( Recurvirostra Linn.). Famille 5. — Macrodactyles. Bec plus ou moins comprimé; doigts fort longs , propres à marcher sur les herbes des marais, ou à nager ; pouce, et surtout l’ongle, très longs. lre tribu — Ailes armées. 1° Jacanas ( Barra Linn.). 2° Kamichi ( Palamedea Linn.). Kamichis proprement dits, Chayarias ou Chaïa , Mé- gapodes. 2e tribu — Ailes dépourvues d’armes. 3° Râles ( Rallus Linn.). Raies propre¬ ment dits , Crex. 4° Foulques (Fulica Linn.). Poules d’eau, Talèves ou Poules-Sultanes, Foulques pro¬ prement dites. genres isolés. 1° Vaginales ( Chionis Forster). 2° Glaréoles ou Perdrix de mer ( Glareola Gmel. ). 3° Flammants (Phœnicopterus Linn.). Ordre VI.— PALMIPÈDES. ( Anseres Linn.). Famille 1 . — Plongeurs ou Brachyptères. Jambes implantées très en arrière ; ailes gé¬ néralement impropres au vol ; plumage très serré. 1° Plongeons ( Colymbus Linn.). Grèbes , OIS 77 Grebi-Foulques, Plongeons proprement dits, Guillemots, Cephus. 2° Pingouins ( Alca Linn.). Macareux, Sta- ryques, Pingouins proprement dits. . , 3° Manchots ( Aptenodytes Forster). Man¬ chots proprement dits, Gorfous, Sphénisques. Famille 2. — Longipennes ou Grands voiliers. Bec sans dentelures; ailes très longues ; pouce libre ou nul. 1° Pétrel (Procellaria Linn.). Pétrels pro¬ prement dits, Thalassidromes, Puffins, Péli- canoides, Prions. 2° Albatros ( Diomedea Linn.). 3° Goélands ( Larus Linn.). Goélands pro¬ prement dits, Mouettes, Stercoraires. 4° Hirondelles de mer ou Sternes ( Sterna Linn.). Hirondelles de mer proprement dites, Noddis. 5° Becs -en- Ciseaux ( Rhynchops Linn.). Famille 3. — Totipalmes. Pouce réuni avec les autres doigts dans une seule membrane. 1° Pélicans ( Pelecanus Linn,). Pélicans proprement dits. Cormorans, Frégates, Fous ou Boubies. 2° Anhingas ( Plotus Linn.). 3° Paille-en-Queue ( Phœton Linn.). Famille 4. — Lamellirostres. Bec revêtu d'une peau molle, ses bords garnis de lames ou de petites dents. 1° Canards ( Anas Linn.). Cygnes, Oies, Bernaches , Céréopsis , Canards proprement dits, Macreuses, Garrots, Eiders, Milouins, Souchets, Tadornes, Sarcelles. 2° Harles ( Mer gus Linn.) Ainsi, la classification des Oiseaux, ra¬ menée presqu’à son point de départ, c’est- à-dire réduite à six ordres, plus naturels toutefois que ceux du Systema natures ; l’a¬ doption complète de la nomenclature lin- néenne; la reproduction de toutes les gran¬ des divisions génériques créées par Linné ou par ses successeurs, mais ces divisions, le plus souvent modifiées par l’intervention de coupes secondaires , et par suite le nombre des genres porté à près de trois cents; telle est , en résumé , la réforme apportée par G. Cuvier dans la méthode ornithologique. OIS OIS 78 A cette période scientifique , que nous venons d’examiner, et que nous appelle¬ rions volontiers période linnéenne, parce que les méthodistes, tout en modifiant la classification de Linné, sont généralement restés fidèles à ses principes , va succéder celle de laquelle est sortie insensiblement cette surabondance de divisions génériques qui encombrent actuellement les méthodes. Faire l’analyse, même succincte, de tous les travaux qui appartiennent à cette deuxième époque , et les mettre d’accord entre eux , est chose qui nous entraînerait au-delà des limites qui nous sont imposées. Aussi nous bornerons-nous à constater les résultats gé¬ néraux auxquels les auteurs sont arrivés. Ces résultats sont dus à l’introduction , en ornithologie, d’une réforme qui dominait depuis longtemps les méthodes botaniques; c’est-à-dire à la création de familles orni¬ thologiques , non plus comme les avaient comprises Schœffer, Scopoli, Vieillot, G. Cu¬ vier, etc., mais comme les admit Boié, et comme, après lui, beaucoup de natura¬ listes les ont reproduites. L’auteur du Règne animal avait maintenu les divisions lin- néennes comme genres. Boié, dans un Essai de classification des Oiseaux d’Europe, pu¬ blié en 1822, les transforma en familles et considéra les coupes secondaires comme coupes génériques. Ainsi des genres élevés à la puissance de familles, et des sous-genres ou sous-divisions portées à la dignité de genres, tel est le mérite de la réforme, bien simple en apparence, mais très importante par ses conséquences , qu’introduisit Boié dans la classification des Oiseaux. Nous avons dit que la méthode de G. Cuvier nous pa¬ raissait être l’origine de cette réforme. Que fallait-il, en effet, pour que, même en con¬ servant la nomenclature linnéenne, un ré¬ sultat pareil se produisît ? Il suffisait de don¬ ner aux divisions préalablement établies une valeur plus grande ; de considérer, par exem¬ ple, les genres Lanius , Fringilla , etc., comme autant de familles naturelles, et les coupes introduites parmi ces Fringillœ et ces Lanii comme genres. C’est ce que fit Boié, et l’honneur lui en revient tout entier. Ce premier changement en provoqua un autre, et celui-ci consista dans la modifi¬ cation de la nomenclature ornithologique. Vigors fut l’auteur de cette innovation , qui j depuis a été généralement adoptée. Les noms de genres, devenus noms de famille, reçurent tous une même terminaison. Ainsi les Tanagra devinrent des Tan a g ridées , les Falco des Falconidées, etc. Enfin, ces deux modifications, dont on ne saurait nier l’importance, ont été de nos jours poussées jusqu’à leurs dernières con¬ séquences, jusqu’à l’exagération; on ne s’est plus contenté de reconnaître des familles; la moitié des genres créés, soit par Brisson, soit par G. Guvier, soit par Boié, etc., sont devenus des sous-familles, et dès lors, les coupes génériques se sont accrues dans des proportions vraiment effrayantes. Ainsi , dans la List of the généra of liras de G. R. Gray, qui peut être considérée comme la dernière expression de la science sur ce point, en ce sens qu’elle renferme presque toutes les divisions qui ont été proposées vers ces dernières années, les Oiseaux se trou¬ vent dispersés dans 49 familles, 176 sous- familles (chiffres que n’ont jamais atteints les genres linnéens, car, même dans la der¬ nière édition du Systema naturæ, ils n’ont été portés qu’à 104), et dans 1175 genres. Si Linné, si G. Cuvier n’ont pas assez mul¬ tiplié leurs divisions génériques, il faut con¬ venir que les méthodistes modernes sont tombés dans l’excès opposé. Or, dans l’in¬ térêt de la science, mieux valait encore le défaut contraire. (Z. Gerbe.) Explication de la planche 60 (oiseaux). Pour rendre claire, pre'cise et courte la caracté- ristique des genres et la description des espèces, les ornithologistes sont convenus de préciser les diffé¬ rentes parties des Oiseaux, et de créer, pour les dé¬ signer, une nomenclature spéciale. Nous avons cru nécessaire et surtout utile pour nos lecteurs de don¬ ner une planche théorique dans laquelle toutes , ou a peu près toutes ces parties se trouvent désignées. Fig. 1. Cette figure est destinée à donner une idée des diverses régions de l’Oiseau dans leur ensemble. À. Face supérieure ( notœum ) montrant : 1. La mâchoire , ou mandibule supérieure , à laquelle on distingue la pointe (a), le dos ou F arête (i), les fosses nasales (c), l’angle J routai (d) et le bord ( e ). 2. Le bonnet , divisé en frotit (_/’), en oertex ou sommet (g), et en occiput (h). o. La région cervicale f qui compreud la nu- (pie (i) et le bas du cou ( auchenium ) (y). 4. Le dos , que l’on divise en épaules (4), en dos proprement dit (f) et en croupion (/?/). OIS o. La queue , recouverte à son insertion par les tectrices caudales supérieures (n). B. Face inférieure ( gastrœum ) montrant : G. La mandibule inférieure , divisée en extré¬ mité (o) et en branches ( p ), entre lesquelles se trouve le menton ( q ). 7. La gorge, qui comprend la gorge proprement dite (r) et le devant du cou ( s ). 8. La poitrine. 9. L’ abdomen , subdivisible en épigastre (t), en ventre ( u ) et en région anale ( cris - tum ) (-v). C. Faces latérales, montrant : 10. Sur les côtés de la tête, les anthies (x), le lorum (y), les joues {a a), les soui-cils ( bb ), la région ophthalmique (ce), la région paro- tique. 1 1. Les parties latérales du cou. 12. Les hypocliondres ou flancs. D. Ailes , divisées en épaule (dd) et en poi¬ gnet (ce). Les plumes qui les recouvrent et qui s’y implan¬ tent se distinguent eu tectrices , en rémiges et en pennes policiales , qui constituent l’aile bâtarde (ff). Les tectrices sont ou petites (gg), ou moy ennes {h h), ou grandes \ii ) ; les rémiges sont ou primaires (jj), ou secondaires (AA), ou tertiaires {II). E. Queue. Les pennes qui la composent ont été nommées rectrices, et sont disposées par paires ; les plumes qui la recouvrent à sou insertion ont reçu le nom de tectrices supérieures ou infé¬ rieures , selon le lieu qu’elles occupent. F. Jambes , divisées en pieds , auxquels on dis¬ tingue un pouce (mm) et des doigts (nn), que l’on compte de l’intérieur à l’extérieur. Tous sont armés d’ongles (oo). En tarses ( pp ), sur lesquels on distingue une face antérieure (qq) et une face postérieure (rr). En jambe proprement dite (ss). On nomme talon (II) l’articulation du tarse avec la jambe, et podartrum l’articulation des doigts avec le tarse. Fig. 2. Représentant une aile étalée vue par sa face inférieure , destinée à montrer les rapports des rémiges avec les parties solides qui la constituent. L’aile se divise anatomiquement eu main (a), à laquelle on distingue le pouce (6); en avant-bras (c) composé d’un radius (d) et d’un cubitus (e), et en bras formé d’un seul os , comme dans les Mammi¬ fères. Les pennes de la main (f) ont reçu le nom de pennes primaires ou métacarpiennes ; elles va¬ rient en nombre, selon les espèces. Les quatre pre¬ mières (g) ont été nommées par M. de Blainville pennes digitales ; celles du pouce sont appelées pennes bâtardes ou policiales (/t), et celles de l’a¬ vant-bras, ou pennes cubitales , sont distinguées en pennes secondaires (i) et en pennes tertiaires ou axillaires (y), I ig. 3. Tête d’un Oiseau de proie (Falco tinnun- 01, A 7!) cii/us), destinée à montrer la cire (c), au milieu de laquelle sont percées les narines. Fig. 4. Tête de Gallinacé, destinée à montrer le caractère sur lequel G. Cuvier a établi cet ordre. (Voir plus haut la classification, ordre des Galli¬ nacés.) (Z. Gerbe.) OISON, ois. — Nom vulgaire de l’Oie do¬ mestique dans l’état de jeunesse. ‘OK K\l l ( nom propre ). bot. ph. — Genre de la famille des Nyctaginées, établi par Schiede (in Linnœa , V, 92). Herbes du Mexique. Voy. nyctaginées. — Olcenia , Dietr. Voy. ockenia. OLACE. Olax. bot. ph. — Genre de la famille des Olacinées , établi par Linné ( Amœn. académ. , I, 387 ), et dont les principaux caractères sont : Calice cupuli- forme, tronqué, très petit. Corolle à 6-5 pé¬ tales hypogynes. Étamines fertiles 3 , rare¬ ment 4 ou 5, alternes aux pétales; étamines stériles 5 ou 6 opposées, indivises ou bi¬ fides ; filets adhérents aux pétales ; an¬ thères introrses, à 2 loges s’ouvrant longi¬ tudinalement. Ovaire libre, à une seule loge 3 ovulée. Style terminal simple; stig¬ mate à 3 lobes. Drupe sec, libre, à noyau osseux, monosperme. Les Olacessont des arbres ou des arbris¬ seaux glabres, garnis ou dépourvus d’épines, d-ressés ou quelquefois grimpants ; à feuilles alternes, souvent distiques , pétiolées , très entières, articulées, décidues; à stipules nulles; à fleurs blanchâtres , petites , sou¬ vent polygames, axillaires, solitaires ou réunies en épis. Les espèces de ce genre croissent assez abondamment dans l’Asie, l’Afrique tropi¬ cale et la Nouvelle -Holland e (Olax zelya- nica, scandens , etc.). (J.) OLACINÉES. Olacinede. bot. ph. — Le genre Olax, type de cette famille, était placé par Jussieu à la suite des Sapotées ; mais le Fissilia, qui n’en diffère pas, et qui dès lors était connu plus complètement, formait, avec plusieurs autres, la première section de celle des Orangers. M. Mirbel éleva cette section à*la dignité de famille, sous le nom d 'Olacinées , et la laissa à cette même place que lui ont conservée la plupart des auteurs. Cependant, M. R. Brown admettait un point de vue tout différent , en rejetant VOlax à la suite des Santalacées, avec les¬ quelles, en effet, son affinité est beaucoup 80 OLA OLA moins contestable. La structure de l’ovaire à placentation centrale et celle du fruit et de la graine, jointe au port, établissent ce rapport , qu’infirment d’autre part la posi¬ tion libre et non adhérente de ce même ovaire, la présence d’une double enveloppe dans la fleur, et la proportion fréquente d’étamines en nombre double. Ajoutons que l’adjonction de plusieurs genres à placenta¬ tion axile, contribuait aussi à justifier l’éloi¬ gnement des Olacinées et des Santalacées. Mais si on les exclut de la famille , et si l’on établit une comparaison rigoureuse avec les Santalacées et les Loranthacées, on voit que dans ces deux groupes l’adhérence de l’o¬ vaire et l’unité d’enveloppe florale souffrent de nombreuses exceptions, de sorte que le caractère contraire doit perdre une partie de sa valeur dans les Olacinées. Cette famille pourra donc être ainsi décrite : Enveloppe florale double, l’extérieure (calice des au¬ teurs) libre ou adhérente à sa partie infé¬ rieure, tronquée ou dentée, quelquefois ac- crescente; l’intérieure (pétales des auteurs) composée de 4 , 5 ou 6 pièces libres , ou réunies deux à deux, ou même soudées infé¬ rieurement en tube, à préfloraison valvaire. Étamines au nombre double de ces pièces alternativement stériles et anthérifères , quelques unes de ces dernières manquant quelquefois ; anthères biloculaires , intror- ses , s’ouvrant par deux fentes longitudi¬ nales. Ovaire à une loge unique , du milieu de laquelle s’élève une petite colonne pla- centifère portant à son sommet de un à quatre ovules, mais présentant en général, vers le bas, autant de cloisons incomplètes qui semblent la partager en autant de loges. Un style simple , tronqué au sommet ou partagé en autant de lobes. Un fruit in¬ déhiscent, à sarcocarpe mince, un peu ou point charnu , à endocarpe crustacé ou os¬ seux, contenant plusieurs graines ou le plus souvent par avortement une seule, qui, par l’arrêt du placenta soudé sur son contour, semble dressée du fond de la loge. Embryon dans l’axe d’un périsperme épais et charnu, beaucoup plus court que lui, et situé à son extrémité supérieure, à radicule supère, à cotylédons peu élargis ou même demi-cylin¬ driques. Les Olacinées sont des arbres ou ar¬ brisseaux, quelquefois grimpants, inermes ou à rameaux épineux, glabres ou munis de poils rares, à feuilles alternes, simples, très entières, dépourvues de stipules; à grappes axillaires, quelquefois réduites à très peu de fleurs et même à une seule , qu’accompa¬ gnent de petites bractées écailleuses. Les espèces sont dispersées entre les tropiques sur tous les points de la terre à peu près, sans abonder plus particulièrement sur au¬ cun en particulier ; on en observe aussi dans, la Nouvelle-Hollande extratropicale. Genres. * Plusieurs ovules. Étamines toutes ou seulement les alternipétales fertiles. Heisteria, L. ; Ximenia, Plum. ( Heymas •• soli , Aubl.; Roltboellia , Scop. ; Teanosia , Rich.); Olax L. ( Fissilia , Comm.; Sper- maxyrum , La Bill.; Roxburghia, Kœn.U ** Un seul ovule. Les étamines oppositi- pé taies fertiles. Opilia, Roxb. ( Groutia , Guill. Perrot.); Cansjera, Lam. M. Bentham, dont les travaux ont con¬ tribué à illustrer cette famille, y réunit en¬ core le Schœpfa , Schreb., que nous avons cité avec doute parmi les Loranthacées , avec lesquelles l’ovaire adhérent à sa base, et les étamines opposées et adnées aux di¬ visions de l’enveloppe interne établissent des rapports, qui confirment l’alliance intime des deux familles. Quelques genres imparfaitement connus, comme les Pseudaleia et Pseudaleioïdes , Pet. Th. ; Plotea et Stemonurus, B1 . ; Quil- lesia , Blanc, étaient réunis aux Olacinées; mais ne peuvent entrer dans leur définition et dans la discussion de leurs affinités, tant que leur connaissance restera incomplète et leur place par conséquent aussi incer¬ taine. Cependant il nous reste à parler de quel¬ ques autres genres mieux connus, que tous les auteurs s’accordent à conserver parmi les Olacinées, où ils formaient une troisième section, celle des Icacinées , comprenant les genres Gomphandra, Wall.; Icacina, Ad. J.; Apodytes , Benth. ; Leretia, Velloz. et Benth. ; Pogopetalum, Benth. (? Emmolum, Desv. ). Ces plantes diffèrent essentielle¬ ment des vrais Olacinées par leur placenta¬ tion, puisque les ovules sont suspendus au nombre de deux à l’angle d’une ou de plu- OLE OLE 81 sieurs loges, que leurs étamines toutes fer¬ tiles alternent avec les pétales , égales en nombre, et qu’enfin leur inflorescence est en général terminale. Il nous semble donc que ce petit groupe ne doit être conservé ici que provisoirement et sans que ses caractères soient pris en considération dans la défi¬ nition de la famille, dont ils détruisent l'unité. (Ad. J.) OLAX. BOT. PH. — Voy. OLACE. OLBIA , DG. ( Prodr. , I, 438). bot. ph. — Voy. lavatera, Linn . *OLDEIVBERGIA (nom propre) . BOT. PH. — Genre de la famille des Composées, tribu des Mutisiacées, établi par Lessing (in Lin- nœa, V, 252, t. 3, fig. 69-75). Arbrisseaux du Gap. Voy. composées. OLEA. bot. ph. — Nom scientifique de l’Olivier. Voy. ce mot. OLÉACÉES, OLÉINÉES. Oleaceœ , Olei- neæ. bot. ph. — Famille de plantes dicotylé¬ dones, monopétales, hypogynes, primitive¬ ment confondue avec les Jasminées , parmi lesquelles plusieurs auteurs continuent à la conserver encore comme simple tribu. Elle est ainsi caractérisée: Calice à quatre divi¬ sions plus ou moins profondes, manquant presque dans un petit nombre de cas. Corolle tubuleuse, dont le limbe se partage en autant de lobes alternes, à préfloraison valvaire, ra¬ rement fendue jusqu’à la base comme en autant de pétales, ou manquant tout-à-fait. Deux étamines alternan t avec ces lobes et in¬ sérées sur ce tube, à anthères introrses, bilo- culaires, s’ouvrant longitudinalement. Ovaire libre, sans disque glanduleux, à deux loges, dontchacunecontient deux ovules suspendus en dedans versle sommet et collatéraux, rare- menten plus grand nombre. Stylecourt. Stig¬ mate indivis ou bifide. Fruit indéhiscent , charnu ou sec, et quelquefois prolongé supé¬ rieurement en une aile membraneuse, d’au¬ tres foiss’ouvrant en deux valves par le décol¬ lement des cloisons, réduit par avortement à peu de graines ou même à une seule, souvent comprimée, quelquefois ailée. Embryon dans l’axe d’un périsperme épais, charnu ou corné, l’égalant presqu’en longueur, à cotylédons fo¬ liacés, à radicule cylindrique et supère. Des espèces sont des arbres ou des arbrisseaux, rares entre les tropiques, répandus dans les régions tempérées surtout de l’hémisphère boréal. Leurs feuilles sont opposées, entières T. IX. et simples, ou plus rarement pennées avec impaire, dépourvues de stipules ; leurs fleurs verdâtres, jaunes, blanches ou violacées, en grappes ou en panicules définies, d’une odeur souvent agréable et pénétrante qui les fait rechercher autant que leur élégance. Le bois, dans quelques unes, est extrêmement dur et employé comme tel. Mais celle qui rend le plus de services est incontestablement l’Oli¬ vier, dont le péricarpe fournit la meilleure huile en usage. Cet arbre ( Olea europœa ) peut servir à caractériser par sa présence toute une grande région botanique, la zone qui borde la mer Méditerranée où sa culture est si générale, tandis qu’elle ne réussit pas autre part. C’est aussi à cette famille qu’on rap¬ porte le Frêne, duquel plusieurs espèces lais¬ sent échapper, par incision de leur écorce, la Manne, cette substance sucrée et légère¬ ment purgative, dont les propriétés parais¬ sent dues à un principe distinct du sucre, la Mannite. GENRES. Tribu I. Oléinées. Fruit charnu. Chionanthus , L. — Linociera , Sw. ( Thoui - nia , Sw. — Mayepea , Aubl. — Ceranthus , Schreb. — Minutia , Yel I. ) — Noronhia, Stadt. (. Binia , Norh.)— Olea, R. Br. (Gymnelœa, Endl. — Phillyrea , Tourn. — Osmanthus , Lour. ) — Notelœa, Vent. ( Rhysospermum , Gærtn.) — Stereoderma, Bl. ( Pachyderma , BI.) — Ligustrum, Tourn. Tribu IL Fraxinées. Fruit sec, indéhiscent, ailé ou capsulaire. Fraxinus , Tourn. ( Ornus , Pers.) — Fon- tanesia , Labill. ( Desfontainesia , Hoffman.) — Syringa, L. (Lilac, Tourn.) — Forsythia , Vahl. — Schrebera , Roxb. Genres douteux. Tetrapilus, Lour. — Myxopyrum , Bl. (Ad. J.) OLEARIA (olea, huile d’olive), moll. — Dénomination employée chez les anciens pour désigner une coquille servant à puiser de l’huile, et qui était probablement le Buc- cinum olearium de Linné , classé aujour¬ d’hui dans le genre Tonne (Dolium) de La- marck. Quelques auteurs ont prétendu que ce devait être plutôt le Turbo olearius ou marmoratus de Linné, et Klein a même 11 ou 82 OLE proposé un genre de ce nom , ayant pour type cette coquille. (Duj.) OLE ARIA. bot. ph. — Genre de la fa¬ mille des Composées, tribu des Astéroidées, établi par Mœnch ( Meth. suppl. , 254). Arbrisseaux de la Nouvelle-Hollande. Voy . COMPOSÉES. OLEASTER, Endl. ( Gen . plant., p. 572, n. 3349). bot. ph. — Voy. olivier. OLÉATES. chim. — On nomme ainsi des sels formés par la combinaison de l’Acide oléique avec les bases. Ils font partie des savons, et leurs caractères principaux sont d’être solubles dans l’eau et l’alcool, et de donner , par l’action des acides , un corps gras, huileux, liquide à la température or¬ dinaire, et même à plusieurs degrés au- dessous de zéro. Les principaux Oléates sont ceux de Plomb , et ceux de Potasse et de Soude. OLÉINE, chim. — Syn. d’Elaïne. OLÉINÉES. Oleineœ. bot. ph. — Sous- ordre ou tribu des Oléacées. Voy. ce mot. OLÉIQUE (acide), chim. — Produit de la saponification et de la distillation des corps gras. Cet acide a la propriété, de sa¬ turer les bases et de former des sels neu¬ tres. Il est liquide à la température ordi¬ naire, solide et cristallisable à 7° çentigr. OLENCIRA. crüst. — C’est un genre de l’ordre des Isopodes, qui a été établi par Leach, et que M. Milne Edwards range dans sa tribu des Cymothoadiens parasites. Cette petite division générique se compose d’une seule espèce d’Isopodes qui a une très grande analogie avec les Cymothoés {voy. ce mot), et qui peut-être ne devrait pas en être distinguée. Les principaux caractères qui l’en séparent sont tirés de la forme al¬ longée de la tête et des pattes : celles-ci sont imparfaitement ancreuses. Le dernier ar¬ ticle de l’abdomen est beaucoup plus long que large. La seule espèce connue est l’O- lencire de Lamarck , Olencira Lamarckii Leach ( Dict . des sc. nat., t. XII, p. 350). On ne connaît pas la patrie de ce curieux Crustacé. * (H. L.) *OLEI\IIDÆ. crust.— M. Burmeister, dans son Organisation des Trilobites , désigne sous ce nom une famille qui renferme les genres Paradoxides et Olenus. (H. L.) *OLENUS (nom mythologique), ins. — Genre de Coléoptères subtétramères, Tri¬ mères deLatreille, famille des Fongicoles, des Sulcicoles de Mulsant , formé par nous et adopté par Dejean {Catalogue , 3e édit., p. 463), qui en énumère deux espèces : les O. Senegalensis et minutus Dej. La première est du Sénégal , et la deuxième habite Java. (C.) *OLENUS. crust. — Sous ce nom est dési¬ gnée par M. Burmeister, dans son Organisa¬ tion des Trilobites, une nouvelle coupe gé¬ nérique établie aux dépens des Paradoxides. Ce genre renferme quatre ou cinq espèces , dont Y Olenus gibbosus, Wahl., peut être con¬ sidéré comme le type. (H. L.) *OLÉRACÉES. Oleraceæ. bot. ph. — Ce nom sert vulgairement à désigner les plantes potagères. Mais M. Endlicher l’a appliqué dans sa classification à ce groupe de familles apétales, que’ caractérisé un ovaire 1-loculaire avec un ou plusieurs ovules attachés à sa base et présentant un embryon souvent courbé autour d’un péri- sperme farineux : les Atripiieées, Amaran- tacées , Polygonées , Nyctaginées. (Ad. J.) *OLESTHERUS ( oWt®0v,Po'ç , glissant). ins. — Genre de Coléoptères pentamères , famille des Brachélytres , tribu des Phlœo- chariniens , formé par Dejean ( Catalogue , 3e éd., p. 79), et adopté par Erichson ( Généra et, species Slaphylinorum, p. 843). Il se compose de deux espèces de la Laponie, ou 85 OL1 es O. substriatus Ghl., et megacephalus Zett. (G.) *OLISTHOPlJS (ohaQ oç, glissant \ 7TOVÇ, pied), ins. — Genre de Coléoptères penta¬ mères , famille des Carabiques, tribu des Féroniens , créé par Dejean (Species général des Coléoptères , t. III, p. 176). Sept es¬ pèces composent ce genre, les O. rotun- dalus Pk., hispanicus , punctulatus , fus- catus, Slurmii Dufs., græcus Br., et parma- lus Say. Les six premières sont propres à l’Europe, et la dernière vient des États- Unis. Ces Insectes se tiennent dans les bois un peu marécageux. (C.) OLÏVA1UA. moll. — Nom proposé par Latreille pour une famille de Mollusques gastéropodes comprenant les genres Olive, Tarière et Ancillaire qui font partie de la fa¬ mille des Enroulés deLamarck. (Duj.) OLIVE. Olive i (forme du fruit de l’Oli¬ vier). moll. — Genre de Mollusques gas¬ téropodes, de la famille des Enroulés, établi par Bruguière aux dépens du grand genre Volute de Linné. Il est caractérisé par la co¬ quille subeylindrique, enroulée, lisse; à spire courte, dont les sutures sont canaliculées ; avec l’ouverture longitudinale , échancrée à sa base et la columelle obliquement striée. L’animal, observé et décrit par MM. Quoy et Gaimard , a le pied allongé, étroit, lingui- forme, très épais et relevé de chaque côté pour envelopper la coquille, comme le fait le manteau des Porcelaines. Demêmeaussi cette enveloppe charnue sécrète la couche émaillée, luisante et vivement colorée, qui revêt l’extérieur de la coquille. Le pied, dont les expansions laissent la spire à découvert, se prolonge antérieurement en un lobe triangu¬ laire, fendu au milieu et séparé du reste par un sillon assez profond. La tête, fort petite, porte deux tentacules réunis à la base. Une première portion, plus épaisse, presque cy¬ lindrique de chaque tentacule, est terminée par un œil, et une deuxième portion plus grêle, deux fois plus longue, et pointue, part latéralement de l’extrémité de ce pédoncule oculaire. Le manteau, en outre du tuyau cy¬ lindrique destiné à porter l’eau dans la ca¬ vité branchiale, forme dans l’échancrure même de la coquille une duplicature, comme une languette triangulaire libre et flottante derrière le siphon. Un autre appendice du manteau est situé en arrière et se loge dans une petite gouttière ou un canal qui sépare et contourne les tours de la spire ; c’est même là un caractère exclusivement propre aux Olives. Le genre Olive est tellement distinct et naturel qu’il a dû fixer l’attention des zoo¬ logistes, longtemps avant que d’avoir reçu le nom qu’il porte aujourd’hui. Cependant Linné le confondit avec ses Volutes et même le réduisit à une seule espèce. Adanson, au contraire, le distingua bien des Volutes, mais il le réunit avec les Marginelles pour en faire son genre Porcelaine. Depuis Bruguière, tous les naturalistes ont été d’accord pour adopter le genre Olive dont on connaît maintenant environ quatre-vingts espèces habitant les mers des pays chauds , et une dizaine d’es¬ pèces fossiles des terrains tertiaires. Les Oli¬ ves sont voraces et carnivores; elles s’enfon¬ cent dans le sable pour y chercher les Mollus¬ ques bivalves dont elles se nourrissent. Comme leurs coquilles sont très recherchées pour les collections, on les pêche au moyen d’une ligne amorcée avec de la chair crue. Elles s’y attachent avec force et se laissent ramener ainsi près de la surface où on les reçoit dans un petit filet quand elles se lais¬ sent tomber. Les conchyliologistes , d’après M. Duclos, divisent les Olives en quatre sections, savoir : 1° les Olives ancilloïdes, dont le pli columel- laire est en forme de torsade, telle que l’O. hialulata, petite coquille ovale conique, lon¬ gue de 18 millimètres, à spire élevée, ayant l’aspectd’un Buccin, et se trouvant à la fois vivante sur les côtes du Sénégal , aux An¬ tilles, dans le aanal de Mozambique, et fossile aux environs de Dax et de Bordeaux. 2° Les Olives cylindroïdes, dont la spire est fort pointue et qui ont des plis columellaires nombreux occupant presque tout le bord gauche, telle est l’O. subulala. 3° Les Olives glandiformes, qui sont globuleuses, ventrues, à spire courte, et dont le bord columellaire est strié seulement jusqu’à moitié, telle est l’O. porphyria vulgairement Olive de Panama, la plus grande et la plus belle du genre. Elle est ornée de lignes nombreuses brunes, fines, anguleuses ou en zig-zag, sur un fond cou¬ leur de chair, ou roussâtre. Cette coquille, qui se trouve près des côtes de l’Amérique méridionale, a quelquefois plus de 12 centi¬ mètres de longueur. 4" Les Olives volijtelles, 86 OLÏ OL1 dont la spire est mucronée, et dont le canal s’oblitère vers le commencement du dernier tour, telle est l’0. brasiliana ou brasiliensis Lamarck, longue de 45 à 50 millimètres, ayant presque l’aspect d’un cône, et à spire large, courte, aplatie, mucronée au centre, avec la columelle blanche, très calleuse su¬ périeurement. (Duj.) OLIVE, bot. ph. — Fruit de l’Olivier. Voy . ce mot. OLIVE (Huile d’). CHIM. — Voy. HUILE. OLIVÉMTE. min. — Syn. de Cuivre arséniaté vert-olive. Voy. cuivre. OLIVERIA . bot. ph. — Genre de la famille des Ombellifères, tribu des Smyrnées, établi par Ven tenat {Hort. cels., t. 21). Herbes des régions orientales. L’espèce type a été nom¬ mée par l’auteur Oliv. decumbens. OLIVETIER. moll. — Dénomination im¬ propre pour désigner l’animal de l’Olive. OLIVIA (Olivi, nom d’un naturaliste ita¬ lien). polvp. ? alg. — Nom du genre proposé par Bertoloni pour une Algue calcifère*, qui a été classée parmi les Polypiers sous le nom d ' Acetabularia{voy . ce mot), et qui avait été également rangée avec les Polypes sous le nom de Tubularia acetabulum par Linné et Gmelin, de Corallina androsace par Pallas, et d' Acetabulum mediterraneum par Lamarck. (Duj.) OLIVIA, Gr. ( Brit ., pl. I, 349). bot. cr. — Syn. de Chlorococcum, Grev. OLIVIER. Olea. bot. ph. — Genre de la famille des Oléacées , de la diandrie mono- gynie dans le système de Linné. Il se com¬ pose d’arbres et d’arbrisseaux qui croissent dans l’Europe méditerranéenne, l’Asie tro¬ picale, les parties extra-tropicales de l’Àus- tralasie, au cap de Bonne-Espérance, et très rarement dans l’Amérique septentrionale. Les feuilles de ces végétaux sont opposées , très entières, coriaces ; leurs fleurs sont pe¬ tites , blanches ou jaunâtres , généralement odorantes, souvent disposées en grappes, en panicules , etc.; elles présentent les carac¬ tères suivants : Calice court, à 4 dents ; co¬ rolle courte, campanulée, à limbe 4-fide ou 4-parti, plan, nulle quelquefois (sous-genre Gymnelœa ) ; 2 étamines insérées au fond du tube de la corolle, saillantes; ovaire à 2 lo¬ ges contenant chacune 2 ovules collatéraux suspendus au haut de la cloison ; style très court, terminé par un stigmate bifide. Le fruit est un drupe à noyau dur et osseux , ou chartacé et fragile , creusé de 1 ou de 2 loges, et ne contenant , par suite d’un avortement, qu’une ou deux graines. Tel que nous venons de le caractériser d’après M. Endlicher, le genre Olivier a une cir¬ conscription plus étendue que celui établi d’abord par Tournefort, adopté ensuite par Linné et par la plupart des botanistes ; aussi M. Endlicher le divise-t-il en trois sous- genres bien tranchés, et distingués par des caractères suffisants aux yeux de beaucoup de botanistes pour constituer des groupes génériques. C’est cette division en trois sous- genres que nous reproduirons ici , en y rap ¬ portant les espèces qui offrent de l’intérêt. a. Gymnelœa , Endlich. Corolle nulle et étamines hypogynes. Noyau du drupe os¬ seux (ex. : Olea apetala , Vahl. ). Ce sous- genre avait été proposé comme genre par M. Endlicher dans son Prodrome d’une flore de Norfolk. b. Oleaster, Endlich. Corolle à limbe qua- drifide , portant les étamines à sa base. Noyau du drupe osseux. Ce sous-genre ré¬ pond au genre Olea de Tournefort et de presque tous les botanistes. Il renferme une espèce du plus grand intérêt , et qui devra nous arrêter quelque temps. 1. Olivier d’Europe, Olea europœa Lin., plus connu sous le nom d'Olivier . Selon qu’il est à l’état spontané ou cultivé, il forme , soit un arbrisseau rameux, tortueux et irré¬ gulier, plus ou moins épineux , soit un arbre de hauteur moyenne, à tête arrondie, dont le tronc, haut seulement de 2 ou 3 mètres, acquiert, grâce à sa grande longévité , une épaisseur assez forte. Ses feuilles, persistan¬ tes, coriaces, ovales - lancéolées , entières, sont marquées de nervures pennées très fines ; leur vert-grisâtre , surtout à la face inférieure, donne à l’arbre entier une teinte un peu triste qui réagit quelque peu sur l’aspect général des pays où on le cultive abondamment. Ses fleurs, petites et de peu d’apparence , forment , au moins chez les individus cultivés , une grappe paniculée souvent pyramidale, dressée, à bractées et bractéoles courtes et subulées. Chacune de ces inflorescences ne donne le plus souvent que 1-3 fruits ovoïdes, acuminés, devenant d’un violet noir à leur maturité , mais va¬ riant au reste beaucoup de forme , de di- ou 8? OU mensions , même de couleur , par l’effet de la culture. On distingue dans cette espèce deux sous- espèces , ou plutôt deux grandes variétés , dont Tune est le type sauvage, buissonnant, épineux, à fruit très petit ; dont l’autre est formée par le végétal cultivé et devenu un arbre inerme , à fruit plus gros et plus hui¬ leux. C’est dans celle-ci que les influences de la culture, du sol, du climat, prolongées pendant une longue suite de siècles, ont fait naître de nombreuses modifications, ou, si l’on veut, des variétés, parmi lesquelles on distingue encore quelquefois des sous-varié¬ tés ou des formes d’ordre inférieur. Nous croyons devoir signaler ici celles de ces va¬ riétés que l’on cultive communément dans nos départements méridionaux. Nous sui¬ vrons pour cet exposé le mémoire spécial de Saint-Amans, qui a été imprimé dans le bel ouvrage sur les arbres fruitiers de MM. Poi- teau et Turpin, ainsi que les listes qui ont été données par Gouan ( Hort. Monspel. , pag. 7) et par De Candolle ( Flore française , 3e vol., pag. 497). Nous rapporterons à cha¬ que variété les noms vulgaires sous lesquels elle est connue dans la Provence et le Lan¬ guedoc. 1° O. e. angulosa Gouan. Cette variété porte les noms vulgaires de Galiningue, Ou- livière , Laurine ; elle est surtout cultivée aux environs de Béziers. Selon Rozier, elle est peu estimée près de Montpellier; l’huile qui en provient est dite par Gouan de qua¬ lité médiocre, tandis que d’autres lassent bonne. Son fruit est gros, rougeâtre, à long pédicule, bon à confire : elle résiste assez bien au froid ; son feuillage est ordinaire¬ ment maigre. 2° O. e. subrotunda, vulgairement Aglan- dou, Caïanne ; cultivée surtout dans les en¬ virons d’Aix. Fruit petit et arrondi, très amer, donnant une huile excellente. 3° O. e. amy g dalina Gouan, Amellou , Amel- lengue ou Amellenco, plant d’Aix. L’une des variétés les plus répandues en Provence et en Languedoc, estimée pour son fruit gros, ovoïde et de forme un peu analogue a celle d’une amande, d’où lui sont venus ses noms vulgaires, arrondi a. la base, aigu au som¬ met, noirâtre, piqueté, que l’on confit plus souvent qu’on n’en extrait l’huile, quoique celle-ci soit très bonne. 4° O. e. cranimorpha Gouan , Olivier à fruit de Cornouiller , ou Cormeau , Corniau, Courgnale, Plant de Salon. Fruit petit, ar¬ qué , pointu et très noir, porté sur un pédi¬ cule court, donnant une huile fine; variété très productive, à branches inclinées vers la terre. 5° O. e. sphœrica Gouan , Barralengue , Ampoullaoü. Fruit plus arrondi que celui des autres variétés , gros , noir, donnant une huile délicate. 6'' O. e. oblonga Gouan, Picholine , Sau- rine. Cultivée principalement en Provence, bruit allongé, ovale-oblong, à noyau bombé d’un côté, le plus estimé pour confire, et donnant aussi une huile fine et douce; feuille large. 7° O. e. viridula Gouan, Verdale , Ver - daoü , Pourridale. Fruit ovoïde, tronqué à la base, a long pédicule, restant très long¬ temps vert, pourrissant souvent à la matu¬ rité, d’où les noms de Pourridale et Pour- riale qu’on donne souvent à cette variété aux environs de Montpellier ; variété mé¬ diocrement productive. 8" O. e. prœcox Gouan , Mouraü , Mou- relte , Négrette , Mourescale. Fréquemment cultivée en Provence et en Langüedoc. Fruit de grosseur moyenne, ovoïde, de couleur très foncée à sa maturité, porté sur un court pédicule, à noyau très petit ; feuilles épaisses, larges, nombreuses. 9° O. e. racemosa Gouan, Olivier à bou¬ quets. , Bouteillaoü , Boutiniane , Pabière , Ra- pugète. Fruit arrondi, noir, à noyau court, en bouquets, donnant une huile bonne, mais qui dépose beaucoup. Cette variété est moins sensible au froid que les autres; son produit varie beaucoup d’une année à l’au¬ tre : par intervalles il est abondant. 10° 0. e. atro-rubens Gouan, Sayerne , Salierne , Sagerne. Fruit violet noirâtre, re¬ vêtu d’une couche de poussière glauque , arrondi inférieurement, aigu au sommet , donnant une huile très fine. Cette variété , cultivée surtout en Languedoc, reste ordi¬ nairement basse; ses feuilles sont petites. Elle est sensible au froid. 11° 0. e. variegala Gouan, Olive mar¬ brée ou tiquetée , Pigaoü , Pigale. Fruit de grosseur et de forme variables , passant du vert au rouge et du rouge au violet, tou¬ jours tiqueté de blanc. 88 OU OU 12° O. e. odorata Rozier, Luquoise , Lu- ques. Fruit très allongé, courbé en bateau, rougeâtre, tiqueté de blanc, à odeur agréa¬ ble , des meilleurs pour confire , mais se conservant médiocrement ; feuilles larges et nombreuses. 13° O. e, hispanica Rozier , Olivier d’Es¬ pagne ou à gros fruit , Espagnole , Plant d'Eiguïeres de la grosse espèce. Fruit plus gros que celui de toutes nos autres variétés, quoique bien inférieur encore en volume à celui de certaines variétés exotiques, comme celle de Lima , estimé pour confire , mais donnant une huile amère. Cultivé surtout en Provence. 14° O. e. regia Rozier, Royale , Triparde, Triparelle. Fruit gros, moins cependant que celui de la variété précédente, donnant une huile mauvaise, mais bon à confire ; feuilles petites, étroites, allongées. 1 5° O. e. atro-virens Rozier , Pointue , Pounchudo , Rougelte. Fruit oblong , en pointe à ses deux extrémités, prenant à la maturité une couleur rouge foncé, donnant une bonne huile; feuilles étroites. 16° O. e. alla Rozier, Olive blanche , Vierge , Blancane. Cette variété, toujours chétive et à- peu près inutile, est cependant remarquable parce que son fruit ne noircit ni ne rougit à la maturité ; ce fruit est, au reste, très petit, à chair blanche, semblable à de la cire , à noyau très gros proportion¬ nellement. Les feuilles de l’arbre sont cour¬ tes et larges ; ses rameaux sont faibles et ef¬ filés. On ne trouve guère cette variété qu’en quelques points de la Provence et près de Nice. Enfin , pour clore cette liste, nous men¬ tionnerons encore une variété dans la¬ quelle la chair du fruit n’a pas, à la matu¬ rité, cette âpreté et cette amertume qu’il faut enlever par une longue lixiviation et par de nombreux lavages pour rendre les Olives comestibles. Quoique l’Olivier ait reçu la dénomina¬ tion spécifique d’Olivier d’Europe , il n’est pas indigène de cette partie du monde ; il croît spontanément dans la chaîne de l’Atlas, en Syrie, en Arabie et en Perse. Il a été d’abord transporté d’Asie en Grèce à une époque très reculée, puisque, d’après la mythologie , Minerve en avait doté la ville d’Athènes à sa naissance; sa culture acquit de l’extension dans la Grèce; mais elle ne passa en Italie que lorsque Rome eut com¬ mencé d’asseoir sa puissance sur une large base, puisqu’elle était encore étrangère à ce pays pendant le règne de Tarquin-l’An- cien. Il est probable que l’époque de son introduction dans le midi de la Gaule eut lieu vers le septième siècle avant Jésus- Christ; les Phocéens, de Marseille, durent, en effet, en doter leur colonie dès sa fon¬ dation. Plus tard, les conquêtes des Ro¬ mains eurent nécessairement pour effet de répandre l’Olivier dans toutes les parties de l’Europe méridionale qui purent se prêter à sa culture, et c’est ainsi que s’ouvrit pour elles une nouvelle source de richesses. La culture de l’Olivier se rattache néces¬ sairement à deux causes qui la circonscri¬ vent dans des bornes étroites ; d’abord un cii- matassez tempéré pour que le froid de l’hiver n’y soit guère inférieur à 4°, et en second lieu le voisinage de la mer. Eh effet, l’OIi- Yier souffre par une température d’environ 4 ou 5° au-dessous de 0; il gèle par un froid plus intense; aussi les hivers rigoureux de 1709 et 1789 firent-ils dans les plantations de nos départements méridionaux des rava¬ ges affreux dont elles commençaient à se remettre, lorsque les froids de 1829-1830 sont venus les frapper de nouveau. Ces pertes successives ont jeté le découragement dans l’âme de beaucoup de cultivateurs dont plusieurs , notamment aux environs de Bé¬ ziers, ont renoncé à la culture de l’Olivier, ou ne l’ont plus considérée que comme ac¬ cessoire. Cependant , pour pallier en quelque sorte cette sensibilité au froid , l’Olivier possède dans ses racines une vitalité très énergique, qui leur permet de résister, souvent, lorsque toute la partie extérieure de l’arbre a péri par le froid , et de repous¬ ser de manière à rétablir, après un certain nombre d’années, les plantations momenta¬ nément détruites ; mais on conçoit sans peine que ce remplacement est nécessaire¬ ment très lent. En second lieu , l’influence de l’air de la mer est une condition essen¬ tielle pour le succès de la- culture de l’Oli¬ vier; aussi, malgré l’exemple qu’on a cité de plantations heureuses faites en Aragon, à peu près à moitié distance de la Méditer¬ ranée et de l'Océan, ne voit-on jamais cet arbre s’enfoncer profondément dans les ou ou terres. En France, sa culture est limitée à l'extrême midi ou au littoral de la Médi¬ terranée, ainsi qu’on peut le voir sur la carte botanique qui accompagne la Flore française de De Candolle ; elle se termine à une ligne oblique qui, partanLde la fron¬ tière nord du département des Pyrénées- Orientales, passe dans celui de l’Aude un peu au-dessous de Carcassonne, coupe obli¬ quement celui de l’Hérault dans le voisinage et un peu au-dessous de Lodève, et va se terminer dans celui de l’Isère, à quelques lieues plus bas que Grenoble. L’Olivier se plaît dans les sols pierreux , bien exposés au soleil , surtout sur les flancs des coteaux; il végète très bien dans les vallées, dans les plaines à terrain gras et fertile ; mais l'huile qu’on en obtient dans ces localités est toujours de qualité inférieure. Sa culture ne s’élève pasplushautverslenord que 45” de latitude; encore, à celte hau¬ teur, ne réussit-elle que lorsqu’on abrite les arbres. Loudon dit cependant que dans les endroits bien abrités du Devonshire, cet arbre végète très bien en plein vent , et qu i! fructifie même abondamment lorsqu’on le plante contre un mur. En Irlande, près de Dublin, il supporte très bien les froids de l’hiver, mais il ne fleurit jamais. Toute l’importance de lOlivier réside dans son fruit. Excepté dans une ou deux variétés peu répandues, celui-ci est tou¬ jours d’une âpreté et d’une amertume ex¬ trêmes. Pour l’en débarrasser, on le sou¬ met pendant deux ou trois heures a l’action d’une forte lessive; apres quoi, on le laisse pendant plusieurs jours dans de l’eau douce, qu’on renouvelle fréquemment; il ne reste plus ensuite qu’à le saler légèrement pour le conserver. Cette opération se pratique pour les Olives vertes ou cueillies avant leur maturité, les seules qui se trouvent dans le commerce ; mais , dans les pays mêmes où l’Olivier est cultivé, on mange également les Olives déjà noires et à peu près mûres. La préparation de celles-ci est plus facile et se réduit à les laisser quelque temps dans l’eau , en ayant la précaution de les piquer avec une épingle ou de les entailler pour que l’action de ce liquide pénètre dans toute la chair. Mais le principal avantage de l’Olivier est de fournir une huile qu’aucune autre r ix. 89 n’a pu encore remplacer. Cette huile réside dans la chair de l'Olive et s’en extrait par expression. L’opération est entièrement analogue à celle que nous avons décrite pour l’extraction de l’huile de noix ( voy. noyer), et dès lors nous n’en reproduirons pas les détails. Elle donne de même une huile vierge très douce et de qualité supérieure par la seule expression des Olives, sans action de l’eau bouillante, et ensuite V huile ordinaire ou inférieure par une seconde et plus forte pression de la pâte soumise préalablement à l'action de l’eau bouillante. Les nombreux et importants usages de cette huile d’Olive sont trop connus pour que nous ayons be¬ soin de les rappeler ici. La meilleure est celle des arbres qui ont végété dans des terres calcaires ou caillouteuses; au con¬ traire, Ja moins estimée provient des ar¬ bres cultivés dans les terres substantielles , grasses ou surtout humides. Avec les mêmes arbres, elle est meilleure lorsqu'elle a été obtenue de fruits cueillis un peu avant leur maturité; mais la quantité qu’on en ob¬ tient ainsi est moindre que si les Olives avaient atteint leur maturité parfaite. L’Olivier fleurit dans les mois de mai et de juin; son fruit est mûr en novembre; on l’abat à cette époque et en décembre , en frappant l’arbre avec de longues perches et le recevant sur des linges étendus à terre; sans cela les Olives persistent sur l’arbre jusqu’au printemps suivant. Le bois de cet arbre est jaunâtre, veiné, dur , susceptible de recevoir un beau poli. Ces qualités permettent de l’employer pour des ouvrages de tour , de tabletterie et d’é- bénisterie ; de plus, il n’est pas sujet à se fendre, et il est rarement attaqué par les insectes. Les sculpteurs anciens le préfé¬ raient à tout autre pour leurs ouvrages. C’est un excellent bois de chauffage. La multiplication de l’Olivier d’Europe est très facile et s’opère de diverses manières ; 1 ° par graines ; en Toscane, où le procédé des semis est, dit-on, fréquemment employé , on croit que les pieds qui en proviennent sont plus vigoureux, mais leur produit se fait longtemps attendre; 2” par boutures, mode de multiplication très commode; 3° par rejetons ou drageons enracinés que l’on enlève avec la hache en laissant fixée a leur base la protubérance ligneuse qui les 12 90 Ofl O LU porte; en Provence, on pense que la vigueur du rejeton est proportionnée au volume du fragment ligneux qui lui sert de base; sou¬ vent, pour obtenir plus de rejets que l’arbre n’en donnerait spontanément, on coupe le tronc au pied et on couvre la section d’une couche de terre; il ne tarde pas à se pro¬ duire ainsi un grand nombre de pousses que l’on enlève dès qu’elles sont bonnes à être plantées; 4° enfin, Rozier a recom¬ mandé comme très avantageuses les bou¬ tures de racines faites par tronçons d’en¬ viron 3 ou 4 décimètres de longueur mis en terre un peu obliquement. L’Olivier est sujet à être attaqué par des Insectes, parmi lesquels les plus redouta¬ bles sont un Lépidoptère, le Tinea oleœlla, Fabr. ; et un Diptère, VOscinis ou Dacus Oleœ, qui se logent dans les Olives et en font périr des quantités parfois énormes , sans qu’aucun procédé ait pu jusqu’à ce jour débarrasser l’agriculturede ce fléau. On trou¬ vera des détails d’un grand intérêt sur ces Insectes et sur leurs mœurs dans le rapport fait à l’Académie des sciences, le 18 mai 1 846, par M.Milne Edwards, sur un mémoire de M. Blaud ( voy . comptes rendus, 1er semes¬ tre de 1846 , p. 791). 2. Olivier d’Amérique , Olea Americana Lin. Nous nous bornerons à quelques mots sur cette espèce , que son beau feuillage persistant fait cultiver comme plante d’orne¬ ment. Elle croît au midi des États-Unis , à peu de distance de la côte de l’Océan. Elle forme un arbre de 10-12 mètres ou plus souvent un grand arbrisseau à feuilles lon¬ gues de 8-15 centimètres , oblancéolées , co¬ riaces, luisantes, d’un beau vert, persistant quatre ou cinq ans ; ses petites fleurs sont très odorantes ; son fruit est de la grosseur d’une petite cerise , globuleux , pourpre bleuâtre , à chair mince et à gros noyau fort dur. Son bois est très dur et si difficile à travailler que les Américains le nomment bois du diable j deuil voood. c. Phillyrea , Endlic. Cette section, que la plupart des botanistes regardent comme un genre à part, se distingue par les carac¬ tères suivants : Corolle à limbe 4-parti ; éta¬ mines insérées à la base de la corolle, noyau charlacé , fragile. M. Endlicher rapporte ici le genre Osmanthus, Lour. 3. Olivier odorant, Olea fragrans Thunb. ( Osmanthus fragrans Lour. ). Arbre assez fort dans la Chine et au Japon , mais res¬ tant dans nos contrées à l’état d’arbuste de 1-2 mètres, à feuilles d’un vert gai, per¬ sistantes, coriaces, elliptiques ou oblongues, ou lancéolées oblongues , acuminées, den- ticulées ; fleurs petites , d’une odeur très agréable; on dit que les Chinois en parfu¬ ment le thé. Dans nos jardins, on cultive cette plante en orangerie, et on la multiplie de marcottes , de boutures et de semis. A ce sous-genre se rapportent encore les Phillyrea latifolia Lin., media Lin., et angustifolia Lin., jolis arbustes toujours verts , spontanés dans le midi de l’Europe et au nord de l’Afrique, que M. Spach ( Suites à Buffon , t. VIII , p. 265 ) réunit comme simples variétés en une espèce uni¬ que, à laquelle il donne le nom de Phillyrea faux - alaterne , P. alalernoides Spach. On les cultive fréquemment en palissades et dans les bosquets d’hiver. (P. D.) OLIVIIVE. min. — Syn. de Péridot gra- nuliforme. Voy . péridot. OLLAIRE. min. — Voy. talc. *OELICELA. arach. — C’est un genre de l’ordre des Acariens, quia été publié dans le journal VJsis, par M. Heyden, mais dont les caractères n'ont jamais été formu¬ lés. (H. L.) OLMEDIA. bot. ph. — Genre de la famille des Artocarpées, établi par Ruiz et Pavon (Prodr. , 129, t. 28). Arbres du Pérou. Voy. ARTOCARPÉES. OLOCARPHA, DC. (Prodr., Y, 672). BOT. PH. — Voy . HEMIZONIA, DC. OLOFETALEM ou HOLOPETALEM, DC. bot. ph. — Voy. monsonie, Linn. fils. *0L0P1IR0A (5Xoç, complet; o crochet; xsyaK, tête), helm. — M. de Blain¬ ville (Dict. sc. nat., t. LVII, p. 530) a nommé ainsi un ordre d’Helminthes qu’il classe le premier parmi ses Vers apodes, et dans le¬ quel prennent place les Linguatules et les Prionodermes, deux genres que l’on a aussi réunis en un seul sous le nom de Penlastoma. Ainsi que M. de Blainville l’avait prévu, d’a¬ près le peu d’observations exactes que l’on possédait alors, les Onchocéphalés doivent former un groupe distinct, et ce ne sont ni des Nématoïdes, comme le supposait Cuvier, ni des Trématodes, comme le croyait Rudol¬ phi. MM. Diesing et Dujardin en font aussi un groupe à part, et ils leur donnent le nom d’ Acanthothèques . Voici comment le second de ces savants helminthologistes les caracté¬ rise : Vers ayant un intestin droit avec une bouche subterminale et un anus terminal ; bouche située à la face inférieure et accompa¬ gnée de deux paires de crochets rétractiles dans des gaines ou loges; tégument résis¬ tant; système nerveux distinct; sexes sé¬ parés? (P- G.) *0\Cn(>CEHC\ ( oyxoç , crochet ; x/p- xo ç , queue), helm.— Genre de Nématoïdes , établi par M. Diesing dans le Medizinische Jahrbucher en 1 84 1 . (P. G.) *OS\CHOLAÏMU$ ( oyxoç , crochet; W fxo'ç, gosier), helm. — Genre de Nématoïdes établi par M. Dujardin dans la famille qu’il ONC ONC 109 appelle Enopliens. Les espèces qu’il renferme sont remarquables par leur genre de vie. Elles ne sont pas parasites, mais extérieures comme les Anguillules et les Amblyures, et vivent dans les eaux douces ou salées, ou même dans la terre humide. L’une d’elles a néanmoins été trouvée dans l’intestin des Épinoches. Ces petits Helminthes se distin¬ guent par leur cavité buccale qui est aussi spacieuse que celles des Sclérostomes et des Cucullans, mais armée seulement de deux ou trois pièces longitudinales et non revêtue antérieurement d’une capsule cornée. (P. G.) *ONCHOMERUS ou mieux ONCOME RES (oyxyj, crochet; pjpoç, cuisse), ins. — Genre de Coléoptères subpentamères, tétra- mères de Latreille, famille des Longicornes, tribu des Cérambycins , formé par Dejean ( Catalogue , 3pédit., p. 358) avec les trois espèces suivantes : O. pilicornis ( Callidium flavum) F., unicolor Lat., cribripennis Dej. La première est originaire des Antilles , la deuxième de l'île Maurice , et la troisième de patrie inconnue. (C.) *OI\CIDERES (Syx oç , tubercule; <5/Pyj , cou), ins. — Genre de Coléoptères subpen¬ tamères, tétramères de Latreille, famille des Longicornes, tribu des Lamiaires, créé par Serville ( Annales de la Soc. ent. de France, t. 1Y, p. 67) , et adopté par Dejean ( Cata¬ logue , 3e édit. , p. 369). Plus de 30 espèces de l’Amérique équinoxiale rentrent dans ce genre, et nous citerons comme en faisant partie les O. amputator, globifera , repan- dator, gutturator F. , Diana 01. ( Lamia ), L’herminieri Schr., ulcerosa , remicosa , im- pluviata Gr. Ces Insectes rentrent dans trois divisions : l’une offrant des antennes plu¬ meuses , l’autre des antennes à base cornue chez les mâles, et enfin des antennes sim¬ ples dans les deux sexes. Les Oncideres ont le corps cylindrique, la tête tronquée verti¬ calement et munie de fortes mandibules , larges, aplaties, tranchantes, servant à en¬ tailler les branches de certains arbres. Ces branches, ainsi lacérées, entrent en décom¬ position, et bientôt servent de nourriture aux larves qui s’y développent plus tard. Kirby a donné, de son côté, à ces Insectes, le nom générique d'Apocoptona. (C.) ONCIDIEM(oyxoç, tubercule), bot. ph. — Genre de la famille des Orchidées, tribu des Vandées, établi par Swartz (in Ad. Holm. , 1800, p. 239), etdontles principaux caractè¬ res sont: Les trois folioles extérieures du pé- rianthe souvent ondulées, les latérales libres ou soudées au labelle, les intérieures con¬ formes. Labelle très grand, sans éperon , lobé, tuberculé ou crêté à la base. Gyno- stème dressé, semi-cylindrique, ailé au som¬ met ; anthères à 2 loges. Masses pollini- ques 2, sillonnées postérieurement; caudi- cule plane; glande oblongue. Les Oncidium sont des herbes parasites, souvent bulbiformes à leur base; à feuilles coriaces, planes, triquêtres ou cylindriques; à fleurs grandes, fauves, rarement blanches, portées sur des hampes radicales, et le plus souvent disposées en panicules. Ces plantes croissent assez abondamment dans l’Amérique tropicale. Plusieurs sont cultivées dans les serres. Parmi ces derniè¬ res , nous citerons principalement les One. variegalum* Sw. et barbatum Lindl., à fleurs blanches , maculées de taches d’un jaune rougeâtre. (J.) ONCIDIUM , Fr. bot. cr. — Synon. de Myxolrichum, Kunze. *0\CI\EMA. bot. ph.— Genre de la fa¬ mille des Asclépiadées, établi par Arnott (in Edinb. new Philosoph. Journ., XVIII, 261) aux dépens des Periploca , et dont l’espèce type est le Periploca capensis Roxb., arbris¬ seau du Cap. (J.) * ONCINOLABES ( Zyxoç , crochet ; SA, prise), échin. — Genre proposé par M. Brandt pour les espèces d’Holothuries ayant tous les pieds égaux ou homoïopo- des, et dépourvues d’organes respiratoires externes ou apneumones. Elles ont le corps très allongé, cylindrique, muni de crochets sur toute sa surface; leurs pieds, très dis¬ tincts , occupent cinq bandes parallèles également écartées; leurs tentacules sont oblongs et linéaires. M. de Blainville coïn- prend les Oncinolabes comme sous-genre , avec les Synaptes et Chirodotes, dans sa di¬ vision des Holothuries vermiformes ( Fistula - ria ), dont le corps est allongé, mou, ver- miforme, à suçoirs tentaculaires fort petits; ce qu’il nomme ici suçoirs étant ce que Brandt a nommé les pieds. (Du.r.) *ONCINOTUS (oW crochet ; v5toç, dos). ins. — Genre de Coléoptères subpentamè¬ res , tétramères de Latreille, famille des Longicornes, tribu des Prioniens, créé par 110 ON'C Erichson (ArcAtw. fur Nalurgeschiclhe, 1842, p. 219 ) , avec le Prionus arcualus de Fa- bricius, espèce originaire de la Nouvelle- Zélande. (G.) *0.\CmUM, Kirhy (Stephens, Cat.). ins. — Synonyme de Cryplophagus , Herbst, ou de Corlicaria , Marsharn. (G.) OXCI.XTS. bot. ph. — Genre de la fa¬ mille des Myrsinées , tribu des Théophras- tées?, établi par Loureiro ( Flor . cochinch., 151 ). Arbrisseaux de la Cochinchine. Voy. MYRSINÉES. ONCOBA. bot. ph. — Genre de la fa¬ mille des Bixiacées, tribu des Prockiées, éta¬ bli par Forskal ( Ægypt . , 103 ). Arbres de l’Afrique tropicale. L’O. spinosa est la prin¬ cipale espèce de ce genre. *ONCOCEPHALES ( oyx oq , bosse ; xî- tpaV/j , tête), ins. — Genre de Coléoptères subpentamères, tétramères de Latreille, fa¬ mille des Cycliques, tribu des Gassidaires hispites, formé par nous et adopté par De- jean ( Catalogue , 3e édit., p. 390). Quatre espèces rentrent dans ce genre : les O. den- tulata Ghv. , Senegalensis , humilis Dej. , et guadrilobata Guér . Les deux premières sont originaires du Sénégal, la troisième est pro¬ pre au cap de Bonne-Espérance, et la qua¬ trième aux Indes orientales (Pondichéry). Ce genre a pour caractères : Antennes épaisses, égales en grosseur, acuminées à l’extrémité et sillonnées longitudinalement; tête offrant à sa partie supérieure une bosse difforme; corselet inégal, bidenté sur chaque côté antérieur ; él y très obliquement tronquées. (C.) *OIMCOCEPHALES ( oyxo s , enflure ; xî- tp oJyj , tête ). ins. — Genre de l’ordre des Hémiptères hétéroptères, section des Géoco» rises , groupe des Sténopodides , établi par Burmeister (Amyot et Serville , Hémiptères, Suites au Buffon-Roret ) aux dépens des Rè~ duvius. L’espèce type, O. dessiccatus ( Red. id. ), est originaire de Cayenne. (L.) *OXCODERES (o/xoq , grosseur ; o/pvj , cou), ins. — Genre de Coléoptères subpen¬ tamères, tétramères de Latreille, famille des Longicornes, tribu des Lamiaires, formé par nous et adopté par Dejean ( Catalogue , 3e édit., p. 377). Le type, FO. Chevrolatii Dej. (denlicollis Chev. ) , est originaire du Mexique. Deux autres espèces du même pays font partie de ce genre. (C.) *ONCOMA, Spreng. ( Cur.port ., 18). bot. ph. — Syn. d'Oxera, Labill. *01\C0MERA, Stephens (Cat.). ins. — Synonyme d'OEdemera , Oliv. , ou division établie avec certaines espèces de ce dernier genre. (C.) * OXCOMERUS ( o-yxoç , tumeur; ywpoç, cuisse), ins. — Genre de l’ordre des Hémi¬ ptères hétéroptères, section des Géocorises , groupe des Édessides, établi par Burmeister (Amyot et Serville, Hémiptères, Suites à Buffon , édit. Roret). L’espèce type, One. fiavicornis ( Tesseratoma id. Guér.), pro¬ vient de la Nouvelle-Guinée. (L.) *ONCOMYCES , Klotsch. ( in Linnœa , VII , 195). bot. cr. — Syn. de Phlebia , Fr. ONCOPHORES ( oyx vj , crochet ; epopoç , qui porte), bot. cr. — Genre de la famille des Mousses, établi par Bridel (Bryolog., I, 389) aux dépens des Dicranium , pour les espèces dont la capsule présente une apo¬ physe à la base. Ces Mousses croissent dans les contrées extratropicales et marécageuses du globe. *0\C0RH1M S (Syxoç, force; pt’v, nez). ins. — Genre de Coléoptères tétramères, fa¬ mille des Curculionides gonatocères, division des Érirhinides, créé par Schœnherr ( Généra et sp. Curculion. syn., t. III, p. 592-7, 2, p. 338). Ce genre renferme les quatre es¬ pèces suivantes: O. scabricollis Dup. , cri - brithorax , nodulosus et planatus Chev. et Schr. La première est originaire de Cayenne et les trois autres proviennent du Brésil. Ce genre est caractérisé par une trompe caré¬ née, sciée à la base, et par des ély très apla¬ ties. (C.) OXCORflIZA, Pers. bot. ph. — Syn. d’On- cus, Lour. *ONCOSCELIS Céyxn, crochet; <™Aoç, jambe), ins. — Genre de Coléoptères tétra¬ mères, famille des Curculionides gonato¬ cères, division des Apostasimérides Crypto- rhynchides, formé par nous, adopté par De¬ jean ( Catalogue , 3e édit. , p. 319), et publié par Schœnherr sous le nom de Onchoscelis ( Généra et species Curculion. syn. , t. VIH, I, p. 302). Le type, l’O. Germari Schr. (ru- biginosus Dej.), est originaire du Brésil et de Cayenne. (C.) *ONCOSPERMA (Syxy>, crochet ; ani 'pf,a, graine), bot. pii. — Genre de la famille des Palmiers , tribu des Arécinëes , établi par ONE ONG lil Blume ( in Bullet. Neerland., 1830, p. 66) pour des Palmiers qui croissent dans les contrées humides de l’archipel Indien. Voy. PALMIERS. *ONCOSPORUM (o'yxoç, crochet ; airopa, spore), bot. ph. — Genre de la famille des Pittosporées , établi par Pulterlick (in Nov. stirp. Mus. vindob. , DG. , II, 21 ). Arbris¬ seaux de la Nouvelle-Hollande. Voy. pitto¬ sporées. *ONCOSTEMUM (oyxv,, crochet ; couronne), bot. pij. — Genre de la famille des Myrsinées , tribu des Ardisiées?, établi par Adr. de Jussieu (in Mem. Mus. , XIX , 133, t. 11). Arbrisseaux de Madagascar. Voy. MYRSINÉES. 'OACOïlJS (ôyxwToç , grossi ). ins. — Genre de Coléoptères hétéromères , famille des Mélasomes , tribu des Blapsides, formé par Dejean (Catalogue, 3e édit., p. 210) avec huit espèces de l’Afrique australe , dont les principales sont les O. f arclus, tar¬ das , et pedellus d’Illiger ( Opatrum). Les autres sont toutes inédites, et ont été nom¬ mées par Dejean , mais le nombre de celles actuellement connues est plus que doublé. (G.) ONCUS (oyx-n, crochet), bot. ph. — Genre de la famille des Dioscorées, établi par Lou- reiro (Flor. cochinch., I, 240). Sous-arbris¬ seaux de la Cochinchine. Voy. dioscorées. *0NC1L0G0NATUM. bot. cr. — Genre de la famille des Équisétacées , établi par Kœnig (in Geolog. Transact., t. II, sér. 2, p. 390, 't. 32, f. 1-6), et considéré par M. Endlicher comme une simple section des Equisetum. Voy. prêle. ONDATRA, mam. — Genre de Rongeurs créé par Lacépède (Tableau des Mam. 1803) et réuni généralement au genre des Cam¬ pagnols. Voy. ce mot. (E. D.) ONDULÉ. Undulatus (undà, onde), bot. — On donne cette épithète aux feuilles ou aux pétales, lorsque leurs bords présentent des plis ou des ondulations (Ex. : les feuilles du Chou, de la Mauve crépue, etc.). ONEILLIA, Agardh (Spec., I, 169). bot. cr. — Syn. de Claudea, Lamx. *ONESIA. ins. — Genre de l’ordre des Diptères brachocères, famille des Athéricè- res, tribu des Muscides, sous-tribu des Sarco- phagiens , établi par M. Robineau-Desvoidy. M, Macquart, qui adopte ce genre ( Diptères , Suites à Buffon, édition Roret), en décrit sept espèces qui vivent en France. Nous citerons parmi les plus communes les Ones. floralis, claripennis et viarum. (L.) ONGLE. Unguis. zool. — Voy. peau. ONGLE DE CHAT. Unguis Cati. bot. ph. — Nom vulgaire d’une espèce du genre In g a. ONGLET. Uuguiculus. bot. — On donne ce nom au rétrécissement brusque qui ter¬ mine certains pétales à leur base, et consti¬ tue un point d’attache par lequel le pétale adhère à l’ensemble de la fleur. On dit alors le pétale onguiculé (Crucifères, Malpighia- cées, Caryophyllées, etc.). Les pétales dé¬ pourvus d’Onglets sont dits sessiles ( Vitis , Elatine, Cissus, etc.). ONGUICULÉ, bot. — Voy. onglet. ONGUICULÉ, ois. — Syn. d’Orthonyx. Voy. ce mot. (Z. G.) ONGUICULÉS. Unguiculala. mam. — Ray, et d’après lui tous les zoologistes, a employé ce mot , pour désigner les Mam¬ mifères qui ont l’extrémité supérieure de la dernière phalange de leurs doigts armée d’un ongle. (E. D.) ONGULÉS. Ungulata.MAM. — Nom com¬ mun à tous les Mammifères dont la dernière phalange est entièrement revêtue d’un ongle. Tels sont les Chevaux, les Éléphants, les Ruminants en général, etc. Ce nom d 'Ongulés, à peu près synonyme de celui d'Ongulogrades (voy ce mot), a été introduit dans la science par Ray. (E. D.) ONGULINE. Ungulina. moll. ■ — Genre de Conchifères dimyaires établi par Daudin et adopté depuis par Roissy et par Lamarck, mais dont les vrais rapports avec les Lucines n’ont été bien indiqués d’abord que par Sowerby, et ensuite par M. Deshayes. La coquille est longitudinale ou transyerse, ar¬ rondie au bord inférieur, presque équila¬ térale avec ses valves closes et ses crochets écorchés. Le ligament n’est pas intérieur, comme le dit Lamarck, mais extérieur, et porté, comme l’observe M. Deshayes, par des nymphes très aplaties, séparées d’abord par un sillon profond dans lequel est insérée sa portion la plus superficielle. Une autre pe¬ tite portion du ligament s’étale sur l’extré¬ mité de la nymphe, qui représente la deuxième fossette dont parle Lamarck. Les dents cardinales, comme celles des Lucines, 112 ONI ONI sont peu saillantes; sa valve droite en a deux divergentes ; la valve gauche en a une seule pyramidale, épaisse, fendue au som¬ met. Les impressions musculaires sont étroi¬ tes et allongées aussi, comme celles des Lu¬ tines. L’espèce type (O.. allongée , O. obionga) vit sur la côte du Sénégal, où elle se creuse une habitation dans les pierres calcaires, à la manière des Pétricoles et des autres co¬ quilles perforantes. C’est là ce qui occa¬ sionne les variations de la forme de cette coquille, dont on a voulu faire plusieurs espèces. Elle est ^encore rare , longue de 27 millimètres , brune et rugueuse en dehors, teinte de rose en dedans, et souvent aussi avec une tache brune au milieu de la face interne. On connaît aussi des Ongulines fossiles des terrains tertiaires. (Duj.) ÛNGULOGRADES. mam. — Ordre de la classe des Mammifères, suivant la mé¬ thode de M. de Blainville. Cet ordre, qui correspond presque à la divison des Ongulés de Ray, comprend les Pachydermes et les Ruminants. (E. D.) *ONISCIA, moll. —Genre de Gastéropo¬ des pectinibranches , proposé par Sowerby pour quelques espèces du genre Cassidaire de Lamarck, étayant pour type la Cassidaire cloporte {C. oniscus) de cet auteur. L’ani¬ mal étant inconnu, les caractères sont pris uniquement de la coquille qui est oblongue, subcylindrique, un peu conoïde, aspire courte, obtuse au sommet, rétrécie à la base, avec l’ouverture longitudinale, étroite, à bords parallèles. La columeîle est droite, simple, revêtue d’un bord gauche assez large et granuleux ; le bord droit est épaissi, dentelé , renflé au milieu ; le canal termi¬ nal est court, étroit, à peine échancré. C’est la forme de l’ouverture qui les distingue particulièrement des Cassidaires; le renfle¬ ment de leur bord droit semble au contraire devoir les rapprocher des Colombelles. Les Oniscies habitent les mers des pays chauds, elles sont toutes de petite ou de moyenne taille ; i’O. cloporte, qui est très commune dans les mers d’Amérique, est longue de 25 à 30 millimètres; elle est épaisse, entourée de trois rangs de tubercules, et tachée de blanc, de jaunâtre et de brun. M. Deshayes en a distingué, sous le nom d’O. Lamarchii, une espèce qu’on avait confondue jusqu’alors ; elle atteint une longueur de 35 millimètres ; son ouverture est constamment d’un beau rose, tandis qu’elle est blanche dans la pré¬ cédente. On connaît aussi quatre autres es¬ pèces vivantes d’Onîscies et une espèce fossile des terrains tertiaires de Bordeaux et de Turin. (Duj.) ONISCIDES. crust. — Voy. cloportides. ONISCODA. crust. — Genre de l’ordre des Isopodes, de la tribu des Asellotes ho- mopodes établi par Latreille. Le genre Ja~ nira de Leach ou Oniscoda de Latreille ne diffère que très peu des Jœridina {voy. ce mot), et ne devra probablement pas en être distingué. On ne connaît qu’une seule espèce dans ce genre , V Oniscoda maculosa Latr., qui a été rencontrée sur les côtes d’Angleterre. (H. L.) ONISCUS. crust. — Voyez cloporte. ONITICELLUS (diminutif A'Onilis). ins. — Genre de Coléoptères pentamères , famille des Lamellicornes , tribu des Scara • béides coprophages , proposé par Ziegler, adopté par Dejean ( Catalogue , 3e édit. , p. 159) et publié par Mulsant {Histoire na¬ turelle des Lamellicornes de France, p. 95). 22 espèces font partie de ce genre : 9 appar¬ tiennent à l’Afrique , 8 à l’Asie , 4 à l’Eu¬ rope, et une seule est originaire d’Améri¬ que. Les plus remarquables sont les sui¬ vantes : 0. flavipes , pallipes , recticornis , parandus , femoratus , cinctus F. ( Copris ), pallens Oliv. , pictus , diadema et setosus Wied. La première se rencontre quelque¬ fois aux environs de Paris, mais elle y est très rare. Ces Insectes se trouvent dans toutes sortes d’excréments; leur corps est de moyenne taille, oblong , aplati en dessus; leurs étuis offrent souvent à l’extrémité des poils sétiformes. Leurs palpes labiaux n’ont que deux articles apparents. L’écusson est distinctetl’abdomen plus long que large. (C.) ONITIS ( ovtç; , fumier d’âne), ins. — Genre de Coléoptères pentamères, famille des Lamellicornes, tribu des Scarabéides Coprophages, créé par Fabricius {Systema Eleutheralorum, t. 1, p. 27 ) , et générale¬ ment adopté depuis. Ce genre renferme 31 espèces, dont 13 sont originaires d’Eu¬ rope , 1 3 d’Afrique, 3 d’Asie, une est propre à la Nouvelle-Hollande et une à l’Amérique. Les principales sont les suivantes : 0. Sphinx , Philemon , Inuus , Aygulus, ungui- culatus , Menalcas, Clias , Lophus , Apelles , ONO 113 Vandelt , et tridens F., Olivieri III. Les Onitis ont des palpes labiaux composés de trois articles ; l'écusson est apparent ou remplacé par un vide scutellaire. Le corps est souvent métallique, oblong et déprimé ; le prothorax n’ofîre aucune saillie en de¬ vant. La taille des Onites est au-dessus de la moyenne. (C.) ONOBROMA (ovoç, âne; £pwp.a, nourri¬ ture). bot. ph. — Genre de la famille des Composées , tribu des Cynarées , établi par De Candolle ( Prodr. , YI , 613). Herbes orientales. Voy. composées. ONOBRACIIIS (ovoç, âne; Spvx”, rugir). bot. ph. — Genre de la famille des Légumi- neuses-Papilionacées, tribu des Hédysarées, établi par Tournefort (Inst., 211) aux dépens des Hedysarum, et dont les principaux ca¬ ractères sont : Calice 5-fide, à divisions su- bulées, presque égales. Étendard de la corolle papilionacée oblong. Étamines 10 , diadel- phes, à filet vexillaire libre; stigmate capi- tellé. Gousse sessile, uni-articulée , compri¬ mée, indéhiscente, monosperme; la partie supérieure épaisse, dressée, porte la graine; la partie inférieure est plus mince, courbée, très souvent dentée , épineuse ou lobée. Les Onobrychis sont des herbes annuelles ou Yivaces ; à feuilles imparipennées ; à fleurs rouges ou blanches, disposées en épis axillaires et terminaux supportés par de longs pédoncules. Les espèces de ce genre , qui croissent en Europe et dans l’Asie centrale , ont été ré¬ parties par De Candolle ( Prodr. , II , 344 ) en quatre sections , qu’il nomme : Eubry- chis, Hymenobrychis, Dendrobrychis et Echi- nobrychis. (J.) *ONOCEPHALA ( ovo; , âne; xt

o'v , œuf; xvavoç , bleu). ins. — Genre de Coléoptères subpentamè¬ res , tétramères de Latreille , famille des Clavipalpes, tribu des Érotyliens , créé par M. Hope (Revue Zoologique de Guérin, 1841, p. 113), et adopté par Th. Lacor- daire (Monographie delà famille des Éroty- liens, 1842, p. 194). Les types sont les 0. violaceus Sturm (Er. cyaneus Duponchel , Epytus azureus Dej. ) et costatus Lac. La première esp. est originaire de File de Cuba, et la deuxième de la Nouvelle-Grenade. (C.) OODES (wiA. infus. — Genre d’infusoires ciliés de la famille des Leucophryens, établi par MM. Purkinje et Valentin pour une espèce parasite , qu’on trouve presque con¬ stamment très abondante dans l’intestin des Grenouilles. Leeuwenhoeck, le premier, avait observé cet Infusoire dans les excré¬ ments des Grenouilles. Depuis lors, Bloch le décrivit sous les noms de Chaos intestinalis et d 'Hirudo intestinalis. O. -F. Müller, dans son Histoire naturelle des Infusoires , paraît avoir eu en vue le même objet en décrivant son Vibrio vermiculus et sa Leucophra glo- bulifera ; M. Ehrenberg en a fait plusieurs espèces de son genre Bursaria. Toutefois , le genre Opaline est imparfaitement carac¬ térisé et ne diffère des Leucophres que par la présence d’une fente oblique qu’on pour¬ rait prendre pour une bouche, quoiqu’on n’observe pas l’introduction des aliments ou des substances colorées dans l’intérieur du corps. En outre des Opalines habitant l’intestin des Batraciens , on peut rapporter au même genre, des Infusoires vivant dans les cavités interviscérales des Lombrics et des Nais. (Duj.) *OPATR!DES. Opatridœ. ins. — Tribu de Coléoptères hétéromères, famille des Mé- lasomes, proposée par Hope ( Coleopterist’ s manual, 3, 1840, p. 110), qui y comprend les genres suivants: Opatrum , Scleron , Trichoton , Isopleron , Microzoon , Leiche- num, Pilioba et Crypticus. (C.) *OPATRINUS ( diminutif d 'Opatrum ). ins. — Genre de Coléoptères hétéromères , famille des Mélasomes , tribu des Piméliai- res, formé par Dejean (Catalogue, 3eédit., p. 213), qui en énumère 16 espèces: 8 appar¬ tiennent à l’Amérique , 4 à l’Afrique, 3 à l’Asie, et une seule est originaire d’Europe. Parmi elles nous citerons principalement les : 0. clathratus , nigrila ( Helops ) F., planus (Opatrum) III . , perforalus Ghl., et oblongus Stev. Ces Insectes sont d’assez petite taille , noirs, et couverts de points serrés plus ou moins gros; leur chaperon est échancré, et le prothorax plus large que les étuis. (C.) *OPATROIDES (Opatrum, genre de Co¬ léoptères; îcLa , forme), ins. — Genre de Coléoptères hétéromères, famille des Méla- somes , tribu des Crypticites, établi par Brui lé (Expédition scientifique de Morée , p. 219, pl. 40, fig. 9). La principale espèce, VOpatroides punctulatus de l’auteur, est ori¬ ginaire de la Grèce. Ce genre a beaucoup de rapport avec les Phylax, mais ses élytres sont séparées et ont des ailes en dessous, tandis que les espèces de l’autre genre sont aptères. (C.) OPATRUM. ins. — Genre de Coléoptè¬ res hétéromères, famille des Mélasomes, tribu des Ténébrionites de Latreille, des Opatrides de Hope , créé par Fabricius (Systema Entomologiœ, p. 76) et générale¬ ment adopté depuis. 90 espèces environ sont décrites sous ce nom, mais ce nombre se trouve réduit à une vingtaine, attendu que Solier a établi un nouveau genre, celui de Gonocephalum, avec les espèces pourvues d’ailes et qui y étaient aussi comprises. Les véritables Opatrum sont donc aptères. Ils habitent les contrées chaudes et sablonneu¬ ses de l’Europe méridionale et de l’Afrique septentrionale. Leur démarche est lente, et on ne les rencontre qu’au milieu du jour et exposés à l’ardeur du soleil. Leur larve n’a pas encore été observée. Le corps des Opatrum est noirâtre ou de couleur terreuse ; la tête est reçue postérieu¬ rement, avec les yeux, dans une profonde échancrure du corselet : celui-ci est large , très arrondi sur les côtés, et fortement bi~ sinué à la base; les élytres sont plus étroi¬ tes, ovalaires, convexes, dures, raboteuses; elles offrent des séries longitudinales de tu¬ bercules ou d’excavations ponctiformes. Les 120 OPE OPE jambes sont munies de petits éperons, les antérieures plus courtes. Les palpes se ter¬ minent par un article tronqué et en mas¬ sue. Les antennes, composées de 11 articles, grossissent insensiblement jusqu’à leur ex¬ trémité; le chaperon est en saillie au milieu antérieur. Les espèces types sont : le Silpha sabulosa Linné , les O. verrucosum Germ., et geminalum Brullé. (G.) OPEGRAPHA. bot. cr. — Genre delà famille des Lichens, tribu des Graphidées , établi par Persoon (in Usteri Ann., VII, 29), et dont les principaux caractères sont : Nu¬ cléus arrondi ou allongé, membraneux, re¬ couvert entièrement ou à moitié par un pé • rilhèce à déhiscence longitudinale et mar¬ ginale. Ce genre renferme un très grand nombre d’espèces qui croissent sur les troncs et les branches d’arbres recouverts de leur écorce, ainsi que sur les rochers des climats tempé¬ rés et des régions tropicales. Plusieurs genres ont été établis par diffé¬ rents auteurs aux dépens des Opegrapha ; quelques uns ont été rejetés , d’autres con¬ servés. Voici ceux que M. Endlicher ( Gen . plant., p. 12) adopte et considère seulement comme sections du genre Opegrapha : a. Hys- terina, Fries (PI. hom.) : nucléus conique, maisdontla partie amincie est tournée en bas; périthèce entier, à bords infléchis ; b. Oxy- stoma , Eschw. ( Syst . , 14 , f. 5) : nucléus conique, mais tourné en sens inverse du pré¬ cédent; périthèce entier, à bords connivents; c. Scaphis, Eschw. ( loc . cit., f. 6) : nucléus en forme de disque ou semi - cylindrique ; périthèce entier, à bords d’abord rappro¬ chés, puis distants; d. Leucogramma , Mey. ( Flecht . , 331) : nucléus en forme de disque ou semi - cylindrique ; périthèce à moitié , soudé vers la base du nucléus, à bords d’a¬ bord rapprochés, puis distants. OPE RC LL AUI A. bot. ph. — Genre de la famille des Rubiacées, tribu des Opereu- lariées, établi par (in Mem. soc. h. n. Paris, V, 144, t. 13, f. 2). Herbes delà Nouvelle- Hollande. Voy. OPERCULARIÉES. OPERCULAR1A (operculum , opercule). infus. — Genre de Vorlicelliens proposé par M. Goldfuss, et adopté par Bory de Saint-Vin¬ cent et par M. Ehrenberg , pour des espèces qui nous paraissent devoir être réunies aux Epistylis. Ce genre serait caractérisé par l’ap¬ parence d’un couvercle ou d’un opercule qui se soulève obliquement au-dessus du bord supérieur. M. Ehrenberg lui attribue aussi des corps de diverses formes, les uns sembla¬ bles à ceux des Épistylis , mais bilabiés avec la lèvre supérieure en parasol , les autres beaucoup plus gros, différents entre eux. Ces corps sont portés par un pédicule raide , strié, très raineux, haut de 4 à 6 millimètres. On les trouve au printemps sur le corps des gros Insectes aquatiques. (Duj.) *OPERCLLARIÉES. Opercularieæ. bot. ph. — Tribu de la famille des Rubiacées, ainsi nommée du genre Opercularia qui lui sert de type. (Ad. J.) OPERCULE, moi.l. — Pièce calcaire ou cornée sécrétée par une portion du pied de certains Mollusques gastéropodes à coquille turbinée et servant à en fermer l’ouverture quand l’animal s'y est retiré. Cependant cette pièce est quelquefois beaucoup plus petite que l’ouverture , ou même tout à- fait rudimentaire : elle présente d’ailleurs des différences caractéristiques dans sa com¬ position , dans sa forme et dans son mode d’accroissement. Quelques Annélides tubi- coles, telles que les Serpules et les Spirorbes , sont également pourvues d’un opercule, et l’on peut aussi donner ce nom aux pièces calcaires servant à fermer le tube des Ta- rets. (Duj.) OPERCULE. Operculum. bot. — On nomme ainsi le couvercle qui ferme l’urne des Mousses (voy. ce mot); à la pièce folia¬ cée, plus ou moins mobile, qui recouvre les outres des feuilles ascidiées (Nepenthes). Dans certains fruits nommés Pyxides , ce nom s’applique à la valve supérieure du péricarpe (Pourpier, Anagallis, Jusquiame, etc.). OPERCLLIWA, Silva do Mans. bot. ph. — Syn. de Batatas, Chois. OPERCLLIXA (operculum, opercule). foramin. — Genre de Rhizopodes ou Forami- nifères , établi par M. Aie. d’Orbigny , pour des petites coquilles vivantes et fossiles, dont quelques unes avaient été confondues avec les Lenticulites. Les Operculines font partie de la famille des Nautiloïdes, dans l’ordre des Hé- licostègues. L’animal est donc symétrique et formé de segments consécutifs enroulés en spirale, et correspondant à autant de loges de la coquille qui est équilatérale à spire en¬ roulée dans un même plan et visible des deux OP H côtés. Cette coquille a une seule ouverture triangulairecontrele retour delaspire. (Duj.) OPEIICULITES. moll. — Dénomination employée autrefois pour désigner des Oper ¬ cules fossiles. *01>ETI0PALPUS (ÔTTTjTtov, petitealène; palpus , palpe), ins. — Genre de Coléoptè¬ res tétramères, famille des Malacodermes , tribu des Clairones, établi par Spinola (Es-' sai monographique sur les Clérites , t. Il , p. 110). L’auteur l’a compris dans sa troi¬ sième sous-famille , celle des Clérites cory- néloïdes , et fait connaître les quatre espèces suivantes: 0. auricollis Spin., sculellaris Pz., luridus Dej., et collaris Schr. La pre¬ mière et la quatrième sont originaires de l’Afrique australe, la deuxième est propre à l’Europe, et la troisième à l’Amérique sep¬ tentrionale. Les Corynetes rubricollis , aler , discolor et pallipes Klug., devront peut-être rentrer dans ce genre. Leur caractère con¬ siste particulièrement dans la forme des palpes maxillaires, dont le dernier article est subulé et terminé en alêne. (C.) OPETIORHYNCI1US. ois.— Voy. ophie. OPHELIA. annél. — Genre établi par M. Savigny ( Syst . des Annélides , pag. 38 , 1817) pour une espèce d’Annélide recueillie à La Rochelle, et dont les caractères ont été résumés ainsi qu’il suit par M. Edwards : Pieds similaires et divisés en deux rames à peine saillants , qui ne présentent point de lobe membraneux terminal ; point de cirrhe dorsal ; un cirrhe ventral filiforme sur un certain nombre des anneaux de la partie moyenne; point de branchies. M. Savigny avait attribué aux Ophélies des antennes incomplètes : les mitoyennes excessivement petites, très écartées, de deux articles, le dernier subulé ; l’impaire nulle; les extérieures semblables, pour la forme et la grandeur, aux mitoyennes et rapprochées d’elles. M. de Blainville avait dit de ces antennes des Ophélies ( Dict . sc. nat., tom. LYII , pag. 479 ) que leur disposition, si elles sont réellement des antennes, est assez particu¬ lière. Depuis peu , M. Sars (Comptes-rendus de l'Académie des Sciences de Paris pour \ 837 ) a observé des Ophélies vivantes. D’a près lui , ce genre aurait été décrit en sens inverse par l’auteur, qui en a d’abord établi les caractères; et ce que l’on a pris pour T. IX. OP ri 123 ieurs tentacules appartient aux appendices anaux. Les Ophélies n’ont pas d’antennes , et ce sont des Néréidiens de la tribu des Acérés. M. Edwards les place parmi les An¬ ciens, et M. de Blainville avec les Néréides microcères. (p. g.) OPHELIA. bot. ph. — Genre de la fa¬ mille des Gentianées, tribu des Chironiées , établi par Don (in Philosoph. Magaz., 1836, VIII, 77). Herbes de l’Inde. Voy. gentianf.es. OPHELINA. annél. — M. OErsted appelle' ainsi le groupe qui comprend les Ophélies et autres Anciens. (P. g.) OPIIELES, Lour. (Flor. cochincli ., 50). bot. ph. — Syn. d'Adansonia, Linn. OPiiiALA, Derv. (in Annal. Soc, Linn. Paris, VI, 195). bot. cr. — Syn. de Hel- mintostachys , Kaulf. OPIIICALCE. géol. — Nom donné par M. Brongniart à une division des roches mélangées à base de calcaire. Voy. roches. OPIIICÉPHALE. Ophicephalus ( oepeç , serpent; xstpaX-o, tête), poiss. — Genre de l’ordre des Acanthoptérygiens , famille des Pharyngiens labyrinthiformes , établi par Bloch, et généralement adopté. Ce qui dis¬ tingue principalement ces Poissons de tous les autres Acanthoptérygiens, c’est l’absence totale de rayons épineux dans leurs nageoi ¬ res, excepté l’épine de leurs ventrales. Du reste , voici la description qu’en donnent MM. G. Cuvier et Valenciennes (Hist. des Poiss., t. VII, p. 95) : Leur corps est allongé, peu comprimé de l’arrière, et presque cylin¬ drique de l’avant. Leur tête, déprimée plus ou moins, un peu plus large que le corps, est garnie en dessus d’écailles ou plutôt de plaques polygones. Le museau est très court, large, obtus. Les yeux s’approchent de son extrémité. Les deux orifices de la narine sont assez éloignés : l’antérieur , garni d’un petit tube charnu , est sous le bord du museau; le postérieur, en forme de simple trou, est tout près de l’œil. La gueule est fendue en travers au bout du museau , large , garnie aux mâchoires , au chevron du vomer, et aux palatins, de dents en velours ou en cardes, parmi lesquelles se trouvent souvent d’assez fortes canines. Il y a cinq rayons à leurs ouïes; leur dor¬ sale s’étend sur presque toute leur lon¬ gueur, et leur anale est aussi fort longue; leur caudale est arrondie, leurs pectorales 16 122 OP H OPH et leurs ventrales sont médiocres; il n’y a pas d’interruption à leur ligne latérale. Leur estomac est en sac obtus ; deux cæ¬ cums seulement, mais assez longs, adhèrent à leur pylore. Leur cavité abdominale se prolonge au-dessus de l’anale jusque tout près du bout de la queue. Les Ophicéphales ont aussi , comme les Anabas et les Osphromènes , au-dessus de leurs branchies , une cavité divisée par des lames saillantes et propres à retenir l’eau. Cette cavité leur donne , comme aux autres Poissons qui en sont pourvus, la faculté de vivre assez longtemps à sec. Aussi les voit-on sortir eux-mêmes des marais et des canaux, où ils vivent pour aller chercher d’autres eaux ; cette faculté permet encore de les transporter au loin. Dans l’Inde, leur patrie , les jongleurs eu ont toujours avec eux pour divertir la populace, et les enfants même s’amusent à les faire ramper sur le sol. La vie de ces Poissons est tellement dure, qu’on peut, dit-on, leur arracher les entrailles et les couper par morceaux sans les tuer d’abord ; c’est ainsi qu’on les vend sur les marchés ; il faut en enlever pas mal de tranches pour les empêcher de remuer tout-à-fait. Leur chair , qui n’a pas beau¬ coup de goût, est cependant légère et facile à digérer. Les espèces de ce genre, au nombre de dix -neuf (G. Cuv. et Val., loc. cit.), ont été réparties en trois sections fondées sur le nombre des rayons de la dorsale. 1 . Trente et quelques rayons. La principale espèce de ce groupe est I’Ophicéphale karouvé , Ophic. punctatus Bl. — Corps cylindrique à l’endroit des pec¬ torales, comprimé latéralement plus en ar¬ rière; tête un peu déprimée longitudinale¬ ment et aplatie en dessus ; mâchoire infé¬ rieure un peu plus avancée que la supé¬ rieure; dents en velours sur une bande à chaque mâchoire , au chevron du vomer et à chaque palatin ; 4 ou 5 fortes canines pointues de chaque côté de la mâchoire in¬ férieure. La couleur de ce Poisson est sur le dos et les côtés d’un gris verdâtre sombre, et en dessous d’un blanc grisâtre. De larges ban¬ des nuageuses noirâtres, au nombre de huit, descendent obliquement en avant jusqu’à la ligne latérale. Sa longueur ordinaire est de 15 à 16 centimètres. Cependant, selon M. Leschenault, cette espèce, qui habite en abondance les rivières et les étangs d’eau douce des environs de Pondichéry, attein¬ drait quelquefois une longueur de 50 cen¬ timètres. Sa chair passe pour très saine. 2. Quarante et quelques rayons. Parmi les espèces de ce groupe, nous ci¬ terons surtout l’OPHICÉPHALE STRIÉE, Ophic. striatus, ou SohxduBengale. — Têtedéprimée, arrondie en avant, mâchoire inférieure un peu plus avancée que la supérieure ; dents en carde à la mâchoire supérieure et au milieu de l’inférieure, au chevron du vo¬ mer, et à chaque palatin ; 3, 4 ou 5 fortes canines de chaque côté de la mâchoire in¬ férieure. La couleur de cette espèce est d’un vert brunâtre, variée de bandes obliques et irré¬ gulières, noires; les flancs, au-dessous de la ligne latérale , ont des bandes brunes et jaunes , et le dessous est blanc. Ce poisson atteint quelquefois 65 centimètres de lon¬ gueur. On le trouve assez abondamment dans les étangs et les rivières de l’Inde. 3. Cinquante et quelques rayons. L’Ophicéphale noirâtre , Ophic. nigricans Cuv. et Val., est le type de cette section. — Tête assez étroite et grêle; parmi les dents en velours de ses palatins et de la mâchoire inférieure, il y en a une rangée de plus forts, et parmi celles du devant du vomer, il s’en trouve cinq ou six, grosses et coniques. Ce Poisson est d’un brunâtre foncé, un peu plus pâle vers le bas; à peine voit-on quelques bandes plus foncées au chevron vers le bout de la queue, et quelques points plus noirs sur la mâchoire inférieure. Sa longueur est de 25 centimètres à peu près. Il habite les mêmes lieux que les pré¬ cédentes. (M.) 0PH1CIITHÏCTES , Dumér. POISS. — - Syn. d’Anguilliformes , Cuv. *OPHIDIASTER (iylêiov, petit serpent ; àcr-v 'p, astre ou astérie), échin. — Genre proposé par M. Agassiz pour les espèces d’Aslëries, telles que YAsterias ophidiana , dont le disque est petit , et dont les rayons fort allongés ressemblent à des Serpents réunis en étoile. Ces rayons, presque lisses OPH OPH 123 sur le dos , sont finement lesselës, ainsi que le reste du corps, et présentent en dessous un sillon très étroit. MM. Miiller et Troschel ont adopté ce genre en y comprenant douze espèces dont six nouvelles. Ces auteurs le placent dans la deuxième famille des Àsté- rides, ayant un anus et deux rangées de tentacules dans chaque sillon ventral. (Duj.) OPIIIDIE. poiss. — Voy. ophidium. OPHIDIENS. Ophidii (o<*ns, serpent; , forme), rept. — La dénomination d'Ophidiens répond à peu près à celle plus vulgaire de Serpents , et pendant une grande partie de ce siècle, les naturalistes l’ont ap¬ pliquée (ainsi que l’avait proposé M. Alexan¬ dre Brongniart en 1805) à tous les Reptiles privés de pieds et à corps allongé. C’est dans ce sens qu’ Aristote employait le mot ocpiç, et Linné le mot Serpentes. G. Cuvier s’est aussi rangé à cette manière de voir, et, dans le Règne animal , il dit que « les Ophidiens ou Serpents sont les Reptiles sans pieds, et par conséquent ceux de tous qui méritent le mieux la dénomination de Reptiles. » Il ajoute que leur corps, très allongé, se meut au moyen de replis qu’il fait sur le sol. Là se borne la caractéristique des Ophidiens; aussi les Orvets (genre Anguis), les Schelto- pusik (genre Pseudopus ), les Amphisbènes et les Cécilies sont-ils, pour lui, des Ophi¬ diens, aussi bien que les Boas, les Couleu¬ vres et les Vipères. A l’exemple de M. de Blain ville et d’Oppel, les naturalistes actuels ont restreint les limites de l’ordre des Ophi¬ diens, et tous les Reptiles serpentiformes n’en font pas partie; l’absence de membre et la forme cylindrique allongée du corps ne suffisent pas, en elîet, pour caractériser l’ordre qui va nous occuper; elles peuvent, en effet , coïncider avec des caractères tout- à-fait différents de ceux qui sont communs aux Boas, aux Couleuvres et aux Vipères, c’est-à-dire aux vrais Ophidiens ; le faciès est alors serpentiforme; mais l’organisation est celle qui caractérise des animaux d’un ordre tout différent. Ainsi , les Cécilies, qui ont l’apparence extérieure des Serpents, tiennent des Batraciens par leur double condyle oc¬ cipital , par leurs organes générateurs , par leur peau visqueuse et par divers autres ca¬ ractères, qui tendent, comme ceux-ci, à les éloigner des Ophidiens. Aussi est-ce avec les Batraciens qu’on les classe aujourd’hui. Les Orvets, au contraire, ainsi que divers genres, et les Scheltopusik, ont le crâne, la peau, les trous auditifs et beaucoup d’au¬ tres traits distinctifs des Sauriens; et c’est dans cet ordre qu’ils prennent rang : les Orvets à la fin des Scincoïdes , les Schelto¬ pusik à la fin des Chalcidiens, dont ils sont les uns et les autres les représentants ser¬ pentiformes. Les Amphisbènes, au contraire, ne ressemblent véritablement ni aux Ophi¬ diens, ni aux Sauriens. Avec un simple con¬ dyle occipital, un double pénis et divers autres caractères qu’ils partagent avec ces deux ordres, ils en présentent d’autres qui peuvent les faire regarder comme un ordre à part. Et l’on connaît parmi eux une es¬ pèce pourvue d’une paire de pieds , c’est le Chirote, tandis que les autres en sont dé¬ pourvues. Pour cette raison, divers auteurs, MM. Gray et Ch. Bonaparte entre autres, font, des Amphisbènes et des Chiroles réu¬ nis , un ordre particulier dans les Reptiles écailleux. Nous reviendrons sur ce sujet à l’article reptiles. L’absence de membre paraît même ne pas être un caractère propre à tous les Ser¬ pents, quoiqu’on l’ait donnée comme le ca¬ ractère distinctif des Ophidiens. Ainsi, les Boas ont de chaque côté de l’anus des cro¬ chets, que l’on a considérés comme des ru¬ diments ou pieds postérieurs. Ce n’est donc ni par la forme générale du corps, ni par l’absence de membre, qu’il faut caractériser les Ophidiens. Ces animaux sont des Reptiles à peau écailleuse, pourvus, comme les autres or¬ dres de la même classe , d’un seul con¬ dyle occipital , et dont les embryons ont , comme ceux des Vertébrés , qu’on place avant eux dans la série zoologique, un am* nios et une vésicule allantoïde , tandis que les animaux vertébrés, placés après eux, n’ont plus qu’une seule vésicule, qui est la vésicule ombilicale. Ces premiers caractères les distinguent parfaitement des Batraciens, classés à la fin des Reptiles proprement dits. Les Ophidiens ressemblent aux Amphisbè ¬ nes et aux Sauriens par leur double pénis, et ils s’éloignent, sous ce rapport, des Ché- loniens, aussi bien que des Crocodiles, chez lesquels le pénis est simple. Ils ont le corps allongé et serpentiforme, à peu près cylin¬ drique, quoique toujours plus ou moins ap- 1*24 OPH OPH pointi en arrière. Ils ont la langue bifide, manquent de paupières, n’ont pas le tym¬ pan visible extérieurement , ont l’ouverture cloacale en fente transversale. Leurs m⬠choires, jointes au crâne par désarticulations, sontplus ou moins allongées, mobiles, et leur os carré ou tympanique est mobile, ainsi que le mastoïdien. Leurs dents sont acro- dontes,et ils en présententsouventsur les os palatins et les ptérygoïdes, aussi bien que sur les maxillaires inférieure et supérieure. Ils ont des poumons, l’un allongé et l’autre court. Leurs vertèbres sont concavo-con- vexes , nombreuses, partageables en tron- eales ou costifères, et en caudales; ils man¬ quent toujours de sternum, ainsi que d’é¬ paule et de bassin, et très peu d’entre eux ont présenté, en arrière seulement, des or¬ ganes qu’on a pu regarder comme des rudi¬ ments de membres. Une étude plus détaillée de leurs princi¬ paux organes nous démontrera, d'une ma¬ nière plus évidente encore, quelles sont les particularités qui ont dû les faire regarder comme un ordre à part dans la classe des Reptiles écailleux. Le corps de ces animaux est toujours plus ou moins cylindrique. Leur tète n’est pas séparée du tronc par un étranglement col 1 i- forme, et elle est à peu près d’égale grosseur ainsi que lui. Le tronc est toujours fort al¬ longé, et la queue qui lui fait suite est très longue dans certains groupes, plus courte au contraire chez d’autres. CerlainsOphidiens ont le corps et la queue très grêles et presque filiformes; ceux qui vivent dans les arbres sont plus particulièrement dans ce cas. Les Vipères ont généralement la queue assez courte; elle l’est plus encore chez les Rou¬ leaux. Celle des Boas et des Pythons est plus ou moins prenante, et elle est, au contraire, plus ou moins aplatie en nageoire chez les Mydrophis ou Serpents marins ; les Uropeltis ont la queue terminée par un aplatissement discoïdal. Aucun Ophidien ne porte décrété dorsale ou caudale, comme celle qui sur¬ monte le dos de beaucoup de Sauriens, ni de nageoires. Ceux qui nagent le font à l’aide des ondulations de leur corps. A terre, ils avancent en serpentant, au moyen des on¬ dulations qu’ils décrivent sur le sol. Tout le corps est recouvert d’un épiderme squami- forme, et la peau est susceptible, dans la plu¬ part des cas, d’une certaine extension. Des dispositions particulières de la surface der¬ mique donnent aux écailles épidermiques des apparences assez diverses, soit entre les différents genres, soit même entre les diffé¬ rentes parties du corps dans une même es¬ pèce. Chez les Hydrophis , les écailles des différentes parties du corps sont toujours plus ou moins uniformes. Mais, chez les autres Ophidiens , des écailles bien plus larges que les autres se remarquent à la partie infé¬ rieure du tronc, où elles forment une série de plaques transversales dont le nombre et la largeur présentent des variations caracté¬ ristiques. Sous la queue, il y a de semblables écailles; mais elles sont le plus souvent sur deux rangs au lieu d’un. La tête montre aussi, dans beaucoup d’Ophidiens, des pla¬ ques différentes des autres écailles du corps, et le nombre, la forme et la disposition de ces plaques céphaliques ont été étudiés avec un soin extrême. Nous avons vu à l’article couleuvre comment on avait pu s’en servir pour caractériser les divers groupes et même les nombreuses espèces qu’on a distingués parmi ces animaux. Les Couleuvres, les faus¬ ses Couleuvres elles fausses Vipères ont deux plaques céphaliques; mais il n’y en a pas chez les Vipères et divers autres Ophidiens, ou bien elles n’y sont que rudimentaires, la tête étant alors plus ou moins entièrement garnie d’é- cailles qui ont l’apparence de celles du dos. Ces dernières sont habituellement lancéolées et imbriquées; elles sont simples, carénées ou cannelées. Celles des Hydrophis sont po¬ lygonales ou discoïdales. L’épiderme des Ophidiens mue assez fréquemment. II s’en¬ lève d’une seule pièce, depuis la tête jusqu’à la queue, sans se déchirer d’aucune manière, et, après que l’animal s’en est dépouillé , il en conserve si bien tous les caractères exté¬ rieurs qu’on peut reconnaître par un épi¬ derme de Serpent trouvé au hasard dans un bois l’espèce dont il provient. Les yeux eux- mêmes, qui manquent de véritables pau¬ pières, sont recouverts par cette membrane qui forme au-devant d’eux une vitre trans¬ parente, sauf à l’approche de la mue. M. de Blainville a fondé en grande partie sa classi¬ fication des Serpents sur la considération de leur écaillure, et plus anciennement M. Du- méril avait partagé ces animaux en deux groupes, les Homodermes ( Achrochordes et OPH OPH Hydrophis , auxquels il joignait même les Cécilies, les Amphisbènes, les Orvets) et les Hétérodermes . L’ouverture buccale des Serpents estgrande et trèsdilatable, à causedela disposition toute particulière des os des mâchoires et des mus¬ cles qui les meuvent. Leurs narines sont percées sur les parties latéro-antérieures du museau. Chez les Langahas, le nez se prolonge en une sorte de queue; aussi un des noms de ces Serpents est-il celui de Rhinurus, et un autre celui de Xyphorhynchus . Chez aucun d’eux, la membrane tympanique n’est visible à l’extérieur, et leur orifice anal, qui est com¬ mun au rectum et aux organes génito-urinai¬ res, est la fente transversale recouverte d’une plaque operculiforme dans la plupart des es¬ pèces, mais sans pores semblables à ceux de beaucoup de Sauriens. Les os des Ophidiens sont d’un tissu assez dur. Le squelette formé par leur réunion présente plusieurs particularités remarqua¬ bles. Les diverses pièces de la tête ont été déterminées avec soin par les anatomistes et principalement par G. Cuvier. Voici l’énu¬ mération qu’il en donne dans son anatomie comparée: 2 frontaux principaux, 2 frontaux antérieurs, 2 frontaux postérieurs, 1 parié¬ tal, 1 basilaire, 1 occipital supérieur, 2 oc¬ cipitaux latéraux, 2 rochers, 2 mastoïdiens, 2 tympaniques, 1 sphénoïde postérieur, 2 ptérygoïdiens, 2 transverses, 2 palatins, 2 maxillaires, 2 intermaxillaires, 2 nasaux (en vestiges), 2 jugaux et 2 vomers; au total 28 os. Ce nombre varie en plus, chez les Py¬ thons, par l’existence des surorbitaires, et en moins, chez les Rouleaux, par l’absence des frontaux postérieurs. La forme et la propor¬ tion des os offrent aussi des variations remar¬ quables, dans les divers genres et sous-gen¬ res, même dans les espèces d’un même groupe, et M. Bibron en a tiré habilement parti pour la caractéristique et la classification des Ophidiens. Il a aussi reconnu que dans beau¬ coup de cas certaines de ces dispositions sont en rapport avec le genre de vie. Un des traits les plus généraux des Ophidiens est la mobi¬ lité des maxillaires supérieurs et des incisifs qui ne sont pas soudés au crâne, et le grand développement de la mâchoire inférieure dont les mastoïdiens et les tympaniques sont eux-mêmes mobiles et en forme de pédon¬ cule. Cette mâchoire manque de symphyse 125 articulaire, et peut, ainsi que la supérieure, s’élargir considérablement et agrandir ainsi l’orifice buccal de manière à faire pénétrer dans le corps de l’animal des proies d’un volume considérable; les maxillaires supé¬ rieur et inférieur, le palatin et le ptérygoï- dien, de chaque côté, portent habituellement des dents. Le crâne des Ophidiens, comme celui des Tortues, des Crocodiles, des Sauriens et des Amphisbènes, s’articule avec la colonne ver¬ tébrale par un seul condyle. Les vertèbres qui lui font suite sont nombreuses et peu¬ vent être partagées en deux groupes seule¬ ment: les troncales et les caudales. Les ver¬ tèbres troncales, c’est-à-dire celles qui sont entrela têteet l’anus, sontpourvues de côtes, sauf les deux ou trois premières. L’atlas est court; les autres vertèbres sont concavo- convexes, c’est-à-dire munies à la partie antérieure de leur corps d’une cavité arti¬ culaire, et, à la partie postérieure, d’une saillie hémisphérique qui fait l’office de con¬ dyle. L’Éryx turc a 219 vertèbres, dont 1 cervicale, 192 costifères ou dorsales et 26 caudales; le Python améthiste 422, dont 320 dorsales et 102 caudales; la Couleuvre à collier 230, dont 1 cervicale, 167 dorsales et 61 caudales; la Vipère commune 202, dont 2 cervicales, 145 dorsales et 55 cauda¬ les; le Serpent à sonnettes 207, dont 171 dorsales et 36 caudales (1). Presque tous les Ophidiens montrent, à la face inférieure du corps des vertèbres, une saillie qui prend le plus souvent l’apparence d’une carène bien déterminée, etconstitueunesorte d’apophyse épineuse. Dans les Serpents à sonnettes, cette épine est plus longue que la ventrale apophyse épineuse; lorsqu’elle existe à la queue, elle est presque toujours double. Les côtes ne sont pas jointes entre elles à la face ventrale, ni réunies à un sternum, cetorgane manquant toujours aux Ophidiens, ainsi que l’épaule , tout le reste du membre antérieur et le bassin, même lorsqu’ils sont des rudiments de membres. On a considéré comme un commencement des membres postérieurs les crochets osseux que les Boas et les Pythons portent auprès de l’anus, mais cette détermination n’est pas à l’abri de toute objection. (r) Les Cécilies qu’on avait réunies à tort aux Ophidiens n’ont que 6 vertèbres sur z3o 126 OPH OPli Les dents desOphidiens sont nombreuses, toujours appointies , assez souvent inégales entre elles , ruais disposées avec beaucoup de symétrie et appointies à leur sommet. Elles sont insérées sur les os ptérygoïdiens , palatins, maxillaires supérieurs, maxillaires inférieurs, et même incisifs ou intermaxil¬ laires. Les variations de leur nombre , de leur proportion, de leur forme, fournissent au zoologiste d’excellents caractères. Quoi qu’on en ait dit, aucune espèce d’Ophidien ne manque complètement de dents, et il en est qui en ont à la fois sur tous les os que nous venons d’énumérer. Cependant les Typhlops en manquent à la mâchoire supérieure et à l’inférieure ; certaines es ¬ pèces de différents genres n’en ont pas aux ptérygoïdiens et aux palatins, et, sauf certains Rouleaux et divers Pythons, tou¬ tes en manquent aux os intermaxillaires. Toutes les dents des Ophidiens sont acro- dontes , c’est à-dire fixées sur le bord des os qui les portent, et sans racines ; elles sont dirigées en arrière et disposées pour retenir la proie , mais non pour la broyer. On peut les comparer aux denticules d’une machine à carder. A la mâchoire supérieure, elles paraissent rangées sur quatre rangs longi ¬ tudinaux , deux pour les maxillaires et deux pour les palatins et les ptérygoïdiens. Sui¬ vant que les Serpents sont venimeux , ou au contraire sans venin, la forme des dents du maxillaire supérieur est différente. Celles des espèces non venimeuses sont plus nom¬ breuses, implantées sur un os plus allongé et toutes pleines, c’est-à-dire sans canal ni gouttière ou cannelure. Toutefois, certaines d’entre elles sont , dans quelques cas , plus longues que les autres et comme rapprochées en un petit groupe. Chez les espèces qui distillent un venin, il y a un nombre va¬ riable de ces mêmes dents , qui sont canne¬ lées antérieurement en forme de gouttière, mais dont les bords , quoique fort rappro¬ chés l’un de l’autre , ne sont cependant pas soudés entre eux. La soudure , au contraire, est parfaite chez les Serpents à crochets ve¬ nimeux , comme les Vipères, les Trigono- céphales et les Crotales; et chez ceux ci le maxillaire supérieur , qui est très court , ne porte point d’autres dents, la plupart de ces dents ne sont point fixées au squelette. Une lamelle très fine de ces molaires canalicu- lées, prise suivant une section transversale et soumise au microscope , montre bien que le canal vénénifère de ces dents est le ré¬ sultat d’un ieploiement en oublie de la dent amincie. M. Owen en a dressé une jolie figure dans son ouvrage intitulé Oclonlo- graphie. M. Jourdan , professeur de la Faculté des sciences de Lyon , a décrit dans le Coluber scaber , du cap de Bonne-Espérance , des plaques émaillées et semblables à des dents qui garnissent le sommet des apophyses épineuses inférieures, des vertèbres dans la région œsophagienne. Ces dents, d’une nouvelle espèce, sont taillées dans l’œso¬ phage à travers des perforations de la mem¬ brane de ce dernier. Cette disposition remar¬ quable paraît avoir pour objet de permettre aux Couleuvres, dont il est question, de bri¬ ser les œufs qui composent leur nourriture habituelle; elie leur a valu de la part de M. Jourdan le nom générique de Rachio- don (1). Une partie seulement des nombreuses es¬ pèces connues d’Ophidiens, possède la fu¬ neste propriété de sécréter une liqueur vé¬ néneuse. Celte liqueur est produite par une glande particulière, indépendante des glan¬ des salivaires et de la glande lacrymale, qui est placée dans la région sus-maxillaire ; le venin s’en écoule à travers un canal ; c’est par les dents molaires qu’il est introduit dans la plaie. Les Serpents les plus dangereux sont les Vipères , les Trigonocéphales , et principa¬ lement les Crotales, ou Serpents à sonnette, dont la blessure tue en quelques minutes. Chez ces Ophidiens , les maxillaires supé¬ rieurs sont très courts, et ils portent un petit nombre de longues dents toutes cana- liculées ; ces dents sont leurs crochets vé- nénifères. Les Elaps , les Najas , les Bongares, les Ilydrophis , et d’autres , sont également des Ophidiens à venin; mais leurs maxillaires supérieurs ont deux sortes de dents, les postérieures pleines et non vénéneuses, les antérieures, au contraire, en rapport avec les glandes à venin. Mais ces dents ne sont pas , comme dans le cas précédent , creusées par un canal, elles sont simplement en (i) Le genre comprenant le Coluber sçuber avait été ap¬ pelé précédemment Jodon , etc. OP H OPH 127 gouttières à bords plus ou moins rapprochés mais non confondus. Dans une troisième catégorie de Serpents venimeux , les maxillaires sont allongés comme ceux des Couleuvres, et leurs dents antérieures sont simples et pleines, tandis que les dernières présentent à leur face an térieure un sillon semblable à celui des dents venimeuses des animaux de la présente ca¬ tégorie. Telles sont, d’après MM. Duméril etBibron, les genres Psammophis , Cœlo- pellis, Oxyrope'e, etc. Le Coluber Monspessu- lanus, espèce commune dans le midi delà France, présente, ainsi que nous nous en sommes assuré, un exemple de cette disposi¬ tion. Les Ophidiens de ce troisième groupe sont réputés non venimeux. MM. Duméril et Bibron les appellent Aphobérophides ou Ophidiens fidendiformes , tandis qu’ils don¬ nent le nom de Fallaciformes ou Apisto- phides à ceux des genres Élaps , Naja , etc., et Vipéri formes ou Thanatophides aux Vipè¬ res et autres genres de la même tribu. Plusieurs exemples ont démontré que les crochets venimeux de ces derniers conser¬ vaient encore , après la mort de l’animal, et même après leur dessiccation ou un séjour prolongé dans l’esprit de vin, des propriétés malfaisantes. On doit donc , lorsqu’on veut les étudier, ne les toucher qu’avec une ex¬ trême précaution. Il est question, aux arti¬ cles CROTALE, TRIGONOCÉPHALE, VIPÈRE, etc., des accidents qui résultent de la morsure des Ophidiens appartenant à ces divers gen¬ res, et de la nature de leur venin. Les glandes vénéneuses manquent com¬ plètement, ainsi que les dents cannelées ou canaliculées dans les Serpents de la tribu des Couleuvres , des Pythons, des Boas etdesRoit- leaux (les Aze'miophides ou Cicur if ormes , Dum. et Bibron). Elles manquent également dans les Typhlops, mais ceux-ci tiennent peut- être plus par la forme de leur corps et de leurs écailles, par leur crâne, ainsi que par quel¬ ques autres caractères, aux Sauriens qu’aux Ophidiens ; et les naturalistes sont encore partagés au sujet de la place qu’ils doivent réellement occuper dans la classification. Le prince Bonaparte les met à la fin des Sauriens, après les Orvets et les Àcontias , manière de voir qui nous semble préférable à celles des autres erpétologistes. Comment, en effet, commencer la série des Ophidiens par des Serpents qui n’ont que l’apparence des animaux de cet ordre, et qui manquent de plusieurs de leurs véritables caractères? Les autres organes internes des Ophidiens afTectent aussi , pour la plupart, des dispo¬ sitions dignes d’être notées. Leur langue mobile et allongée est bifurquée dans sa partie libre , et retenue à sa base dans une sorte de gaine ou fourreau. Quoiqu’on l’ap¬ pelle vulgairement le dard , et qu’on la représente bien à tort, dans le Serpent qui figure parmi les attributs d’Hippocrate , comme terminée en fer de flèche, elle ne jouit d’aucune propriété malfaisante. Les Serpents s’en servent effectivement pour palper, et elle est leur principal organe tactile. Ils peuvent aussi l’employer pour boire. Tous les Serpents se nourrissent de substances animales , et les petits Mammi¬ fères , ainsi que les Reptiles batraciens , constituent leur nourriture la plus ordinaire. Les œufs , quelquefois des Oiseaux , des Poissons, des Insectes, et même de cer¬ tains Mollusques , leur conviennent aussi, à défaut d’autres aliments. La plupart atta¬ quent leur proie vivante , et quoiqu’ils soient dépourvus de membres, ils s’en ren¬ dent maîtres assez facilement. La capture d’une Grenouille par une Couleuvre est une lutte assez curieuse , quoique fort inégale , et dont on peut aisément se procurer le spec¬ tacle. Peu de Serpents mangent des animaux morts ; les Crotales sont cependant dans ce cas. L’aliment n’est pas mâché dans la bou¬ che ; saisi et retenu accroché par les dents, il chemine lentement de cette première cavité jusque dans la partie stomacale de l’intestin, et il n’est pas rare de retirer presque vivants, de cette partie de l’intestin des Serpents , les animaux qu’ils ont déglutis. Les Ophi¬ diens exotiques, conservés dans nos collec¬ tions , ont ainsi fourni aux naturalistes quelques espèces curieuses appartenant à différentes classes du règne animal , à cause de la dilatabilité de leur bouche, de l’ex¬ trême mobilité de la mâchoire, et de leurs côtes aidées par l’absence du sternum. Les Serpents avalent des animaux plus gros qu’eux. Les grandes espèces peuvent manger, après les avoir broyés, des Mammifères d’un assez gros volume. Les Pythons elles Boas de nos ménageries, quinesontcependant pas des plus gros dans leur espèce, avalent des La- OPH m pins i des Poules et des morceaux de viande de boucherie qui pèsent plusieurs livres. On assure même qu’il y a des Serpents assez forts pour avaler des Bœufs et des Cerfs , après les avoir broyés dans leurs replis; ce¬ pendant on n’en a aucun témoignage authen¬ tique , quoique Adanson lui-même rapporte le fait sur des grands Serpents du Sénégal. Le canal intestinal des Ophidiens est à peine aussi long que leur corps ; il manque de cæcum, et l’estomac est peu distinct du commencement de l’intestin. Le foie s’ouvre dans le duodénum par un seul canal. La respiration n’est pas très active, et peut être suspendue au gré de l’animal. Elle s’o¬ père dans deux poumons en forme de sacs allongés et de grandeur très inégale. Aussi a-t-on dit fort souvent qu’il n’en existait qu’un seul. Panizza et Muller ont décrit des cœurs lymphatiques chez les Serpents. Nous en traiterons à l’article reptiles, ainsi que de la circulation du sang proprement dit. La taille varie beaucoup dans les différents genres. Sans parler des Typhlops, qui sont fort petits et souvent de la grosseur d’une plume, il y a des espèces de Couleuvres qui ont à peine 2 décimètres de long. Les Serpents venimeux n’acquièrent qu’une longueur médiocre , et leur taille est en général moindre que celle des Serpents non venimeux. Certaines espèces de Couleuvres arrivent a 3 et même 4 mètres de longueur. Les Boas et les Pythons ont fréquemment cette dimension, et il en est beaucoup qui la dépassent. Adanson parle de Serpents du Sénégal qui mesuraient 40 ou 50 pieds en longueur et 2 pieds 1/2 de diamètre. Il en a tué lui-même de 22 pieds de long sur 8 pouces de large, à deux lieues de l’île du Sénégal. Les Nègres les y appellent Nkio et Nkiebi. Peut-être est-ce à quelques Ophi¬ diens qu’il faut rapporter le fameux Serpent de Régulus. Ce Serpent arrêta , dit-on , l’ar¬ mée romaine entre Utique et Carthage, et l’on dut avoir recours à des machines de guerre pour le détruire. Sa peau fut rap¬ portée à Rome par Régulus etsuspendue dans un temple jusqu’à la guerre de Numance. On a aussi parlé de très grands Serpents de mer sans en démontrer l’existence; aussi faut-il reléguer parmi les plaisanteries de la presse périodique la nouvelle qui nous vient de temps en temps d’Amérique de la réap¬ parition de ces monstres gigantesques. Dans une même espèce d’Op'hidien la taille n’est pas toujours la même pour des individus du même âge , et les différences analogues à celles qu’on remarque dans les autres fa ¬ milles du règne animal se voient également ici. L’abondance ou la rareté de la nourri¬ ture , le concours favorable ou défavorable des circonstances environnantes, la vigueur de santé ou la faiblesse de chaque individu, diverses autres causes encore accélèrent le développement des uns , et ralentissent la croissance de certains autres. Les organes mâles des Serpents sont dou- bles' dans la partie destinée au rapproche¬ ment des sexes , et chaque pénis est plus ou moins garni à sa surface d’aspérités épineu¬ ses. Ce caractère de la duplicité du pénis existe aussi chez les vrais Sauriens et chez les Amphisbènes : aussi M. de Blainvil le a- t-il réuni ces trois groupes d’animaux en un seul ordre sous la dénomination de Bispé- niens. Les œufs produits par les ovaires des femelles sont toujours fécondés à l’intérieur du corps : il y a un véritable accouplement. La génération est ovipare dans la majorité des cas, ovovivipares dans quelques uns. Les Vipères, et les genres de la même famille qu’elles , produisent plus particulièrement des petits vivants. M. Florent Prévost a pu¬ blié l’observation curieuse que les Couleu¬ vres peuvent être rendues ovovivipares si on les tient pendant longtemps dans des endroits privés d’eau ; il est remarqnable , en effet, que les SerpentsoYovivipares vivent, en général , dans les lieux les plus secs. Beaucoup de Serpents placent leurs œufs dans des lieux d’élection , et les surveillent avec soin. Les Pythons femelles entourent les leurs par les replis de leur corps , et les soumettent ainsi à une sorte d’incubation. Ce fait, dont les voyageurs ont fait mention, a pu être constaté dans les ménageries de Londres et de Paris. On a décrit quelques Serpents de forme monstrueuse, particulièrement des Serpents à double tête. Redi en cite un qui fut pris vivant sur les bords de l’Arno, en Italie : il avait deux têtes et deux cous sur un seul corps. Les Ophidiens sont répandus dans toutes les parties du monde; mais, comme presque tous les autres groupes d’animaux, ils ac- OP If OPH 129 quièrent , dans les régions intertropicales , de plus grandes dimensions , et ils y sont plus variés en espèces. La répartition géo¬ graphique de leurs espèces est la même que celle des autres animaux terrestres. Celles de l’Amérique méridionale , de l’Afrique et de la Nouvelle-Hollande , diffèrent entre elles. L’Inde et l’Afrique ont quelques espèces communes. Le pourtour de la Méditerra¬ née présente quelques espèces communes à tous ses points, et qui vivent aussi dans le nord de l’Afrique, dans l’est de l’A¬ frique et dans le midi de l’Europe; toute¬ fois chacune de ces contrées en présente aussi quelques unes qui lui sont particuliè¬ res avec le reste du continent dont chacune fait partie. L’Amérique septentrionale four¬ nit des espèces fort semblables à certaines de celles d’Europe, et d’autres qui en diffèrent évidemment. Il n’est pas bien certain que les premières soient réellement identiques. On ne connaît en Europe que 26 espèces d’Ophidiens, en y joignant même une espèce du genre des Typhlops. En voici l’énuméra¬ tion d’après le travail du prince Ch. Bona¬ parte, intitulé : Amphibia europœa. 1° Typhlops : Typhlops vermicularis . 2° Ekyx : Eryx jaculus, le Boa turc d’O¬ livier. 3° Couleuvres : Ailurophisvivax , Cœlopel- tis monspessulana, Periops hippocrepis, Za- colus auslriacus , Zamenis Riccioli, Callopel- tis flavescens , C. leopardinus , Rhinecliis sca- laris ou Agassizii , Elaphis quadrilineatus ou C. elaphis , Elaphis Parrey ssii, Hæmorrhois trabalis , Coluber viridiflavus , C. caspius , Nalrix tessellata , N. viperina , N. Cettii, N. torquata , N. hydrus , N. sculata. 4° Vipères: Trigonocephalus halys , Re¬ lias berus, Vipera aspis , Vipera ammodytes. Les autres Reptiles serpentiformes d’Eu¬ rope, qui ne sont pas des Ophidiens , sont : Blanus cinereus ( espèce d’Amphisbène ) , Pseudopus serpenlinus (le Scheltopusik ) , Anguis fragilis (l’Orvet), O phiomor us milia- ris (l 'Anguis punctalissimus de Moréej. Il n’y a qu’un petit nombre de groupes importants qui soient circonscrits dans des limites géographiques spéciales. Ainsi les Crotales sont exclusivement américains; les Boas sont principalement de l’Amérique mé¬ ridionale , et les Pythons des parties chaudes de l’ancien monde. Il y a des Serpents af- T. IX. fectés aux endroits boisés, d’autres aux lieux humides, d’autres aux plaines sablonneuses. Les races venimeuses recherchent, ainsi que nous l’avons déjà dit , les terrains dénudés , secs et chauds. Divers genres de Serpents vivent, au contraire, dans les eaux salées , et s’écartent plus ou moins des terres. Il n’y en a pas en Europe qui appartiennent à ce dernier groupe. A toutes les époques, les Ophidiens ont fixé l’attention de l’espèce humaine, et dans toutes les mythologies quelques uns des leurs jouent des rôles plus ou moins importants. La défiance naturelle qu’ils inspirent à l’Homme, leurs allures singulières, le dan¬ ger que l’on court en touchant certains d’entre eux, sont autant de causes qui expli¬ quent les nombreux récits que l’on fait à leur égard. Ils nous apprennent également pourquoi les espèces innocentes sont, comme celles qui nuisent, en état constant de suspi¬ cion . Beaucoup de personnes ont essayé, dans ces derniers temps, d’exprimer, d’une ma¬ nière claire , les traits à l’aide desquels on pourrait distinguer les Serpents venimeux de ceux qui ne le sont pas, mais elles n’y ont pas réussi. Cette sorte de signalement est plus facile à donner si l’on se borne aux espèces européennes , et nous y reviendrons à l’ar¬ ticle vipères. Quelque défiance que l’on ait pour les Serpents, on les mange dans pres¬ que toutes les parties du monde, aussi bien chez les peuples civilisés, en Europe et même en France , que chez les peuples sauvages. Les Serpents à sonnettes eux-mêmes sont recherchés dans quelques parties de l’Amé¬ rique, et passent pour un excellent mets. La vénénosité des Serpents et les carac¬ tères qui l’accompagnent ont été et sont en¬ core, ainsi que les particularités principales de l’écaillure, les meilleures notes dont on ait pu faire usage pour classer les Ophidiens. Beaucoup d’auteurs, depuis Linné, se sont occupés de la description et de la classifica¬ tion des nombreuses espèces de cet ordre. Nous citerons parmi eux Lacépède, dont les écrits rappellent parfois le romancier, et pas assez le naturaliste observateur , G. Cu¬ vier, Boié, Wagler, ainsi que MM. de Blain- ville, Fitzinger, Müller, Schlegel , Ch. Bo¬ naparte, J.-E. Gray, Duméril et Bibron. Ces deux derniers publient en ce moment la par¬ tie ophiologique de leur grande erpétologie. 17 13o OP H Nous regrettons bien vivement de n’avoir pu consulter pour cet article qu’un seul des volumes consacrés aux Serpents, les autres n’ayant pas encore paru. MM. Duméril et Bibron partagent les Ophidiens en cinq grandes sections : les Ty- phlops ou Vermiformes, les Cicuriformes ou Couleuvres , les Fidendiformes ou fausses Couleuvres , les Fallaciformes ou fausses Vipères, et les Vipériformes. Voici le ta¬ bleau des caractères qu’ils assignent à cha¬ cun de ces groupes. A. Des dents seulement à l’une ou à l’autre des mâchoires : Scolecopkicles ou ver- mif ormes. B. Des dents aux deux mâchoires. a. Les dents maxillaires antérieures pleines. * Les postérieures également rondes et pleines : Azémophides ou Cicuriformes. ** Les postérieures creusées en avant d’une gouttière : Aphobérophides ou Fidendi¬ formes. b. Les dents maxillaires antérieures par¬ courues en avant par un canal vénénifère. * Formant un sillon en avant : Apisto- plüdes ou Fallaciformes. **Sans trace de sutures (un canal) : Tha- natophides ou Vipériformes. A côté de cette classification, essentielle¬ ment basée sur la considération du système dentaire, nous rappellerons les principales coupes de celle proposée par M. de Blain- ville , dont la caractéristique porte sur les écailles aussi bien que sur les dents. M. de Blainviile ne considère les Ophidiens que comme un sous-ordre de ses Saurophiens ou Bispéniens. Il établit parmi eux sept tribus sans compter les Amphisbènes , qui , pour lui , sont aussi des Ophidiens. Voici les noms de ces sept tribus, et ceux de leurs princi¬ paux genres : 1. Des dents maxillaires non venimeuses. A. Corps vermiforme , couvert d'écailles imbriquées semblables en dessus comme en dessous. — Typhlops. B. Corps en général cylindrique, presque également obtus aux deux extrémités, mais couvert d’écailles en dessus , et de scutelles sur un seul rang en dessous. — Bouleau ou Torlrix. C. Corps colubriforme, couvert d’écailles en dessus, et d’un seul rang de scutelles en dessous; souvent une paire d'appendices en OP H forme de crochets près de l’anus. — Eryoc Boa. D. Corps colubriforme ; des scutelles sur la tête, un rang de scutelles simples sur le corps et doubles sous la queue. — Python , Couleuvre- Rouleau ( Cœlopeltis , Calamaire). E. Corps un peu plus renflé au milieu . des scutelles sur la tête , un rang simple sous le tronc, un double rang sous la queue. — Couleuvre. II. Des dents maxillaires vénéneuses et d’autres non vénéneuses ; écaillure variable. F. Serpents aquatiques ou Hydrophis (Acrochordus , Hydrophis , Pseudechis). III. Dents maxillaires, toutes vénéneuses. Vipères (. Echis , Viper a, Naja, Cenchris , Tri- gonocephalus, Cro talus). La classification du prince Ch. Bonaparte est ainsi formulée dans ses Amphibia euro- pœa ( Mém . Acad, de Turin ) : Erycidæ : Erycina , Calamarina. Boidæ : Boina, Pythonina. Acrochordidæ . Colubridæ : Colubrina , Dipsadina , Den - drophitina , Natricina. Hydridœ. Naiidæ : Bungarina , Naiina. Viperidœ : Crotalina , Viperina. Voir, pour plus de détails , les différents articles consacrés à chacun de ces groupes sous leur nom vulgaire , et l’article rep¬ tiles. (P- G.) OPHIDIUM (pylSiov, petit serpent), poiss. — Genre de l’ordre des Malacoptérygiens apodes, famille des Anguilliformes , établi par Linné. Ces Poissons ont beaucoup de rapports avec les Anguilles ; ils en diffèrent principalement par des branchies bien ou¬ vertes, munies d’un opercule très apparent, et d’une membrane à rayons courts. Leurs rayons dorsaux sont articulés , mais non branchus. Plusieurs espèces présentent certains ca¬ ractères d’organisation qui ne se retrouvent pas chez d’autres espèces ; de là la division de ce genre en deux sections , nommées : Fieras fer ( voy . ce mot) et Ophidium propre¬ ment dits, ou vulgairement Donzelles. Cette dernière section se distingue de la précé¬ dente par la présence, chez les individus qui la composent , de deux paires de petits barbillons placés sous la gorge, et adhérents à la pointe de l’os hyoïde. OP n OP H 131 Les Donzelles ou Ophidium comprennent plusieurs espèces, parmi lesquelles nous ci¬ terons les deux suivantes , qui vivent dans la Méditerranée. 1 . Donzelle commune , Ophidium barba- tum. Le corps de ce Poisson est couleur de chair , avec la dorsale et 1 anale lisérées de noir. Les barbillons antérieurs sont plus courts que les postérieurs. 2. Donzelle brune , Ophidium Vassalli Riss. Brune , sans liséré aux nageoires. Les barbillons sont d’égale longueur. Ces Poissons atteignent environ 25 centi¬ mètres de longueur, et leur chair est assez agréable. (MO *OPIHDOMOïVAS (ocpiç , serpent; u ovaç, monade), infus. — Genre proposé par M. Ehrenberg pour des Infusoires très sim¬ ples, faisant partie de sa famille desCrypto- monadines, c’est-à- dire revêtus d’une cara¬ pace. Les Ophidomonas se distinguent par ’ leur forme allongée sans prolongement en pointe, et leur mode de multiplication par division transverse; ils sont dépourvus d’yeux. (Duj..) *OPHIDOïVAIS (fyiç, va~s, c’est-à- dire Nais en forme de serpent), annél. — Genre de la famille des Nais proposé par nous dans le tome Y des Bulletins de V Académie de Bruxelles. Voy. naïs. (P- G~) OPHIE. Opetiorhynchus , Temm. ois. — Syn. de Furnarius , Yieill. Voy. fôurnier. *OPHIOCEPHALUS (ocptç, serpent; x£- cpaM, tête), helm. — Genre de Némertiens proposé par MM. Quoy et Gaimard, et repro¬ duit par M. de Blainville (in Dict. sc. nat., t. LYII , p. 574). Il a pour type une espèce découverte par les deux premiers de ces na¬ turalistes dans la rade de Sidney, à la Nou ¬ velle-Hollande. (P- G.) *0PHI0CNEM1S (or , serpentiforme ). ■rept. — Genre de Scincoïdes anguiformes , établi par Wagler pour une espèce des par¬ ties chaudes de l'Amérique méridionale. MM. Duméril et Bibron le caractérisent ainsi : Narines latérales percées chacune au milieu de la plaque nasale; quatre plaques supéro-nasales ; langue largement échancrée à sa pointe , à papilles granuliformes en avant , filiformes en arrière ; palais non denté, à rainure longitudinale; dents coni¬ ques simples; des ouvertures auriculaires fort petites; pas de pattes antérieures; des membres postérieurs , courts , aplatis , non divisés en doigts; museau conique; corps anguiforme ; flancs arrondis; queue co¬ nique, pointue. L’espèce unique de ce genre est VOphiodes slrialus. r (P- H.) OPHIOGLOSSÉES. Ophioglosseœ. bot. CRi — Tribu de la famille des Fougères. Voy. ce mot. OPHIOGLOSSUM (S ç, serpent; pop?y{t forme), ins. — Genre de Coléoptères pen¬ tamères , famille des Brachélytres , formé par Dejean ( Catalogue , 3e édit., pag. 73) avec une espèce de l’Afrique australe, nom¬ mée par Fauteur O. capensis ; n’ayant pas vu cet Insecte , nous ne pouvons dire à quelle tribu d’Erichson elle peut être rap¬ portée. (C.) *OPHIOMOÏUJ$ (oc pcç , serpent ; ouopoç, allié), rept. — Genre établi par MM. Du- méril et Bibron (Erpétologie générale, t. Y, p. 799) pour Y Anguis miliaris de l’Europe orientale et d’Algérie. Voy. orvet. (P. G.) *OPIIIOMYXA (gytç, serpent; , mucosité), échin. — Genre d’Ophiurides éta¬ bli par MM. Müller et Troschel pour une seule espèce, et constituant, avec YOphios- colex, la deuxième section du premier groupe de leur deuxième famille , c’est-à-dire ayant deux fentes génitales dans chaque intervalle et des papilles à la bouche, mais à surface nue ou sans piquants. (Duj.) OPHION (oV;, serpent), ins. — Genre de l’ordre des Hyménoptères, tribu des Ichneu- mortiens, famille des Ichneumonides , groupe des Ophionites, établi par Fabricius, et géné¬ ralement adopté. Ses principaux caractères sont : Tarière courte, mais saillante ; man¬ dibules bidentéesà l’extrémité; antennes fili formes, entièrement grêles; bouche point avancée en forme de bec; palpes labiaux de quatre articles, les maxillaires ayant leurs articles très inégaux; abdomen pédonculé, très comprimé, en forme de faucille. Ce genre renferme un grand nombre d’es¬ pèces européennes et une quantité plus grande encore d’espèces exotiques ; leurs mœurs sont assez semblables à celles des au¬ tres Ichneumoniens. Voy. l’article ichneumo- niens. L’Ophion jaune, Ophion luteus F. ( Ichneu - mon luteus Linn.), espèce type du genre , est répandue dans presque toute l’Europe. Elle a 2 à 3 centimètres de longueur; le corps d’un jaune testacé; la tête quelque¬ fois entièrement roussàtre, d’autres fois plus pâle, avec la face et le bord des yeux plus colorés ; les mandibules noires à l’extrémité ; les antennes testacées; le thorax de même couleur avec deux lignes plus pâles sur le prothorax ; l’écusson jaune ; les ailes transpa- rentes, très légèrement enfumées ; les pattes et l’abdomen testacés , ce dernier un peu brunâtre vers l’extrémité. Les larves de cette espèce ont été fréquemment observées par divers auteurs; elles vivent aux dépens de certaines chenilles et principalement de la chenille d’une espèce de Bombyx, nommée vulgairement Queue fourchue. Une espèce assez fréquente aux environs de Paris a été particulièrement observée par Audouin, qui a constaté ces observations dans les Annales des sciences naturelles (t. III, p. 423, pl. 9). Cette espèce vit aux dépens du genre Dosithea, et a été nommée, pour cette raison par le naturaliste que nous venons de citer, Ophion Dositheæ. (L.) OPHIONEA ( ocptwv , serpent), ins. — Genre de Coléoptères pentamères, famille des Carabiques , tribu des Troncatipennes , créé par Klug ( Entomologia brasiliana , p. 24), et adopté par Hope et par Eschscholtz ( Zoolog. atlas, 1829, p. 5). L’espèce type, Casnonia cyanocephala F. Dej., est origi¬ naire des Indes orientales. (C.) OPHIONITES. Ophionites. ins. — Groupe d’Hyménoptères de la famille des Ichneu¬ monides , dans la tribu des Ichneumoniens. Voy. ichneumoniens. *OPIIIONYX (o ser¬ pent; cpayoç/mangeur). ois. — Famille créée par Vieillot dans son ordre des Sylvains , et de laquelle fait partie le seul g. Hoazin. (Z. G.) * OPHIOPIITHALMES (o?lç , serpent ; ôç, serpent ; G/jpaca, chasser), ois. - — Syn. de Messager ou Serpentaire. (Z. G.) *OPHIOTHRIX (fyiç, serpent; 0Pfê, che¬ veu). échin. — Genre d’Ophiurides établi par MM. Millier etTroschel, et constituant avec les Ophionyx, tout le deuxième groupe de leur deuxième famille. (Duj.) OPHIOXYLÉES. Ophioxyleœ. bot. ph. — Sous-ordre ou tribu de la famille des Apocynacées. Voy. ce mot. OPHIOXYLON (ècpc'cov , serpent ; £vlov , bois), bot. ph. — Genre de la famille des Apocynacées , sous-ordre des Ophioxylées , établi par Linné ( Gen. , n. 1142 ). Arbris¬ seaux de l’Inde. Voy. apocynacées. — Ophio- xylon, Pers., syn. d'Ochrosia, Juss. OPHIRA, Linn. (Gen., n. 602). bot. ph. — Syn. de Grubbia , Berg. OP1ÎIS. rept. — Genre établi par Wa- gler aux dépens des Couleuvres. Voy. cou¬ leuvre. OPHISAURUS ( oVs » serpent ; aaSpoç , lézard), rept. — Genre de Reptiles serpen- tiformes dont la seule espèce connue ( Ophi - saurus ventralis ) vit dans les parties chaudes de l’Amérique septentrionale. Linné en avait fait une espèce de son genre Anguis ; mais bien qu’elle soit, commel’Orvet, un faux Ser¬ pent et non un véritable Opbidien , elle n’appartient pas comme lui à la famille des Scinques. C’est du Scheltopusiclc ou Pseuclo- pus qu’ette se rapproche davantage , et elle doitêtre classée, ainsi que ce dernier, parmi les Sauriens de la famille des Chalcidiens. C’estDaudin qui l’adistinguée génériquement le premier. Merrem a remplacé par celui d'Hyalinus le nom d’ Ophisaurus , employé par l’erpétologisle français. MM. Duméril et Bibron, et tous les naturalistes actuels, pré¬ fèrent avec raison la dénomination d 'Ophi¬ saurus , qui a d’ailleurs la priorité. Voici comment MM. Duméril et Bibron caracté¬ risent ce genre : Langue en fer de flèche , échancrée triangulairement en avant, libre -\ dans son tiers antérieur, lequel offre des pa¬ pilles granuleuses , tandis qu’on en voit de filiformes sur ’es deux tiers postérieurs. Des dents sur plusieurs rangs au palais. Dents inter-maxillaires coniques ; dents maxillaires sub-cylindriques simples. Narines latérales ouvertes chacune dans une seule plaque; un orifice externe de l’oreille fort petit ; des paupières ; plaques céphaliques nombreuses. Corps serpentiforme. Pas le moindre ves¬ tige de membres à l’extérieur; deux sillons latéraux assez profonds ; pas de pli en tra¬ vers à la face inférieure du cou. (P. G.) OPHISPERMUM, Lour. ( Flor . cochinch. , I, 344 ). bot. ph. — Syn. d’ Aquilaria , Lamk. *OPHISTOMIS (°Vs> serpent; o-top-a , bouche), ins. — Genre de Coléoptères sub¬ pentamères, tétramères de Latreille, famille des Longicornes, tribu des Lepturètes, formé par Dejean (Catalogue , 3e édit. , pag. 381) avec les six espèces suivantes, qui toutes sont originaires *du Brésil, savoir : 0. fas- data , unifasciata , signalicollis , Duponti , quinquenotata , et sellata de l’auteur. (C.) OPIHSURE. Ophisurus (fytç, serpent; ovpcü , queue), poiss. — Genre de l’ordre des Malacoptérygiens apodes, famille des Anguil- liformes, établi par Lacépède et adopté par G. Cuvier (Règn. anim., t. II, p. 350). Les Ophisures diffèrent des Anguilles proprement dites, parce que la dorsale et l’anale se ter¬ minent avant d’arriver au bout de la queue, de sorte que celle-ci se trouve ainsi dépour¬ vue de nageoire. La principale espèce de ce genre est connue vulgairement sous le nom de Serpent de mer. Ce Poisson habite la Méditerranée , où il at¬ teint environ 2 mètres de longueur; il est brun en dessus, et argenté en dessous. (M.) OPHITE ( SÿiTviç , semblable à. un ser¬ pent). géol. — Ce nom a été donné par divers géologues à des roches de compo¬ sition très différente, et appartenant à plusieurs espèces distinctes. Ainsi , on a nommé Ophite toutes les roches porphy- roïdes verdâtres, à cristaux de feldspath , ayant pour base soit une pâte de Pétrosi- lex (Porphyre pétrosilicenx ) , soit une pâte de Pétrosilex légèrement amphiboleux (Por¬ phyre syénitique) , soit une pâte pyroxé- nique et feldspathique (Ophite), soit enfin une pâte dioritique compacte (Dioritine). OP H 135 Mais M. Cordier, dont nous adoptons ici la classification, réserve le nom d’Ophite aux seules roches pyroxéniques composées d’une pâte aplianitique ( Pyroxène et Feldspath compacte), au milieu de laquelle sont des cristaux de Feldspath et de Pyroxène dis¬ cernables à l’œil nu. Cette roche, contenant souvent des aman¬ des siliceuses, calcédonieuses et calcaires, appartient aux terrains pyrogènes de la pé¬ riode phylladienne. (C. d’O.) *QPHITEÉi (oyt'r/jç, semblable à un ser¬ pent). ins. — Genre de Coléoptères penta¬ mères, famille des Brachélytres , tribu des Pédériniens , formé par Dejean , et publié par Erichson ( Généra et species Staphylino- rum , pag. 627, tab. 4, fig. 32 b). Ce genre se compose de trois espèces de Colom¬ bie , savoir: O. versatilis , Raphidioides et velitaris Er. Elles rappellent, par leurs for¬ mes, certaines Casnonies et Raphidies. (C.) OPHITES. rept. — Genre établi aux dé¬ pens des Couleuvres. Voy. ce mot. *OPHITOi\E ou GRAMTE OPHITIQUE. géol. — M. Cordier a donné ce nom à une roche composée de Feldspath, gras, à gros grains, de Pyroxène vert et d’un peu de terre verte qui y forme des taches faciles à enta ¬ mer par l’acier. Le Feldspath y est coloré en verdâtre, par la matière pyroxériique qu’on a longtemps prise à tort pour de l’Amphi¬ bole. L’Ophitone appartient aux terrains py¬ rogènes de la période phylladienne. (C. d’O.) OPHIURE. Ophiura(oft -, serpent ; oèp*, queue), échin.— Genre d’Échinodermes éta¬ bli par Lamarck, aux dépens du grand genre Asterias de Linné, et comprenant les espèces dont le corps orbiculaire déprimé ou dis¬ coïde contient seul les viscères, tandis que les bras, au lieu de contenir, comme ceux des Astéries , un prolongement de la cavité viscérale, sont de simples organes locomo¬ teurs. La face inférieure des bras est aplatie et sans gouttière longitudinale ; la bouche est inférieure et centrale prolongée par une fente dans la direction de chaque bras et armée de pièces osseuses ; des orifices géni¬ taux se voient entre la bouche et le bord du disque, dans les intervalles des bras, mais il n’y a jamais d’orifice anal. Les bras sont revêtus de pièces écailleuses et ressemblent quelquefois à des queues de Lézard, mais quelquefois aussi ils sont bordés d’épines ou de piquants plus ou moins longs. C’est en contractant et en contournant de diverses manières leurs bras que les Ophiures se meuvent en rampant sur le sable ou entre les pierres et les corps marins; mais ils ne nagent point. Ils sont d’ailleurs pourvus de papilles ou pédicules rétractiles sortant entre les écailles ou les piquants de chaque bras, et pouvant leur servir à se fixer sur les algues ou les pierres. Les espèces d’O- phiures étant très nombreuses, les natura¬ listes les ont divisées en plusieurs groupes ou genres. M. de Blainville, d’abord, a em¬ ployé pour cette distinction la longueur et la disposition des épines. M. Agassiz, plus tard, en a faitcinq genres, savoir: 1 °Ophiura, ayant le disque très déprimé, les rayons simples , squameux, portant des épines très courtes accolées aux rayons; telles sont les O. texlurala et lacerlosa de Lamarck. 2° Ophiocoma, différant du précédent par de longues épines mobiles de chaque côté des rayons; telles sont les O. squamata et echinala Lamk. 3° Ophiurella , dont le disque est à peine distinct , et qui ne com¬ prend que des espèces fossiles. 4° Acroura, qui diffère des Ophiures et des Ophio- comes , parce que de petites écailles sont placées de chaque côté des bras , comme les épines de ces derniers. Ce genre ne com¬ prend aussi que des espèces fossiles remar¬ quables par l’étroitesse de leurs bras. 5°A- croura , ayant la face supérieure du disque recouverte par une étoile de dix plaques , tandis que les rayons proportionnellement épais sont entourés d’éeailles imbriquées. Ce genre ne comprend qu’une seule espèce fos¬ sile, A. loricata , de Goldfuss. Plus récem¬ ment , MM. Muller et Troschel ont consi¬ déré les Ophiures comme un ordre distinct d’Échinodermes manquant de pédicellaires et d’anus , ou plutôt comme un sous-ordre constituant, avec les Euryales , l’ordre des Ophiurides. Ils divisent ce sous-ordre en deux familles , dont la première moins nom¬ breuse , et caractérisée par la présence des papilles aux fentes buccales et de quatre fentes génitales dans les intervalles des bras, comprend seulement les deux genres Ophio- derma et Ophiocnemis. La deuxième famille, beaucoup plus nombreuse, est caractérisée parla présence de deux fentes génitales, seulement dans chaque intervalle des bras. 136 OPH OP H Elle se divise en deux groupes : le premier, comprenant les espèces pourvues de papilles à la bouche , se subdivise en deux sections , suivant que les disques et les bras sont bor¬ dés de pointes ou d’écailles ; tels sont les genres Ophiolepis , Ophiocoma , Ophiara- chna et Ophiacantha ; ou sont nus et dé¬ pourvus de pointes , tels sont les deux gen¬ res Ophiomyxa et Ophioscolex. Enfin , un deuxième groupe de cette deuxième famille comprend les deux genres OphioLhrix et Ophionyx, qui, avec les deux fentes géni¬ tales dans chaque intervalle des bras , se distinguent par l’absence des papilles à la bouche. (Düj.) *OPHRJRELLA. échin. — Genre d’O- phiurides fossiles établi par M. Agassiz pour des espèces fossiles du Calcaire lithographi¬ que et du Lias, remarquables par la peti¬ tesse relative de leur disque. (Düj.) OPHIURIDES. Ophiuridæ. échin.— Ordre d’Échinodermes à cinq bras locomoteurs, et dont la cavité viscérale est limitée au disque, et qui sont dépourvus d’anus et de pédicel- laires. MM. Müller et Troschel le divisent en deux sous-ordres, les Ophiures, qui ont les bras simples , et les Euryales , dont les bras sont divisés. M. de Siebold forme des Ophiurides une familiede son ordre des Asté¬ roïdes; mais, dans tous les cas, cette famille ou cet ordre doit être divisé en genres nombreux. Voy. ophiure et euryale. (Duj.) OPHIURES (opvç, sourcil, cil), infus. — Genre d’infusoires établi sous le nom d 'Ophrydia, par Bory de Saint-Vincent, pour une espèce de Vorticelle de O. -F. Müller ( V . versatilis ) que Schranck a décrite aussi sous le nom de Linza pruniformis , et Sprengel sous le nom de Coccochloris slag- nina. Cet Infusoire très remarquable , que nous n’avons pas vu en France, paraît être assez commun en Allemagne; il est tantôt libre , tantôt réuni avec une foule d’indi ¬ vidus dans une masse gélatineuse, large de 9 à 50 millimètres , sécrétée en commun et colorée en vert par les animalcules eux- mêmes, dont la plus grande longueur est d’un cinquième de millimètre environ. Les animalcules, dans cette masse, sont disposés avec régularité suivant des lignes rayonnan¬ tes et en zones concentriques; ils peuvent , en se contractant, prendre les formes les plus variées depuis celle d’un fuseau allongé jusqu’à celle d’une urne , d’une coupe, d’un œuf ou d’un globule. Les Ophrydies nous paraissent devoir être rangées avec les Sten¬ tors etlesUrcéolaires dans la famille des Ur- céolariens; ils sont pour M. Ehrenberg le type de sa famille des Ophrydiries qui repré¬ sentent des Vorticellines cuirassées. (Duj ) *OPHRYLOPHUS (ô^puç, sourcil ; lo'yôç, panache), ins. — Genre de Coléoptères té- tramères, famille des Curculionides goriato- cères, division des Byrsopsides?, formé par Dejean ( Catalogue , 3e édit., p. 288), avec une espèce d’Égypte, nommée O. subulosus par l’auteur. (£.) *OPIIRYOCERCA(ô1 sont : Taises de quatre articles distincts, premier très court, suivants cachés en des¬ sus, à leur base ; antennes de douze articles, 1-8 subcylindriques, les suivants plus épais, les onzièrneet douzième coniques, le dernier le plus grand, ovalaire, tronqué oblique¬ ment; prothorax conico-cylindrique , res¬ serré à la base ; yeux sans sinus distinct. (C.) *OPIALS. ins. — Genre de l’ordre des Hémiptères hétéroptères , tribu des Rédu- viens , famille des Réduviides, groupe des Réduviites , établi par M. Laporte de Cas¬ telnau. Ses principaux caractères sont : Tête allongée; antennes à premier article court; le deuxième sans division ; les deux derniers longs, très pales ; corselet plat. MM. Amyot et Audinot-Serville ( Hémi¬ ptères. , Siùtes à Buffon , édit. Roret) décri¬ vent 4 espèces de ce genre ( Op . rubropic- tus , proximus Am. et Serv., piclus , rufus Lap. ) qui habitent Java. (L.) OP1PTÈRE. moll. — Genre proposé par Rafînesque pour un Mollusque trop incom¬ plètement décrit. (Duj.) OPÏS (nom mythologique), moll. — Genre de Conchifères dimyaires, de la fa¬ mille des Cardites ou Carditacées , établi par M. Defrance pour une coquille fos¬ sile (O. cardissoides ) très rare, du terrain oolithique , rapportée par Lamarck au genre Trigonie (T. cardissoides ), et par So- werby au genre Cardite sous le nom de Car- dita lunulata. Le genre Opis , bien distinct et intermédiaire entre les Astartës et les Cardites, a été caractérisé plus complètement par M. Deshayes , qui a pu dégager de sa gangue la charnière de la coquiile fossile. Cette coquille singulière , dont la forme se rapproche un peu de celle du Cardium car- dissa , est cordiforme , à crochets grands et saillants, avec le côté postérieur séparé de l’antérieur par un angle ou une carène; la charnière est large , et présente sur la valve droite une grande dent comprimée un peu oblique, pyramidale , à côté de laquelle se trouve en arrière une cavité étroite et peu profonde à bords parallèles ; sur la valve gauche est une cavité conique pour recevoir la dent de la valve opposée, et à côté une dent peu saillante, allongée le long du bord postérieur. Le ligament est extérieur; l’im¬ pression palléale est simple ; les impressions musculaires sont superficielles et arrondies. En outre de l’espèce type, on connaît une deuxième espèce fossile, O. similis, que So • werby avait également confondue avec les Cardites. (Duj.) ^OPüSTHÏIjS [bnlaOioq, situé par derrière) . ins. — Genre de Coléoptères pentamères, fa¬ mille des Carabiques , tribu des Élaphrides , créé par Kirby ( Fauna boreali americana, 1837, p. 87, pl. 1 , f. 9), et adopté par Hope ( Coleopterisl’s manual , 1838, t. II, p. 9). Le type, l’O. Richardsoni de l’auteur, est originaire du Canada. (C.) *OPISTHOCOMIIVÉES. Opisthocominæ . ois. — Sous-famille établie par G. -R. Gray dans la famille des Musophagidées. Elle cor¬ respond aux Ophiophages de Vieillot. (Z. G.) OP1STIIOCOMUS , Hoffm. ois. — Nom latin du genre Iloazin. (Z. G.) OP IST I SOGN A TIÏE . Opislhognathus (on taGvj, en arrière; yvaOoç , mâchoire). poiss. — Genre de l’ordre des Acanthopté- rygiens, famille des Gobioïdes, établi par G. Cuvier ( Règne anim., t. 11, p. 240) aux dépens des Blennies, dont les Opisthogna- thes diffèrent par leurs maxillaires très grands et prolongés en arrière en une«espèce de longue moustache plate. Leurs dents sont en cardes fines, sur une bande étroite à chaque mâchoire. Les nageoires ventrales sont placées sous la gorge , en avant des pectorales, et ont cinq rayons mous à la suite de leur épine. On ne connaît encore que deux espèces de ce genre; l’une habite la mer des Indes, et a été nommée par G. Cuvier,' Opist. Son- nerati ( Opist. ocellatus Ehrenb. , Opis ni - gromarginatus Rupp.); l’autre, découverte en Amérique, a été dédiée par M. Valen ¬ ciennes à G. Cuvier , et nommée Opist. Cuvierii (Hist . des Poiss., t. XI, p. 504). (M.) OPISTOLOPHES , Vieill. ois. — Syn. de Chauna, Illiger. Voy. chavaria. (Z. G.) *0PIST0PIITHALMIJS ( on ioBn, en ar¬ rière ; oep0oc)>p.oç, œil), arach. • M. Koch désigne sous ce nom un genre de l’ordre des Scorpionides dont les caractères génériques peuvent être ainsi présentés : Les deux yeux médians, situés fort en arrière, presque au troisième quart de la longueur de la tête ; les deux paires latérales antérieures presque aussi grosses que ceux-ci; la troisième éloi¬ gnée, plus petite et placée un peu en de¬ dans. Tels sont les principaux caractères OPL GPL 140 de celle nouvelle coupe générique, dont l’espèce typique est I’Opistophthalme du Cap, Opistophthalmus capensis Koch. Celle es¬ pèce a pour patrie les environs du cap de Bonne-Espérance. (H. L.) *OPIiOMOHPHUS. ins.— Genre de Co¬ léoptères tétramères, famille des Cucurlio- nides gonatocères, division des Cyclomides, proposé par Motehoulski ( Mémoires de la Soc. imp. des nat. de Moscou, t. XVII, p. 104), qui n’y comprend qu’une espèce, O. brevi- rostris, de la Géorgie asiatique. (C.) OPIUM. chim. — Suc gomino-résineux, extrait principalement du Pavot somnifère, Papaver sovnniferum L. Voy. pavot. *OPIUS. ins. — Genre de l’ordre des Hy¬ ménoptères, tribu des Ichneumoniens, fa¬ mille des Braconides , groupe des Opiites, établi par Wesmaëî ( Mon. des Brach. de Belg., lrc série, p. 134), et dont les princi¬ paux caractères sont : Abdomen ovalaire à pédoncule très court; tarière non saillante ou à peine saillante. Ce genre renferme une assez grande quantité de petites espèces qui habitent les endroits humides et ombragés; nous citerons principalement les Op . recondilor et carbo- narius Wesm. , communes en France , en Allemagne, en Angleterre et en Belgique. (L.) *OPIZIA.bot. ph. — Genre de la famille des Graminées, tribu des Chloridées, établi par Presl (in Reliq. Hænk., I, 293 , t. 41 , f. 1 ). Gramens du Mexique. Voy. gra¬ minées. OPLISMENUS (ônhcrpoç, armure), bot. pu. — Genre de la famille des Graminées, tribu desPanicées, établi par Palisotde Beau- vois (FL owar., II. 14), et dont les princi¬ paux caractères sont : Épillets biflores ; fleur inférieure mâle ou neutre, fleur supérieure hermaphrodite. Glumes 2, inégales, concaves ou un peu carénées , très souvent aristées. Fl. mâles: Paillettes 2, l’inférieure aristée. Étamines 3; la fleur est neutre par l'avor¬ tement de la paillette supérieure et des éta¬ mines. FL hermaphrodites : Paillettes 2 , l’inférieure acuminée, mucronée, embras¬ sant la supérieure parinerviée. Paléoles 2, collatérales, tronquées. Étamines 3. Ovaire sessile. Styles 2, terminaux, allongés ; stig¬ mates plumeux. Caryopse libre. Les Oplismçnus sont abondamment répan¬ dus sur la surface du globe. Ce sont des gramens à feuilles planes ; à épis racémeux ou paniculés ; à rachis continu. Deux sections ont été établies dans ce genre : la première, nommée Orthopogon par M. Brown ( Prodr ., 194), est caractérisée par des glumes égales , carénées , aristées ; des épis disposés en grappes et alternes ; la se¬ conde section , que Palisot de Beauvois a nommée Echinochloa , se distingue par des glumes inégales, concaves, mutiques; des épis paniculés, rarement racémeux. (J.) *OPLOCEP!IALA (Mo* , arme; xtyaU, tête), ins. — Genre de Coléoptères hétéro- mères, famille des Taxicornes, tribu des Diapériales, établi par de Laporte et Brullé (Société d'histoire naturelle de Paris, 1818, p. 14), et adopté par Motehoulski, qui le distingue des Neornida de Ziegler, et que De- jean avait réuni dans son Catalogue, comme synonyme d’un même genre. Les Oploce- phala sont donc formés des trois espèces européennes suivantes et d’un assez grand nombre d’exotiques propres à l’Afrique et à l’Amérique, savoir: violacea , bicolor F. , Dejeanii Br. Del. Leur corps est ovalaire , aplati. (C.) *OPLOCEPHALUS ( Mov , arme; **- tête), rept. — Genre de l’ordre des Ophidiens, établi par G. Cuvier (Règn. anim., t. II, p. 75) et dont les espèces qui le com¬ posent sont principalement caractérisées par de grandes plaques sur la tête, et toutes les plaques subcaudales simples. (L.) * OPLOCHEfRUS (SrGov, arme; Xelp , main), ins. — Genre de Coléoptères hété- romères , famille des Sténélytres, tribu des Hélopiens, formé par Dejean (Catalogue, 3e édit. , p. 223 ) avec cinq espèces afri¬ caines, nommées: O. helopioides, tenebrioides, upioides , alleculoides et carbonarius par l’auteur. Les trois premières sont originai¬ res du cap de Bonne-Espérance, et les deux dernières du Sénégal. (C.) *OPLOCJVEMUS ( onXov , arme ; xvngn , jambe), ins, — Genre de Coléoptères tétra¬ mères , famille des Curculionides gonato¬ cères , division des Érirhinides , formé par Dejean ( Catalogue , 3e édit., p. 300) avec une espèce de Java, nommée O. mucrona- tus par Buquet. (C.) OPEOGNATHUS ( StG.ov, arme; yvaOoç , mâchoire), ins. — Genre de Coléoptères O PL OPO 141 pentamères, famille des Lamellicornes, tribu des Searabéides phyllophages , établi par Mac-Leay ( Horæ Enlomologicœ , p. 159; édit. Lequin , p. 95), et adopté par Bur- rneister ( Handbuch der Entomologie , p. 428), avec la rectification de Hoplognathus. Le premier de ces auteurs l’a placé parmi ses Rutélides, et le second dans ses Aréodides. Deux espèces du Brésil sont comprises dans le genre, savoir: les O. Kirbyi M.-L., et maculatus Gy. (C.) *OPLOMERES ( ottIov , arme; pjpoç , cuisse), ins. — Genre de Coléoptères hété- romères , famille des Sténélytres , tribu des Ténébrionites, formé par Dejean ( Catalo¬ gue, 3e édit., p. 227 ). Le type, O. denti- pes de l’auteur , vit au Sénégal. (C.) *OPLOPHORA ( SttIov , arme; cp/po , je porte), ins. — Genre de Coléoptères sub¬ pentamères, tétramères deLatreille, famille des Longicornes, tribu des Lamiaires, créé par Hope ( the Trans. Lin. Soc. Lond. , t. 18, p. 438) , qui y comprend deux es¬ pèces : les O. farinosa Linn. ( Chinensis Forst., punctator F., 01. ), et Sollii Hope. La première est de Chine , et la seconde d’Assam. (C.) OPLOPHORES. Oplophori. poiss. — Nom donné par M. Duméril (ZooL anal.) à une famille de Poissons de l’ordre des Ho- lobranches, comprenant tous ceux qui ont un rayon pointu , libre à leurs nageoires pectorales, souvent denté. Elle répond en grande partie à la famille des Siluroïdes de G. Cuvier. *OPLOPIIORES (orr^ov, arme ; cpopoç, qui porte), crust. — Genre de l’ordre des Décapo¬ des brachyures, tribu des Pénéens, créé par M. Milne Edwards. Le Crustacé d’après le¬ quel cette nouvelle coupe générique a été établie ressemble beaucoup aux Ephyres et aux Pasiphaés par les points les plus impor¬ tants de la structure, mais a un faciès tout- à fait différent. Le corps n’est pas com¬ primé; la carapace se termine par un rostre styliforme très long et dentelé sur les bords. La seule espèce connue est I’Oplopiiore type, 0. lypus Edw. ( Hist . nat. des Crust., t. II, p. 424). Cette espèce a été trouvée dans les mers de la Nouvelle-Guinée. (H. L.) OPLOPES. ins. — Voy. hoplopus. *OPLOSlPHES. annél. — Rafinesque, dans son Analyse de la nature , a donné ce nom à un genre de Lombricinés, dont il n’a pas décrit les caractères. (P. G.) OPLOTFIECA. rot. pii. — Voy. hoplo- THECA. *OPLOTHERFEM (StDov , arme défen¬ sive; Gvjpfov , animal), mam. foss. — Genre de Pachydermes fossiles établi par MM. de Laizer et de Parieu {Ann. des sc. nat., 2e sér., t. X), dont on rencontre les restes dans les terrains tertiaires du bassin de l’Ai¬ lier, et voisin du sous-genre d'Anoplothe- rium de Cuvier, nommé Dichobum , et que M. Bravard avait déjà nommé antérieure¬ ment Cainotherium. L’Oplothérium tire son nom de ses canines, qui sont un peu plus saillantes que les autres dents des mâchoi¬ res. Les deux collines transversales d?mt sont formées les arrière-molaires'supérieures sont formées de cinq pointes ou croissants, deux à la colline antérieure, et trois à la colline postérieure, tandis que, dans les Anoplotheriums , c’est l’inverse qui a lieu. L’angle de la mâchoire offre un contour ar¬ rondi, qui avait engagé M. Geoffroy Saint- Hilaire à proposer pour ce genre le nom de Cyclognathus. Un travail de M. Bravard , qui est sous presse, fera connaître ce genre dans tous ses détails. MM. de Laizer et Parieu établissent deux espèces de ce genre, l’OpL laticurvatum et VOpl. leptognathum. (L...d.) OPEERUS. rept. — Voy. HOPLURUS. OPOCALAPSEM. chim. — Voy. gomme OPOCALAPSDM. *OPOCÉPHALE. Opocephalus. térat. — Genre de Monstres unitaires, de l’ordre des Autosites , de la famille des Otocéphalieris. Voy. OTOCÉPHALIENS. *OPODYME. Opodymus. térat. — Genre de l’ordre des Autositaires, famille des Mo- nosomiens. Voy. monosomiens. OPOETHES, Vieill. ois. — Synonyme de Touraco. (Z- G.) *QPOMYZA (Sttoç, suc ; je suce), ins. — Genre de l’ordre des Diptères brachocères, famille des Athéricères, tribu des Muscides, établi par Fallen, et adopté par Meigen et M. Macquart. Cedernicr auteur {Dipt., Suites à Buff. , édit. Roret, t. II, p. 555) en décrit 15 espèces, qui se trouvent toutes en France et en Allemagne ( Opom . germinationis, flo- rum, etc.). Elles diffèrent des Diastates par la forme moins allongée des antennes ; par 142 GPU GPL le style moins velu, et par la première ner¬ vure transversale des ailes qui est située vers le milieu et non près de la base. (L.) OPOPONAX. bot. pu. — Genre de la fa¬ mille des Ombellifères , tribu des Peucéda- nées, établi par Koch ( Umbellif ., 96). Herbes de l’Europe australe. Voy. ombellifères. OPOPONAX ou OPOPANAX. chim. — Voy. GOMME-RÉSINE OPOPONAX. *OPOIiïNIA, Don (in Edinb. new Philos. Journ. , 1829, p. 309 ). bot. ph. — Voy. leontodon , Linn. OPOSSUM. mam. — Les Anglais dési¬ gnent sous ce nom'notre genre des Didelphes. Le même mot d 'Opossum a été appliqué à une espèce de groupe des Sarigues. Voy. ce«iot, (E. D.) OPPOSÉ. Oppositus. bot. — On donne cette épithète à toutes les parties d’une plante qui se présentent au nombre de deux, sur un même plan horizontal et vis-à- vis l’une de l’autre, comme les bractées, les cotylédons, les feuilles, les fleurs, etc. *OPSIMUS ( tardif), ins. — Genre de Coléoptères subpentamères, tétramères de Latreille, famille des Longicornes, tribu des Cérambycins , formé par Eschscholtz et adopté par Dejean ( Catalogue , 3e édit., p. 354). L’espèce type et unique, l’O. qua- drilineatus Esch. , est originaire de la côte occidentale de l’Amérique du nord. (C.) *OPSOMALA. ins. — Genre de l’ordre des Orthoptères , tribu des Acridiens, fa¬ mille des Truxalides, établi par MM. Amyot et Serville (Rev. me'th. des Orlhopt .), et dont les caractères essentiels sont : Tête très médiocrement pyramidale ; antennes à ar¬ ticles plans ; prosternum muni d’une pointe ; corselet ayant une ligne médiane élevée. Élytres droites. M. Audinet-Serville (Orthoptères , Suites à Buffon , édit. Roret) cite et décrit 44 es¬ pèces de ce genre qui habitent Java , et quelques contrées de l’Amérique septen¬ trionale. (L.) *OPSONAIS (ty, œil; Nais, Nais), an- nél. — Genre de Nais que nous avons établi dans le t. V des Bulletins de l'Académie des Sciences de Bruxelles. Voy. naïs. (P. G.) OPULUS, DC. ( Prodr., IV ). bot. ph. — Voy . viburnum. OPUNTIA, bot. ph. — Genre de la fa¬ mille des Opuntiacées , établi par Tourne- fort (Inst. , 239, t. 122). Arbrisseaux de l’Amérique tropicale. Voy. opuntiacées. OPUNTIACÉES. Opuntiaceœ. bot. ph. - — Linné réunissait les Cierges ou Cactus dans un genre unique, et Jussieu, en le con¬ servant, en avait fait le type de la famille des Cacti qui comprenait aussi les Groseilliers dans une section distincte. Celle-ci est deve¬ nue la famille des Ribésiacées , et le genre Cactus qui s’est enrichi d’une foule d’espè ¬ ces nouvelles a été non seulement divisé en plusieurs genres, maison a distribué ceux-ci en plusieurs tribus. Leur groupe a reçu di ¬ vers noms, outre celui sous lequel nous le désignons, ceux de Cactées , Cactacées, Cac- toïdées et de Nopalées. 11 est ainsi caractérisé : Calice adhérent à l’ovaire, divisé immédiate¬ ment au-dessus de lui, ou après s'être pro¬ longé en un tube plus ou moins long, en un nombre de lobes indéfini, foliacés ou colorés, et, dans ce dernier cas, à peine distincts des pétales auxquels ils passent insensiblement. Ces pétales semblent donc le plus souvent continuer la série des divisions caliçinales à l’origine desquelles ils naissent eux-mêmes et forment avec elles une suite de folioles colorées et nombreuses sur deux ou plusieurs rangs, souvent enroulées en spirale, tombant ou se flétrissant aussi avec elles. Étamines en nombre indéfini, insérées au dedans des pétales, plus courtes qu’eux, à filets filiformes et libres, à anthères introrses ou biloculaires dont le pollen globuleux et lisse est marqué de deux ou trois zones diaphanes. Ovaire adhérent, à une seule loge sur la paroi de la¬ quelle s’allongent trois placentas longitudi¬ naux ou plus, chargés d’ovules horizontaux et anatropes , surmontés d’un style simple , allongé, cylindrique, percé dans son axe d’un canal quelquefois rempli et terminé par au¬ tant de stigmates qu’il y a de loges ; stigma¬ tes linéaires, étalés ou rapprochés en faisceau, souvent tordus en spirale, comme la plupart des autres parties de la fleur. Le fruit est une baie tantôt lisse, tantôt hérissée par les extrémités libres et durcies des folioles ca- licinales, remplie à l’intérieur d’une pulpe dans laquelle sont nichées les graines parié¬ tales, à test dur, noir, brillant, ponctué, doublé d’une membrane mince sous laquelle est immédiatement, ou avec l’interposition d’une même couche de périsperme, l’embryon droit ou courbé, à cotylédons distincts ou sou- OPU OR 143 dés en un corps ovoïde et seulement bilobulé au sommet, à radicule plus longue tournée du côté du hile. Toutes les espèces de cette fa¬ mille sont originaires de l’Amérique où elles habitent surtout entre les tropiques, quoi¬ qu’elles s’avancent dans les régions tempé¬ rées jusqu’au 49e degré de latitude boréale et au 30e de latitude australe. Cependant elles ne paraissent pas craindre le froid, puisqu’el¬ les abondent sur les hautes montagnes où on les rencontre jusqu’auprès de la limite des neiges éternelles, abondantes sur les pierres et les rochers et, en général, dans les terrains arides que leur texture particulière ne leur rend pas défavorables. Une espèce, la plus vulgaire, s’est répandue dans toutes les ré¬ gions méditerranéennes où elle s’est si bien naturalisée qu’elle semble former un des traits distinctifs de sa végétation. Plusieurs auteurs prétendent même qu’elle n’y a pas été importée, et on a parlé aussi de quelques autres originaires de l’ancien continent. Mais jusqu’ici les preuves authentiques manquent pour justifier ces exceptions. La culture de nos jardins a familiarisé sans doute la plupart de nos lecteurs avec les for¬ mes singulières et bizarres des Cactées. Ce sont, en effet, rarement celles d’arbrisseaux feuillés et charnus ; mais on en voit un plus grand nombre arrondis en forme de Melons ou autres fruitsdeCucurbitacées,allongésen colonnes cannelées, en prismes, aplatis en lames continues ou séparées en une suite de palettes épaisses, toutes dépourvues de feuil¬ les qui ne se montrent guère qu’à l’état ru¬ dimentaire, mais dont la place est bien in¬ diquée par autant de coussinets desquels partent les bourgeons, et qui portent sou¬ vent des touffes de poils et des pointes plus ou moins développées. C’est à ce point que se montrent les fleurs solitaires, quelquefois très grandes et très belles, avec des couleurs brillantes et une odeur plus ou moins péné¬ trante. Le suc des tiges est tantôt aqueux et mucilagineux, d’autres fois laiteux et âcre comme celui des Euphorbes dont quelques unes imitent la forme des Cierges. On mange les fruits de la Raquette ordinaire (Opuntia), connus vulgairement sous le nom de Figues d'Inde. Plusieurs autres rendent un service d’un autre genre, en nourrissant sur leurs rameaux la Cochenille, cet insecte si recher¬ ché pour la teinture. GENRES. 1. Cactées a fleurs tubuleuses. Périanthe prolongé en un tube au-dessus de l’ovaire. Mamillaria , Haw. — Anhalonium , Lemaire ( Ariocarpus , Sch ied w) . — Melocaclus , Tou r n . ( Cactus , Haw.). — Echinocactus, Link, Ott. Discocacius , Pfeiff. — Pilocereus , Lemaire ( Ccphalocereus , Pfeiff.). — Echinopsis , Zucc. (. Echinonyclanthus , Lem.). — Cereus , Haw. — Phyllocactus, Link ( Phyllocereus , Miq. — Phyllarlus, Neck.). — Epiphyllum, Pfeiff. 2. Cactées a fleurs rotacées. Périanthe divisé immédiatement au-des¬ sus de l’ovaire. Rhipsalis, Gærtn. ( Hariota , Ad.). — Pfeif- fera, Salm. — Lepismium, Pfeiff. — Opuntia , Tourn. ( Tuna , Dill. ) . — Pereskia, Plum. ( Peirescia , Salm. — Perescia, Spr.). Le genre Pelecyphora, Ehr., n’a pas été classé, parce qu’on n’a pas connu ses fleurs. Le prince de Salm-Dyck, dont les ouvrages ont tant servi à avancer la connaissance des plantes grasses, et dont les jardins présentent la plus riche collection de la famille qui nous occupe, a proposé la subdivision des deux sections précédentes en plusieurs tribus fondées sur la forme entière du végétal, sur les modifications de l’inflorescence, la nature de la surface du fruit, etc. Il divise ainsi la première en Méléocaclées, Echinocaclées, Cé- réastrées et Phyllocactées ; la seconde en Rhip- salidées , Opuntiées et Peiresciées. (Ad. J.) OR. Aurum. min. — Corps simple métalli¬ que, que caractérise une belle couleur jaune, jointe à une grande malléabilité, et à une densité considérable. Il pèse dix-neuf fois autant que l’eau, à volume égal, ou à peu près deux fois autant que l’Argent ; sa pesan¬ teur spécifique ne le cède qu’à celle du Pla¬ tine. Il surpasse tous les métaux par sa té¬ nacité, qui est telle, qu’un fil de 3 milli¬ mètres de diamètre supporte un poids de 250 kilogrammes, sans se rompre. Sa mal¬ léabilité est si grande, qu’on peut l’em¬ ployer en dorure , c’est-à-dire par couche d’une extrême minceur. Sa dureté est assez faible, ce qui fait qu’on a besoin , pour en former l’Or monnayé et l’Or de bijoux, de l’allier avec une certaine quantité de Cuivre ou d’Argent, dont la proportion est réglée par la loi et garantie par le contrôle. La 1 44 OR OR monnaie renferme un dixième de Cuivre. Ce métal est remarquable encore par son inal¬ térabilité; il n’est point sujet à s’oxyder, comme la plupart des métaux usuels; et il est inattaquable par tous les acides, excepté l’eau régale, qui seule peut le dissoudre. C’est sur cette propriété que se fonde l’essai par la pierre de touche , dans lequel l’eau forte (acide azotique) sert à dissoudre le Cuivre ou l’Argent sans attaquer l’Or. — Le mercure dissout l’Or, aussi bien que l’Ar¬ gent : et c’est pour cela qu’on a recours au procédé de l’amalgamation, pour retirer les plus petites particules d’Or des minerais en poudre , ou des terres naturelles qui les renferment. L’Or n’est fusible qu’à une température au-dessus de la chaleur rouge, et n’est point volatil au feu de forge. Sa so¬ lution par l’eau régale précipite en pourpre parle chlorure d’étain. L’Or ne se trouve guère dans la nature qu’à l’état métallique, ou allié à une petite quantité de Cuivre ou d’Argent, qui modifie plus ou moins sa couleur. On le rencontre quelquefois, mais rarement, combiné avec le Tellure. Voy. tellurures. — Quelques minéralogistes ont considéré l’alliage d’Or et d’Argent comme une espèce particulière, à laquelle ils ont donné le nom û'Eleclrum; mais les proportions de cet alliage varient tellement, qu’on ne peut y voir qu’un mé¬ lange indéfini de deux métaux de cristalli¬ sation semblable. — L’Or pur ou sensible¬ ment pur se montre quelquefois cristallisé comme l’Argent et le Cuivre, sous les formes du système cubique ; il est plus ordinaire toutefois de le rencontrer à l’état de den- drites ou de ramifications, provenant de pe¬ tits cristaux implantés les uns sur les autres, ou sous la forme de lames , de réseaux ou d’enduits à la surface de diverses gangues pierreuses, dont la plus commune est le Quartz , ou bien encore sous celle de fila¬ ments pénétrant ces mêmes gangues ; enfin, et c’est sa manière d’être la plus habituelle, on le trouve en grains ou en paillettes, en¬ gagés dans des pyrites, que pour cette rai¬ son on nomme aurifères, ou bien dissémi¬ nés dans des terrains meubles. Ces grains en général sont petits; quelquefois cepen¬ dant ils forment des masses arrondies, plus ou moins volumineuses, qu'on nomme pé¬ pites. Le Muséum d’histoire naturelle à Pa¬ ris en possède une dont le poids est de plus d’un demi-kilogramme ; on a trouvé dans les sables des monts Ourals, des pé¬ pites pesant 10, 15 et jusqu’à 36 kilogram¬ mes: et on en a cité une, trouvée dans la province de Quito, en Amérique, et dont le poids était d’environ 50 kilogrammes. Dans ses divers gisements, l’Or est toujours dans un grand état de dissémination : pour en donner une idée, il nous suffira de dire que l’on exploite des filons de pyrite, qui n’en contiennent qu’un deux cent millième; c’esf-à-dire qu’il faut extraire de la mine deux cent mille kilogrammes de minerai, pour avoir un seul kilogramme d’Or. On comprend, d’après cela, comment il se fait que l’Or soit un métal si cher, et qu’une mine d'Or soit en général une propriété peu avantageuse. A cause de l’état extrême de division, dans lequel l’Or se rencontre habituellement, l’Or est un des métaux les plus rares; mais, en même temps, il est, un des plus répandus dans la nature ; car il n’y a guère de terres ou de sables de rivière qui n’en contiennent quelques particules, et on en a trouvé jusque dans les cendres des végétaux. L’Or , considéré sous le rapport géolo¬ gique , peut présenter trois sortes de gi¬ sements : 1° il forme des gîtes spéciaux, dans des filons ou amas, et quelquefois dans des couches , au milieu des terrains schis¬ teux cristallins ou du sol de transition, sur¬ tout dans les parties qui sont traversées par certains porphyres; 2° il s’associe à l’Argent dans les filons argentifères, et il y est sur¬ tout concentré dans les parties supérieures, voisines des affleurements, dans des terres ferrugineuses, appelées pacos ou colorados, et qui ne sont que des portions de filons dé¬ composées; 3° enfin , ne se montrant point dans le sol de sédiment proprement dit, il reparaît dans les terrains d’alluvion ou er¬ ratiques, dans les sables des rivières, et no¬ tamment dans les sables siliceux et ferru¬ gineux qui, dans quelques pays, sont en même temps geminifères et platinifères. — Toutes les mines d'Or exploitées de nos jours se partagent donc en deux classes dis¬ tinctes : en mines souterraines ou propre¬ ment dites, établies sur des couches, amas ou filons des terrains primordiaux, et en simples lavages de sables aurifères, lesquels OR sont toujours des dépôts superficiels. Et il est à remarquer que ce n’est point dans les premières que l’Or est le plus abondant : ce sont les lavages de sables, qui, dans presque toutes les parties du monde, fournissent la plus grande partiede l’Or que l’on recueille pour les besoins du commerce. Ces allu- vions aurifères proviennent sans doute de la destruction de gîtes antérieurs, consti¬ tuant des mines de la première espèce, et dans lesquels l’Or se trouvait lié au Quartz et à des minerais de Fer (fer oligiste, pyrite, et fer hydroxydé). C’est au Brésil que l’on trouve l’Or dissé¬ miné dans des couches solides, où il est ré¬ pandu en assez grande quantité; ces cou¬ ches sont composées de Quartz et de Fer oligiste métalloïde ; elles se lient à des roches quarzeuses métamorphiques (Quar* tzites, Itacolumites ) , dans lesquelles on a trouvé des diamants et du platine , et sont recouvertes par une brèche ferrugineuse ex¬ trêmement aurifère. Ce terrain est pénétré ç.à et là par des dykes de roches éruptives, appartenant à la série des roches porphyri- ques. Dans le voisinage de ces roches en place, sont les alluvions ou dépôts de trans¬ port de Matto-Grosso, et de Minas Geraës, si riches en Or et en Platine, et que l’on at¬ tribue à la destruction des gîtes analogues. Les mines en filons sont beaucoup plus communes que les gîtes en couches. C’est le Brésil qui produit la plus grande partie de l’Or que l’on recueille en Améri¬ que , à peu près les f de la quantité totale; et presque tout cet Or provient de lavages opérés par des esclaves. Le produit annuel est de 7,000 kilogrammes d’Or, représen¬ tant une valeur de 24,000,000 fr. Après le Brésil, c’est la Nouvelle-Grenade, dans la Colombie, qui donne le plus d’Or; le produit de ses mines est d’à peu près 10,000,000 fr., dont sept proviennent de filons, et trois des terrains d’alluvion. C’est dans les provinces du Choco, d’Antioquia, de Popayan et Pamplone, que sont situées les exploitations. Vient ensuite le Chili, dont les lavages produisent 7 à 8,000,000. Le Pérou est peu riche en Or ; il possède d’abondantes mines d’ Argent aurifères ; mais on a beaucoup exagéré son importance sous le rapportdumétal qui nous occupe, ce qui vient sans doute de ce qu’à l’époque de la décou- OR 145 verte du Pérou , on trouvait fréquemment, à la surface du sol , des pépites d’Or de la gros¬ seur d’une amande; mais cet Or superficiel ayant été ramassé avec soin, on n’en trouve plus aujourd’hui, et l’on ne peut plus en extraire que des mines, qui se sont considé¬ rablement appauvries. Le Pérou produit à peine 800 kilog. d’Or annuellement; sous ce rapport, il cède le pas au Mexique, qui possède aussi des filons et des lavages d’Or, dont le produit est de 1,600 kilog. On estime que le produit total annuel des mines d’Or des deux Amériques est de 17,500 kilogrammes, ayant une valeur de 60,000,000 fr. Le Nouveau-Monde livre au commerce douze fois plus d’Or que l’Europe entière; il est donc pour nous, en quelque sorte, le pays de l’Or, ou plus généralement des métaux précieux; mais le prestige de l’Or disparaît, et la prépondérance de l’Eu¬ rope dans l’industrie minérale se manifeste clairement, lorsqu’on compare ce produit à ceux que dorment, chez nous, les minerais de Fer et les combustibles fossiles. Le Fer, à lui seul , donne un produit annuel de près de 500 millions. En Europe, il y a fort peu de mines d’Or en exploitation; les plus importantes sont celles de Flongrie et de Transylvanie. La France ne possède aucune mine d’Or que l’on puisse exploiter : il existe à la Gardette, près du bourg d’Oisans en Dauphiné, un filon de Quartz aurifère traversant le Gneiss, qui, pendant quelque temps, a donné de belles espérances aux mineurs ; mais il s’est appauvri à une faible profondeur, et, à cause des difficultés de l’extraction, on a été forcé de l’abandonner. L’Or est disséminé en petite quantité , mais assez généralement, dans le sol d’al¬ luvion de l’Europe. On exploite maintenant avec beaucoup d’avantage des sables auri¬ fères étendus sur les pentes de l’Oural en Russie. 11 en existe également en Hongrie, en Espagne, etc. On sait qu’on trouve de l’Or en France , dans le sable de plusieurs rivières, dont les eaux passent pour avoir la propriété de charrier des paillettes d’Or : tels sont, entre autres, l’Ariége, le Gar¬ don , le Rhône, le Rhin près de Strasbourg, la Garonne près de Toulouse, l’Hérault près de Montpellier. Il y a des hommes qu’on nomme orpailleurs , et dont l’unique occu- 19 T. IX. 146 OR ORA pation est de recueillir ces paillettes d’Or. Cet Or n’a point été arraché de nos jours par les eaux des rivières aux roches solides des pays où elles prennent leur source : il préexistait dans le sol d’alluvion des plaines que les rivières traversent; leurs eaux ne font qu’opérer naturellement le lavage des sa¬ bles et concentrer le minéral dans quelques points, où il devient visible. Les quantités d’Or et d’Argent qui sont versées annuellement dans lecommercesont, entre elles , dans le rapport de 1 à 52 ; ce¬ pendant les valeurs commerciales des deux métaux sont seulement entre elles comme 1 est à 15 (le kilog. d’Argent valant à peu près 200 fr., et le kilog. d’Or un peu plus de 3,000 fr.). Cette différence provient de ce que, 1 Or étant beaucoup moins employé que l’Argent, les demandes qu’on en fait sont moins nombreuses, et son prix réel est au-dessous de celui qu’il devrait avoir, s’il suivait le rapport de la quantité. Si le prix de l’Or est encore si élevé , ce n’est pas seu¬ lement parce que ce métal est rare; il est aisé de voir que le prix des métaux, dans le commerce, n’est nullement en rapport avec leur rareté naturelle. Le Platine, moins abondant que l’Argent, est cependant moins cher que ce dernier métal. Le prix de l’Or, comme celui de l’Argent, est la représenta¬ tion exacte du travail qu’il faut exécuter pour obtenir ces métaux ; et si l’Or est quinze fois plus cher que l’Argent, c’est qu’il est quinze fois plus difficile à extraire. Le traitement métallurgique des mine¬ rais d’Or, dans lesquels le métal est dissé¬ miné en parties visibles ou invisibles, con¬ siste dans l’amalgamation avec le mercure, après avoir fait subir aux minerais quelques préparations mécaniques. On enlève ensuite le mercure par distillation , et l’on obtient l’Or pur ou allié avec quelques autres mé¬ taux , dont on le sépare au moyen de l’a¬ cide azotique. L’Or contenu dans les mine¬ rais d’Argent , s’obtient combiné avec l’Ar¬ gent qu’on retire par la coupellation, et on opère ensuite le départ des deux métaux par l’acide azotique. Quant à l’Or d’allu. vion, on n’a besoin que de le fondre pour le mettre en lingots. La dorure sur métaux s’opère aujourd’hui en précipitant de l'Or de ses dissolutions, par les procédés galvanoplasliques. Avant la découverte de ces nouveaux procédés , l’art de la dorure reposait sur la propriété dont jouit le mercure de s’amalgamer avec l’Or, et de se volatiliser au feu, en aban¬ donnant le métal, qui adhère fortement à celui sur lequel on a étendu l’amalgame. C’est ainsi que l’on dore à chaud l’Argent, qui dans cet état prend le nom de Vermeil. Quant à la dorure des matières qui ne peuvent soutenir l’action du feu, comme le Plomb et le Bois, elle se pratique en fixant à leur surface, au moyen d’un mucilage, des feuilles d’Or excessivement minces. (Del.) ORAGE. MÉTÉOR. — Voy. MÉTÉOROLOGIE. ORANG. Pithecus, Geotï. mam, — Genre de Mammifères quadrumanes, appartenant à la famille des Singes selon Is. Geoffroy, et à celle des Anthropomorphes selon MM. de Blain ville et Lesson. De tous les Quadruma¬ nes , ceux de cette famille sont les seuls dont l’os hyoïde , le foie et le cæcum ressemblent à ceux de l’Homme. Ils ont le museau très proéminent, l’angle facial de 55 à 65 degrés; trente- deux dents semblables à celles de l’Homme, si ce n’est que leurs canines sont plus longues et se logent dans un vide de la mâchoire opposée; leurs ongles sont plats ; ils manquent de queue, et leurs membres supérieurs atteignent ou dépassent l’articu¬ lation du genou. Leurs mouvements sont graves et n’ont pas cette pétulance capri¬ cieuse ou brutale qui caractérise si bien les autres Singes. Les femelles sont sujettes aux mêmes incommodités périodiques que les femmes. Les Orangs proprement dits , Pithecus, GeofT. ; Simia, Lin.; Salyrus , Pithecus et Pongo , G. Guv. , forment le premier genre de la famille des Anthropomorphes, lis manquent d’abajoues; leurs bras sont très longs; leurs oreilles arrondies, plus petites que celles de l’Homme; enfin, ils n’ont point de callosités aux fesses. Selon l’opinion nouvelle des naturalistes, il n’existerait qu’une seule espèce d’Orang , et l’on établit ce fait sur ce passage de Temminck : « Nous venons enfin d’obtenir la certitude de l’identité spécifique du Simia satyrus avec le prétendu Pongo Wurmbii des catalogues. ( Probablement M. Tem¬ minck regarde le Règne animal de Cu¬ vier comme un catalogue, ce que nous ne pouvons accepter.) Plusieurs peaux d’Orangs OR A ORA 147 et quelques squelettes, hauts de quatre pieds et demi , obtenus récemment au musée des Pays Bas , et faisant partie des objets rassemblés par M. Diard à Bornéo, ne laissent plus aucun doute sur cette iden¬ tité. » (Fauna japonica , discours prélimi¬ naire, en note, p. vi.) On réunirait égale¬ ment à la même espèce le Pongo d’Abel , de Lesson , le Simia mono , d’Owen , etc. Nous reviendrons sur ce sujet du plus haut intérêt, quand nous décrirons les va¬ riétés d’âge et de localité. L’Orang - Houtan , Pithecus satyrus , Desm.; Satyrus rufus , Less.; Simia sa¬ tyrus , Lin.; l 'Orang-Outang, Vosm, G. Cuvier; Y Homme des bois des voyageurs; l 'Homme sauvage d’Hérodote ; le Sphynx ou Satyre d’Ælien; le Satyre de Pline; Y Orang -Pendak ou homme nain de Suma¬ tra; le Kahica des Dayaks ; Y Or an g roux de plusieurs naturalistes, etc., etc. — G. Cuvier se trompe en donnant l’étymolo¬ gie de ce nom en langue malaise: Orang signifie en effet Homme ou être raisonnable ; mais Outang signifie dette et non forêt. Orang-Outang veut dire littéralement un débiteur; on doit donc écrire Orang -Hou¬ tan , qui signifie Homme des forêts. Aussi est-ce dans les forêts les plus reculées et les plus sauvages de Sumatra , de l’Inde orien¬ tale, de la Cochinchine et de la presqu’île de Malaka , qu’il faut aller chercher cet animal devenu rare, et dont la race finira par disparaître peu à peu de dessus le globe; autant qu’on peut le prévoir, il en sera de lui comme de ces animaux fossiles dont les dépouilles, enfouies dans les entrailles de la terre, viennent de temps à autre révéler l’antique existence; et si, dans ces temps à venir, la mode des effrayants cataclysmes , des épouvan tables ca tastrophes du globe, etc. , existe encore , les géologues auront un joli sujet pour inventer une nouvelle révo¬ lution de la terre. Jadis les Orangs habitaient toute la partie occidentale de l’Asie, comme on en peut juger par un passage de Strabon (lib. 15 , tom. 2). Selon cet auteur, lorsque Alexandre pénétra dans l’Inde à la tête de son armée victorieuse, il en rencontra une nombreuse troupe , qu’il prit pour une armée ennemie; aussitôt il fit marcher contre elle son invin¬ cible phalange macédonienne. Mais le roi Taxile, qui se trouvait auprès de lui, tira le conquérant de l’Asie de son erreur , en lui apprenant que ces créatures , quoique semblables à nous , n’étaienl que des Singes fort pacifiques, nullement sanguinaires , et n’ayant pas la plus mince parcelle d’esprit de conquête. Les Indiens sont tellement persuadés qu’ils ont été, au moins en partie, Singes avant d’être Hommes civilisés, qu’un de leurs an¬ ciens historiens du Thibet, traduit d’abord en langue mongole, puis du mongol en anglais, par M. Klaproth , raconte ceci : « Après que la véritable religion de Chakiamouni eut été répandue dans l’indoustan et chez les Bar¬ bares les plus éloignés, le grand prêtre et chef de la religion des Boudhistes , ne voyant plus rien à convertir entre les Hom¬ mes, résolut de convertir la grande espèce de Singes appelée Jaktcha ou Raktcha, d in¬ troduire chez eux la religion de Boudha , et de les accoutumer à la pratique des pré¬ ceptes , ainsi qu’à l’observation exacte des rites sacrés. L’entreprise fut confiée à une mission , sous la direction d’un prêtre re¬ gardé comme une émanation de Khomchim- Botisato. Ce prêtre réussit parfaitement et convertit une quantité prodigieuse de Singes à la croyance indienne. » Cette fable an¬ tique prouve que l’Orang était jadis com¬ mun dans l’Inde , et peut-être , par cette raison, beaucoup moins sauvage qu’aujour- d’hui. Quoi qu’il en soit , cet animal a une res¬ semblance effrayante avec l’Homme , res¬ semblance qui avait d’abord poussé Linné , Edwards et d’autres , à le placer dans le même genre, sous le nom d'Homo troglo¬ dytes et d'Homo sylvestris. Considérés sous les rapports anatomiques, les Orangs , en y comprenant le Chimpanzé, s’éloignent beau¬ coup plus des Singes que de l’espèce hu¬ maine. Le célèbre physiologiste Tiedemann trouve le cerveau de l’Orang roux absolu¬ ment conformé comme le nôtre, et 1 on est obligé, pour trouver des différences spécifi¬ ques invariables, d’aller les chercher dans les pouces des pieds, qui sont chez lui op¬ posables aux autres doigts , et dans d’autres caractères encore plus légers. Il en est un cependant auquel G. Cuvier et d auties na¬ turalistes donnent une grande importance , et le voici : les Orangs ont des poches thy- 148 ORA OR A roïdiennes placées en dedans du larynx, de manière à ce que l’air sortant de la glotte s’y engouffre pour produire un murmure sourd, lequel ne peut conséquemment, selon ces naturalistes , jamais former un langage articulé. Il me semble que ceci n’est pas très concluant, surtout quand on a en¬ tendu articuler des mots par des Perro¬ quets, des Pies, des Serins et autres Oiseaux qui, certes, ont un organe de la voix bien plus différent de celui de l’IIomme. Ensuite voici un passage extrait de l’Abrégé de géo¬ graphie de Balbi : « M. de Rienzi a vu lui- même , près de la baie des Lampoungs, des Hommes de très petite taille, etc. Cet infa¬ tigable voyageur a vu aussi , sur la côte orientale de l’île d’Andragiri, quelques in¬ dividus que les naturels nomment Gougons ; ils venaient, dit-il, de l’État de Menang- karbou. Ces hommes appartenaient à la race qu’il propose de nommer Pithékomorphes (ou à formes de Singes), parce qu’ils of¬ frent quelque ressemblance avec ces Qua¬ drumanes , par leur corps couvert de longs poils, l’os frontal très étroit et comprimé en arrière , la conformation de la glotte, et leur peu de conception. » A ceci, M. de Rienzi ajoute : « Ils ne surpassent guère les Singes en intelligence, mais enfin ils sont Hommes. Ils nous dirent qu’ils habitaient l’intérieur de Menangkarbou , et qu’ils formaient une petite peuplade.» Quelle que soit la confiance que l’on ait en M. de Rienzi , il n’en est pas moins vrai que si les Orangs ne parlent pas , c’est tout simplement parce que , ainsi que tous les autres animaux, ils ne pensent pas, à la manière de l’Homme, faute d’une intelli¬ gence suffisante. Ils n’ont pas reçu de Dieu une âme immortelle et raisonnable, et ce caractère spécifique , comme dirait un na¬ turaliste , suffit pour mettre entre l’Homme et l’animal une distance incommensurable , que nulles ressemblances anatomiques ne peuvent rapprocher. L’Orang-lIoutan , selon le plus grand nombre des naturalistes, est haut de trois à quatre pieds. Son corps est trapu, couvert d’un poil uniformément roux ; son visage est nu , un peu bleuâtre; ses cuisses et scs jambes sont courtes , ses bras très longs; son ventre est gros et tendu. Telle est la des¬ cription qu’on en fait généralement. G. Cu¬ vier ajoute : « C’est un animal assez doux, qui s’apprivoise et s’attache aisément; qui, par sa conformation, parvient à imiter un grand nombre de nos actions, mais dont l’in¬ telligence ne paraît pas s’élever à beaucoup près autant qu’on i’a dit, ni même surpasser beaucoup celle du Chien. Camper a décou¬ vert et bien décrit deux sacs membraneux qui communiquent avec les ventricules de la glotte de cet animal, et qui assourdissent sa voix; mais il a eu tort de croire que les ongles manquent toujours à ses pouces de derrière. » Cette description prouve que Cuvier connaissait fort mal cet Orang , et ce qui le prouve encore davantage , c’est l’établissement de son genre Pongo, placé dans son règne animal à la suite des Gue¬ nons et des Macaques, quoique son prétendu Pongo ne soit qu’un Orang-Houtan. L’histoire de cet animal est extrêmement embrouillée , et les naturalistes ne font tous les jours qu’augmenter sa confusion. Citons- en un exemple : Lesson { Mastolo g ie métho¬ dique , p. 40) dit, dans sa description gé¬ nérale de l’Orangroux, qu’il habite exclu¬ sivement les îles de Sumatra et de Bornéo. Puis il donne sa description à l’âge adulte , et il le place alors sur le continent indien ; puis, à l’âge mûr, il lui fait habiter la côte N. -O. de Sumatra ; et enfin , dans sa vieil¬ lesse , l’île de Bornéo. Or , comme il n’admet qu’une espèce , i! en résulte naturellement que cet animal devrait changer de contrée en raison de son âge, et être fort habile nageur pour passer du continent indien à la côte N. -O. de Sumatra , entre l’âge adulte et l’âge mûr ! — D’un autre côté , voilà Temminck qui décide, comme je l’ai dit plus haut, sur une peau et un squelette, que le Pongo de Cuvier ou Orang de Wurmbs est identique avec l'Orang roux, et cependant Cuvier a établi uniquement son genre Pongo sur la présence d'a¬ bajoues , dont Temminck n’a pu vérifier l’existence ni sur des peaux ni sur des sque¬ lettes ! Et voilà cependant comment écrivent des naturalistes à grande réputation , je dirai mieux, à réputation méritée. Quant à moi , je crois qu’il est d’une sage critique de ne décider son opinion que sur des faits parfaitement constatés, et je n’en vois aucun dont on puisse conclure avec cer¬ titude qu’il n’existe qu’une espèce d’Orang- OUA OUA Iioutan. J’en vois beaucoup, au contraire , qui ine portent à croire qu’il en existe au moins deux , peut-être trois. L’histoire de l’Orang, telle que nous allons la faire, jettera peut-être quelque jour sur cette question. La ménagerie de Paris a possédé, il y a quelques années , un Orang-Houtan vivant, qui a permis de faire de bonnes observa¬ tions, en faisant néanmoins la part de l’âge, car il n’avait pas plus de deux ans. Il est clair que l’on ne peut pas plus se faire une idée de l’Orang adulte , d’après cet individu, que l’on ne pourrait se faire l’idée d’un tam¬ bour-major de grenadiers sur la Yue d’un enfant de deux ans, malingre, rachitique , mourant de marasme dans un hôpital sous un ciel étranger et un climat contraire , à trois mille lieues de son pays. Or, cet indi¬ vidu avorté a servi de type à presque toutes les figures elles descriptions que l’on a pu¬ bliées en France , et même en Allemagne , depuis cette époque. Un autre Orang vivant avait déjà été vu à Paris en 1808; il appar¬ tenait à l’impératrice Joséphine, qui le te¬ nait à la Malmaison , et comme c’était une jeune femelle , Bonaparte l’avait nommée Mademoiselle des Bois. Cet animal était en ¬ core plus malingre que l’autre. Il avait eu les mains et les pieds gelés dans les Pyré¬ nées, lorsqu’on l’apportait d’Espagne; et il n’a survécu que peu de mois à cet accident. Lorsqu’il mourut, il n’avait que dix-huit mois. Voilà , ou du moins je le crois , les seuls sujets vivants qui, en France, ont pu être soumis à l’observation des savants ; et l’on conçoit qu’ils n’étaient nullement propres à fournir une description exacte , quant au physique de l’animal ; mais pour son moral il en est autrement : aussi nous rapporte¬ rons ici tout ce que l’on a pu observer de leur intelligence. Fr. Cuvier, qui a publié un Mémoire sur l’Orang de l’impératrice Jo¬ séphine, s’est fait une très haute idée de cette intelligence. « Us répètent sans peine, dit cet écrivain, toutes les actions auxquelles leur organisation ne s’oppose pas , ce qui résulte de leur confiance, de leur docilité , et de la grande facilité de leur conception. Dès la première tentative, ils comprennent ce qu’on leur demande, c’est-à-dire qu’a- près avoir fait l’action pour laquelle on vient 149 de les guider, ils savent qu'ils doivent la faire eux-mêmes, lorsque la même circon¬ stance sereprésente. » L’auteur va plus loin, il dit, dans les Annales du Muséum (t. XVI, p. 58) : « Il a (l’Orang) la faculté de géné¬ raliser ses idées , de la prudence , de la prévoyance , et même des idées innées aux¬ quelles les sens n'ont jamais la moindre part. » Je demande ce que peut avoir de plus , je ne dis pas un Hottentot, mais un Homme civilisé. Ailleurs, le même Fr. Cu¬ vier assure que toutes ces choses ne sont pas des actes de raisonnement, et qu’on pour¬ rait les apprendre à des Chiens , seulement avec un peu plus de peine. Abstraction faite de la contradiction où tombe F. Cuvier avec lui-même, voilà deux naturalistes à grande réputation, lui et G. Cuvier, qui n’accor¬ dent guère plus d’intelligence à cet animal qu’à un Chien. D’autres, au contraire, lui en attribuent presque autant qu’à un Homme, et Bory de Saint-Vincent va jus¬ qu’à lui en supposer plus qu’à un Hottentot. Il y a une grande exagération dans chacune de ces opinions contradictoires, d’où il ré¬ sulte que l’histoire morale des Orangs est tout aussi embrouillée que leur histoire physique. Etudions d’abord les deux indi¬ vidus misérables que nous avons vus vivants. Nous extrairons de Fr. Cuvier lui-même les observations faites sur celui de l’impératrice Joséphine. Il employait ses mains comme nous employons les nôtres, et l’on voyait qu’il ne lui manquait que de l’expérience pour en faire l’usage que nous en faisons dans un très grand nombre de cas particu¬ liers ; il portait presque toujours les aliments à sa bouche avec les doigts. Il buvait en humant, flairait ses aliments avant de mettre la dent dessus ; mangeait presque indifféremment des légumes , des fruits, des œufs , du lait et de la viande. Il aimait beaucoup le pain , le café et les oranges , ne mettait aucun ordre dans ses repas , et pou¬ vait manger à toute heure, comme les en¬ fants. La musique ne produisait chez lui aucune autre sensation que celle du bruit ; pour sa défense il mordait et frappait de la main, mais ce n’était qu’envers les enfants qui l’impatientaient qu’il montrait quelque méchanceté. En général , il était doux, af¬ fectueux, et répondait au besoin naturel de vivre en société. Il aimait à être caressé , 150 ORA donnait de véritables baisers. Son cri était gut¬ tural et aigre ; il ne le faisait entendre que lorsqu’il désirait vivement quelque chose; alors tous ses signes étaient très expressifs. Secouant sa tête pour montrer sa désappro¬ bation , il boudait quand on ne lui obéissait pas, et, quand il était fâché tout de bon , il criait très fort en se roulant par terre; son cou s’enflait alors beaucoup. Cet ani¬ mal , bien différent de ceux dont on avait jusqu’alors fait l’histoire , n’avait été soumis à aucune éducation particulière ; il ne de¬ vait rien à l’habitude , toutes ses actions étaient indépendantes et les simples effets de sa volonté. « La nature, ajoute Fr. Cu¬ vier, a doué l’Orang-Houtan de beaucoup de circonspection ; la prudence de cet ani¬ mal s’est montrée dans toutes ses actions , et principalement dans celles qui avaient pour but de le soustraire à quelque dan¬ ger. Il donna plusieurs preuves d’une cer¬ taine façon de raisonnement durant la tra ¬ versée , ne se hasardant à faire ce dont il ne connaissait pas les suites, qu’il ne l’eût vu faire sans danger à la personne qui en avait un soin particulier , et dans laquelle il avait conséquemment placé ses affections et sa confiance » Ennuyé des nombreuses visites qu’on lui faisait, il se cachait sou¬ vent sous sa couverture, mais il n'en agis¬ sait jamais ainsi avec les personnes qu’il affectionnait, et dont il ne se séparait qu’avec peine, la solitude lui paraissant insupportable. Une fois , pour l’empêcher d’entrer dans un appartement, on avait ôté du voisinage de la porte les chaises sur lesquelles il eût pu monter pour atteindre au loquet; mais il fut au loin en chercher une pour s’élever jusqu’à la serrure, qu’il sut bien ouvrir. Aimant à jouer avec un petit Chat qu’on lui avait donné pour le divertir, il en fut égratigné ; aussitôt il re-> garda fort attentivement le dessous des pattes du Chat ; y ayant trouvé les griffes, il examina comment elles étaient faites et essaya de les arracher avec ses doigts. Se servant assez maladroitement de fourchette et de cuiller , lorsque les choses qu’il voulait saisir avec ces instruments semblaient s’y refuser, il présentait la fourchette et la cuiller aux personnes qui l’avoisinaient, pour qu’on l’aidât dans ce qu’il n’avait su faire. Ayant posé un vase de travers , et s’aperce- ORA vant qu’il allait tomber, il le soutint et l’étaya. Quant à l’Orang qui a vécu à la Ména¬ gerie, il a confirmé en tout point ce que Fr. Cuvier avait observé chez le précédent, et il serait inutile de le répéter ici. Nos na¬ turalistes en ont conclu avec beaucoup de justesse que les Orangs sont des animaux éminemment grimpants , destinés à vivre constamment sur les arbres , ce qui est ri¬ goureusement vrai. En effet, quand ils marchent à quatre pattes , ils ne posent sur le sol que l’extrémité des doigts des pieds , et le devant du corps ne porte que sur les poings fermés ou sur le tranchant des mains. En outre, ils sont obligés, dans cette attitude, pour voir devant eux, de relever la tête d’une manière fort incom¬ mode. Mais il me semble qu’on s’est un peu trop pressé quand on a décidé qu’ils ne pou¬ vaient pas marcher debout , parce qu’il leur manque ce puissant développement des muscles du mollet, de la cuisse et des fes¬ ses , au moyen duquel l’homme conserve son équilibre et marche avec fermeté. Du¬ mont d’Urville et beaucoup d’autres voya¬ geurs ont trouvé en Australie des nations sauvages qui sont aussi mal partagées sous ce rapport que les Orangs, dont les hom¬ mes, cependant, sont de très bons mar¬ cheurs. D’une autre part, nous voyons tous les jours dans les rues de Paris de petits Singes bien plus mal conformés pour la sta¬ tion verticale, et auxquels , cependant, on a fait contracter l’habitude de se tenir et de marcher constamment debout L’Orang observé par Vosmaër était une jeune femelle à peu près de l’âge des deux précédents. Elle aimait le vin de Malaga , les carottes , et surtout les feuilles de persil. Elle mangeait aussi avec plaisir de la viande rôtie et du poisson cuit, savait boire avec un verre, déboucher une bouteille, se curer les dents , s’essuyer les lèvres avec une ser¬ viette , escamoter dans les poches ce qu’elle y trouvait à sa convenance. Connaissant la route de la cuisine, elle y allait seule cher¬ cher son repas. Elle se couchait à l’entrée de la nuit, après avoir bien arrangé le foin de sa couche, s’être fait un oreiller et avoir disposé convenablement sa couverture, sous laquelle on la voyait se blottir comme le fait un homme frileux. Ayant examiné que ÜRA ORA 151 Vosmaër ouvrait ou fermait le cadenas de sa chaîne au moyen d’une clef, on la sur¬ prit tournant un morceau de bois dans le trou et cherchant à se rendre compte de ce qu’elle ne réussissait point à se mettre en liberté. Lorsqu’il lui arrivait d’uriner sur le plancher, elle n’avait pas de cesse qu’elle n'eût trouvé un chiffon pour essuyer les ordures qu’elle avait faites. On lui avait ap¬ pris à nettoyer les bottes , ainsi qu’à ôter les boucles des souliers, etc. C’est à peu près tout ce qu’on sait de très positif sur le jeune Orang-Houtan. A l’état adulte et sauvage, cet animal a été peu ob¬ servé. On sait qu’il n’habite que les forêts les plus retirées , et qu’il se construit sur les arbres une sorte de hamac, où il se couche chaque soir, pour neselever qu’avec le soleil . 11 se nourrit principalement de fruits , mais il est probable qu’il y adjoint les œufs et les petits des Oiseaux qu’il est habile à déni¬ cher. D’anciens voyageurs ont avancé qu’en temps de disette il quitte les montagnes, et descend sur le bord de la mer, où il se nourrit de Coquillages et de Crabes. « 11 y a, dit Gemelli Careri , certaines Huîtres qui pèsent plusieurs livres, et qui sont souvent ouvertes sur le rivage; or, le Singe, crai- gnantque, lorsqu’il veut les manger, elles lui attrapent la patte en se refermant, jette une pierre dans la coquille, ce qui l’em¬ pêche de se fermer, et ensuite il les mange sans crainte. » Les Indiens lui font la chasse pour le réduire en esclavage et en tirer quelques services domestiques. « On les prend , dit Sehouten , avec des lacs, on les apprivoise , on leur apprend à marcher sur les pieds de derrière , et à se servir de leurs mains pour faire certains ouvrages, et même ceux du ménage, comme de rincer les verres, donner à boire, tourner la broche, etc. » « L’Orang-Houtan , dit Sonnerat, est plutôt sauvage que méchant, ses passions sont néanmoins très vives. Un observateur judicieux, qui exerçait la chirurgie à Ba¬ tavia , écrivait à M. Allemand , savant na¬ turaliste hollandais, qu’il avait vu pendant quelque temps, chez un magistrat de Bata¬ via , un couple d’Orangs-Houtans de gran¬ deur humaine, qui, entre autres singula¬ rités, témoignaient de la honte quand on les regardait avec trop d’attention. La fe¬ melle se jetait dans les bras du mâle et se cachait le visage dans son sein, ce qui , ajoute l'observateur , faisait un spectacle véritablement touchant, que j’ai vu de mes propres yeux. Ces animaux, continue Son¬ nerat, vivent en troupe, se construisent des cabanes, et se nourrissent de fruits, de racines, de graines, d’œufs de Gre¬ nouilles, d’Huîtres, etc. Us aiment beau¬ coup leurs petits, et les corrigent en leur donnant des soufflets. En domesticité, on leur apprend à travailler, à servir à table; mais toute contrainte les rend tristes, et ils meurent bientôt d’ennui en captivité , quel¬ ques soins que l’on prenne pour l’adoucir. » François Léguât dit avoir vu à Java « un Singe fort extraordinaire; c’était une fe¬ melle ; elle était de grande taille et marchait souvent fort droit sur ses pieds de derrière; alors elle cachait d’une de ses mains l’en¬ droit de son corps que la pudeur défend de montrer. Elle avait le visage sans autres poils que les sourcils , faisait fort proprement son lit chaque jour , s’y couchait la tête ap¬ puyée sur un oreiller, et se couvrait d’une couverture. Quand elle avait mal à la tête, elle se serrait d'un mouchoir, et c’était un plaisir de la voir ainsi coiffée dans son lit. Je pourrais en raconter diverses petites cho¬ ses qui paraissent extrêmement singulières, mais j’avoue que je ne pouvais pas admirer cela autant que la multitude, parce que je savais qu’on devait conduire cet animal en Europe, pour le montrer par curiosité , et je supposais qu’on l’avait dressé en consé¬ quence. » Il y a, dans cette citation et la précé¬ dente , une chose qui me paraît plus que douteuse ; c’est le fait de la pudeur, fait qui a été également avancé par Bontius , médecin à Batavia. Les voyageurs qui ont vu les femmes de la Nouvelle-Zélande , de quelques îles de la mer du Sud, etc. , se montrer sans voile et sans pudeur aux étran¬ gers, auront de la peine à croire que cette vertu puisse exister naturellement dans un animal, quand elle manque à des nations en¬ tières. A cet âge adulte , cet animal aurait, selon Lesson , l’occiput aplati au lieu d’être bom¬ bé, et les crêtes occipitales et frontales se¬ raient très saillantes. C’est ce qu’on ne voit pas sur une excellente figure d’adulte que l’on trouve dans les Mémoires pour servir 152 ORA OR A à l'histoire naturelle des possessions Néerlan¬ daises dans l'Inde , lre livraison. 1839. A cet âge, toujours selon le même, il habite¬ rait le continent indien, comme s’il était possible que cet animal s’exilât de contrées en contrées selon ses différents âges! Son pelage serait alors d’un roux plus ou moins foncé, avec les poils des avant-bras , des jambes et de la tête plus roux que les autres. Prenons maintenant l’Orang-Houtan dans ce que Lesson appelle son âge mûr. Il aura alors 6 pieds 3 pouces de grandeur, et ce sera le Pongo Abelii du Manuel de M. Lesson lui même, le Simia satyrus de Clark Abel , et le Simia Abelii de Fischer. Sa tête sera recouverte d’une épaisse crinière de poils lisses et d’un noir plombé. Il aura la face nue , des moustaches touffues sur la lèvre supérieure; une barbe couleur marron , longue, épaisse, au menton; le nez très aplati et le museau très proéminent ; le pe¬ lage entièrement roux ou rouge-brunâtre, passant au rouge vif ou au brun noir en certains endroits; la paume des mains et la plante des pieds nues et noirâtres. Sa peau sera encore d’un gris bleuâtre, comme dans les précédents. Il habitera alors la côte nord-ouest de Sumatra. Or , voici tout ce que l’on sait de cet ani¬ mal , que je crois , à l’exemple de M. Les¬ son , être l’Orang roux. Je l’extrairai de the Asialic researches , t. XV : « Deux offi¬ ciers anglais , du brick Mary - A nn a- Sophia , MM.FishetGraigman, qui étaient en relâche à Ramboun , sur la côte nord-ouest de Su¬ matra , furent avertis qu’un animal de la plus haute taille se trouvait perché sur un arbre du voisinage. Ils formèrent sur-le- champ le projet de s’en emparer mort ou vif. Plusieurs chasseurs du pays se joigni¬ rent à eux. En les voyant approcher, l’ani¬ mal , qu’ils reconnurent pour un Orang- Houtan de la plus grande espèce, descendit de l’arbre et se mit à fuir sur deux pieds , avec assez de vitesse , et s’aidant quelque¬ fois de ses mains ou d’une branche d’arbre. Dès qu’il eut atteint d’autres arbres, on reconnut combien il était habile à grimper. Malgré sa taille élevée et son poids , il sai¬ sissait de faibles branches et s’en servait pour s’élancer sur d’autres, comme aurait pu faire un Singe de la petite espèce. Les habitants de Sumatra assurent que dans les vastes forêts de l’intérieur de l’île , où les grands arbres sont très rapprochés , ces animaux s’élancent de l’un à l’autre avec autant de vitesse qu’un Cheval peut en mettre à la course. Le bosquet dans lequel l’Orang-Houtan poursuivi se réfugia était assez petit; mais les mouvements de 1 ani¬ mal étaient si vifs et si prompts, que les chasseurs restèrent longtemps sans pouvoir l’ajuster, et le manquèrent à diverses re¬ prises. Ils prirent alors le parti de couper plusieurs arbres, afin de ne lui permettre d’autre refuge que ceux qu’ils laissèrent debout. On l’atteignit enfin , et une grêle de balles lui traversa le corps. II se cou¬ cha sur une branche qu’il tenait fortement embrassée , et rendit par la bouche une quantité prodigieuse de sang ; ses viscères sortaient par les blessures qu’on lui avait faites au ventre, et offraient un spectacle horrible. Les chasseurs ayant épuisé toutes leurs munitions, résolurent, pour achever leur capture, d’abattre l’arbre sur lequel le malheureux Orang-Houtan s’était cram¬ ponné ; mais, dès que cet arbre loucha la terre , le blessé s’élança sur un autre arbre avec autant d’agilité que s'il n’eût rien perdu de ses forces. On renouvela le procédé dont on venait de se servir; on reprit la hache et l’on abattit l’un après l’autre pres¬ que tous les arbres du bosquet. Réduit enfin à se défendre par terre, l’animal abattu montra encore un courage digne d’un meil¬ leur sort. Accablé par le nombre , percé d’outre en outre à grands coups de lances , on le vit s’emparer d’une de ces armes , et , selon l’expression des témoins du combat , la briser aussi facilement que si c’eût été une carotte. Pendant son agonie, on fut forcé de reconnaître dans cet animal une grande similitude avec l’homme, en étudiant l’ex¬ pression de son regard mourant et de ses gestes, les intonations plaintives de sa voix, et surtout son intelligence et son cou¬ rage. Malgré ses douleurs atroces , il n’était point abattu et s’efforçait à prolonger sa vie en contenant avec ses mains les parties blessées. Mais rien ne put arrêter ses impi¬ toyables meurtriers , jusqu’à ce que la vic¬ time eût rendu le dernier soupir. » On fut alors étonné de la taille et des proportions du vaincu. Cet Orang-Houtan avait environ 6 pieds 6 pouces (anglais) de ORA ORA hauteur, le corps bien proportionné, la poitrine large , la tête d’une grandeur moyenne, les yeux un peu plus petits que les nôtres. Le nez paraissait plus saillant que dans les autres Singes; la bouche était très fendue; une barbe couleur de noisette , et de 3 pouces de longueur, couvrait les lè¬ vres et les joues. Elle semblait plutôt un ornement qu’un disgracieux appendice au visage; les bras étaient bien plus longs que les membres postérieurs. La beauté des dents, dont aucune ne manquait, indiquait que l’animal était encore jeune. Le poil qui recouvrait tout le corps était doux, poli, luisant. Ce qui surprenait le plus les assis¬ tants était la ténacité avec laquelle sa vie avait résisté aux coups nombreux qu’il avait reçus. Sa force musculaire devait avoir été bien grande, car l’irritabilité de la fibre se manifesta encore lorsque le cadavre eut été transporté à bord et hissé pour être écorché. Dans cette opération , faite longtemps après sa mort, l’action du couteau détermina un mouvement effroyable de contraction sur les parties charnues. Cette espèce de vie gal¬ vanique inspira un tel sentiment d’horreur, que, lorsqu’on parvint a-ux régions dorsales, le capitaine du navire ordonna de suspendre la dissection jusqu’à ce que la tête eût été détachée. » Cet Orang avait dû voyager durant plu¬ sieurs jours avant d’arriver au lieu où on le surprit, car il avait de la boue jusqu’aux genoux (ce qui prouve qu’il avait voyagé à pied, au moins en partie). Sans doute il s’é¬ tait égaré en sortant des forêts impénétra¬ bles de cette partie de l’île, dans lesquelles nul habitant n’aurait osé s’aventurer. Les gens du pays , accourus à cette chasse, at¬ tribuèrent alors à l’Orang les cris singuliers qu’ils entendaient depuis quelques jours, et qui n’appartenaient a aucun des animaux féroces de la contrée. La hauteur de son corps était de 6 pieds 6 pouces. Desséchée, sa peau avait encore 5 pieds 4 pouces de hauteur, de l’épaule a la cheville du pied; le cou avait 3 pouces, et la face 8 ; la figure était complètement nue, si ce n’est au men¬ ton et au bas des joues, où commençait la barbe; les cheveux, d’un noir plombé, tom¬ baient sur les côtés et sur les tempes; les paupières étaient garnies de cils; ses lèvres paraissaient minces; les oreilles, appliquées 153 contre la tête, avaient un pouce et demi de haut en bas; ses bras étaient très longs. >> Il paraît certain, d’après ce qu’on vient de lire , que le Pongo Abelii n’est rien autre chose qu’un Orang- Houtan , mais qui, à l’âge mûr, pour me servir de l’expression de M. Lesson, n’avait ni le nez très aplati, ni le museau très proéminent, ni crinière épaisse, mais une chevelure, car il n’est pas dit que cette chevelure existât sur le cou et les épaules. Selon l’auteur que je viens de citer, le Simia morio d’Owen ( Proced . 1836, p. 91) ne serait qu’une variété adulte de l’Orang roux, tandis que d’autres auteurs le regar¬ dent comme une variété de l’Orang de Vurmbs. Owen, qui certainement est un excellent anatomiste , a soutenu son opinion dans l 'Écho (mars 1839), dans les Ann. des sc. nat. (t. XI, 1839), et dans un Mé¬ moire envoyé à l’Institut (séance du 18 fé¬ vrier 1839), que son Simia morio diffère spécifiquement de l’Orang roux et de l’O- rang de Wurmbs par plusieurs caractères spécifiques très tranchés, et particulière¬ ment par son système dentaire. En effet, son Morio , au lieu de n’avoir que seize molaires, comme l’avait avancé M. Du- mortier, en avait vingt, dont douze vraies, et huit bicuspides ou fausses molaires ca¬ chées dans l’épaisseur des mâchoires; en outre, les canines sont plus petites que les incisives. II cite encore la présence ou la persistance des sutures maxillo-intermaxil- laires, comme de bons caractères pour le distinguer. Jusqu’à des preuves contraires mieux établies, je crois, comme Owen , que son Morio doit être considéré comme une espèce distincte. Il nous reste maintenant le Pongo de G. Cuv., grand Orang -Houtan deWurmbs, Pongo Wurmbii E. Geoff. Desm., Blainv., Fr. Cuv., etc. Simia Wurmbii Owen , Kuhl, Fischer; animal dont Lesson, dans sa Mas- tologie , fait l’état de vieillesse de l’Orang roux. Or, nous avons vu que ce dernier auteur donne 6 pieds 5 pouces à son Orang de l’âge mûr, et le fait habiter la côte N. -O. de Su¬ matra. Pour l’amener à l’état de vieillesse, il le fait se raccourcir de 1 7 pouces, car il ne lui donne plus que 5 pieds , et il le fait se transporter de Sumatra à Bornéo. Tout cela 20 T. IX. OR A ORA 1 f)4 n’a pas besoin de réfutation , mais d’autres naturalistes ont traité la chose plus sérieu¬ sement. Buffon , qui n’avait aucune con¬ naissance de cet animal, a donné le nom de Pongo à un être imaginaire qu’il croyait voisin du Chimpanzé. Le savant G. Cuvier, qui probablement ne l’avait connu que par le Mémoire de Wurrnbs, le retira de la fa¬ mille des Orangs, pour le classer, ainsi que je l’ai dit, entre les Mandrilles et les Sapa¬ jous, place qui certainement ne lui convient pas. Desmarest, à son exemple, et plusieurs naturalistes anglais, en ont fait un genre bien tranché; et voilà qu’aujourd’hui on ne veut pas l’accepter comme espèce. « Les Pongos, dit G. Cuvier, ont les longs bras et l’absence de queue des Orangs-Hou- tans , avec les abajoues des Guenons et des Babouins, et une forme de tête toute 'par¬ ticulière; le front en est très reculé, le crâne petit et comprimé; la face de forme pyramidale, à cause des branches montantes de la mâchoire inférieure, etc. On n’en con¬ naît encore qu’une espèce, qui est le plus grand de tous les Singes, et un des animaux les plus redoutables. Son squelette est repré¬ senté dans Audebert, pl. II, f. S. » Comme on le voit, ceci ne peut guère s’appliquer aux Orangs dont nous avons parlé jusqu’à présent. Si le Pongo est un Orang-Houtan , son histoire offre une singularité unique parmi les animaux, et la voici : dans tous les êtres doués d’instinct ou d’intelligence, cette in¬ telligence est comparativement très faible dans le premier âge; elle se développe pro¬ gressivement, et n’atteint guère à toute son énergie que vers la fin du premier tiers de la vie. Elle se soutient ensuite jusqu’à la décrépitude, et même, dans les animaux sauvages , jusqu’à la mort. Dans l’Orang- Houtan, ce serait positivement le contraire, en supposant qu’il devînt un Pongo dans sa vieillesse. Dans son enfance, il a le front grand, saillant, proéminent, et la tête ar¬ rondie comme l’homme. Alors il est doux, posé, réfléchi, et il semble tout-à-fait in¬ capable de la pétulance et de la férocité de beaucoup de Singes ; il affectionne les personnes qui le caressent et le nourrissent, et, comme le Chien, il est susceptible de recevoir une certaine éducation. Devenu vieux, c’est-à-dire quand il prend le nom de Pongo, il s’opère chez lui une métamor¬ phose étrange et sans autre exemple connu : son angle facial, qui était ouvert à 65 degrés, s’allonge, se ferme, et se trouve réduit à 50 ; son front se rejette en arrière comme celui des idiots nommés crétins; sa tête s’allonge vers son sommet et se rétrécit considérable¬ ment. Son museau s’avance; sa face s’élar¬ git prodigieusement par l’effet de deux gros¬ ses protubérances qui se développent entre les yeux et les oreilles, depuis la base des mâchoires; son nez s’affaisse et disparaît; ses lèvres, de minces qu’elles étaient, de¬ viennent épaisses et grosses; une loupe dif¬ forme et adipeuse s’élève depuis la tempe jusqu’à l’origine de la mâchoire inférieure, sur chaque joue, devant les oreilles; la cou¬ leur de la peau et du poil passe au noir et au brun noirâtre; et, ce qu’il y a de plus merveilleux , sa taille , qui était de 6 pieds 6 pouces, se réduit à 4 pieds, car telle est la hauteur du squelette d’ Aude¬ bert. II se creuse des abajoues dans sa bou¬ che ; ses dents canines, au lieu de se rac¬ courcir par l’usure, grossissent, s’allongent, sortent de sa bouche dans des proportions menaçantes. Des sortes de poches se forment sur sa poitrine; enfin, c’est une métamor¬ phose aussi complète qu’extraordinaire. L’intelligence éprouve la même révolution. Les voyageurs épouvantés qui le retrouvent dans les bois sous les noms de Sin-Sin, Féfé, Kukurlago, Goloklc , tremblent à son ap¬ proche , car ce n’est plus cet animal rempli de douceur et d’affection , mais un être fa¬ rouche, indomptable, plein de courage et de férocité, sans cesse occupé à donner la chasse aux êtres plus faibles que lui, se nourris¬ sant non seulement de fruits, mais de la chair des animaux qu’il surprend la nuit dans leur retraite ; c’est ce terrible homme nocturne qui poursuit les femmes, attaque les voyageurs, les assomme à coups de pierre ou de bâton, et les dévore ; qui, enfin, porte l’épouvante et la mort partout avec lui. Sans doute, dans ce portrait que nous en font les voyageurs, il y a beaucoup d’exagé¬ ration ; mais en adoucissant beaucoup cette peinture de mœurs sauvages, il restera tou¬ jours, dans le Pongo de Wurrnbs, un animal féroce, courageux et indomptable. Pour en donner une idée plus précise, nous extrai¬ rons quelques passages du Mémoire de ORA OKA Wurmbs (Trans. Soc. clc Balav ., tom. II, P- 245). Le résidant hollandais à Rarnbang , ayant été envoyé en mission à Saccadona, dans l’île de Bornéo, parvint à se procurer l’animal dont il est question , lequel se dé¬ fendit vigoureusement avec de grosses bran¬ ches d’arbre qu’il arrachait, de sorte qu’on ne put parvenir à le saisir vivant. Sa tête était un peu pointue vers le haut de l’occi¬ put; le museau était assez proéminent, et les deux joues munies d’une large excrois¬ sance charnue. Les yeux, petits, saillaient hors de la tête; le nez, qui n’offrait point d’élévation, consistait en deux narines pla¬ cées obliquement à côté l’une de l’autre. La bouche était garnie de grosses lèvres et d’a¬ bajoues; la langue était épaisse et large; la face d’un noir fauve, sans poils, excepté à la barbe, qui en présentait fort peu; le cou fort court; la poitrine beaucoup plus large que les hanches. Les jambes, courtes et grêles, étaient fortement musclées. La poi¬ trine et le ventre demeuraient sans poils ; mais sur les autres parties du corps où l’a¬ nimal en était couvert, ce poil, qui n’avait au plus qu’un doigt de long, était brun. Il avait des poches particulières sur la poi¬ trine. En 1818, Cuvier ayant reçu une tête os¬ seuse de l’Inde, qui, dans la généralité de ses formes, ressemble à celle de l’Orang roux, mais où le museau est plus allongé, et dans laquelle on voit des crêtes sourci¬ lières, supposa que cette tête prouvait l’iden¬ tité de l’Orang roux et du Pongo de Wurmbs, mais que celui-ci était le vieil âge du pre¬ mier. Comme on le voit, quelques rapports dans les os du crâne lui firent négliger d’au¬ tres caractères bien plus essentiels, en dépit de la description de Wurmbs, et il est re¬ marquable qu’il ne connaissait l’animal que par cette description ! Je pense que, s’il eût connu le Pongo Abelii, ce grand naturaliste eût changé de manière de voir. En dernière analyse, et pour les raisons que je n’ai pu qu’esquisser dans cet article, je pense que cet animal doit être considéré comme espèce distincte, au moins tant qu’on n’aura pas la certitude qu’il manque d’aba¬ joues , et même quand il en manquerait, son identité serait encore discutable. Je ne doute pas non plus que l’animal empaillé 1b b oo du Muséum , portant l’étiquette de vieil Orang-Outang , ne soit le Pongo de Wurmbs. i Nous terminerons par la citation de ce que le docteur Abel Clarck raconte d’un Orang mâle, qui fut transporté, en 1826, de Java à Londres : « Lorsqu’il fut à bord , dit le docteur, on chercha à s’assurer de lui par une chaîne fixée à un câble; mais il réussit bientôt à détacher la chaîne, et il s’en fut sur le pont la traînant après lui. Comme elle le gênait dans sa marche, il la roula deux fois autour de son corps , et en laissa pendre l’extrémité sur son épaule. Quand ensuite il s’aperçut qu’elle n’y te¬ nait pas, il la plaça dans sa bouche. On le laissa enfin circuler librement dans le na¬ vire, et il devint familier avec les matelots, qu’il surpassait en agilité. Ils faisaient la chasse après lui dans les cordages, et lui donnaient , dans leurs jeux, des occasions multipliées de déployer son adresse. Tant que nous restâmes à Java, il logeait dans un grand tamarin, près de mon habitation. Le soir, il préparait son lit en entrelaçant de petites branches de l’arbre, et en les re¬ couvrant de feuilles. Pendant le jour, il restait couché sur la poitrine, la tête avan¬ cée hors de son lit, pour observer ce qui se passait au dehors. Quand il apercevait quel¬ qu’un avec des fruits, il descendait pour en obtenir une portion. Cet animal était en général fort doux; mais cependant, quand on l’irritait, sa colère n’avait plus de bor¬ nes : il ouvrait sa bouche, montrait ses dents, et mordait ceux qui l’approchaient; deux ou trois fois on eût pu croire que, dans sa rage, il allait se suicider. Lorsqu’on lui refusait quelque nourriture qu’il dési¬ rait ardemment, il poussait des cris aigus, s’élançait avec fureur dans les cordages, puis revenait et tâchait encore de l’obtenir; si on lui refusait de nouveau , il se roulait sur le pont, comme un enfant en colère, en remplissant l’air de ses cris, puis se relevait tout-à-coup et disparaissait de l’autre côté du navire. La première fois que cela arriva, nous crûmes d’abord qu’il s’était jeté à la mer; après beaucoup de recherches, on le trouva caché sous des cordages. » Il ne faisait point de grimaces comme les autres Singes, et n’était point disposé, comme eux , à faire perpétuellement de mauvais tours. Il était habituellement doux, OR A O RA 1 56 grave, et même mélancolique. Lorsqu’il se trouvait pour la première fois en présence d’étrangers, il promenait autour de lui des regards inquiets, et pouvait rester des heu¬ res entières la tête cachée dans ses pattes. S’il était trop incommodé par leur examen, il allait se blottir sous le premier abri qui était à sa portée. Il faisait voir sa douceur par la patience habituelle avec laquelle il supportait les injures; il fallait qu’elles fus¬ sent bien violentes pour qu’il les ressentît. Cependant il avait toujours le soin d’éviter ceux qui le tourmentaient: Il montrait, au contraire, beaucoup d’attachement pour les personnes dont il était bien traité ; il allait s’asseoir près d’elles, s’en approchait le plus possible, et ce pauvre animal, dans sa ten¬ dresse , portait même souvent leur main à sa bouche. Le contre maître , qui était son favori, attendu qu’il lui laissait prendre la moitié de sa portion , lui apprit à manger avec une cuiller. C’était un spectacle cu¬ rieux que de le voir prendre le café avec une gravité grotesque. Ma qualité d’histo¬ rien m’oblige cependant à dire, à la charge de mon héros, que, malgré sa reconnais¬ sance pour les bienfaits du contre-maître, il lui dérobait souvent son eau-de vie. Après le contre maître , j’étais peut-être son ami le plus intime; il me suivait sur les points écartés du navire où je me rendais afin de lire tranquillement, loin du bruit de l’équi¬ page. Après s’être bien assuré que mes po¬ ches ne contenaient rien qu’il pût manger, il s’étendait à mes pieds, fermait les yeux, puis les ouvrait de temps à autre pour obser¬ ver mes mouvements. Son plus grand plaisir était de se suspendre aux cordages par les bras, s’aidantpour grimper de ses pattes et de ses dents. Il dormait ordinairement sur une voile du grand mât, dont il ramenait une partie sur lui pour lui servir de couverture. Lorsqu’il disposait son lit, il prenait le plus grand soin d’écarter tout ce qui pouvait en rendre la surface inégale. Quelquefois, pour le contrarier, j’en prenais possession avant lui ; il secouait alors la voile avec vio¬ lence pour m’en faire sortir; mais quand elle était assez large pour nous contenir tous les deux, il se résignait et venait se coucher tranquillement à côté de moi. Si toutes les voiles étaient déployées, il allait à la recherche d’une autre couverture, déro¬ bait les chemises que les matelots faisaient sécher, et se permettait même souvent d’en¬ lever les draps des hamacs. » Cet animal arriva malade à Londres, et y mourut au bout de dix-neuf mois. (Boitard.) ORANGE, rot. ph. — Fruit de l’Oranger. Voy. ce mot. ORANGE DE MER. polyp. — Nom vul¬ gaire des Eponges du g. Telhium. Voy. ce mot. ORANGER. Citrus. bot. ph. — Genre de plantes de la famille des Aurantiacées , rangé par Linné dans la polyadelphie ico- sandrie de son système. Son nom français d’Oranger présente dans la pratique des in¬ convénients, à cause des équivoques et des confusions qu’il fait naître; on l’emploie en effet également , soit pour le genre tout en¬ tier, soit , et plus communément , pour une de ses espèces. Dès lors , il aurait été peut- être avantageux d’adopter le nom d' Agru¬ mes , que proposait Gallesio pour le genre entier, mot qui n’était, au reste, que l'imi¬ tation de celui d 'Agrumi , sous lequel les Italiens réunissent commodément toutes les espèces et variétés cultivées de ce genre. Les Citrus sont des arbres de taille médio¬ cre, ou des arbrisseaux, souvent armés d’é¬ pines axillaires, qui croissent spontanément dans l’Asie tropicale , d’où la culture les a répandus sur la plus grande partie de la surface du globe. Leurs feuilles persistantes, alternes , sont composées-unifoliolées, c’est- à-dire qu’elles représentent des feuilles pennées dans lesquelles toutes les folioles , moins l’impaire , auraient disparu par avor¬ tement; presque toujours cette composition réduite autant qu’elle puisse l’être, est in¬ diquée par l’articulation qui existe à l’ex¬ trémité du pétiole , sous la foliole terminale ; celle-ci présente dans son épaisseur des ré¬ servoirs vésiculaires d’huile essentielle qui se montrent comme des points transparents lorsqu’on la regarde contre le jour. Les fleurs blanches ou légèrement purpurines possèdent également dans l’épaisseur de leur tissu des réservoirs d’huile essentielle qui produisent sur elles l’effet de ponctua¬ tions, et à l’existence desquelles elles doi¬ vent leur odeur suave et pénétrante. Elles présentent les caractères suivants : Calice urcéolé , 3-5-fide; corolle à 5-8 pétales hy- pogynes; 20 60 étamines, à filets compri- ORA OR A 157 mes inférieurement, polyadelphes , à an¬ thères 2-loculaires ; ovaire à loges nom¬ breuses, renfermant chacune 4-8 ovules , fixés à l’angle central en deux séries ; style unique, cylindrique; stigmate renflé , hé¬ misphérique. Le fruit qui succède à ces fleurs a reçu des botanistes le nom d 'Hespé- ridie ( Hesperidium , Desv.) , et dans le lan¬ gage vulgaire ceux d’Orange, Citron, Cédrat, Limon, etc. Ses loges , creuses dans l’ovaire , et ne renfermant d’abord dans leur cavité que les ovules, se remplissent peu à peu , après la fécondation , de sortes de poils à grandes cellules allongées et pleines de pul¬ pes qui, de la paroi externe, s’étendent gra¬ duellement et se multiplient jusqu’à remplir tout le vide qui existait précédemment, et à envelopper les graines. Un endocarpe membraneux entoure ces loges, qui peuvent se séparer sans déchirement, formant ainsi ce qu’on nomme vulgairement les tranches. Le reste du péricarpe forme ce qu’on nomme vulgairement l 'écorce ou le zeste , et se dis¬ tingue en deux couches; l’extérieure est orangée ou rougeâtre, creusée d’un grand nombre de réservoirs vésiculeux, remplis d’huile essentielle, ou de vésicules qui, d’après l’observation de M. Poiteau , font saillieà la surface des fruitsà jus doux, et for¬ ment, au contraire, une petite concavité dans ceux à jus acide ou amer. L’intérieure, très épaisse dans certaines espèces et variétés , est blanche , plus ou moins charnue ou spongieuse, comme feutrée intérieurement; elle renferme une substance particulière qu’on a nommée Hespéridine. Cette manière d’envisager le fruit des Citrus diffère entiè¬ rement de celle de De Candolle. Ce bota¬ niste admettait, en effet, qu’un « torus , qui est épais et glanduleux à l’extérieur, entoure complètement les carpelles jusques à l’origine du style, et adhère avec eux au moyen d’un tissu cellulaire très lâche. » ( Organog . végét. , t. II, p. 41.) Mais cette opinion est à peu près abandonnée aujour¬ d’hui. Les graines, dont plusieurs avortent d’ordinaire dans les individus cultivés , se distinguent par la multiplicité de leurs em¬ bryons, parmi lesquels il en est en général un dont le volume dépasse celui des autres. Les espèces de Citrus décrites jusqu’à ce jour sont, d’après la 2e édition du Nomen- clator, de Sleudel , au nombre de 25. Celles d’entre elles dont la culture a pris de vastes développements dans ces derniers siècles , ont donné une si grande quantité de variétés, que leur histoire en est deve¬ nue très difficile. Les botanistes et les hor¬ ticulteurs ne sont pas d’accord à cet égard , et nous voyons même les travaux successifs d’un même auteur présenter quelquefois , sous ce rapport, des divergences frappantes. Pour sortir de cet embarras, nous adopte¬ rons ici la classification spécifique exposée par Risso , dans son mémoire sur V Histoire naturelle des Orangers , Bigaradiers , etc. (Annal, du Mus., vol. XX), classification qui a été adoptée généralement par les bo¬ tanistes. Nous ferons connaître ensuite la division qui a été présentée par le même auteur dans l’ouvrage qu’il a fait en com¬ mun avec M. Poiteau. Pour plus de déve¬ loppements à cet égard , ainsi que pour l’histoire détaillée des Citrus, on pourra consulter les ouvrages suivants : Ferrari ; Hesperides , sive de malorum aureorum cul - turâ et usu, in-fol. ; Romæ, 1646. — Vol- camerius ; Hesperidum norimbergensium , sive de malorum citreorum , limonum , auranliorum culturâ et usu , libr. IV ; No- rimbergæ. — Gallesio ; Traité du Citrus , I , in-8. Paris, 1811. — Risso ; sur l 'Histoire naturelle des Orangers, Bigaradiers , Limet- tiers, Cédratiers, Limonniers ou Citronniers, cultivés dans le déparlement des Alpes mari¬ times ; Annal, du Mus. , vol. XX, p. 169- 212 et 401-431. — Risso et Poiteau; His¬ toire naturelle des Orangers, I, in-fol.; Paris , 1818, avec de belles planch. color. 1. Le Citronnier ou Cédratier, Citrus medica Risso. Pétioles nus ou non ailés ; feuilles oblongues, aiguës ; fleurs à 40 éta¬ mines environ, souvent agynes ou sans pistil; fruit oblong, à écorce épaisse, rugueuse, à pulpe acidulé. Originaire de l’Asie ; cultivé dans l’Europe méridionale. La tige du Citronnier est peu élevée; ses branches sont courtes et roides, colorées d’une légère teinte violette dans leur jeu ¬ nesse , de même que les feuilles ; plus tard, les unes et les autres deviennent d’un vert clair ; ses feuilles sont plus allongées que dans les espèces suivantes , à pétiole continu ou non articulé. Ses fleurs sont grandes , blanches en dedans, purpurines ou viola¬ cées en dehors , portées sur un pédoncule 1 58 GRA ORA court et épais; elles se succèdent pendant presque toute l’année*. Son fruit , vulgaire¬ ment nommé Citron ou Cédrat , se distingue par la grande épaisseur de son écorce pro¬ portionnellement au faible volume de sa portion pulpeuse , qui est fort peu succu¬ lente , moins acide et moins parfumée que celle des Limons : aussi ne fait on guère usage que de cette écorce , qu’on mange ou que l’on confît au sucre. 2. Le Limettier , Citrus Limetta Risso. Pétioles nus; feuilles ovales-arrondies , den¬ tées en scie ; fleurs à 30 étamines environ ; fruit globuleux couronné par un mamelon obtus , à écorce ferme , à pulpe douce. Ori¬ ginaire des Indes orientales , cultivé en Italie. Le Limettier forme un arbre plus haut que le précédent ; il ressemble beaucoup au Li- monnier; ses fleurs sont blanches, tant en dehors qu’en dedans. Son fruit porte les noms vulgaires de Lime douce , Limetta , Bergamotla , Perelta. 3. Le Limonnier, Citrus Limonum Risso. Pétioles légèrement ailés ; feuilles oblongues, aiguës, dentées ; fleurs à 33 étamines, sou¬ vent agynes ; fruit oblong, à écorce mince , à pulpe très acide. Originaire d’Asie. Le Limonnier forme un arbre assez haut; ses branches, longues et flexibles, sont très anguleuses , violacées dans leur jeunesse , ainsi que les feuilles ; son port est très ir¬ régulier. Ses feuilles adultes sont grandes, larges, dentelées sur les bords et d’un vert clair, à pétiole articulé. Ses fleurs , plus grandes que celles de l’Oranger, mais plus petites que celles du Citronnier , sont blan¬ ches en dedans, violacées en dehors. Son fruit , ou le Limon , est ovoïde ou oblong , terminé par un mamelon obtus plus ou moins volumineux ; son écorce est d’un jaune pâle, mince et lisse ; ses loges sont grandes , à pulpe acide par l’effet de la présence d’une forte proportion d’acide citrique. Son suc est employé pour la préparation des limo¬ nades et autres boissons rafraîchissantes. 4. L’Oranger, Citrus Aurantium Risso. Pétioles presque nus ; feuilles ovales-oblon- gues, aiguës; fleurs à 20 étamines; fruit globuleux, à écorce mince, à pulpe douce. Originaire de l’Asie orientale. L’Oranger forme un arbre élégant, à cime arrondie, plus haut et plus vigoureux que les précédents et le suivant; ses rameaux jeunes sont anguleux, mais non violacés ; ses feuilles, d’un vert foncé, sont oblongues, aiguës , dentelées sur le bord , à pétiole lé¬ gèrement ailé, articulé. Sa fleur blanche, tant en dehors qu’en dedans , est constam¬ ment hermaphrodite, portée sur un pédon¬ cule allongé. Sa floraison a lieu au prin¬ temps ; elle est ou totale et dans ce cas bisannuelle , ou partielle et alors annuelle. Son fruit , ou l 'Orange , est globuleux ou un peu déprimé, d’un beau jaune doré , à écorce d’épaisseur variable, dans laquelle la couche blanche intérieure n’est pas char¬ nue comme dans le Citron, mais en quelque sorte cotonneuse et presque dépourvue de saveur. Ses loges sont grandes, à pulpe douce , très agréable. Ce fruit est l’un des plus estimés dans nos contrées. 3. Le Bigaradier, Citrus vulgaris Risso. Pétioles largement ailés ; feuilles elliptiques, aiguës , légèrement crénelées ; fleurs à 20 étamines ; fruit globuleux à écorce mince , raboteuse , à pulpe âcre et amère. Origi¬ naire de l’Asie. Le Bigaradier est un bel arbre à cime touffue et régulière, moins haut que l’Oran¬ ger. Ses rameaux, anguleux et blanchâtres dans leur jeunesse , deviennent plus tard minces et pendants. Ses feuilles se distin¬ guent surtout par leur pétiole articulé , bordé d’une large membrane en cœur. Sa fleur, blanche tant en dehors qu’en dedans, est plus parfumée que celle des précédentes; aussi est-elle préférée pour la préparation des eaux distillées et des essences. Sa flo¬ raison est analogue à celle de l’Oranger. Son fruit , ou la Bigarade , vulgairement nommé Orange amère, est d’un jaune rouge, d’une odeur pénétrante , à pulpe amère ; on en confectionne de très bonnes confitures, et son jus sert à assaisonner les aliments. Aux cinq espèces que nous venons de dé¬ crire se rattachent les nombreuses variétés de Citrus que l’on possède aujourd’hui , et dont on devra chercher l’énumération dans les ouvrages spéciaux que nous avons cités. Mais lorsqu’on examine avec soin ces cinq es¬ pèces elles-mêmes, on reconnaît qu’elles sont en quelque sorte organisées selon deux types distincts ; aussi Linné n’en faisait-il quedeux espèces, dont l’une, le Citrus medica, corres¬ pondait au Citronnier, au Limettier et au ORA ORA 159 Limonnier, dont l’autre, le Citrus auran- tium, comprenait l’Oranger et le Bigara¬ dier. D’un autre côté, MM. Risso et Poi- teau, dans leur grand ouvrage sur l’histoire naturelle des Orangers, ont rattaché toutes les variétés cultivées de ces arbres à huit groupes différents, sur la valeur desquels ils ne s’expliquent pas, de telle sorte qu’il est difficile de savoir s’ils constituent à leurs yeux autant d’espèces distinctes. Ces grou¬ pes sont ceux des Orangers, des Bigaradiers, des Bergamottiers, des Limettiers, des Pam- pelmousses, des Lumies, des Limonniers, des Cédratiers ou Citronniers. Nous nous bornerons à ajouter à notre description des cinq espèces admises d’abord par Risso, que les Bergamottiers, associés aux Limonniers par Gallesio, forment un petit groupe carac¬ térisé par de petites fleurs blanches, à odeur suave, par un fruit pyriforme ou déprimé, d’un jaune pâle, à vésicules concaves, à pulpe légèrement acide, d’un arôme agréa¬ ble; que les Lumies ont la tige, les rameanx et les feuilles des Limonniers; mais que leurs fleurs sont purpurines à l’extérieur; que leur fruit ressemble au Limon pour les proportions relatives de l’écorce et de la chair, mais que sa pulpe est douce et plus ou moins sucrée; enfin que les Pampel- mousses ont des fleurs très grandes, un fruit très gros, arrondi ou pyriforme, jaune pâle, à écorce lisse , à pulpe verdâtre, peu abondante et médiocrement savoureuse. L’histoire de l’introduction des Citrus dans les cultures européennes a donné lieu à des recherches multipliées , et desquelles est ré¬ sultée la preuve que leurs diverses espèces ont été importées à des époques très différentes. Le Citronnier a certainement paru le pre¬ mier. De la Médie, où il croît spontané¬ ment, il a dû se répandre dans plusieurs provinces de la Perse, où les Hébreux et les Grecs ont pu facilement le voir et le con¬ naître. Néanmoins, il est impossible de pré¬ ciser l’époque à laquelle ces peuples com¬ mencèrent à le cultiver, ni celle où ils le portèrent en Europe. Théophraste l’a dé¬ crit, il est vrai, en termes précis; mais sa description elle- même, écrite après les guer¬ res d’Alexandre, prouve que les notions qu’il possédait à ce sujet lui étaient venues de l’Asie. Parmi les Latins, Virgile est le premier qui ait parlé du Citronnier , mais seulement comme d’un arbre propre à la Médie, où ses fruits servent de contre-poison ( Géorg ., liv. 2, vers 126 et suiv.). Après lui , Pline commence à désigner cet arbre sous le nom de Citrus, et dans quelques passages il nous apprend que son fruit était apporté de Perse à Rome, où on l’em¬ ployait comme médicament, surtout à titre de contre-poison. Ce n’est guère quedeuxsiè- cles plus tard, du temps de Plutarque, qu’on commença de s’en servir à Rome en qualité d’aliment; mais, même à cette. époque , le Citronnier n’était pas encore cultivé en Ita¬ lie, bien que, dès le temps de Pline, on eût fait des essais , à la vérité infructueux, pour y en transporter quelques pieds. La plupart des auteurs attribuent à Palladius l’introduction du Citronnier en Italie; mais cet agronome dit lui-même que, de son temps, cet arbre était déjà acclimaté en Sicile et à Naples , où il portait, toute l’année, des fleurs et des fruits; sa culture y était même déjà tellement perfectionnée , qu’on doit sûrement la faire remonter à un siècle au moins avant cet auteur. Or, les Bénédictins de Saint-Maur admettent que Palladius vi¬ vait au ve siècle; et dès lors l’introduction du Citronnier en Italie remonterait au me ou ive siècle. C’est seulement plus tard, et vers le xe siècle, que sa culture paraît s’être étendue à la Ligurie; c’est encore plus tard qu’elle est arrivée à Menton et à Hyères; enfin, il faut descendre jusqu’au xve siècle pour la voir parvenir jusque dans les contrées froides de l’Europe. L’introduction en Europe de l’Oranger et du Citronnier a eu lieu bien postérieure¬ ment à celle du Citronnier. L’Oranger, ori¬ ginaire, à ce qu’il paraît, de l’Inde au-delà du Gange, est probablement arrivé dans l’Arabie vers la fin du ixe siècle ou au com¬ mencement du xe. De cette contrée, il a passé dans la Palestine, l’Égypte et la côte septentrionale de l’Afrique. Il paraît qu’il avait été introduit en Sicile dès la fin du xe siècle ou au commencement du xie. Enfin ce fut à l’époque des croisades, et dans le xme siècle, qu’il fut porté sur le continent de l’Italie et que sa culture s’étendit , avec celle du Limonnier, jusqu’à Salerne, Saint- Rême et Hyères. D’un autre côté, des pas¬ sages de divers auteurs arabes autorisent à penser que déjà , à cette époque, la culture 160 ORA URA de ces deux arbres avait été introduite en Espagne par les Arabes , et qu’elle y avait même acquis beaucoup de développement. C’est à une époque assez récente que l’O¬ ranger a commencé de s’éloigner de la Mé¬ diterranée et de se répandre en France et dans les autres parties du centre et du nord de l’Europe. Ainsi, c’est en 1336 que le dauphin Humbert, à son retour d’un voyage qu’il fit à Naples , fit acheter, à Nice, vingt pieds d’Orangers pour les planter en Dau¬ phiné. Dans le nord de la France, il n’exis¬ tait encore, au commencement du xvic siè¬ cle, qu’un seul pied d’Oranger. C’était celui qui existe encore à l’Orangerie de Versailles, et qui est connu sous les noms de Fran¬ çois /er, grand Bourbon , grand connétable. Il fut pris, déjà gros, en 1523, à la saisie des biens du connétable de Bourbon. Il avait été semé à Pampelune en 1421 ; de là il avait été transporté successivement à Chan¬ tilly et à Fontainebleau. Dans nos climats septentrionaux, on cul¬ tive les diverses espèces de Cilrus dans une terre composée qu’on désigne sous le nom de terre à Oranger. La nature et les propor¬ tions des matières qui entrent dans la compo¬ sition de cette terre varient assez ; mais, dans tous les cas, ses qualités doivent consister à être très nutritive, légère, facilement per¬ méable aux racines, à se laisser aisément traverser par l’eau sans la retenir; de plus, les matières qui la composent doivent être entièrement réduites à l’état de terreau et intimement mélangées. Aussi ce n’est qu’a- près être restée en tas pendant trois ou quatre ans et avoir été passée chaque année à la claie , qu’elle est propre à être em¬ ployée. On prend ordinairement pour type la terre de l’Orangerie de Versailles, dans laquelle entre pour base un mélange, pat- portions égales, de terre franche et de ter¬ reau découché, auquel on ajoute intimement de la terre de gazon et divers excréments animaux. Les Citrus se cultivent principa¬ lement en caisses; ils y prospèrent même beaucoup plus que dans des pots de terre, qui , d’ailleurs, seraient difficilement assez grands pour les contenir lorsqu’ils ont ac¬ quis de fortes dimensions. Dans ce dernier cas, la mobilité des panneaux des caisses est très commode et permet diverses opéra¬ tions , qui seraient souvent très difficiles avec des vases de terre. Pour ces divers mo¬ tifs, on met ces végétaux en caisse de très bonne heure. La multiplication se fait prin¬ cipalement par les semis. Celle par bou¬ tures, quoique s’opérant sans difficulté, est peu avantageuse, surtout pour les Orangers et les Bigaradiers , qui , reproduits de la sorte, restent faibles et poussent fort peu pendant plusieurs années. Le marcottage présente encore plus d’inconvénients, aussi est-il abandonné. Quant aux semis , con¬ duits avec intelligence, ils ont beaucoup d’avantage. Au premier printemps ou vers la fin de l’hiver, on sème des graines de Limonniers, le développement de cette es¬ pèce étant plus rapide, dans des terrines un peu profondes, en les espaçant d’environ 3 ou 4 centimètres, ou une à une dans au¬ tant de petits pots; on les couvre légère¬ ment de terre. On enfonce ensuite les ter¬ rines ou les pots dans le terreau d’une cou¬ che chaude , et l’on couvre le tout de châssis vitrés. La germination a lieu du dixième au quinzième jour. On arrose fréquemment et on maintient les châssis fermés jusqu’au commencement de l’été; alors seulement on commence à les soulever pour donner de l’air. Par ce moyen , on a déjà , en octo¬ bre, des pieds de 3 ou 4 décimètres de hau¬ teur. En laissant ce jeune plant sous les châssis pendant les deux années suivantes, et lui donnant seulement de plus en plus d’air, on obtient, à la quatrième année, des pieds susceptibles d’être greffés. On emploie pour les Citrus deux modes de greffe : la greffe en écusson pour les sujets déjà forts, et la greffe à la Pontoise pour les petits pieds. Celle-ci consiste , comme on le sait, à fixer contre l’extrémité du sujet , coupé obliquement, l’extrémité inférieure d’un ra¬ meau de même diamètre , coupé également dans une direction oblique. Quant aux soins nombreux qu’exige la culture des Orangers, Citronniers, etc., ils constituent tout un art dont nous n’essaierons pas d’exposer les préceptes , et pour lequel nous renver¬ rons aux traités de culture. La culture des diverses espèces de Citrus est d’une grande importance à cause de la variété et de l’utilité de leurs produits. Dans les lieux où l’Oranger pousse en pleine terre, ses fruits se consomment en grande quan¬ tité sur place, et de plus, le commerce en ÜRA OR B 161 exporte des quantités considérables dans les climats moins favorisés. Les limons et les bigarades forment aussi l’objet d’un com¬ merce important. Ces fruits et ceux des au¬ tres espèces se confisent de diverses ma¬ nières, soit en entier, soit leur écorce seu¬ lement. Les feuilles, les fleurs et la couche extérieure du fruit de ces végétaux renfer¬ ment une huile essentielle très odorante qu'on en extrait par la distillation, et qui, suivant la manière dont la préparation a eu lieu et la partie sur laquelle on a opéré, sert à divers usages, et reçoit divers noms. Dans les fleurs, cette huile essentielle est appelée Néroli. La plus connue et la plus répandue de ces préparations aromatiques est l’eau distillée des fleurs , vulgairement désignée sous le nom d'Eau de fleurs d’O- ranger , bien qu’on la prépare principale¬ ment avec les fleurs du Bigaradier. On fait aussi grand usage dans la parfumerie de l’huile essentielle retirée de l’écorce de ci¬ tron et de celle de bergamotte. En méde¬ cine, on emploie fréquemment , soit ces huiles essentielles, soit les fleurs, les feuilles d’Oranger, et l’écorce ou zeste d’orange et de citron. Cette dernière partie agit à la manière des stimulants , à cause de son huile essentielle et de son amertume. Les feuilles agissent aussi comme stimulants et non comme toniques; elles ont, de plus, ainsi que les fleurs , une action très mar¬ quée sur le système nerveux , sur lequel elles agissent comme antispasmodique ; aussi les emploie-t-on tous les jours contre les affections nerveuses, en infusion ou en dé¬ coction. On a usé de la poudre des feuilles d’Oranger à haute dose contre l’épilepsie, et dans quelques cas, on en a obtenu des ré¬ sultats avantageux. Le bois de l’Oranger, du Citronnier, etc., est estimé en ébénis- terie. Il est de couleur jaune clair , d’un grain fin et serré, très liant, susceptible de recevoir un beau poli. On en fait des meubles de prix, des objets de tour et de tabletterie. Un usage spécial, pour lequel on le piéfèie à tout autre , est la fabrication des mètres pliants. Enfin on sait quel rôle jouent les divers Citrus pour la décoration des jardins et des parcs; cultivés ainsi pour ornement, ils sont d’autant plus précieux , qu’à la beauté de leur feuillage, à l’élégance de leur forme, au parfum de fleurs, ils joignent l’a- T. IX. vantage de fournir un revenu qui ne man¬ que pas d’importance. (P. D.) ORANGERS. bot. ph. — Nom donné au ¬ trefois à la famille actuellement connue sous celui d’Aurantiaçées. Voy. ce mot. *ORAMA. bot. ph. — Genre delà famille des Palmiers, tribu des Arécinées, établi par Blume ( Apud Zippelium et Mac Klock in Bijdr. tôt de nat. Wet., V, 142 ). Palmiers de Java et de la Nouvelle-Guinée. Voy. pal¬ miers. ORANOIR. ois. — Nom vulgaire d’une espèce de Gros-Bec. ORAWERT. ois. — Espèce de Stourne, Lamprotornis chrysogasler Licht. F. merle. ORBAÏNE. ois. — Nom vulgaire des La¬ gopèdes. ORBE, poiss. — Nom vulgaire des espèces du genre Diodon. Voy. ce mot. ORBEA, Harw. ( Synops. succul. ). bot. ph. — Voy. stapelia , Linn. ORBICULA. moll. — Voy. orbicule. ORBICULAIRES. OrUcularia , Latr. crust. — Syn. de Corystiens de M. Milne Edwards. Voy. ce mot. (H. L.) ORBICULE. Orbicula. moll. — Genre de Brachiopodes établi par Lamarck pour une coquille bivalve que O. -F. Müller avait nom¬ mée Patella anomala , dans l’opinion que c’était une coquille univalve , parce que la valve inférieure est si mince, si délicate, qu’il ne l’avait pas aperçue. Ce genre, adopté par tous les naturalistes comme faisant par¬ tie de la classe des Brachiopodes avec les Lingules et les Cranies , comprend aujour¬ d’hui quatre espèces vivantes et deux ou trois fossiles. Il n’a d’abord été connu que par la coquille qui est suborbiculaire , iné- quivalve , sans charnière apparente , ayant la valve inférieure très mince, aplatie, adhé¬ rente aux corps marins , et la valve supé¬ rieure légèrement conique. Mais tout récem¬ ment, en 1834, M. Owen a publié une ana¬ tomie presque complété de 10. Cumingii , qui habite les mers du Chili et du Pérou. Il résulte de ce travail que l’animal de l’Or- bicule a les deux lobes du manteau désunis dans toute leur circonférence, bordés de cils fins, inégaux, cornés; le corps est petit, ar¬ rondi , et présente à sa partie antérieure et médiane la bouche, qui est unesimple fente ; le pied passe au travers d’une fente de la valve inférieure pour s’attacher aux rochers. 21 162 OR B ORB Les deux bras ciliés caractéristiques de la classe des Brachiopodes sont assez grands, contournés en spirale , mais non saillants au dehors; l’appareil respiratoire est repré¬ senté par un réseau vasculaire occupant toute la surface du manteau qui revêt la valve su¬ périeure. La coquille est plutôt cornée que calcaire. L’espèce type , O. Norwegica , se trouve dans la mer du Nord : elle est large d’un centimètre environ. Une deuxième es¬ pèce des mêmes mers, O. lævis , est un peu plus grande. Avec i’O. Cumingii , on trouve aussi une quatrième espèce, O. lamellosa, dans les mers du Pérou. Une des espèces fos¬ siles, O. reflexa, appartient aux lias d’An¬ gleterre ; une autre, O. canceliala, vient des terrains anciens du Canada. (Duj.) ORBICULIAA. foramin. — Genre de Fo- raminifères ou Rhizopodes établi par La- marck, qui le plaçait parmi les Céphalopodes polythalames à coquille multiloculaire, dans sa famille des Cristacés. M. Aie. d’Orbigny a admis ce genre, et l’a placé, avec les Al- véolines et les Lituoles , dans la deuxième section de sa famille des Nautiloïdes faisant partie de l’ordre des Hélicostègues , c’est-à- dire ayant une coquille équilatérale formée de loges empilées suivant une spire enroulée sur le même plan, les loges étant d’ailleurs divisées intérieurement en compartiments réguliers, et présentant plusieurs ouvertures en lignes longitudinales à l’enroulement spi¬ ral. Férussac avait placé ce genre dans sa famille des Camérines avec les Nummulites ; M. de Blainville le plaça de la même ma¬ nière dans sa famille des Nummulacées. L’espèce type, O. numismalis , se trouve vi¬ vante dans les mers des Antilles ; mais elle varie tellement que Fichtel et Moll en firent trois espèces admises par Lamarck, et prises par Montfort pour types de ses trois genres Ilote , Hélénide et Archidie , qui n’ont pas été adoptés. (Duj.) *01li»Ui.\YA (nom propre), bot. ph. _ Genre de la famille des Palmiers inermes, tribu des Cocoïnées, établi par Martius ( Sy - nops. msc. ). Palmiers de l’Amérique au¬ strale. Voy. palmiers. ORBILLE. bot. cr. — Nom donné aux apothécies des Usnées. Voy. lichens. OIÎSUS. moll. — Ancien nom vulgaire du (Jardium aculealum. ORBITES, anat. Voy. oeil. OBBITOEITES. polyp. — Genre de Poly¬ pes ou de Bryozoaires que Lamarck avait d’abord nommé Orbi tu I i te puis Orbulite, et qu’il plaçait parmi les Polypiers foraminés. L’animal n’étant pas connu, ce genre doit être caractérisé seulement par la forme et par la structure du Polypier qui est pierreux, libre, orbiculaire, plan ou un peu concave, poreux des deux côtés ou dans le bord seu¬ lement, et ressemblant un peu à une Num- mulite. Les pores, très petits , sont assez régulièrement disposés et très rapprochés; toutefois, M. de Blainville ne leur trouve pas ce caractère de régularité qui appartient aux Polypiers des Eschares et des Rétépores, par exemple, et conséquemment, il pense que ce pourraient bien n’être pas de véritables Po¬ lypiers, mais seulement quelque pièce inté¬ rieure qui s’accroît par la circonférence. On connaît une petite espèce d’Orbitolite à l’é¬ tat vivant dans les mers d’Europe et parti¬ culièrement dans la Méditerranée parmi les Corailines. Elle est large de 2 millimètres et huit à dix fois plus mince, très fragile. On en connaît aussi cinq ou six espèces fos¬ siles dont une, très commune dans les ter¬ rains marins tertiaires des environs de Paris (à Grignon), est large de 3 à 4 millimètres; les autres proviennent du terrain crétacé. (Duj.) ORBITULITES. polyp.— Dénomination employée d’abord par Lamarck pour le Po¬ lypier que depuis il a nommé Orbulites. Voy. ce mot. (Duj.) *0RBULI1XA. foram. — Genre de Fora- minifères , de l’ordre des Monostègues, éta¬ bli par M. Aie. d’Orbigny, qui le caracté¬ rise ainsi : Enveloppe testacée , coquille ovale, une ouverture placée sur une sail¬ lie. Voy. FORAMIN1FÈRES. ORBULITES. moll. — Genre proposé par Lamarck pour les espèces d’Ammoriites dont le dernier tour enveloppe tous les autres, e’est-à-dire dont la spire ^n’est nullement visible. M. de Haan a formé un genre cor¬ respondant sous le nom de Globite, mais le caractère distinctif adopté par ces auteurs n’a point une valeur absolue, et l’on observe tant de formes intermédiaires entre les Or¬ bulites et les Ammonites à spire visible qu’on ne peut assigner une limite entre les unes et les autres. (Duj.) ORBULITES. polyp. — Dénomination ORC ORC 163 adoptée par Lamarck pour les Polypiers qu’il nommait d’abord Orbutites et que depuis lors les naturalistes sont convenus de nommer Orbitolites. Voy. ce mot. (Duj.) ORCA. mam. — Nom que les Latins donnaient à une espèce de Cétacé indéter ¬ minée, et que les modernes ont également appliqué à des Cétacés d’espèces différentes. Dans ces derniers temps, M. Wagler ( Sys¬ tème des Amphib., 1830) a indiqué particu¬ lièrement sous cette dénomination une subdivision des Dauphins (voy. ce mot) qui comprend le Delphinus orca des auteurs. (E. D.) ORCA NETTE, bot. ph. — Nom vulgaire du Gremil tinctorial , Lühospermum tincto- rium. *ORCHESELLA (opx^ç» agilité), hexap. — Genre de l’ordre des Thysanures, de la fa¬ mille des Podurelles, établi par Templeton, et dont les caractères peuvent être ainsi présentés: Corps cylindrique souvent fusi¬ forme, très velu, et hérissé, ainsique la tête, de poils longs, en massue, obliquement tronqués au sommet. Segments du corps iné¬ gaux et au nombre de huit. Tête souvent glo¬ buleuse; antennes courbées à la seconde ar¬ ticulation, plus grêles à l’extrémité, presque aussi longues que le corps, et composées de six ou sept articles d’inégale longueur. Plaques oculaires rapprochées de la base des antennes; yeux au nombre de six sur cha¬ que plaque et disposés sur deux lignes courbes. Pattes longues, grêles, velues et hérissées comme les antennes , mais dans toute leur longueur ; queue large. Les es¬ pèces qui composent ce genre sont très agi¬ les, soit à la marche , soit au saut. On en connaît un assez grand nombre d’espèces dont VOrchesella villosa Geoff. , peut être regardée comme le type. Cette espèce , qui vit solitaire , est très commune en été et en automne sous les broussailles ; c’est parti¬ culièrement dans les bois de Vincennes et de Meudon que je l’ai rencontrée très abon¬ damment. (H. L.) ORCHESIA (opxvjore'ç , danse), ins. — Genre de Coléoptères hétéromères, famille des Sténélytres , tribu des Serropalpides , créé par Latreille (Généra et sp. Ins., t. Il, p. 194), et ainsi caractérisé : Palpes maxil ¬ laires terminés par un article en forme de hache ; pieds propres pour sauter, pénul¬ tième article des quatre tarses antérieurs bi¬ fide. Ce genre renferme 8 espèces. 3 sont originaires du Brésil, 3 des États-Unis, et deux sont propres à l’Europe, savoir: les O. bipunctata, tomentosa Dej., quindecim- maculata Lap. , fasciata , flavicornis Say , hypocritaCh\.,micans F., et fasciata Pyk., espèce distincte de celle de Say. Ces deux dernières, types du genre, se trouvent aux environs de Paris, l’une dans les Bolets, l’autre sur les branches mortes et humides. (G.) ORCHESTES ( op^crr/j; , sauteur), ins. — Genre de Coléoptères tétramères , fa¬ mille des Curculionides gonatocères, divi¬ sion des Érirhinides, établi par Jlliger ( Ma¬ gasin , 3, p. 103 ) et généralement adopté depuis. Ce genre se compose de 30 ou 40 es¬ pèces qui , pour la presque totalité, appar¬ tiennent à l’Europe , et quelques unes à l’Amérique septentrionale. Nous citerons comme en faisant partie les suivantes : O. quercus , [agi, alni, salicis Linn ., scutellaris, ilicis, iota, populi, bifasciatus, pilosus, ru- fescens, capreæ Fab., rufus 01. , etc. Ce sont de très petits Insectes, longs de 3 à 5 mil¬ limètres, et larges de 1 à 2 , etc., qui ron¬ gent les feuilles de certains arbres. Leur corps estovalaire et couvert de villosités ; la tête est petite , les yeux sont gros et conti¬ gus ; la trompe est cylindrique, arquée, un peu plus longue que la tête et que le corse¬ let réunis; leurs cuisses postérieures , très anguleusement renflées en dessous , sont munies d’une rangée de petites épines , et leurs tarses grêles, flexibles, et à pénultième article bifide, donnent, par cette organisa¬ tion toute particulière, à ces Insectes, la fa¬ cilité de sauter au moindre danger. Fabricius avait donné le nom générique de Salins à quelques unes de ces espèces. Ce nom n’a pas été adopté. Schœnherr avait aussi établi avec celles dont le funicule est composé de 7 articles, et qui ont les cuisses simples, son genre Tachyerges , qu’il n’a considéré dans son dernier ouvrage que comme division du genre en question. (C.) ORCÏIESTIA (opx'ifr'rtîç, qui s’agite vio¬ lemment). crijst. — Genre de l’ordre des Amphipodes , rangé par M. Milne Edwards dans sa famille des Crevettines, et dans sa j tribu des Crevettines sauteuses. Ce genre, 164 ÜRC ORG fondé par Leach et adopté par tous lescarei- nologistes , ne diffère guère des Talitres {voy. ce mot) que par la conformation des deux premières paires de pattes. Les mœurs de ces petits crustacés sont les mêmes que celles des Talitres , et on les trouve souvent dans les mêmes localités. Ce genre renferme huit à dix espèces répandues dans la mer Méditerranée et dans l’Océan ; quelques unes habitent les côtes de la mer Rouge, du Chili et de la Nouvelle- Zélande. L’Orchestie littorale , Orchestia littora - lis Montagu , peut être considérée comme le type de ce genre. Cette espèce est très abondamment répandue sur nos côtes océa¬ niques et méditerranéennes. (H. L.) ORCHESTRIS, Kirby. ins. — Synonyme des genres Disonycha et Phyllolreta , Che- vrolat. (C.) *ORCHETTA» crust. — Rondelet, dans le tome II de son Histoire des Poissons , donne ce nom au JScyllare large des au¬ teurs. Voy. scyllare. (H. L.) ORCIHDE. Orchis ( opx<-ç , testicule, à cause des deux tubercules ovoïdes du plus grand nombre), bot. ph. — Genre de plantes de la famille des Orchidées, tribu des Ophry- dées, rangé par Linné dans sa Gynandrie diandrie, quoique appartenant réellement à la Gynandrie monandrie. La connaissance imparfaite que le célèbre botaniste suédois avait des organes floraux de ces plantes, l’avait conduit à réunir sous le nom d’Or- chis , toutes les Ophrydées pourvues d’un éperon plus ou moins allongé et non rac¬ courci en une sorte de bourse obtuse. Les botanistes linnéens adoptèrent cette ma¬ nière de voir, de telle sorte qu’ils appli¬ quèrent successivement ce nom à un grand nombre de plantes , dont plusieurs avaient même été distinguées par Linné , comme formant les genres Satyrium et Limodorum. Mais dans ces derniers temps , L. C. Ri¬ chard, MM. R. Brown, Lindley, etc., ayant examiné ces plantes de plus près, ont été conduits à démembrer ce grand groupe, et à proposer plusieurs nouveaux genres for¬ més à ses dépens. Ainsi L. C. Richard a établi les groupes génériques suivants : Ana- camptis, dont le type est notre Orchis pyrci- midalis Linn. ; Platanthera, où rentre notre Orchis bifolia Linn.; Gymnadenia, qui com¬ prend , par exemple , nos Orchis conopsea Linn., et odoratissima Linn., et qui a été lui-même restreint par M. R. Brown ; Ni- gritella , pour V Orchis nigra Wild. ( Saty¬ rium nigrum L.) ; Loroglossum, pour l 'Orchis hircina Wild. ( Satyrium hircinum Linn.); Holotrix , pour V Orchis hispidula Linn., es¬ pèce du Gap; enfin le même botaniste a re¬ pris le genre Limodorum Tour., pour notre Orchis abortiva Linn., qui n’est pas même une Ophrydée , mais bien une Neottiée. A ces genres il en a été ajouté de nouveaux encore pour des Orchis exotiques ; savoir le Perularia Lindl., et le Perystilus Blume. Malgré ces suppressions nombreuses , le genre Orchide conserve encore un assez grand nombre d’espèces. Ce sont des plantes herbacées terrestres , des parties tempérées et un peu froides de l’ancien continent, à racine munie de deux tubercules ovoïdes ou palmés, à feuilles pour la plupart radicales, un peu épaisses, sujettes à noircir par la dessiccation, à fleurs en épi terminal. Celles- ci présentent : un périanthe à folioles con- niventes ou dont les deux extérieures laté¬ rales sont parfois étalées, tandis que la su¬ périeure et les deux du rang interne sont réunies en voûte; le labelle , placé au côté inférieur de la fleur adulte, est conné avec la base de la colonne, entier ou 3-lobé, prolongé à sa base en éperon parfois très long; une anthère dressée, à loges conti¬ guës, parallèles; masses polliniques à 2 glandes distinctes, enfermées dans une bur- sieule 2-loculaire, formée par un plisse¬ ment du stigmate. a. Androrchis. Périanthe à folioles exté¬ rieures latérales étalées ou réfléchies. Ici rentrent quelques espèces communes dans les prairies et les bois de presque toute la France, parmi lesquelles nous décrirons les suivantes : 1. Orchide maculée, Orchis maculata Linn. Racine à tubercules palmés; tige pleine, feuillée, haute de 4-5 décimètres; feuilles inférieures linéaires-lancéolées, presque ob¬ tuses , pour l’ordinaire parsemées de taches noirâtres , les supérieures linéaires acumi- nées ; fleurs en épi serré et un peu court, blanches avec des lignes ou des taches vio¬ lacées , ou purpurines , accompagnées de bractées plus longues que l’ovaire; labelle presque plan , trilobé, les lobes latéraux larges, dentés, le médian entier, plus petit UllC OKU 165 que les latéraux, acuminé; éperon cylin¬ drique, plus court que l’ovaire. b. llerorchis . Périanthe à folioles exté¬ rieures redressées et conniventes comme les autres. Cette section comprend la plupart de nos espèces françaises, parmi lesquelles nous nous bornerons à décrire la sui¬ vante : 2. Orchide boeffon, Orchis Morio Linn. Cette espèce est à peu près la plus commune dans les prairies et les bois du midi de la France; elle est un peu moins répandue dans nos départements du Nord. Ses tuber¬ cules sont OYOïdes-courts et presque globu¬ leux ; sa tige a généralement 2-3 décimètres de hauteur, souvent moins, rarement da¬ vantage; ses feuilles sont linéaires-lancéo- lées obtuses, les supérieures engainantes, aiguës ; ses fleurs violacées , quelquefois blanches, tachetées de blanc sur le labelle, forment un épi lâche, et sont accompagnées de bractées à peu près de même longueur que l’ovaire; les folioles de leur périanthe sont réunies en une voûte presque globuleuse ; leur labelle est court et large, à 3 larges lobes obtus , dont le médian est échancré; leur éperon est conique, ascendant, un peu plus court que l’ovaire. Les tubercules des diverses espèces d’Or- chis, par l’effet d’une préparation fort sim¬ ple, fournissent leSalep, substance alimen¬ taire très usitée en Orient, mais qu’on n’em¬ ploie guère en Europe que pour des usages médicinaux. Dans la Perse , d’où vient presque tout celui du commerce, cette pré¬ paration consiste simplement, après avoir lavé les tubercules , à les passer à l’eau bouillante, afin de les dépouiller delà pelli¬ cule qui les recouvre; après quoi on les fait sécher à l’air et au soleil , en les tra¬ versant d’un fil en guise de chapelets , ou en les déposant simplement sur des toiles. Ainsi desséchés, ils se conservent indéfini¬ ment. Ils forment alors de petits corps ir¬ régulièrement ovoïdes, ridés, un peu trans¬ parents, d’apparence cornée, ayant une lé¬ gère odeur de bouc que l’eau rend plus prononcée. Pour les pulvériser on est obligé de les humecter légèrement. Ils renferment une matière soluble dans environ 60 parties d’eau , et une portion insoluble analogue par ses propriétés à la gomme de Bassora. On peut préparer, comme nous venons de le dire, les tubercules de nos Orchis indigènes pour obtenir du Salep ; mais le prix peu élevé de celui de Perse rend cette opéra¬ tion inutile et sans profit. — Le Salep con¬ stitue un excellent analeptique dont on use avec avantage pour restaurer les forces des personnes épuisées. En Pologne, on en fait une tisane qu’on administre dans un grand nombre de maladies. Dans l’Orient, il con¬ stitue un aliment de tous les jours. Dans quelques opérations de teinture on l’em¬ ploie économiquement en place de gomme arabique. (P. D.) ORCHIDÉES. Orchideæ. bot. ph. — Vaste et belle famille de plantes monocotylédones, rangée par A.-L. de Jussieu dans sa classe des Monocotylédons à étamines épigynes, et qui rentre tout entière dans la Gynandrie du système de Linné. Plus que toute autre, elle peut servir à donner une idée de l’ex¬ tension qu’ont prise toutes les parties du règne végétal , par suite des découvertes faites par les voyageurs dans le cours de ces dernières années. Ainsi, dans son Généra , Linné ne caractérisait que 8 genres de plantes gynandres digynes, dans lesquels rentraient toutes les Orchidées connues de lui. A.-L. de Jussieu lui-même , en 1789 , n’en signalait encore que 13 genres, qui composaient pour lui ce groupe tout entier ; et aujourd’hui la liste de genres que nous donnons, d’après M. Lindley, n’en renferme pas moins de 395. La progression selon la¬ quelle s’est opéré l’accroissement des espè¬ ces , n’a pas été moins forte. Ainsi la der¬ nière édition du Syslema vegelabilium à la rédaction de laquelle Linné ait coopéré (13e édition, par Murray, Gotting. et Gotha, 1774) renferme les diagnoses de 105 es¬ pèces d’Orchidées ; en ce moment les seuls catalogues des horticulteurs anglais renfer¬ ment les noms d’environ 2,500, et l’on peut dire qu’au total le nombre de celles aujourd’hui connues s’élève sûrement à 3,000. Cet accroissement rapide est dû sur¬ tout à la bizarre beauté des fleurs de ces végétaux qui a fixé sur eux l’attention des voyageurs , et qui a fait de leur culture , malgré ses difficultés et les dépenses consi¬ dérables qu’elle entraîne , l’objet d’une vé¬ ritable passion. L’importance de cette belle famille, la structure singulière et obscure des plantes 166 GRC GRC qui la composent, nous obligent à présenter avec quelques détails l’exposé de ses carac ¬ tères , et à signaler les principales opinions qui ont été émises pour en rendre compte. La famille des Orchidées est tellement na¬ turelle que l’examen le plus superficiel suffit pour reconnaître les plantes qui lui appar¬ tiennent; mais cette grande similitude ré¬ side surtout dans les organes de la fructifi¬ cation. Ceux de la végétation présentent, en elfet, des modifications importantes et dont nous devons indiquer les principales. Presque toutes ces plantes sont herbacées ; un petit nombre seulement sont sous-fru¬ tescentes ; toutes sont vivaces. Les unes sont terrestres, comme toutes celles de nos pays; les autres, au contraire , sont des fausses parasites qui s’attachent à l’écorce des ar¬ bres , et qu’on nomme pour ce motif épi - phytes. Celles-ci abondent dans les forêts humides des contrées intertropicales , où leurs espèces sont en nombre presque indé¬ fini. Beaucoup d’Orchidées ont des racines fasciculées, sans caractère propre; il n’existe non plus rien de particulier dans les racines d’une partie de celles qui grimpent sur les arbres , du moins sous le rapport de la dis¬ position extérieure. Mais , chez un grand nombre d’espèces terrestres , outre les ra¬ cines normales , on trouve des corps renflés qu’on nomme improprement des bulbes , et qui constituent plutôt de simples tubercules féculents , formés par le renflement de cer¬ taines divisions de la racine. Ces tubercules sont souvent ovoïdes ou presque globuleux, parfois aussi divisés à leur extrémité libre ou palmés. Il en existe ordinairement deux, dont l’un fournit au développement de la tige actuelle , dont l’autre est destiné à la tige qui se montrera au printemps prochain. On a cru longtemps que ce dernier se pro¬ duisait toujours du même côté par rapport au tubercule ancien, et que de là résultait un déplacement progressif de la plante; mais un examen plus attentif a montré que c’était là une erreur. Les racines propre¬ ment dites partent d’un niveau supérieur à celui des tubercules. La tige , et par suite le port général de la plante, et son mode de végétation , varient beaucoup. Chez les espèces terrestres , un rhizome très court émet chaque année une tige herbacée qui porte un nombre de feuilles variable , et qui se termine par les fleurs. Chez beau¬ coup d’espèces grimpantes , la tige se pro¬ longe presque jusqu’au sommet des arbres; elle reste longtemps vivante dans cette grande longueur et ne présente dans toute son étendue aucun renflement remarquable; cette modification de tige n’est nullement comparable à la précédente ; elle l’est tout au plus au rhizome des plantes de cette pre¬ mière catégorie , quoique en différant nota¬ blement pour la couleur, le mode de déve¬ loppement , etc. ; elle est généralement char¬ nue et verte; elle porte des feuilles nom¬ breuses, également vertes et charnues ; elle finit quelquefois par s’atrophier à sa partie inférieure. Un troisième mode de dévelop¬ pement fort remarquable est celui des Or¬ chidées à pseudo-bulbes. Ici nous trouvons un vrai rhizome ordinairement superficiel , à feuilles très rapprochées, réduites à l’état d’écailles serrées et même imbriquées ; de l’aisselle de ces écailles partent des rameaux qui, au lieu de se développer sous la forme de branches ordinaires , se renflent dans leur portion inférieure et forment ainsi ces corps oblongs, renflés ou aplatis, à section transversale arrondie, ovale ou anguleuse, qu’on a nommés des pseudo-bulbes ; ces corps se terminent par une, deux ou trois feuilles, nombre constant pour chaque es¬ pèce. Dans un petit nombre de cas , leur prolongement supérieur présente encore quelques renflements successifs, mais beau¬ coup moindres, d’où résulte l’apparence de plusieurs bulbes superposés. Dans certains cas , le pseudo-bulbe émet à son extrémité supérieure l’inflorescence; ailleurs, celle-ci part de l’aisselle d’une des écailles qui en¬ tourent la base de ce corps, ou même elle est axillaire pour l’une des écailles du rhi¬ zome. Les feuilles des Orchidées présentent en général plus d’uniformité ; cependant leur consistance est tantôt molle , tantôt charnue, tantôt coriace; elles ont toujours inférieurement une gaîne fermée et un limbe ovale ou lancéolé, entier, à nervures parallèles, très rarement réticulées; chez plusieurs espèces grimpantes , leur limbe est comme articulé à l’extrémité de la gaîne, au point qu’il finit par se détacher et tomber. Chez les espèces terrestres , les feuilles inférieures sont ordinairement ra¬ massées en touffe, les supérieures plus ou ORC ORC moins écartées, plus petites; celles des Épi- dendres sont le plus souvent distiques. Les feuilles d’un petit nombre d’Orchidées pré¬ sentent, sur leur fond vert, une sorte de réseau ou de dessin irrégulier, formé de lignes argentées ou dorées, douées d’un brillant métallique fort rare dans le règne végétal. Telles sont celles du Microchilus pictus Morr. , et de 1 ' Anæctochilus seta- ceus. M. Morren a reconnu que la cause de ce phénomène réside dans les cellules de l’épiderme prismatiques et serrées , cou¬ ronnées à leur côté libre par des calottes hémisphériques, remplies d’un liquide trans¬ parent et laissant entre elles de petites masses d’air. L'inflorescence des Orchidées consiste tan¬ tôt en fleurs solitaires au sommet d’un pé¬ doncule né du rhizome , plus souvent en grappes ou en épis , à fleurs plus ou moins nombreuses, ordinairement spiralées, plus rarement distiques. A la base de chaque fleur se trouve une bractée. La fleur elle- même est sessile ou brièvement pédonculée ; la position de ses parties relativement à l’axe change presque constamment avant l'épanouissement par reflet de la torsion de l’ovaire qui reporte en bas le côté supérieur et réciproquement. De là, dans la descrip¬ tion qui va suivre, il faudrait renverser tous les termes relatifs à la situation apparente des parties par rapport à l’axe pour avoir leur situation réelle dans le bouton et dans le plan normal. Cependant il n’y a pas de torsion chez les Epiclendrum, dont les orga¬ nes floraux conservent, par suite , leur po¬ sition normale. Le périanthe est supère, coloré , à six fo¬ lioles membraneuses ou charnues, disposées sur deux rangs ternaires, toujours irrégu¬ lier. Le rang externe est formé de 3 folioles, dont deux latérales et une inférieure, deve¬ nant supérieure par suite du renversement des parties, quelquefois plus grande que les autres ; le rang interne est également à 3 fo¬ lioles, deux latérales semblables, et une pri¬ mitivement supérieure, presque toujours inférieure par renversement, généralement plus grande, dissemblable, affectant la colo¬ ration et les formes les plus bizarres, à la¬ quelle on a donné le nom de labelle ou lèvre; à sa base, celui-ci présente fréquem¬ ment un enfoncement qui se prolonge même 167 parfois en un long éperon; il est entier, le plus souvent trilobé, ou à contour variable, relevé fréquemment de callosités, de la¬ mes , etc. On qualifie d’ordinaire le rang externe de calice, l’interne de corolle; cepen¬ dant, comme dans certains genres ( Episte - phium), il existe, plus extérieurement, une sorte de calieule, M. Lindley est porté à voir dans ce calieule, le vrai calice; dans le rang externe, la corolle, et dans le rang interne, des staminodesou le résultat delà transfor¬ mation de trois étamines. Cette manière de voir est, au reste, empruntée à M. His, qui l’appuyait sur une monstruosité observée par lui, dans laquelle les trois divisions in¬ ternes du périanthe s’étaient converties en autant d’étamines. Dans quelques cas, les pièces du rang externe se soudent entre elles: ailleurs, la supérieure se soude aux deux latérales du rang interne; enfin la soudure s’opère quelquefois avec la colonne des organes sexuels (Epidendrum) . Cette colonne forme un corps plus ou moins al¬ longé, occupant le centre de la fleur, et pro¬ venant de la soudure des étamines avec le pistil. Sa nature et la situation de ses par¬ ties dans le plan symétrique de la fleur n’ont commencé à être bien connues que par suite des belles observations de MM. Ro¬ bert Brown , Fr. Bauer, etc. Les étamines sont normalement au nombre de 3; mais presque toujours une seule se développe en¬ tièrement, et les deux autres restent rudi¬ mentaires à l’état de simples mamelons ou processus, parfois à peine visibles ou même nuis; mais, chez 1 es Cypripedium, l’inverse a lieu : les deux dernières se développent , tandis que la première reste avortée et rudi¬ mentaire. L’étamine normale de la presque totalité des Orchidées est opposée à la foliole supérieure externe du périanthe; les deux étamines rudimentaires sont opposées aux deux folioles latérales internes du périan¬ the ; cette manière de voir, relativement à la situation des étamines dans le plan théo¬ rique de la fleur, est celle qu’avait exprimée M. R. Brown, dans les Plantæ asiat. rarior. de M. Wallich (vol. I , p. 74), et qu’il a con¬ firmée dans son beau Mémoire sur les orga¬ nes sexuels des Orchidées et Asclépiadées ( Trans . of the linn. Soc., t. XVI, p. 685- 745); il en a déduit la conséquence que le plan symétrique de la fleur d’une Orchidée 168 O RC ORC comprend deux rangs de 3 étamines cha¬ cun , dont ^extérieur est réduit aux deux restées rudimentaires, tandis que l’intérieur n’a plus conservé que celle qui s’est déve¬ loppée normalement. M. Lindley admet, au contraire ( Veget . Kingd ., p. 174) , que les 3 étamines sont opposées aux 3 folioles du rang externe et forment un seul verticille. L’étamine restée unique dans la fleur des Orchidées a son anthère biloculaireou unilo¬ culaire, par suite du développement incom¬ plet de la cloison; ailleurs, au contraire, subdivisée en 4 ou plusieurs logettes plus ou moins complètes par des cloisons secon¬ daires , tantôt presque verticale , tantôt comme rabattue sur le sommet de la colonne (i clinandre ) , sessile ou brièvement stipitée , grâce à l’existence d’un petit rétrécissement terminal de la colonne. Le pollen a toujours ses grains groupés et agglomérés , mais à des degrés divers. Dans certains cas (Néot- tiées et Aréthusées) , ses grains étant grou¬ pés par 4 , ces petits groupes à leur tour sont réunis en très grand nombre, de ma¬ nière à former 2 ou quelquefois 4 grandes masses polliniques; mais leur moyen d’u¬ nion est assez faible pour qu’une légère traction les sépare sans difficulté; c’est là le pollen pulvérulent. Ailleurs (Ophrydées), les petits groupes de 4 grains sont ratta¬ chés par un filament élastique à un axe élastique aussi, de telle sorte qu’en les écar¬ tant, on les voit former une sorte de grappe. Ailleurs enfin (Malaxidées , Yandées), tous les grains de pollen sont agglutinés en tissu solide, compacte, de consistance de cire, ressemblant à une masse de tissu cellulaire très fin; c’est là le pollen céracé , seclile. Dans ces divers cas, le pollen est rassemblé en 2, 4 ou 8 masses polliniques ou pollinies logées dans les poches membraneuses de l’anthère, libres, ou plus habituellement fixées à une glande stigmatique, soit immé¬ diatement (Malaxidées), soit, d’ordinaire, par un prolongement celluleux, plus étroit qu’elles ( caudicule ). La partie de la colonne qui regarde le labelle est formée par le style soudé aux filets staminaux; vers l’extrémité de cette colonne, sous l'anthère, se trouve une fossette qui n’est autre que la surface stigmatique ( Gynixus Rich.). M. R. Brown y a reconnu trois stigmates généralement plus ou moins confluents; mais, dans quel¬ ques cas, manifestement distincts, et dont deux sont quelquefois pourvus de styles fort longs ( Bonatea speciosa). Les stigmates sont, d’après lui , opposés aux trois divisions ex¬ ternes du périanthe ; les cellules qui les forment sont d’abord étroitement unies en¬ tre elles ; mais plus tard , toujours avant la fécondation, elles s’accroissent et sont écar¬ tées l’une de l’autre par l’interposition d’une matière visqueuse abondante. Cette surface stigmatique est mise en communi¬ cation avec l’ovaire par une bande de tissu conducteur , qui se divise , dans le bas , en trois branches , subdivisées elles - mêmes, dans l’épaisseur des parois ovariennes, cha¬ cune en deux faisceaux qui descendent, l’un à droite , l’autre à gauche de l’un des placentaires. Au bord supérieur de la fos¬ sette stigmatique se trouvent une ou deux glandes nues ou enfermées dans un repli membraneux ou une poche simple ou dou¬ ble ( Bursicule ) , auxquelles tiennent les extrémités des masses polliniques. L 'ovaire est presque toujours tordu dans la fleur épanouie , extérieurement à trois angles et trois côtes, intérieurement uniloculaire, à trois placentaires pariétaux , bifides, chargés d’un nombre considérable d’ovules. Ces placentaires alternent avec les stigmates : M. R. Brown regarde cet ovaire comme formé de trois carpelles ; au contraire , MM. Fr. Bauer et Lindley, se basant sur ce que le fruit qui en provient s’ouvre fré¬ quemment en 6 pièces, 3 pour les angles et 3 pour les faces , munies chacune d’un faisceau vasculaire, ont admis que six car¬ pelles entrent dans sa composition , opinion qui semble contraire à toute analogie. Le fruit est une capsule membraneuse ou co¬ riace, rarement presque ligneuse et remplie de pulpe, uniloculaire, renfermant un très grand nombre de graines extrêmement pe¬ tites, à test lâche, réticulé, sous lequel est un embryon sans albumen, charnu, solide. Les fleurs des Orchidées présentent les formes les plus bizarres et les plus diverses ; elles imitent des Insectes, divers petits ani¬ maux, des têtes coiffées d’un casque, etc. , etc. Beaucoup d’entre elles se font remarquer par leur beauté, la vivacité ou la singularité de leur coloration, et par leur longue durée. Un des faits les plus remarquables que pré¬ sentent quelques unes d’entre elles consiste ORC ORG 169 dans l’existence, sur un même pied et dans une même inflorescence, de fleurs tellement différentes, que, considérées à part, elles seraient rangées dans des genres distincts. La première observation de ce fait est due au voyageur K. Schomburgk, qui, dans la Guyane anglaise, trouva, réunies sur un même épi, des fleurs organisées comme un Calaselum , un Myanthus et un Monacan- thus. Plus tard , un même fait a été observé en Angleterre, où l’on a vu des fleurs de Cycnoches ventricosum et Egertonianum réu¬ nies sur un même pied. On peut voir ce dernier exemple tiguré dans le splendide ouvrage de Bateman sur les Orchidées du Mexique. Le nombre des Orchidées utiles est peu considérable; à part la Vanille, dont les fruits sont très employés pour la pulpe par¬ fumée qu’ils contiennent , et les Orchis dont les tubercules fournissent le salep, il n’en est guère qui méritent d’être mention¬ nées. Mais ces plantes ont beaucoup d’im¬ portance aujourd’hui comme plantes d’agré¬ ment. Sous ce rapport, leur culture a pris un immense développement, surtout en An¬ gleterre et en Belgique. Voici la liste des genres d'Orchidées que nous empruntons a l'ouvrage général le plus récent, le Vegetable Kingdom de M. Lindley (Londres, 1846). Tribu I. — MALAXIDÉES. Pollen cohérent en masses céracées (pol¬ linies) dont le nombre est défini, sans tissu celluleux superflu. Anthère terminale, oper- culaire. Herbes épiphy tes ou terrestres , à bases des feuilles ou tiges le plus souvent épaissies. Section 1 . — Pleurothallidées. Pleurothallis , R. Br. ( Rhynchopera , Klotzsch ; Myoxanthus , Pœpp. et Endlic. ; Specklinia , Lindl. ; Centranthera, Scheidw.; Arianthera, Scheidw.) — Dialissa , Lindl. — Stelis , Swartz ( Humboldlia , Fl. Per.) — Le- panlhes , Swartz. — Reslrepia , Kunth. — ? Ca- detia , Gaudich. — Physosiphon , Lindl. — Masdevallia, Fl. Per. — Slenoglossum , H. B. K. — Octomeria , R. Br. Section 2. — Liparidées. Liparis , Rich. ( Slurmia , Rchb. ; Alipsa, Hoffimg. ; CestichiSf Thouars ) — Distichis , Thouars. — Dendrochilum, Blume. — Osy- ricera, Blume. — Chrysoglossum, Blume. — Oberonia, Lindl. ( Ensifera , Blume) — Tita¬ nia, Endlic. — Empusa, Lindl. ( Empusaria , Rchb.) — Platystylis, Blume. — Gaslroglot- Us , Blume. — Microstylis , Nutt. ( Crépi - dium, Blume. ; Monorchis, Mentz.; Achroan- thes , Raf. ; Plerochilus , Hook. ) — Dienia , Lindl. ( Pedilea , Lindl.) — Malaxis, Swartz. — Nephelaphyllum, Blume. — Calypso, Sa- lisb. ( Cytherea , Salisb . ; Norna, Wall.; Or- chidium, Swartz). Section 3. — Dendrobidées. Dendrobium, Swartz ( Graslidium , Blum.; Ceraia , Lour. ; Keranthus , Lour. ; Bontia, Petiv. ; ? Sarcostoma , Blume; § Stachyo - bium, Lindl.; § Ceratobium, Lindl.; § Pedi- lonum, Blume; § Onychium, Blume; $ Des- motrichum, Blume; %Dendrocorync, Lindl.) — Macrostomium, Blume. — Aporum. Blume ( Schismoceras, Presl. ) — Diploconchium , Sehauer. — Oxyslophyllum, Blume. — ?Di- glyphis , Blume ( Diglyphosa , Blume). — Mo- nomeria, Lindl. — Epicrianthes, Blume. — ? Drymoda, Lindl. — Bolbophyllum , Thouars ( Diphyes , Blume; Tribrachia, Lindl.; Odon- tostylis , Blume , f. Endlic. ; Gersinia , Ne- raud, f. Endlic.; Macrolepis, A. Rich.; § Ani- sopelalum , Hook. ) — Sunipia , Lindl. — Trias, Lindl. — Thelichüon, Endlic. — Coch- lia, Blume. — Lyrœa, Lindl. — Megacli- nium, Lindl. — Cirrhopetalum, Lindl. (Z y- goglossum , Reinw. ; Ephippium , Blume ; ? Sestochilus , Kuhl et Hass. ) — Bryobium , Lindl. — Conchidium , Griff. — Mycaran- thes , Blume. — Plirealia , Lindl. — Eria , Lindl. ( Dendrolirium , Blume; Pinalia , Hamilt.). Section 4. — Corallorhizidées. Corallorhiza, Haller. — Aplectrum, Nutt. — Aphyllorchis , Blume. Tribu II. — ÉPIDENDRÉES. Pollen cohérent en masses céracées (pol¬ linies) dont le nombre est défini ; membrane celluleuse cohérente en caudicules élastiques, pulvérulentes, le plus souvent repliées, sans glande diaphane propre. Anthère terminale, operculaire. Herbes épiphytesou terrestres, souvent caulescentes , tantôt à bases des feuilles ou tiges épaissies; tantôt, mais très rarement, à racines charnues lobées. 22 T. IX. I/O ORC ORC Section 1. — Coelogynidées. ? Acanthoglossum, Blume. — Cœloÿyne , Lindl. (Chelonanthera , Blume) — Panisea, Lindl .—Pleione, Don ( Gomphoslylis , Wall.) — Trichosma, Lindl. — Dilochia , Lindl. Pholidola, LindL ( Ptilocnema , Don; Crino- nia , Blume) — Otochilus, Lindl. Farina, Lindl. Section 2. — Isociulidées. Isochilus, R. Br. — Ilexisea , Lindl. (? El- leanlhus, Presl.) — Diothonea, Lindl. -~~Gas- tropodium, Lindl. Section 3. — Læliadêes. Epidendrum, Lin. ( § Uormidium, Lindl.; § Epicladium , Lindl. ; § Encyclium , Hook.; § Diacrium , Lindl. '; § Aulizeum , Lindl. ; § Osmophy tum , Lindl. ; § Lanium, Lindl. ; § Spalhium , Lindl. , § Amphiglottium , Sa- lisb. ; § Euepidendrum , Lindl.; Serapliyla , Fisch.) — Physinga, Lindl .— Portera, Lindl. (. Nemaconia , Knowles) —Aspegrenia, Poepp. etEndlich. — Hexadesmia, Brongn. ( Hexo - pia , Batem.) — Dinema, Lindl. — Sophro- nitis, Lindl. — Alamania, Llave. — Hartwe- gia, Lindl. — Arpophyllum, Llave. — Bar¬ be ria, Knowles. — Broughtonia , R. Br. — Chysis , Lindl. — Lœlia , Lindl. ( Amalia , Rchb.) — Caltleya, Lindl. — Schomburgkia, Lindl. jj — Tetramiera , Lindl. — Leptotes , Lindl. — Brasavola, Lindl. Section 4. — Bletidérs. Phaius, Lour. { Pachyna , Salisb.; Tanker- villia, Link.) — Arundina, Blume. — Eve- lyna , Poepp. etEndlich. — Bletia , R. et Pav. ( Gyas, Salisb. ; Thiebaudia, Colla ) — Müopetalum , Blume ( Tainia , Blume). — Spa- thoglottis, Blume. — - Paxtonia, Lindl. — Col- labium, Blume. — Cytheris, Lindl. — Peso- meria , Lindl. — Ipsea , Lindl. — ? Pachy - sloma, Blume. — Apaturia, Lindl. — ICre - mastra, Lindl. — Ania, Lindl. — ? Callosty- lis , Blume ( Tylostylis , Blum.) — ‘iCeraiium, Blume ( Cylindrolobus , Blume). — ? Tricho- tosia , Blume. — ? Plocoglottis , Blume. — ~ ? Pachychilus, Blume (Endlich.). Tribu III. — YANDÉES. Pollen cohérent en masses eéracées (pol¬ linies) dont le nombre est défini, aggluti¬ nées , lors de l’anthère, à une lamelle élas¬ tique ( caudicules ) et à la glande du stig¬ mate. Anthère terminale, rarement dorsale, operculaire. Herbes épiphy tes ou terrestres, tantôt (surtout les espèces américaines) pourvues de pseudobulbes avec peu de feuil¬ les , tantôt ( surtout les espèces asiatiques) caulescentes ; presque toutes indigènes des régions intertropicales. Section 1. — Sarcanthidées. Eulophia , R. Br. — Galeandra , Lindl. ( Corydandra , Rchb.) — Cyrlopera, Lindl. — Lissochüus, R. Br. — Dorüis, Lindl. — Lui- sia, Gaud. ( Pseudovanda , Lindl.; Mesoclas- tes , Lindl. ; Birchea , A. Rich. ) — Vanda , R. Br. ( Fieldia , Gaud.) — Renanthera, Lour. ( Arachnis , Blume; Nephranthera, Hassk. ;■ Arachnanthe, Blum.) — Phalamopsis, Blum. — - Diplocentrum , Lindl. — Microsaccus , Blume. — Camarotis, LindL — - Chiloschista, Lindl. — Gunnia , Lindl. — Micropera , Lindl. — Saccolabhm , Lindl. ( Saccochilus , Blume ; Gastrochilus , Don ; Robiquetia , Gaud.; Gussonea, A. Rich. ; Rhyncliosiylis , Blume; Carleretia, A. Rich.) — Sarcochilus, R. Br. — Tœniophyllum , Blume. — Cleiso- stoma, Blume ( Polychilos , Kuhl et Hass.) — Ceratostylis , Blume. — Ephippium, Blume. — Ceratochilus, Blume ( Omœa , Blume.) — Echioglossum, Blume.— Sarcantlms, Lindl. — Pleroceras , Hass. — Agroslophyllum , Blume. — Adenoncos, Blume. — Æceoclades, Lindl. — Trichoglottis , Blume. — Aërides , Lour. (Dendrocolla, Blume ; Cuculla, Blume; Tubera, Blume ; Fornicaria, Blume ; Pilea- ria, Lindl.; Ornithochilus, Wall.) — ? Schœ- norchis , Blume. — Aëranthus , Lindl. — Cryptopus, Lindl. (Beclardia , A. Rich.) — Æonia , Lindl. — Angrœcum , Thouars ( Aërobion , Spr.) — Mystacidium , Lindl. — Microcælia , Lindl. — Appendicula , Blume (Metachilum , Lindl.) — Podochilus , Blume ( Platysma , Blume ; Placostigma , Blume ; Apista , Blume; Hexadesmia, R. Br.; ? Blu- mea , Meyer. ) — Cryptoglotlis , Blume. — Glomera, Blume. — Thelasis , Blume. — Te - irapellis, Wall.—? Conchochilus, Hsskl. — ? Todaroa, A. Rich. Section 2. — Crvptochilidées. Cryplochüus, Wall. — Acanthophippium, Blume. — - ? Anthog onium, Wall. Section 3. — Brassidées. Cymbidium, Swartz. — - Bolbidium , Lindl. O RC 171 — Grammatophyllum , Blume ( Gaberlia , Gaud.) — Staurogloltis, Schauer. — Brom- heaclia , Lindl. — Ansellia , Lindl. — Aga- nisia, Lindl. — Epiphora, Lindl. — Aspasia, Lindl. — ? Acriopsis, Bluine. — Trichopilia, Lindl. — Helcia, Lindl. — Nanodes, Lindl. — Pilumna , Lindl. — Dipodium , R. Br. ( ? Armodorum , Kuhl et Hass.) — Dichœa , Lindl. — Fernandezia , R. etPav. ( Lockhar - tia , Hook.) — Phymatidium , Lindl. — Leo- chilus, Knowles. — Oncidium, Swartz ( Cyr - tochilum , H. B. K. ) — Odontoglossum , H. B. K. ( ? Trymenium , Lindl.) — Brassia , R. Br. — Miltonia , Lindl. ( Macrochilus , Knowles ). Section 4. — Pachyphyllidées. Nasonia, Lindl. — Centropetalum, Lindl. — Pachyphyllnm , H. B. K. Section 5. — Maxillaridées. Stanhopea, Forst. ( Ceratochilus , Lodd. ) — Houlletia, Ad. Brong. — Peristeria, Ilook. (Eckardia, Rchb.) — Acinela, Lindl. — La - cœna, Lindl. — ? Cuitlauzina, Llave. — Go- venia , Lindl. ( Eucnemis , Lindl.; Angidium, Lindl.) — Batemannia , Lindl. — Gongora, FL Per. — Acropera, Lindl. — Coryanlhes, Hook. — Chœnanthe , Lindl. — Malachade- nia, Lindl.— Cœlia, Lindl. — Ornithidium, Salisb. — Trigonidium, Lindl. — ? Psittaco- glossum , Llave. — Stenia , Lindl. — Pro - menæa, Lindl. — Grobya, Lindl. — Warrea, Lindl. — Hunileya, Lindl. — Z ygopetalum, Hook. — Bifi'enaria, Lindl. — Slenocoryne , Lindl. — Maxillaria,¥\. Per. ( §?Nothium , Lindl.; Xylobium, Lindl.; Dicrypta, Lindl.; Heterotaxis , Lindl. ) — Lycaste , Lindl. — Anguloa , FL Per. — Camaridium , Lindl. — Siagonanthus, Poepp. et Endlich. — Sca- ticaria , Lindl. — Scaphyglotlis , Poepp. et Endlich. ( Cladobium , Lindl.) — Colax , Lindl. — Paphinia , Lindl. — Polystachya, Hook. — ? Orchidofunltia , A. Rich. ( Clyn - hyménia, À. Rich.) — ? Galeottia, A. Rich. Section 6. — Catasetidées. Cataseium , Rich. ( Monacanthus , Lindl. § Myanthus , Lindl. ) — Mormodes , Lindl. (i Cyclosia , Klolzsch.) — Cloivesia > Lindl. — Cycnoches , Lindl. — Cyrtopodium , R. Br. ( Tylochilus , Nées). ORC Section 7. — Notylidêes. Nolylia, Lindl. — Cirrhœa , Lind. — Zy- gostates, Lindl. (Dactylo styles, Scheidw.) — Ornithocephalus , Hook. — ? Trophianthus , Scheidw. — Cryplarrhena, R. Br. — Macra - dénia, R. Br. — Sulrina, Lindl. — Telipo - ayant son grand diamètre horizontal et un peu incliné en bas et en avant; elle établirait une communication entre la caisse du tym¬ pan et le vestibule, si elle n’était remplie par la base de l’étrier, sur la forme de la¬ quelle elle est moulée; c’est pourquoi elle s’appelle aussi ouverture vestibulaire du tympan. La fenêtre ovale est précédée par une fossette dont la profondeur est déter¬ minée, en haut, par le relief de l’aqueduc de Fallope, qui la circonscrit dans ce sens; en bas, par la saillie du promontoire; en arrière, par une languette osseuse qui va à la pyramide. 2° Au-dessous de la fenêtre ovale est le promontoire , éminence qui ré¬ pond au premier tour de spirale du lima¬ çon , et qui est sillonnée par un canal qui contient le nerf de Jacobson , anastomose entre le glossopharyngien et les filets mous provenant du nerfvidien et du grand sym¬ pathique. 3° Derrière la fenêtre ovale et au niveau de son diamètre transverse est une petite saillie plus ou moins proéminente, suivant les sujets, appelée pyramide ; on y distingue un pertuis par où sort un cordon fibreux appelé muscle de l’étrier. 4° Au- dessous de la fenêtre ovale, en arrière du promontoire, se voit la fenêtre ronde , qui occupe le fond d’une fossette infundibuli- forme, dite fossette de la fenêtre ronde , dont le fond présente une lamelle en partie os¬ seuse, en partie membraneuse, qui est le commencement de la cloison spirale du li¬ maçon. Si cette fenêtre ronde n’était pas fermée par une membrane appelée second tympan, elle communiquerait avec la rampe tympanique du limaçon ; c’est pourquoi elle a reçu le nom d 'ouverture cochléaire du tympan. 5° Sous la pyramide, en arrière de la fenêtre ronde , se voit une fossette pro¬ fonde percée de quelques trous; c’est la fossette sous -pyramidale. 6° Enfin, derrière la fenêtre ovale , un peu au-dessus de son diamètre transverse , sous la saillie du canal de Fallope, se voit Y orifice interne du con¬ duit du muscle interne du marteau. 23 178 ORE ORE Voici ce qu’offre maintenant la circonfé¬ rence de la caisse du tympan : 1° En haut se trouve l’ arrière-cavité destinée à loger la tête du marteau , le corps et la branche pos¬ térieure de l’enclume; 2° en bas, une rigole ; 3° en arrière et en haut, une large ouver¬ ture qui conduit dans les cellules mastoï¬ diennes, cavités excessivement multipliées, qui occupent toute l’étendue de la portion mastoïdienne du temporal; 4U en avant, un rétrécissement en entonnoir qui se continue avec la trompe d'Eustache. Celle-ci est un canal rectiligne, infundibuliforme, aplati de dehors en dedans, de 5 centimètres de long, étendu de la caisse du tympan a la partie supérieure et latérale du pharynx, où il se termine par une extrémité libre, évasée, di¬ rigée en dedans et en bas, et qui s’appelle orifice guttural ou pavillon de la trompe. Sa direction est oblique de dehors en dedans, d’arrière en avant, et de haut en bas. Il est constitué par une portion osseuse de 15 à 18 millimètres de longueur, qui part de la portion écailleuse du temporal , et d’une portion cartilagineuse et fibreuse, qui fait suite à la précédente. La membrane mu¬ queuse qui tapisse cette trompe est fort mince. Cette même extrémité antérieure de la caisse du tympan présente encore deux ouvertures superposées , dont l’une, supé¬ rieure, est l’orifice interne du conduit par lequel passe la corde du tympan, tandis que l’autre, inférieure, est une fissure oblique qui donne passage à un cordon fibreux ap¬ pelé muscle antérieur du marteau. La caisse du tympan est traversée de de¬ hors en dedans par une chaînette osseuse , disposée d’une manière anguleuse, et consti¬ tuée par quatre os articulés entre eux, et qui s’étendent de la membrane du tympan à la fenêtre ovale. Le premier de ces osse¬ lets ou le marteau est le plus antérieur : on lui distingue une tête, qui est située dans l’arrière-cavité tympanique , au-dessus de la membrane du tympan; elle est ovoïde, lisse, excepté en arrière et eu bas, où elle est concave, pour s’articuler avec l’enclume. Au-dessous de la tête est le col, étranglé, légèrement contourné et aplati, qui sert de support aux deux apophyses. Le manche du marteau est vertical; il forme, avec la tête et le col, un angle très obtus, rentrant en dedans, et s’applique contre la face in¬ terne de la membrane du tympan. Le mar“ teau présente encore deux apophyses : une courte et externe, un peu dirigée en dehors; l’autre longue, grêle, dite apophyse grêle de Raw, en forme d’épine, naissant de la partie antérieure du col, pénétrant dans la scissure de Glaser, et donnant attache à un muscle ou cordon fibreux. L 'enclume a été justement comparée à une petite molaire; son corps est contenu dans l’arrière-cavité tympanique, derrière le marteau, avec lequel il s’articule par une surface concave : de ses deux branches, la supérieure, courte, épaisse, conoïde, hori¬ zontale, située sur le même plan que le corps , est aussi logée dans l’arrière-cavité tympanique; l’inférieure, plus longue, plus grêle, se porte verticalement en bas, paral¬ lèlement au manche du marteau; son extré¬ mité inférieure est recourbée en crochet; son sommet présente une espèce de tuber¬ cule lenticulaire appelé os lenticulaire , qui a été considéré comme un os à part, mais qui paraît une dépendance de l’enclume. V étrier est placé horizontalement au ni¬ veau du sommet de la branche inférieure de l’enclume; il est étendu de cette bran¬ che à la fenêtre ovale. Sa tête présente une petite cavité articulaire pour recevoir le tu¬ bercule lenticulaire de l’enclume; sa base, dirigée en dedans , est une plaque mince, dont la configuration est adaptée à celle de la fenêtre ovale. De ces deux branches, l’an¬ térieure est plus courte et moins courbe que la postérieure. Onadmetgénéralement, avecSœmmering, quatre muscles pour les osselets de l’ouïe : 1° le muscle interne du marteau ou tenseur du tympan, le seul peut-être que l’on puisse bien démontrer; 2° le muscle ou ligament antérieur du marteau ou muscle externe; 3° le petit muscle externe; 4° le muscle de l’étrier. Une membrane très mince, de l’ordre des muqueuses , tapisse la caisse du tympan , forme une enveloppe aux osselets de l’ouïe et se prolonge dans les cellules mastoïdiennes. G. Oreille interne ou labyrinthe. Cette partie essentielle de l’organe de l’ouïe est située en dehors de la caisse du tympan, et creusée dans l’épaisseur du rocher. Le laby¬ rinthe est , pour ainsi dire, double ; il est composé d’une portion membraneuse logée GRE ORE 179 dans une portion osseuse. Commençons par celle-ci. Elle est constituée par le vestibule, les canaux demi-circulaires et le limaçon. Le vestibule est une espèce de carrefour intermédiaire aux canaux demi-circulaires et au limaçon , qui sont comme des exten¬ sions de sa cavité. Il se trouve dans l’axe du conduit auditif interne qui s’y porte immédiatement. On y trouve un grand nombre d’ouvertures, de grandes et de pe¬ tites; les premières sont: 1° la fenêtre ovale, que nous avons déjà signalée quand nous avons parlé du tympan dans lequel elle s’ouvre, et qui est bouchée par l’étrier ; 2° cinq orifices pour les canaux demi-circu¬ laires ; 3° l’orifice de la rampe vestibulaire du limaçon ; 4° au-dessous de la fenêtre ovale une ouverture oblongue qui va à la fenêtre ronde. Les petites ouvertures sont : 1° le pertuis de l’aqueduc du vestibule qui s’ou¬ vre sur la paroi postérieure de cette cavité ; 2° des pertuis pour les vaisseaux ; 3° des pertuis pour les nerfs. La cavité du vestibule est d’ailleurs irrégulièrement ovoïde et pré¬ sente deux fossettes, une inférieure, hé¬ misphérique, une supérieure, semi-ellipsoïde; Morgagni en désigne une troisième occu¬ pant l’embouchure commune aux deux ca¬ naux demi-circulaires réunis. Les canaux demi - circulaires sont au nombre de trois, et sont comme trois cy¬ lindres recourbés en demi-cercles réguliers, égaux en diamètre ; ils sont situés dans la base du rocher , en arrière du vestibule dans lequel ils s’ouvrent par cinq orifices. Deux sont verticaux et un horizontal. Le vertical supérieur, qui décrit les deux tiers d’un cercle , occupe la partie la plus élevée du labyrinthe, en dehors du vestibule ; sa con¬ vexité est dirigée en haut; la branche an¬ térieure et externe se dilate en ampoule pour s’ouvrir isolément à la partie supé¬ rieure et interne du vestibule ; la branche postérieure et interne s’unit à la branche correspondante du canal vertical inférieur, pour former un canal commun qui s’ouvre sans se dilater dans le vestibule. Le canal vertical inférieur est perpendiculaire au précédent, parallèle à la face postérieure du rocher, et s’ouvre en dedans et en haut du vestibule par le canal commun que nous venons de désigner; il se porte en arrière , se recourbe et vient s’ouvrir , après s’être dilaté en ampoule, à 2 millimètres de son point de départ, après avoir décrit un cercle presque entier à convexité postérieure. Le canal horizontal , le plus petit des trois, est situé entre les deux autres, en dehors du précédent, en arrière et au-dessous du pre¬ mier; il commence dans le vestibule entre la fenêtre ovale qui est au-dessous et l’ori ¬ fice externe du canal vertical supérieur , se dilate en ampoule, puis décrit un demi- cercle horizontal dont la convexité est en dehors et vient s’ouvrir sur la paroi infé¬ rieure du vestibule entre l’orifice commun des deux canaux verticaux et l’orifice pro¬ pre ou inférieur du canal vertical inférieur. Le limaçon , ainsi nommé à cause de sa ressemblance avec la coquille de l’animal de ce nom , est une cavité conoïde qui décrit deux tours et demi en spirale, et qui est divisée en deux demi-cavités ou rampes, par une cloison étendue de la base au som¬ met. Il est situé en dedans et en avant de la caisse du tympan. Sa base porte sur le fond du conduit auditif interne. On y dis¬ tingue la lame des contours, la lame spi¬ rale , l’axe ou columelle , deux rampes et un aqueduc. La lame des contours forme la paroi ou coquille du limaçon. Le canal spi- roïde du limaçon est divisé, suivant sa longueur, en deux cavités secondaires ap¬ pelées rampes, par une cloison dite lame spirale. Cette lame part de la base du lima¬ çon et de la fenêtre ronde, se contourne autour de l’axe du limaçon et se continue jusqu’au sommet; elle appuie, par son bord interne , sur l’axe du limaçon ; par son bord externe, elle adhère aux parois de la lame des contours. Cette lame spirale est composée de deux portions : une osseuse , qui domine dans le premier tour et cesse au commencement du troisième , où elle se termine par une espèce de bec ou crochet ; et une membraneuse qui complète la cloison dont elle forme la paroi externe, et reste seule pour former le troisième tour. L’axe ou columelle est un noyau osseux qui part de la partie postérieure du fond du conduit auditif interne , se dirige en dehors et s’é¬ lève, par trois étages successifs, jusqu’au sommet de la voûte du limaçon ; épais à son point de départ, et constitué, à son extré¬ mité , par une lamelle appelée infundibu- lum , dont l’évasement répond à la coupole 180 ORE ORE du limaçon. La base de la columeile est percée de trous par lesquels pénètre une branche du nerf auditif. Des deux rampes , Lune est externe, supérieure ou vestibu- laire; elle part en effet du vestibule, et est la plus ample ; l’autre est interne, tym- panique , et part de la fenêtre ronde où elle est bouchée par le second tympan. Les deux rampes communiquent ensemble un peu au-dessous du sommet. L’aqueduc du limaçon s’ouvre , d’une part , dans la rampe tympanique du limaçon près de la fenêtre ronde, et , d’autre part , au bord inférieur du rocher, à côté de la fosse jugulaire. C’est un canal vasculaire. Le labyrinthe membraneux est, pour ainsi dire, inclus dans le labyrinthe osseux, mais il ne l’occupe pas tout entier et ne se prolonge pas dans le limaçon. Il se compose de canaux demi-circulaires et d’un sac vesti- bulaire. Beaucoup moins ample que la por¬ tion osseuse , il flotte , pour ainsi dire, dans cette dernière, et en est séparé par une humeur limpide , connue sous le nom d'hu¬ meur de Cotugno. Dans l’intérieur du laby¬ rinthe membraneux existe un autre liquide, appelé humeur de Scarpa , du nom de celui qui l’a découvert, et que M. de Blainville compare à l’humeur vitrée ; c’est pourquoi il l’appelle vitrine auditive. Les canaux demi- circulaires membraneux ont la même confi¬ guration que les canaux demi -circulaires osseux, et présentent aussi cinq ouvertures; quant à la membrane du vestibule , elle se compose d’une partie nommée utricule , confluent des canaux demi-circulaires , et d’une autre nommée saccule , qui occupe la fossette hémisphérique du vestibule; ce saccule communiquerait avec l’utricule , suivant certains anatomistes , et ne commu¬ niquerait pas, suivant Sœmmering. Outre ce labyrinthe membraneux , la face interne du labyrinthe osseux est revêtue d’une membrane périostique] qui lui est adhérente. D’après M. Breschet, il y aurait dans le saccule et l’utricule une espèce de poussière, sous forme de tache blanche , l’analogue des pierres labyrinthiques des Poissons. Le système nerveux de l’appareil acous¬ tique est formé par la portion molle de la septième paire, qui naît de la paroi anté¬ rieure du quatrième ventricule, et qui, ar¬ rivée au fond du conduit auditif interne , s’y divise en deux branches: l’une anté¬ rieure, plus considérable, est destinée au limaçon ; elle *e contourne en pas de vis et pénètre à travers les trous de la lame criblée, dans les deux rampes, par des filets, dont les premiers sont plus longs et les derniers plus courts. La branche postérieure ou Yes- tibulaire se divise en trois rameaux, dont le plus considérable se rend à l’utricule et aux ampoules des canaux membraneux ver¬ tical supérieur et horizontal, le moyen au saccule et le plus petit à l’ampoule du canal vertical inférieur. Tel est l’appareil auditif de l’Homme ; il est incontestablement le mieux organisé de toute la série animale pour la perception des modulations les plus variées des sons. Mais nous verrons certaines parties l’em¬ porter chez certains animaux par leur dé¬ veloppement sur les parties correspondantes de l’Homme. Ainsi , l’Oreille externe sera plus mobile et plus ample , ou la caisse du tympan sera plus grande c* les muscles des osselets de l’ouïe plus prononcés ; ou bien certaines parties du labyrinthe seront plus développées et les nerfs auditifs auront plus de volume par rapport au cerveau. Mais l’appareil auditif de THomrne reste le plus parfait pour la perception musicale des sons. 1° De V Oreille chez les Mammifères. Ici toutes les parties qui constituent l’ouïe sont à leur plus haut degré de développement, excepté la conque auditive qui semble dis¬ paraître dans un certain nombre d’espèces. Nous verrons aussi cet appareil passer, d’un genre à l’autre, par une série de dégradations qui le rapprocheront de celui des classes inférieures , soit que l’Oreille externe arrive à manquer, soit que le nombre des osselets de l’ouïe diminue , soit par suite de quel¬ que autre particularité. Dans cette revue de l’appareil auditif dans les différentes classes d’animaux, nous commencerons toujours par signaler les par¬ ties fondamentales , parce que ce sont elles que nous retrouverons toujours. En général , le labyrinthe est presque toujours entouré d’une masse osseuse très dure chez les Mammifères ; et cette masse acquiert une dureté pierreuse chez les Dau¬ phins et les Baleines. ORE ORE 181 Chez tous les Mammifères , sans excep¬ tion , se trouvent non seulement le vesti¬ bule, mais les trois canaux demi-circulaires et le limaçon. Le vestibule, de forme irré¬ gulière, est plus petit que dans les autres classes de Vertébrés ; mais la composition est la même. Les canaux demi-circulaires varient ; ils sont très grands , en proportion du limaçon , chez la Taupe , et ils sont pres¬ que libres, entourés seulement d’un diploë fort lâche, et laissent entre eux une fosse profonde pour loger les lobes latéraux du cervelet. Chez les Cétacés , au contraire, les canaux demi-circulaires sont si petits , que Camper les a révoqués en doute , bien qu’ils existent réellement. Le limaçon décrit ordinairement deux tours et demi; il est en général plus grand que les canaux demi-circulaires ; il est en¬ tièrement saillant dans la caisse du tympan chez les Chauves-Souris. Il a unTour de plus que chez l’Homme , dans plusieurs espèces, suivant Cuvier, par exemple, chez le Co¬ chon d’Inde. Sa spire ne s’élève point, mais s’enroule presque à plat, selon Camper, dans la Baleine ; en général , chez les Cé¬ tacés, il ne décrit pas tout-à-fait deux tours. Les Monotrèmes nous offrent un exemple remarquable du passage de la forme du labyrinthe des Mammifères , aux classes in¬ férieures ; ainsi , le limaçon , dans l’Echidné, n’est plus qu’une corne recourbée, suivant Home , et ressemble à celle des Oiseaux et des Crocodiles. Meckel n’a observé qu’un demi-tour de spire chez l’Ornithorynque. Si nous passons à la caisse du tympan , nous y trouvons une trompe d’Eustache; ce canal se dilate considérablement à son extré¬ mité inférieure chez la plupart des Ongulés, comme le Cheval et l’Ane. Ce conduit s’a¬ bouche , chez les Cétacés , dans le conduit nasal correspondant , et offre , à son orifice, une valvule qui empêche l’eau d’y pénétrer; il est assez large. La caisse même est ici bien close , les parois étant formées par l’os temporal ; et sa cavité y est accrue par plusieurs cellules accessoires. Quand cette cavité osseuse se développe en dehors , elle constitue le con¬ duit auditifcommechezl’Homme ; si c’est en dedans, derrière la membrane du tympan, c’est l’ampoule osseuse du Chat, du Chien, des Rongeurs, et des deux manières à la fois , comme chez la Brebis et la Chèvre. La membrane du tympan est générale¬ ment concave; elle est tellement oblique chez la Taupe, qu’elle forme le couvercle du conduit auditif et le fond de la caisse. Cette disposition , secondée par l’ampleur des ca¬ naux demi-circulaires , explique la cause de la finesse de l’ouïe chez cet animal. Si l’on s’en rapporte à Home , c’est la Baleine franche qui a la membrane du tympan la plus remarquable, où elle fait une grande saillie convexe en dehors dans le conduit auditif élargi de haut en bas. Elle laisse apercevoir, comme chez l’Éléphant, dans sa membrane moyenne, des fibres muscu¬ laires bien distinctes , et n’a pas la moindre connexion immédiate avec les osselets de l’ouïe. Il n’a pas été bien constaté si la corde du tympan existe chez tous les Mammifères ; mais Bajanus l’a vue dans le Veau et la Brebis. La plupart des Mammifères ont , de même que l’Homme, trois osselets de l’ouïe, excepté l’Ornithorynque qui n’en a que deux, bien que Meckel en ait admis un troisième. D’ailleurs , les osselets offrent de nombreu¬ ses variétés , comme le prouve la collection des étriers formée par Carlisle ; là on voit que cette forme d’étrier est loin de se main¬ tenir dans la série. Ainsi , tandis que la configuration de cet os ressemble véritable¬ ment à un étrier dans les ordres les plus élevés ; chez le Cochon d’Inde , le Morse , et surtout chez l’Ornithorynque et le Ivan- guroo , il a tout-à-fait perdu cette forme et ressemble à celle que nous rencontrerons dans les classes inférieures à celle-ci. Ru- dolphi a constaté, chez la Taupe dorée du Cap , un quatrième osselet assez gros et cylindrique, placé entre le^marteau et l’en¬ clume. La pièce moyenne du marteau se prolonge , chez le Hérisson , en une large plaque osseuse, qui occupe une grande par¬ tie de la cavité tympanique. L’enclume et le marteau se distinguent , chez les Taupes, en ce qu’ils sont creux et que la cavité de ces deux os s’ouvre , par un large orifice , dans la caisse du tympan. Les muscles des osselets de l’ouïe sont , en général , plus forts chez les Mammifères que chez l’Homme. Le conduit auditif externe est en général 182 ORE ORE comme chez l’Homme, en partie osseux, en partie cartilagineux ; le conduit osseux est fort court chez les Carnivores , tels que le Chien et le Chat , encore plus court chez les Chéiroptères; enfin, il manque tout-à-fait chez les Cétacés , tandis que le conduit car¬ tilagineux y est étroit et long, d’après Cu¬ vier et Home ; ce dernier estime sa longueur à 60 ou 80 centimètres dans la Baleine. Cette portion osseuse est très longue chez les Ongulés ; c’est au contraire la portion cartilagineuse chez les Monotrèmes. Quant à la conque, qui doit être consi¬ dérée comme un complément de l’appareil auditif, elle acquiert chez certains Mammi¬ fères , chez l’Oreillard par exemple , des dimensions considérables, tandis qu’elle est réduite à un très petit appendice chez d’autres, et qu’elle manque entièrement chez quelques uns , tels que les Cétacés , plusieurs Phoques , le Morse , les Monotrè¬ mes , les Taupes et les Musaraignes. Il se¬ rait oiseux de décrire les innombrables va¬ riétés de forme de l’auricule chez les Mam¬ mifères ; il suffit de savoir qu’il est com¬ posé des mêmes parties essentielles que chez l’Homme. Ainsi, on y trouve fréquemment plusieurs pièces cartilagineuses, et souvent des muscles puissants mettent en mouve¬ ment l’auricule tout entier et ses différentes parties. Chez la Chauve-Souris l’Oreille est presque entièrement membraneuse et pré¬ sente peu de muscles , comme nous le ver¬ rons chez la Chouette ; d’autres , la Musa¬ raigne, par exemple , présentent une parti¬ cularité remarquable ; chez cet animal , l’anthelix et l’antitragus peuvent, à la vo¬ lonté de l’animal , fermer exactement ou largement ouvrir l’orifice du conduit au¬ ditif , absolument comme le ferait une valvule. Quant à la distribution du nerf auditif, elle est la même que chez l’Homme ; mais la mollesse de ce nerf, eu égard à la dureté du facial, varie considérablement. 2° De l’Oreille chez les Oiseaux. L’appa¬ reil de l’audition, dit M. de Blainville, tou¬ jours construit , chez les Oiseaux , sur le même plan que chez les Mammifères , se simplifie d’une manière évidente , en ce qu’il n’y a jamais de limaçon proprement dit, ni de conque auditive, que la chaîne d’osselets , d’abord plus simple , moins dé¬ veloppée, est tout autrement disposée, et que les os qui la composent s’éloignent peut à peu de l’appareil de l’ouïe et rentrent dans le domaine des fonctions de la dégluti¬ tion. Si nous commençons notre examen par le labyrinthe , nous voyons qu’ici le lima¬ çon est tellement incomplet, qu’il n’est plus réellement qu’un rudiment de ce que nous l’avons vu chez les Mammifères; il ne con¬ siste plus que dans une corne légèrement recourbée; l’Autruche offrirait, au rapport de Cuvier, le plus petit développement de cet organe. Tréviranus a découvert une conformation intérieure très remarquable de ce rudiment de limaçon. Deux minces car¬ tilages le partagent toujours, dans le sens de sa longueur, en une chambre supérieure et une inférieure; la fenêtre ronde conduit à la première et la fenêtre ovale à la se¬ conde. Au bout du cartilage et à l’extré¬ mité libre du cône osseux, se trouve un réservoir cartilagineux, que Tréviranus ap¬ pelle la bouteille , et par lequel cet organe commence chez les Serpents , d’après Win- dischmann. Il reçoit une branche particu¬ lière du nerf cochléaire. Entre les deux plaques cartilagineuses, on aperçoit une ou¬ verture oblongue , par laquelle pénètre la plus grosse branche du nerf cochléaire, et, de chaque côté de cette ouverture , se trou¬ vent au-dessus des cartilages cochléaires, les feuillets auditifs sur le côté convexe des¬ quels un réseau de vaisseaux sanguins se répand, d’après Windischmann. Nous avons donc ici , dit Carus , un organe fort com¬ pliqué , qui représente en quelque sorte la lame spirale du limaçon humain dans ses nombreux replis, et quanta la forme to¬ tale du limaçon , qui figure au moins le commencement d’un premier tour. Les ca¬ naux demi-circulaires sont entourés ’d’un diploë qui se brise aisément, de sorte qu’il est facile de les mettre en évidence , bien qu’ils soient encore encroûtés. La caisse du tympan est bornée , en avant, par la côte auditive (os carré). Elle s’ouvre, en différents points, ce qui est ex¬ trêmement caractéristique chez les Oiseaux, dans le diploë celluleux et plein d’air des os du crâne, par l’intermède duquel s’éta¬ blit une communication entre les caisses tympaniques des deux côtés. Cette caisse ORE ORE communique, d'un autre côté , en avant, par la trompe d’Eustache , avec la cavité gutturale. Quant à la trompe, elle est pres¬ que entièrement logée dans l’os ; partant de la caisse, par un orifice peu évasé, elle se rétrécit ensuite et s’ouvre du fond d’une large cavité, sécrétant beaucoup de mucus, qui se trouve à la voûte de l’arrière-gorge, derrière l’orifice postérieur du conduit na¬ sal et à peu de distance de cet orifice. En dehors, la caisse du tympan est fermée par une mince membrane à laquelle s’attache une petite colonne osseuse, dont la plaque ovale interne, qui est mobile, ne remplit qu’à demi la fenêtre ovale du vestibule, mais dont l’extrémité externe tient ordinai¬ rement à la membrane du tympan par le moyen de trois cartilages flexibles. Un muscle venant de l’occiput peut la tendre, ainsi que la membrane du tympan, et sa forme varie dans les divers genres. La membrane du tympan est convexe en dehors et se dirige obliquement en bas. Elle est beaucoup moins cachée que chez les Mammifères, étant située à l’extrémité d’un court conduit auditif, uniquement membraneux, dont l’orifice externe est garni de plumes roides , la plupart courtes, rare¬ ment longues. Point d’Oreille externe ou auricule charnue et cartilagineuse; cepen¬ dant la grande valvule membraneuse de plusieurs Chouettes paraît en tenir lieu, car elle occupe le bord postérieur d’une grande conque divisée en plusieurs compartiments, et qui est formée en partie par les os du crâne recouverts seulement par la peau, en partie également par le bord postérieur du globe de l’œil et par plusieurs ligaments tendineux transversaux. L’appareil nerveux est ici tout-à-fait ana¬ logue à celui de l’Homme; c’est le nerf au¬ ditif, dont une branche Ya au rudiment de limaçon, les trois autres se rendant aux ca¬ naux demi-circulaires; le nerf facial tra¬ verse également l’Oreille moyenne. 3° De l’Oreille chez les Replilcs. L’appa¬ reil acoustique occupe ici une place moins considérable dans les parois postérieures du crâne que dans les Oiseaux ; la partie essen¬ tielle du labyrinthe augmente en étendue; tandis que les canaux demi-circulaires di¬ minuent, non pas en nombre, mais en gran¬ deur; le limaçon est encore plus rudimen- 183 taire que nous ne venons de le voir; la substance crétacée de l’humeur du vestibule augmente; la caisse du tympan a, pour ainsi dire, disparu dans un certain nombre de genres, et le conduit auditif externe, ainsi que la conque, ne sont plus; il y a cependant une exception à l’égard de cette dernière pour le Crocodile, qui possède une sorte d’oreille externe, sous la forme de deux lèvres charnues, qui ressemblent assez à des paupières. Plusieurs Sauriens se rapprochent, pour l’organisation du tympan , des types supé¬ rieurs; ainsi le Caméléon a une membrane du tympan couverte de parties charnues, et le Crocodile offre un développement encore plus parfait de l’Oreille. En effet, chez lui, le labyrinthe est exactement enveloppé par une matière osseuse, toujours pourvue de noyaux crétacés, et présente un appendice inférieur, de forme conique et courbé en avant, dont l’intérieur est partagé, par une cloison transversale, en deux conduits qui s’ouvrent, l’un dans le vestibule, l’autre dans la caisse du tympan, dans cette der¬ nière, au moyen d’un petit trou bouché par une membrane , que l’on peut comparer à la fenêtre ronde de l’Homme. D’après la situation de cet appendice, d’après sa forme et ses ouvertures, on le considère comme le rudiment du limaçon; et les recherches de Windischmann ont confirmé ce point. La caisse du tympan, chez les Sauriens , est spacieuse, et les osselets de l’ouïe, réduits à un seul, ne se présentent plus que sous forme d’un long pédicule osseux (columelle) , qui adhère a une membrane du tympan mince et ovale, tout-à fait perpendiculaire lorsqu’elle est extérieure , comme dans l’Iguane , mais se dirigeant en haut chez le Crocodile. Chez les Chéloniens , le vestibule mem¬ braneux est renfermé dans l’os, et leurs ca¬ naux circulaires sont disposés comme nous allons le voir chez les autres Reptiles; mais la chambre correspondante au sac vestibu- laire des Poissons et contenant une concré¬ tion crétacée est séparée ici d’une manière plus distincte, tantis que le vestibule est rempli d’une eau limpide. Les recherches de Windischmann ont démontré encore ici un rudiment du limaçon, avec une fenêtre ronde, déjà entrevue par Cuvier, et qui, 184 ORE ORE placée à côté de la fenêtre ovale, derrière elle, est bouchée par une membrane parti¬ culière. Ce rudiment de limaçon ne forme qu’une simple vésicule légèrement plissée, qui est unie au sac du labyrinthe par un court canal; située derrière la fenêtre ronde, elle est côtoyée par le nerf facial; la caisse est complètement ossifiée, longue, et divisée en deux portions, l’une interne ( antiveslibu - lum de Bajanus), l’autre externe; celle-ci est bouchée par une épaisse membrane du tympan, composée de deux couches mem¬ braneuses, entre lesquelles on aperçoit un disque cartilagineux adhérant à la colu- melle; cette cavité communique d’ailleurs avec la cavité gutturale par une trompe d’Eustache longue et étroite. L’osselet de l’ouïe ressemble à celui des Sauriens , et sa base ovalaire repose sur la fenêtre ovale. Plusieurs Batraciens , les Grenouilles et les Crapauds, ont un labyrinthe garni d’un noyau crétacé , avec une fenêtre ovale ; et , de plus, à l’extérieur, une caisse du tympan. Cette caisse n’est plus entièrement envelop¬ pée de parois osseuses ; elle est en grande partie membraneuse et située derrière la côte de la dernière vertèbre auditive. Elle contient encore des osselets de l’ouïe , qui , indépendamment de l’opercule cartilagineux de la fenêtre ovale, consistent en une petite colonne osseuse (columelle) et en un manche osseux, uni, à angle obtus , avec la colu¬ melle, et adhèrent à la membrane du tym¬ pan. Cette caisse tympanique s’ouvre dans la gorge par une courte et large trompe d’Eustache. Les orifices des deux trompes sont même faciles à voir dans la Grenouille quand on écarte fortement les mâchoires l’une de l’autre; d’après Mayer, ils offrent, dans le Pipa , cela de particulier, qu’ils se confondent en un seul. Le Bufo igneus n’aurait pas de trompe d’Eustache, ni de caisse, ni de membrane du tympan, d’après Huschke. Ceci ne serait pas étonnant, quoi¬ que, comme le remarque Scarpa, la trompe d’Eustache ne se rencontre que chez les ani¬ maux qui ont une caisse du tympan. Mais, chez la plupart des Grenouilles , des Cra¬ pauds et des Orvets, où l’on rencontre en¬ core cette trompe , elle a des dimensions énormes, ce qui tendrait à établir que son but principal est d’être le premier canal au¬ ditif pour la conduite du son à l’Oreille in¬ terne. En s’élevant plus haut , tout au con¬ traire, une membrane du tympan se mani¬ feste, et avec elle un conduit auditif externe proprement dit. Chez les Batraciens, cette membrane est tout- à- fait à la surface exté¬ rieure du corps, à peu près perpendiculaire, derrière l’articulation de la mâchoire, cou¬ verte par les téguments communs. Chez la plupart des vrais Serpents, une pièce osseuse adhère bien à l’opercule de la fenêtre ronde , mais, au lieu de se joindre, d’un autre côté, à une membrane du tym¬ pan , elle se perd dans les muscles de l’ar¬ ticulation de la mâchoire. Les Orvets font exception à cet égard , suivant la remarque de Scarpa , car leur organe auditif est con¬ formé à peu près comme celui des Gre¬ nouilles et des Crapauds, et ce que l’on ap¬ pelle improprement la membrane du tym¬ pan est également couvert encore par des parties charnues. Dans les Serpents propre¬ ment dits, on aperçoit, auprès du labyrin¬ the, un petit appendice en forme de bou¬ teille qui contient une branche nerveuse particulière, et qu’on doit considérer, sui¬ vant Windischmann , comme un dernier rudiment du limaçon , que nous avons vu déjà un peu plus développé chez les Sauriens et les Chéloniens. Voilà aussi pourquoi les Serpents ont, outre une fenêtre ovale, une fenêtre ronde. Les Reptiles branchiés et d’autres Batra¬ ciens , tels que la Salamandre , le Bufo igneus , servent de transition aux Poissons cartilagineux. Ils n’ont plus qu’un petit labyrinthe composé d’un vestibule et de ca¬ naux demi-circulaires, où se voit un noyau crétacé. Voilà tout l’organe auditif; il est situé dans les parois latérales du crâne , de manière cependant que, chez le Protée, la cavité du labyrinthe communique avec la cavité crânienne par une large ouverture. Il s’ouvre également à l’extérieur par une sorte de fenêtre ronde, qui, au lieu de se montrer à la surface du corps , est cachée par un opercule cartilagineux, par la peau et les muscles de la tête. D’ailleurs le nerf auditif qui se distribue au labyrinthe , chez tous les Reptiles, con¬ stitue un nerf à part. Il aboutit au sacvesti- bulaire et aux renflements des canaux demi- circulaires du labyrinthe mou. Le nerf facial traverse encore ici l’appareil auditif. ORE GRE 185 4° De l'Oreille chez les Poissons. Tous les Poissons à branchies libres ont un organe auditif renfermé en grande partie dans la même cavité que le cerveau, moins tourné en dehors que les autres appareils des sens. Les Poissons à branchies cachées, comme les Raies et les Squales, forment une caté¬ gorie à part, et ont un labyrinthe membra¬ neux entouré d’un cartilage qui s’isole de la cavité crânienne. Tous les Poissons, excepté ceux qui ap¬ partiennent au dernier ordre, offrent les dispositions suivantes : 1° trois canaux demi- circulaires, outre un sac membraneux sim¬ ple, que nous retrouvons seul dans les ani¬ maux inférieurs; 2° un noyau solide, sou¬ vent même osseux, un ou plusieurs corps pierreux , composés de carbonate de chaux et d’un peu de matière animale, dans une portion du labyrinthe membraneux. On distingue ordinairement, dans le sac membraneux rempli de liquide, deux par¬ ties, dont la première s’appelle vestibule, parce que les canaux demi - circulaires y aboutissent ; l’autre se nomme le sac , parce qu’elle contient le noyau osseux le plus considérable ; celle-ci n’a point de com¬ munication appréciable avec la première. Quelquefois, par exemple, dans la Baudroie, on peut distinguer, au dire de Scarpa, deux portions distinctes dans cette dernière. Chez plusieurs Poissons, comme la Carpe, le Bro¬ chet, le Silurus glanis et le Cohitis fossüis , le vestibule membraneux, de chaque côté, se prolonge postérieurement en un long ca¬ nal, qui, d’une part, communique avec lui du côté opposé, par un conduit trans¬ versal impair, et d'autre part, offre, à son extrémité postérieure ou inférieure, des di¬ latations qui communiquent, de diverses manières , avec la vessie natatoire , d’après Weber. Les noyaux osseux fragiles des Poissons osseux ont des formes très variées. Le plus petit se trouve ordinairement dans le vesti¬ bule, le plus gros dans la grande portion du sac, et le second dans la plus étroite. Par exception , le vestibule ne contient pas d’os chez le Hareng. Les canaux demi-circulaires tantôt sont parfaitement libres, et tantôt, comme dans le Brochet et la Baudroie, tour¬ nent autour d’une petite columelle osseuse. Souvent ils offrent un renflement considéra¬ ble à l’endroit où ils s’ouvrent en arrière et en avant du vestibule. Les branches moyen¬ nes du postérieur et de l’antérieur commu¬ niquent avec le vestibule par un conduit commun. Il est difficile de déterminer la disposition de l’expansion nerveuse; ce qui est certain, c’est que les nerfs qui se rendent à l’appareil auditif sont fort gros. il est un Poisson osseux, le Lepidoleprus trachyrhynchus, qui, par une anomalie bien singulière, signalée par Otto , présente une sorte de conduit auditif externe. Chez les Poissons cartilagineux supérieurs, le labyrinthe n’est pas encore libre, mais plongé dans les parois latérales du crâne et contenant trois germes osseux. On trouve un analogue de la fenêtre ronde et de la fenêtre ovale, chez le Requin ; il n’y a de chaque côté qu’une ouverture bouchée par la peau, et qui conduit dans la cavité cartilagineuse du vestibule. Ce que l’on appelle les évents, chez les Raies et les Squales, rappelle un conduit auditif externe réuni à la trompe d’Eustache; ils forment un canal qui com¬ mence à la surface de la tête, qui n’a point de communication immédiate avec les orga¬ nes auditifs, et sert à rejeter l’eau, mais il offre les traces d’un premier pas vers ce con ¬ duit auditif. L’appareil de l’ouïe est très faiblement développé chez les Cyclostomes ; il est logé dans les boules cartilagineuses qui se trou¬ vent entre la première et la seconde vertèbre crânienne. Chacune de ces boules est creuse et ne communique avec la cavité crânienne que par deux petits trous. L’un de ces trous donne passage au nerf auditif, l’autre à de petits vaisseaux destinés à la poche vestibu- laire. Celle-ci est constituée par une mem¬ brane mince qui renferme une substance animale liquide, mais point de pierres, et qui offre trois petits plis qui seraient, suivant Weber, les vestiges de trois canaux demi- circulaires qui n’existent plus. 5. De l’Oreille chez les animaux articulés. On ne connaît point les organes de l’ouïe des Insectes, bien que ces animaux soient très certainement doués de ce sens; les ob¬ servations de Camparetti sur ce sujet ne sont point suffisamment confirmées pour être admises définitivement. Nous ne nous arrê¬ terons pas aux descriptions de ces organes, un peu hypothétiques chez quelques gros 24 T. IX. 186 ORE ORE Coléoptères, chez l’Abeille, les Papillons diurnes, la Cigale, et nous laisserons àTre- viranus la responsabilité de l’assimilation qu’il établit entre ces organes et une vési¬ cule qu’il décrit chez quelques Hyménoptè¬ res, quelques Diptères et quelques Névrop- tères. Quant aux derniers ordres, les travaux de Fabricius , Mimasi , Scarpa et autres, n’ont démontré positivement l’existence du sens de l’ouïe que chez les Décapodes. Dans l’Écre¬ visse commune, cet organe apparaît en des¬ sous de la tête de l’animal, sous la forme d’une papille conique très dure, qui appar¬ tient aux grandes antennes et qui renferme la partie la plus essentielle, le sac du vestibule. Cette papille n’est point séparée de la cavité de la tête par des os , elle n’est pas non plus close en dehors, où elle se termine par une ouverture ronde, sur laquelle une forte membrane est tendue, et que l’on peut com¬ parer peut-être à la fenêtre ronde de l’Oreille humaine. Le nerf qui se rend au petit sac, logé dans la cavité de cet organe, n’est plus isolé, il n’est plus qu’une branche de celui qui appartient à la grande antenne et naît du ganglion cérébral. Le sac lui-même ne contient plus de petite pierre, comme il en contenait chez les Poissons. Quant aux Annélides et aux Enthelmin- thes, ils n’ont absolument aucun vestige d’Oreille. 6. De l’Oreille chez les Mollusques. Tous les Mollusques, excepté les Céphalopodes su¬ périeurs, sont dépourvus du sens auditif. Quant à ces Céphalopodes supérieurs (Sei¬ ches, Calmars et Poulpes), ils offrent deux or¬ ganes auditifs bien développés, sous la forme la plus simple. On voit, chez ces animaux, dans la portion du cartilage céphalique située au-devant du pharynx, deux petites cavités closes en dehors, dont chacune est tapissée d’une membrane mince, et remplie de ma¬ tière animale à l’état liquide, au milieu de laquelle nage un petit corps plus dense, ayant à peu près la consistance de l’empois, mais plus ferme chez la Seiche ordinaire. A ces deux petits sacs se rendent quelques courts filets provenant de Parc antérieur de l’anse nerveuse primaire, et qui naissent entre ceux des pieds et ceux des viscères. Ce sac peut être comparé au vestibule de l’Homme; il est plus petit que la cavité du cartilage qui le loge et fixé à ce dernier par un tissu cellulaire entouré d’eau. Owen a vainement cherché un organe au¬ ditif chez le Nautile. de l’audition. Pour expliquer l’audition, il nous est ab¬ solument nécessaire de rappeler quelques principes d’acoustique. Le son est la vibration d’un corps élasti¬ que; quand cette vibration est au-dessous de 3 ou 4 ou au-dessus de 64,000, suivant Savart, elle n’est pas encore perçue ou cesse de l’être; la plus rare donne le son le plus grave; la plus fréquente, le son le plus aigu. La force du son dépend de l’étendue des oscillations. Point de son sans corps vibrant, comme le prouvent la cessation du son dans le vide, et sa diminution sur de hautes mon¬ tagnes et dans des gaz de plus en plus ra¬ res. Les gaz sont meilleurs conducteurs des sons que les solides, et les solides meil¬ leurs que les liquides. 11 ne faut pas oublier qu’une vibration née se communique, de sorte que tout corps éprouve une vibration à l’occasion de celle de l’air ; j’ajouterai que certains corps, d’une certaine forme et d’une certaine consistance, entrent plus facilement que d’autres en vibration, à l’occasion de certaines vibrations de Pair. C’est ce qu’un de nos grands chanteurs modernes appelle les vibrations sympathiques. La marche des ondes sonores se fait par cercles de plus en plus grands, et qui se croisent, dans certains cas, sans se détruire; cette propagation est plus étendue si elle se fait dans un seul sens, comme le prouve cette expérience de Biot qui se fait enten¬ dre , à voix basse, à l’extrémité d’un cylindre de 951 mètres. Le son parcourt 337 mètres par seconde, infiniment moins que la lumière, qui, dans le même espace de temps, parcourt 72,000 lieues; ce qui explique la distance qui existe, dans certains cas, entre l’apparition de l’éclair et le bruit du tonnerre. Cette propagation du son n’est point altérée par l’humidité de l’air; elle s’accroît un peu par l’élévation de température ; elle va mal¬ gré le vent, mais elle est diminuée par ce¬ lui qui lui est contraire, et favorisée par celui qui marche dans le même sens qu’elle. ORE ORE 187 Le son , comme la lumière , est réfléchi sous un angle égal à celui d’incidence. Le bruit résulte d’une succession de sons égaux ou inégaux dans des temps inégaux. Le bruissement est une succession de sons sim¬ ples ou de bruits dans des temps égaux , tout le temps que l’on peut encore distin¬ guer les ébranlements. Les expériences de Millier prouvent que les ondes sonores, primitivement aériennes, augmentent d’intensité en devenant liqui¬ des , et encore plus en devenant solides ; mais elles perdent de leur intensité, Iors- qu’après avoir passé par un corps solide elles retournent à l’air. L’Oreille, appliquée con¬ tre le sol , ne perçoit bien que les ondes sonores primitivement parties du sol , et non celles qui viennent primitivement de l’air. Les ondes sonores solides se communi¬ quent difficilement à l’air, et diminuent d’intensité par ce seul fait. Les ondes so¬ nores liquides diminuent en passant dans l’air. Expliquons maintenant le mécanisme de l’audition chez l’Homme , il sera facile d’en faire l’application aux animaux. Les ondes sonores frappent le cartilage de l’Oreille, et trouvent toujours, quelle que soit leur direction, une surface perpendicu¬ laire, par suite des nombreux replis de ce cartilage. Celles qui vont dans la direction du conduit auditif s’engouffrent dans la conque, qui les recueille et les condense; comme ces ondes sont directes , elles sont les plus fortes , ce qui fait qu’en tournant successivement l’Oreille dans différentes di¬ rections pour percevoir un son, on peut ju¬ ger de la direction de ce son. Ces ondes cen¬ trales restent aériennes , et vont frapper obliquement la membrane du tympan puis¬ qu’elles la rencontrent dans un plan oblique. Les autres ondes sonores , qui ont frappé sur le cartilage, deviennent solides, et se transmettent, par les parois du conduit au¬ ditif externe, au cercle tympanal. D’ailleurs, bien que la condition de la vibration soit , pour le tympan , comme 'pour toute mem¬ brane, une certaine tension , il est bon de remarquer qu’une trop grande tension , comme un grand relâchement du tym¬ pan, nuit à l’audition. Cette tension paraît être, d’ailleurs, en rapport avec l’acuité des sons. Voilà le trajet externe des ondes sonores, mais l’audition peut avoir lieu sans lui; ainsi les vibrations peuvent se transmettre au tympan par les os de la face et du crâne, et par les dents. Ingrassias cite un'Espagnol sourd, qui entendait une guitare en mettant le manche de cet instrument entre ses dents. Ce mode de transmission des sons est ana¬ logue celui qui a lieu chez les animaux dépourvus de conduit auditif externe. Voici maintenant quel est, chez l’Homme sain , le second trajet des sons. La mem¬ brane du tympan, modérément tendue par le muscle du marteau (que Millier croit sou¬ mis à la volonté chez lui ), vibre entre les deux couches d’air, celle du conduit auditif et celle de la caisse du tympan ; cette con¬ dition augmente l’intensité de la transmis¬ sion des ondes sonores de l’air à l’eau , comme le prouve Millier par un mécanisme ingénieux. Cette vibration de la membrane du tympan se transmet donc , avec avan¬ tage , à travers l’air de la caisse jusqu’à la fenêtre ronde, qui est véritablement un se¬ cond tympan. Cette transmission est aé¬ rienne ; mais il y en a une autre solide , au moyen des osselets de l’ouïe, celle-là va à la fenêtre ovale , dont la membrane est ten¬ due par le muscle de l’étrier. Le sifflet ima¬ giné par Müller montre qu’une tige solide , placée entre deux membranes , augmente l’intensité de la transmission des sons. Le second trajet des ondes sonores n’est point encore indispensable à l’audition , et l’on a vu des hommes dont la membrane du tympan était déchirée , privés des osselets de l’ouïe par une suppuration qui les avait entraînés, et qui entendaient cependant en¬ core bien. Suivons maintenant les ondes sonores dans leur troisième trajet. Nous nous sommes ar¬ rêté aux vibrations de la fenêtre ronde et de la fenêtre ovale. Les premières se trans¬ mettent à la rampe inférieure du limaçon ; les autres au vestibule, et de là à la rampe supérieure du limaçon et aux canaux demi- circulaires. Là les ondes sonores rencontrent la lymphe de Cotugno, puis le labyrinthe membraneux , puis la vitrine auditive au milieu de laquelle flotte la substance ner¬ veuse ; celle-ci est ébranlée, et cette impres¬ sion, transmise au cerveau , constitue l’au¬ dition. 188 GRE ORE Il est probable que la transmission des ondes sonores au vestibule est seule néces¬ saire pour l’audition, puisque les expériences de Breschet, et de MM. Flourens et Longet, prouvent que la destruction du nerf du li¬ maçon ne détruit pas la sensation. D’ailleurs , nous ferons observer ici , comme on peut le faire à l’occasion des fonctions de tous les autres sens , que la sensation du son ne dépend pas de la seule existence des ondes sonores dans l’expansion nerveuse; mais qu’elle résulte d’un certain état du nerf auditif, ainsi que le prouvent les sons que Millier appelle subjectifs, c’est- à-dire la persistance de l’audition d’un son longtemps après que les vibrations sonores ont cessé. Enfin c’est le cerveau qui entend, et c’est cet organe , et non l’Oreille propre¬ ment dite, qui fait les musiciens et les chan¬ teurs. On peut se demander, à l’occasion de l’organe auditif, comme à propos de celui de la vue, si l’audition est double. Il faut croire qu’elle est unique, parce que les deux impressions se confondent habituellement; car lorsqu’il y a défaut d’uniformité de transmission des sons, elle apparaît double, d’après les observations de Müller. La section de la cinquième paire a de l’influence sur l’audition comme sur la vi¬ sion, d’après les expériences de M. Magen¬ die; elle la détruirait même, au rapport de ce dernier. La section des canaux demi-cir¬ culaires, faite par M. Flourens, a donné des résultats curieux : celle du canal horizontal fait tourner l’animal sur lui-même ; celle du vertical postérieur le porte à faire des cul¬ butes en arrière, et celle de l’antérieur des culbutes en avant. Mais ces faits n’ont pas encore leur place dans le domaine de la science. Le nerf de l’ouïe a d’ailleurs cela de com¬ mun avec celui de la vision, d’être insensible aux stimulations mécaniques. L’ouïe, pour se développer à son plus haut degré, a besoin , comme tous les sens, d’é¬ ducation ; les animaux, Ses enfants, les sau¬ vages , les aveugles, nous fournissent la preuve de cette vérité. Le mécanisme que nous venons de décrire est applicable à tous les animaux qui en¬ tendent dans l’air , quelque simple que soit l’appareil ; n’y eût-il qu’un rudiment du j tympan, comme chez certains Reptiles, n’y eût-il point de conduit auditif externe, les ondes sonores aériennes viennent toujours frapper les parties solides de l’organe audi¬ tif, avec ou sans vibration de membrane libre, et se communiquent , par les parties solides, jusqu’à l’expansion nerveuse. Mais toute l’Oreille externe est organisée pour re¬ cevoir ces ondulations vibratoires. La diffi¬ culté ici était de ne pas trop perdre de l’in¬ tensité des vibrations dans leur passage de l’air dans un solide , d’un solide dans l’air , puis dans un solide, et enfin dans un liquide, la lymphe qui baigne le nerf auditif. Pour les animaux qui vivent dans l’eau, le méca¬ nisme est beaucoup plus simple; il n’y a que transmission d’un liquide (l’eau) à un solide (les canaux demi-circulaires), et de ce solide à un liquide, la lymphe auditive. Les causes d’affaiblissement de l’intensité des vibrations qui existaient tout à l’heure ne se retrouvent plus ici ; tout au contraire il y a plutôt renfoncement , parce que le passage des ondes sonores liquides à un so¬ lide augmente l’intensité de la vibration. (C. Broussais.) Le mot Oreille a été quelquefois appliqué à des animaux et à des plantes dont l’aspect offrait quelque ressemblance avec cet or¬ gane. Ainsi l’on a appelé : En Ichthyologie : Oreille grande ou grande Oreille , le Thon . En Conchyliologie : Oreille d'Ane, une Haliotide, un Strombe ; Oreille de Bœuf, un Bulime ; Oreille de capucin ou de Cochon, une Moule et un Strombe ; Oreille de géant, la grande Haliotide ; Oreille de mer, les Haliotides; Oreille de Midas, les Auricules ; Oreille de saint Pierre, l’animal des Fis- surelles ; Oreille sans trous, le Sigaret; Oreille de Silène, un Bulime ; Oreille de Vénus, quelques Haliotides. En Botanique : Oreille d’abbé , le spathe des Gouets ; Oreille d’Ane, l’Oreille d’abbé, le Nostoc et la grande Consoude ; Oreille de capucin, quelques Tremelles; Oreille de Diane, voy. Oreille d’abbé ; ORE 189 ORE Oreille d’Homme, VAsarum et quelques Champignons ; Oreille de Judas , l’Oreille d’Ane et une Pezize ; Oreille de Lièvre , quelques Buplèvres , Y Agroslemma githago, le Trèfle des champs ; Oreille de Malchus , quelques Champi¬ gnons parasites ; Oreille de muraille, le Myosotis lappula ; Oreille d’Ours , une espèce de Primula; Oreille de Rat et de Souris, le Myosotis, une Épervière et un Céraiste. OREILLÈRE. ins. — Nom vulgaire des Forficules. OREILLETTE, bot. ph. — Nom vul¬ gaire de V Asarum europœum L. Voy. asaret. ORE ILEON, mam. — Le tragus de l’oreille des Chauves-Souris a reçu généralement le nom d 'Oreillon. Cet organe présente des mo¬ difications de formes et de dimensions qui ont servi dans la caractéristique des genres. (E. D.) *OREUYA, Chev. ins. — Syn. d eChry- sochloa , Hope. (C.) ORE LIA, Aubl. (G uian ., I, 271, t. 186). bot. ph. — Syn. d' Allamanda , Linn. OREOBOLLS. bot. ph.— Genre de la famille des Cypéracées, tribu des Rhyncho- sporées, établi par R. Brown ( Prodr ., 235). Petites herbes originaires de l’île Diémen. Voy. CYPÉRACÉES. OREOCALLIS (opoç, montagne; xcàU , beauté), bot. ph. — Genre de la famille des Protéacées , tribu des Grevillées, établi par R. Brown (in Linn. Transact. , X, 196). Arbrisseaux des montagnes du Pérou. Voy. PROTÉACÉES. OREOCHLOA , Link. ( Hort . Berol., 1 , 44). BOT. PH. — Voy. SESLERIA, Al’d . *OREOCINCLA. ois.— Genre établi par Gould sur le Turdus varius de Horsfield. Voy. MERLE. (Z. G.) *OREODAPIINÉ (gpoç , montagne ; doc- ERA ( cpoç , montagne ;